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08.04.2025 à 22:52

«Guerre en Ukraine, guerre commerciale : vers un nouveau monde» avec Nicolas Meilhan, Caroline Galactéros et David Teurtrie

Le président Donald Trump a pris tout le monde par surprise ce 2 avril avec l’instauration de nouveaux tarifs douaniers sur la quasi-totalité des importations américaines. Il s’agit du plus important changement de politique commerciale mondiale « depuis plus de 100 ans », pour citer l’agence Reuters. Depuis ces annonces, les bourses du monde entier … Continued
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Le président Donald Trump a pris tout le monde par surprise ce 2 avril avec l’instauration de nouveaux tarifs douaniers sur la quasi-totalité des importations américaines. Il s’agit du plus important changement de politique commerciale mondiale « depuis plus de 100 ans », pour citer l’agence Reuters. Depuis ces annonces, les bourses du monde entier sont en chute libre. Quel est le sens de ce chamboule-tout de l’économie mondiale initié par la nouvelle administration américaine ? L’UE, la France notamment, vont-elles trouver leur place dans ce jeu de puissances qui la marginalise ? Où en sommes-nous des négociations concernant la guerre en Ukraine, et comment la Russie et les BRICS vont-ils tirer leur épingle de ce nouveau jeu mondial ? Une fois encore, QG a réuni en direct à Paris le mardi 8 avril les meilleurs experts pour en parler avec Aude Lancelin :

Caroline Galactéros, géopolitologue, fondatrice du think tank Geopragama

Nicolas Meilhan, ingénieur, membre des Éconoclastes

David Teurtrie, directeur de l’Observatoire français des BRICS, auteur de « Russie : le retour de la puissance » (2021)

07.04.2025 à 13:10

« Si vis Europam, para bellum » par Marc de Sovakhine

À peine investi, M. Donald Trump a décidé d’accélérer la recomposition de l’ordre international en ouvrant des négociations avec la Russie dont il cherche à enrayer le rapprochement avec la Chine, « strategic competitor » des États-Unis depuis 2011. Prisonniers de leurs liens de dépendance transatlantique, les dirigeants européens naviguent de Charybde en Scylla, d’allégeance tenace … Continued
Texte intégral (4259 mots)

À peine investi, M. Donald Trump a décidé d’accélérer la recomposition de l’ordre international en ouvrant des négociations avec la Russie dont il cherche à enrayer le rapprochement avec la Chine, « strategic competitor » des États-Unis depuis 2011. Prisonniers de leurs liens de dépendance transatlantique, les dirigeants européens naviguent de Charybde en Scylla, d’allégeance tenace aux États-Unis en appels peu convaincants à une défense européenne face à un ennemi présenté tour à tour comme affaibli puis prêt à envahir l’Europe. Se refusant à ouvrir un dialogue avec la Russie, ils persistent à soumettre leurs « plans de paix » au parrain américain, façon plutôt cocasse d’inaugurer l’autonomie stratégique européenne. Sous les injonctions creuses à construire une chimérique défense européenne, les rivalités intra-européennes alimentent une escalade belliciste au bénéfice des industriels de la défense.     

Une victoire stratégique des États-Unis

À la faveur de la guerre en Ukraine, les Etats-Unis se sont assurés de la subordination durable des pays européens à leurs intérêts dans la perspective d’un conflit avec la Chine. L’axe Paris-Berlin-Moscou, à l’œuvre lors des Accords de Minsk il y a dix ans, a été mis hors-jeu au profit d’un axe Washington-Londres-Varsovie, résolument orienté contre la Russie, en gestation depuis 2014. La France et l’Allemagne « neutralisées », c’est toute l’Europe qui se retrouve désormais hors-jeu, dans une situation qui n’est pas sans évoquer celle des États allemands, victimes du jeu d’alliances de la France de Richelieu, à l’issue de la Guerre de Trente ans. 

Les dirigeants de la Biélorussie, de la Russie, de l’Allemagne, de la France et de l’Ukraine, en 2014 lors des accords de Minsk, censés garantir la paix en Ukraine. Un échec au vu de l’’intervention russe à partir de février 2022

La stratégie opportuniste des Etats-Unis a permis de vassaliser durablement les États européens mais, en provoquant la rupture des relations entre l’Europe et la Russie, elle a eu pour effet, prévisible, d’accélérer le rapprochement sino-russe, à rebours de leur objectif prioritaire. Sous ce rapport, la volte-face de l’administration Trump s’inscrit dans une continuité objective avec la ligne suivie par les précédentes administrations. Certaine de disposer d’alliés européens d’autant plus acquis à sa cause contre la Chine qu’ils n’hésitent pas à en faire un argument pour la convaincre de préserver le lien transatlantique1, l’administration Trump cherche à neutraliser la Russie dans la perspective d’une aggravation des tensions avec la Chine, dans le Pacifique ou encore en Asie centrale dont la richesse des sous-sols et la situation géographique en font une zone hautement inflammable, au carrefour des rivalités sino-russo-américaines. 

Le retour au pouvoir de M. Donald Trump ne constitue pas tant une « rupture » qu’une reformulation opportuniste, brutale dans la forme, d’une politique étrangère fermement orientée contre la Chine. « L’apocalypse » qu’il a déclenchée a seulement déchiré le voile des « valeurs » sous lequel les administrations démocrates s’étaient abritées pour poursuivre des calculs non moins cyniques. Ainsi, l’accord sur les minerais stratégiques qu’il tente d’arracher à l’Ukraine en contrepartie de son aide était déjà en préparation sous l’administration précédente2 dont le soutien n’a jamais été désintéressé, comme l’attestent l’activisme des fonds d’investissement américains tels que BlackRock – à la tête du fonds de reconstruction de l’Ukraine aux côtés de la banque JP Morgan3 – ou la réactivation en 2022 de la loi prêt-bail de 1941, instrument d’une prédation économique à peine dissimulée4

En se plaçant sous tutelle américaine pour leur protection et la sécurisation de leurs approvisionnements énergétiques, les Européens, bercés d’illusions sur la « solidarité transatlantique », paraissent découvrir aujourd’hui, comme le nez au milieu de la figure, que les États-Unis ne défendent que leurs intérêts, réapprenant à leurs dépens la célèbre leçon de M. Henry Kissinger : « il peut être dangereux d’avoir les États-Unis comme ennemi, il est fatal de les avoir comme ami ». Marginalisés, nombre d’entre eux peinent pourtant à renoncer à leur atlantisme indéfectible dont la présidente de la Commission européenne Mme Ursula Von der Leyen, qui se présente comme une « transatlantic citizen »5, ne cherche pas à les détourner. M. Donald Trump à peine élu, elle a suggéré, aux côtés de Mme Christine Lagarde, présidente de la BCE, d’accroître les achats de gaz et d’armements américains afin de prévenir le risque d’une guerre tarifaire avec les Etats-Unis. 

Adversaire historique de la Russie, la Pologne apporte un soutien frileux à l’idée d’une autonomie européenne et ne manque pas de rappeler son attachement à l’unité du camp occidental. Elle voit dans son allié américain, outre son principal fournisseur d’armements, la seule garantie tangible de sécurité. Portée par de grandes ambitions, elle a obtenu que le remplacement de son vieux matériel soviétique (MiG-29 et chars de combat T-72) – livré à l’armée ukrainienne – par des équipements américains (avions F-35 et chars de combat M1 Abrams) soit financé par les États membres de l’Union européenne (UE) à hauteur de 42% (dont 17% par la France). L’Italie de Mme Giorgia Meloni, autant par affinité idéologique que par intérêt, insiste également sur la nécessité de préserver la sainte-alliance. Soucieuse de protéger ses exportations, elle désire à tout prix, comme l’Allemagne et les Pays-Bas, désamorcer une guerre tarifaire lancée par M. Donald Trump pour forcer ses « alliés » à acheter américain. Elle a par ailleurs renforcé ses partenariats industriels dans le secteur de la défense avec l’Allemagne et le Royaume-Uni6, allié inconditionnel des États-Unis depuis 1945. 

La principale obsession de Donald Trump demeure la Chine de Xi Jinping, contre laquelle une guerre commerciale est désormais engagée. À la forte augmentation des droits de douane américains décrétée ce 2 avril, Pékin a rapidement répliqué en annonçant des surtaxes de 34 % sur les produits américains

L’Allemagne au supplice de Tantale brise ses « tabous »

Poumon économique du continent européen, l’Allemagne nourrit le rêve depuis la fin de la Guerre froide de restaurer son statut de puissance continentale à part entière. Elle se trouve toutefois dans une situation critique. Son économie est asphyxiée en raison notamment de la rupture de ses liens économiques avec la Russie. Sa classe politique, taraudée par une extrême-droite à 21% qui ne semble pas avoir fait le deuil de 1945, est très divisée. Son intérêt serait de renouer des relations avec la Russie pour soulager son industrie, au risque, toutefois, de se retrouver isolée et de laisser la voie libre à la France. Du reste, c’est elle qui a le plus à perdre dans une guerre tarifaire. Soumise au supplice de Tantale, elle devrait logiquement choisir d’abandonner un bras, déjà bien entamé, à la Russie plutôt qu’une jambe aux États-Unis. Mais surtout, elle ne cèdera rien à la France sans de solides contreparties. 

Entourée de ses soutiens autour de la mer Baltique, elle refuse de se laisser enfermée dans un futur arc de sécurité franco-russe et accueille avec prudence la proposition française d’étendre au-delà de ses frontières sa dissuasion nucléaire. Sinon à obtenir le droit de partager la décision d’appuyer sur le bouton – ce qui est aussi irréaliste politiquement et juridiquement qu’infaisable techniquement –, l’Allemagne pourrait préférer renouveler son allégeance à Washington. Résolue à ne pas laisser la France s’imposer, elle compte prendre la tête du réarmement européen. Son futur chancelier M. Friedrich Merz a annoncé le 5 mars dernier vouloir investir des centaines de milliards d’euros dans l’armée allemande et réfléchit au rétablissement du service militaire. Son industrie de défense, en plein essor, ne permet pas de couvrir tous les besoins de l’armée allemande. Compte tenu de sa réticence à dépendre d’armements français, comme les avions fabriqués par Dassault – notamment pour sa flotte dite de « partage nucléaire » –, elle n’est pas prête à couper les ponts avec les États-Unis. De fait, outre-Rhin, personne n’évoque sans une grande circonspection le concept d’autonomie stratégique dans lequel les autorités allemandes voient, à raison, une manœuvre de la France. 

Face à elle, elles ont promu début 2024, avec l’appui de la Commission européenne, un projet de règlement relatif au programme européen d’investissement dans la défense (dit « EDIP »), dans le sillage de la Stratégie européenne d’industrie de la défense (dite « EDIS »). Véritable forfaiture juridique dans un domaine ne relevant pas de la compétence de l’UE, ce projet qui vise à soutenir l’acquisition de matériel militaire par les États membres, a été conçu à l’origine comme un moyen d’entraver l’industrie militaire française en la liant à des normes européennes de contrôle des exportations7. Les rapprochements industriels entre la France et l’Allemagne ne doivent, du reste, pas faire illusion8: tous les projets communs d’armement sont au point mort, faute d’accord sur le partage de la technologie et le choix des sous-traitants, tandis que la création par fusion de l’équipementier franco-allemand KNDS en 2015 demeure une union capitalistique sans réalité opérationnelle commune aux deux pays. En octobre 2022, l’Allemagne a également pris la tête d’une initiative (European Sky Shield Initiative) visant, sur le modèle du « Dôme de fer » israélien, à bâtir un bouclier antimissile européen, pour un montant de 3,5 milliards d’euros, doté de systèmes américain, israélien et allemand, au détriment du système franco-italien SAMP/T NG.

Depuis l’échec du projet de Communauté européenne de la défense en 1954, l’Allemagne n’a jamais cessé de jouer les États-Unis contre la France. A force de faire sauter ses « tabous », elle finit par inquiéter. Est-il raisonnable de la laisser se réarmer quand une extrême-droite revancharde est aux portes du pouvoir?

Friedrich Merz, chef de l’Union chrétienne-démocrate (CDU) n’est pas encore effectivement devenu chancelier de l’Allemagne qu’il met déjà un point d’honneur à vouloir augmenter fortement les dépenses militaires de son pays

Une politique étrangère de la France prisonnière de son mercantilisme militaire

Dans l’attente de la nomination du futur chancelier, la France dispose d’une fenêtre de tir pour s’imposer comme le primus inter pares européen face à la Russie. Se présentent à elle deux options, entre lesquelles elle a semblé hésiter longtemps, comme en témoignent les palinodies présidentielles9. La première, qui consiste à ouvrir des discussions sur des bases réalistes avec la Russie, lui permettrait de retrouver la place qu’elle a abandonnée, mais son discrédit diplomatique, entraîné par des années d’alignement atlantiste, rend cette option – pourtant souhaitable – d’autant plus périlleuse qu’elle l’exposerait à un procès en opportunisme – après celui en trahison sous l’ère des démocrates américains – de la part de ses partenaires européens. L’Allemagne, la première, pourrait exploiter ce « faux pas » pour évincer les entreprises françaises des futurs contrats d’armement et affaiblir la position de la France dans les négociations autour du règlement « EDIP ». 

L’option de la surenchère agonistique est plus intéressante a priori ; elle permet d’atteindre le même objectif tout en se présentant comme le grand défenseur des pays européens à qui elle espère vendre des armes à la faveur d’une augmentation annoncée des budgets militaires. Ceci ne signifie pas, même si le jeu des rivalités intra-européennes pourrait y conduire, que la France a intérêt à une guerre ouverte avec la Russie – ce n’est d’ailleurs dans l’intérêt de personne –, mais uniquement à une escalade militaro-marchande en soutien à une réindustrialisation du pays, jusqu’à présent compromise par les diktats du capital financier et les règles européennes de la concurrence. La guerre en Ukraine crée des « opportunités qu’il faut assumer », comme l’a admis le ministre des Armées M. Sébastien Lecornu en septembre 2023. Aussi la France insiste-t-elle, dans le cadre des négociations sur le futur règlement « EDIP », pour accorder la priorité aux achats d’armes européennes dans l’espoir qu’elle profite avant tout aux entreprises françaises. 

Plus que jamais arrimée aux intérêts d’un complexe militaro-industriel de plus en plus dépendant de ses exportations, la France privilégie en réalité depuis longtemps le calcul mercantile à une réflexion stratégique de fond. L’un des objectifs de sa réintégration au commandement intégré de l’OTAN en 2009 était d’accélérer la mise aux normes de l’OTAN des équipements français afin d’accroître leur interopérabilité opérationnelle et de pénétrer ainsi les marchés de l’armement européens difficilement accessibles jusqu’alors. Tous les conflits auxquels la France a été mêlée depuis lors comportent ce motif inavouable: exposer le savoir-faire de son industrie militaire auprès de clients européens dans le cadre du « pivot européen » de la France qui ferme progressivement ses bases en Afrique. 

Sécuriser l’Europe ou les débouchés du complexe militaro-industriel ?

C’est tout l’enjeu de la stratégie française en Roumanie, pays traversé par une crise politique sans précédent. Pilier méridional, avec la Pologne au nord, d’un arc d’endiguement de la Russie allant de la mer Baltique à la mer Noire10, la Roumanie attire les convoitises. Lancée dans une opération de séduction, la France y a déployé, sous couvert de « sécurité » face à une Russie dont elle agite la menace imminente, une brigade blindée « prête au combat » et équipée des meilleurs équipements français, transformant les rives du Danube en un salon d’exposition militaire à ciel ouvert, à quelques encablures de la plus grande base européenne de l’OTAN en cours de construction. Espérons, à considérer l’invraisemblable séquence électorale que vit actuellement la Roumanie, que la France n’ait pas participé à financer autre chose… Malgré une série de déboires ces dernières années, au bénéfice des États-Unis en particulier, elle n’a pas renoncé à y remporter des contrats. Des entreprises comme Thalès, qui s’appuie sur des réseaux d’intermédiaires locaux issus du renseignement roumain et formés par les États-Unis11, ou Naval Group12 y ont délocalisé des emplois13, y compris d’ingénieurs14, cinq ans après l’ouverture d’un Centre de Compétences en Ingénierie (ECC) à Bucarest spécialisé dans la cybersécurité. 

George Simion (photo) fait partie des favoris aux prochaines élections présidentielles roumaines. C’est un proche de Calin Georgescu, favori évincé de la présidentielle le 9 mars 2025, au nom de prétendues ingérences russes que pour l’heure rien ne vient attester

Galvanisés par de si lucratives perspectives, ces grands groupes ne sont plus tant au service de l’État que l’État au leur, caressant le rêve de leur propre « autonomie stratégique ». En se ménageant des opportunités de carrière professionnelle en leur sein, des haut-fonctionnaires se convainquent de continuer à y défendre les intérêts de leur pays. Le complexe militaro-industriel sait pouvoir compter sur des subventions européennes et les dispositifs publics de « soutien export »15, en particulier les garanties apportées par l’État, via Bpifrance, aux banques « françaises » auprès desquelles leurs clients s’endettent. Comme en Ukraine, dont l’apurement de la dette laisse présager, sur le modèle éprouvé de la Grèce, une poursuite des privatisations et une intensification de l’exploitation salariale, ces nouvelles dettes créent des liens d’obligation, même si, en cas de défaut de paiement, ce sont les contribuables français qui règleront l’addition. 

« L’Europe de la défense » au profit du complexe militaro-industriel français a déjà un coût pour les travailleurs et les contribuables. Si les dirigeants européens peinent encore à l’assumer publiquement, ils ont chargé leurs porte-voix médiatiques de préparer les esprits à des reculs sociaux et de nouvelles coupes budgétaires. Devant la Commission des Affaires étrangères du Sénat le 15 octobre 2024, le ministre des Armées fait mine de s’interroger : « Les missions de réassurance en Roumanie doivent-elles faire l’objet d’un écrêtement du budget de la santé, de l’éducation nationale ou de la DGF des communes ? Je pense que la question mérite d’être posée, au regard du principe de sincérité budgétaire. » Il n’y aura pas que des perdants. Le gouvernement français envisage ainsi la création de nouveaux produits d’épargne dédiés au réarmement, donnant l’occasion à une bourgeoisie rentière, socle électoral de M. Emmanuel Macron, de démontrer son patriotisme sonnant et trébuchant. 

Le difficile choix de la paix est dans l’intérêt de la France

Le temps de l’hégémonie américaine adossé à l’idéalisme wilsonien semble révolu. Les jours de l’UE, principal avatar d’une utopie post-historique adossée à cette hégémonie, pourraient bien être comptés à mesure que l’on se rapproche de la résolution du conflit en Ukraine. Tiraillée et clivée, elle trouve dans la rhétorique guerrière, appuyée par les chiffres fantaisistes du récent programme « Rearm Europe », un nouveau sursis. L’Ukraine, dont le destin s’écrira sans elle, n’est plus qu’un prétexte pour précipiter l’avènement d’une « Europe de la défense » vouée à l’échec, mais au revers de laquelle le jeu de ses rivalités internes s’opère au détriment des peuples européens. Tout comme « l’Europe sociale » et « l’Europe verte », que la social-démocratie a vendues aux opinions depuis des années pour leur faire accepter, parfois de force comme au lendemain du référendum de 2005, le projet européen, « l’Europe de la défense » ne saurait voir le jour. 

L’UE ne fait plus rêver, elle fait peur. Choisir la voie de la paix implique de lui tourner le dos ainsi qu’à l’OTAN, cet autre vestige de la pax americana, pour ne pas disparaître avec elles et reconsidérer la place de la France dans les nouveaux équilibres mondiaux. Ce n’est pas une voie aisée, mais c’est la seule que dictent le courage, la raison et la défense des intérêts de la France et du monde du travail. Ce ne sera pas la première fois dans son histoire que la France, dont la voix était encore écoutée à travers le monde lorsqu’elle s’opposa à la guerre en Irak, ne peut compter, dans un premier temps, que sur elle-même. 

Marc de Sovakhine

Haut fonctionnaire écrivant sous pseudonyme pour QG

1 https://www.youtube.com/watch?v=h847uBmG_F8&t=128s

2 https://www.nytimes.com/2025/02/26/us/politics/trump-biden-minerals-ukraine.html

3 https://www.newstatesman.com/the-weekend-essay/2024/08/the-neoliberal-battle-for-ukraines-reconstruction

4 Voir, à ce sujet, Annie Lacroix-Riz, Les Origines du plan Marshall. Le mythe de « l’aide » américaine, Hors collection, 2023, Armand Colin, 576 pages.

5 https://www.atlanticcouncil.org/blogs/new-atlanticist/full-transcript-2021-distinguished-leadership-awards-honor-bold-visionaries-in-challenging-times/

6 https://www.latribune.fr/opinions/l-europe-coalisee-contre-la-france-l-allemagne-l-ame-des-coalitions-de-revers-2-2-1010312.html

7 https://www.lalettre.fr/fr/entreprises_defense-et-aeronautique/2024/01/09/dassault-provoque-une-crise-au-sein-du-lobby-europeen-de-l-armement,110135989-eve 

8 Voir notamment le rapport de la Commission des Affaires étrangères du Sénat sur le Programme 146 « Équipement des forces » du projet de loi de finances pour 2025. 

9 https://www.slate.fr/story/237410/emmanuel-macron-vladimir-poutine-diplomatie-russie-ukraine-garanties-securite-otan-polemique

10 Michel Chevillé « « L’initiative des trois mers », la nouvelle barrière de l’Est », Revue Conflits N° 51, mai-juin 2024.

11 https://www.intelligenceonline.fr/grands-contrats/2024/12/13/ces-anciens-du-renseignement-epaulant-les-industriels-de-defense-francais-a-bucarest,110349330-art 

12 https://www.letelegramme.fr/morbihan/lorient-56100/on-a-moins-de-boulot-et-on-en-laisse-partir-en-roumanie-a-lorient-la-cgt-arsenal-sinquiete-dune-baisse-dactivite-a-naval-group-6759383.php 

13 https://www.usinenouvelle.com/article/un-projet-de-delocalisation-menace-39-emplois-chez-thales-simulation-training-dans-le-tarn.N2228161 

14 https://www.usinenouvelle.com/editorial/thales-gele-ses-recrutements-dans-l-ingenierie-en-france-et-au-royaume-uni.N2217794 

15 Voir le rapport de la Cour des Comptes sur « le soutien aux exportations de matériel militaire », janvier 2023. 

03.04.2025 à 23:24

«Marine Le Pen: du barrage républicain au barrage judiciaire» avec Aude Lancelin, Didier Maïsto et Harold Bernat

5 ans d’inéligibilité, c’est la peine particulièrement sévère requise contre Marine Le Pen, la patronne du RN, dans l’affaire des attachés du parlement européens. Depuis 48h, la droite hurle au coup d’État et au gouvernement des juges, tandis que la gauche se réjouit bruyamment de voir tomber le RN pour corruption, sans beaucoup de vista … Continued
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5 ans d’inéligibilité, c’est la peine particulièrement sévère requise contre Marine Le Pen, la patronne du RN, dans l’affaire des attachés du parlement européens. Depuis 48h, la droite hurle au coup d’État et au gouvernement des juges, tandis que la gauche se réjouit bruyamment de voir tomber le RN pour corruption, sans beaucoup de vista politique. Que penser de cette décision judiciaire s’agissant de la favorite à la présidentielle 2027, soutenue par des millions de Français, notamment issus des classes populaires ? Peut-on combattre l’extrême droite sur le terrain judiciaire, et non pas seulement politique? N’y a-t-il pas là une illusion dangereuse qui renforce le RN à long terme dans sa posture anti-système? Un appel est d’ores et déjà programmé pour l’été 2026, laissant planer une grande inconnue sur la prochaine présidentielle.

Pour évoquer ce sujet brûlant, nos trois animateurs de Quartier Populaire, Aude Lancelin, Didier Maïsto et Harold Bernat étaient en direct sur QG !

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