13.04.2025 à 17:54
Novyny Priazovia
Le plus jeune prisonnier de la guerre russo-ukrainienne raconte sa détention en Russie pendant deux ans et demi.
<p>Cet article Oleksiy Novikov : « La plupart des lieux de détention en Russie sont des centres de torture » a été publié par desk russie.</p>
Oleksiy Novikov, né à Marioupol, est le plus jeune prisonnier de guerre de la guerre russo-ukrainienne. À la veille de l’invasion russe, il n’avait que 18 ans. Le 25 février 2022, le lendemain de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, il s’est porté volontaire pour la défense territoriale de Marioupol. Oleksiy a participé aux combats jusqu’à la mi-avril 2022 : il a ensuite été emmené en captivité en Russie, où il est resté pendant près de deux ans et demi. En septembre 2024, Novikov est retourné en Ukraine à la suite d’un échange. Son témoignage est glaçant.
Dans une interview en ukrainien accordée au projet « News of the Azov Region » de Radio Liberty, Oleksiy raconte son combat à Marioupol, sa capture et sa libération. Il déclare qu’avant même que la Russie ne lance une invasion à grande échelle de l’Ukraine, il avait émis la supposition d’une telle évolution. Mais ni lui ni sa ville n’ont eu le temps de se préparer correctement à la guerre.
« J’étais déterminé à défendre le pays en cas d’invasion massive. Mais j’ai pris un peu de retard dans ma formation militaire, explique-t-il. Le 24 février, mon camarade de classe et moi-même avions prévu de rencontrer la responsable d’une organisation de jeunesse qui s’occupait de l’éducation patriotique des jeunes. Nous pensions nous préparer progressivement grâce à elle. Mais il s’est avéré qu’il était trop tard pour le faire. »
Novikov raconte qu’il a immédiatement rejoint la défense territoriale de Marioupol, sans hésitation. Selon lui, il y avait beaucoup de personnes disposées à le faire dans la ville à l’époque. « Je n’avais aucune crainte et je ne comprenais pas très bien ce qui nous attendait, avoue-t-il. Nous savions déjà que la guerre avait éclaté et que la Russie lançait toutes ses forces. J’ai compris que pendant la guerre, tout pouvait arriver et que je devrais risquer ma vie à tout moment. Mais je n’ai pas hésité. Ma décision a été prise instantanément. »
Lorsqu’il s’est rendu au siège de la défense territoriale locale, on a d’abord essayé de lui refuser l’admission dans l’unité en raison de son jeune âge. « Il y avait des filles assises là qui inscrivaient les bénévoles à la défense territoriale. Je leur ai donné mes documents où il était marqué que j’avais 18 ans, que j’étais étudiant. Elles ont essayé de me dissuader, me demandant : Tu es sûr ? Tu as bien réfléchi ? Tu connais les risques ? Tes parents sont au courant ? et ainsi de suite », raconte Oleksyi. Mais l’un des officiers d’état-major est sorti et leur a dit : « Qu’est-ce qui vous empêche de l’inscrire ? S’il veut s’engager, c’est sa décision consciente. À 18 ans, il est majeur. S’il veut s’engager, qu’il le fasse », se souvient Novikov.
D’après ses souvenirs, dans la soirée du 25 février 2025, des fusillades ont commencé à Marioupol. « Nous avons eu notre première mission dès le lendemain. Le matin, ma section a été équipée, on nous a donné du matériel, des blindés, des lance-grenades, des grenades, etc., raconte-t-il. Et on nous a envoyés garder le pont reliant les rives gauche et droite de Marioupol. Il est fort probable que des groupes de sabotage de l’ennemi se trouvaient déjà dans la ville à ce moment-là. Je ne sais pas exactement quand ils sont arrivés, car ma tâche était d’être à l’arrière et de fournir des services logistiques. J’ai transporté des munitions, de la nourriture, des blessés », témoigne Oleksyi.
Les lignes de communication dans la ville ont été coupées, et les gens de la défense territoriale avaient pour mission d’indiquer aux habitants comment quitter la ville. Le jeune homme raconte que certains habitants de la ville avaient des opinions pro-russes. « Les civils n’avaient plus aucune information. Un jour, se souvient Oleksyi, une femme est venue nous voir et a commencé à nous dire : Pourquoi tirez-vous sur nous ? J’ai été choqué. Je suis un habitant de Marioupol ! Je me suis battu pour la défense de la ville et j’entends ce genre de reproches à mon adresse et envers les forces de défense de la ville. Bien sûr, les gens qui disent cela ont subi un lavage de cerveau et vous ne pouvez rien leur prouver, vous ne pouvez pas les convaincre. Ils persisteront à dire ce qu’ils veulent, même si vous leur donnez toutes les preuves. En fait, la majorité des habitants était apolitique, et parmi les gens actifs, il y a eu des pro-russes et des pro-ukrainiens », explique Novikov.
Au début du mois d’avril 2022, l’unité dans laquelle Oleksyi servait a changé de position. Les communications y étaient accessibles et Novikov a appris que sa mère avait réussi à quitter la ville. À ce moment-là, la situation à Marioupol ne cessait de se dégrader. Le 14 avril, l’unité d’Oleksiy a reçu l’ordre de se retirer vers l’usine Azovstal, que l’armée ukrainienne allait réussir à tenir pendant plus d’un mois. Novikov explique que l’opération d’évasion ne s’est pas déroulée comme prévu.
« Au début, nous nous sommes alignés en colonne et nous sommes partis de manière organisée. Mais au bout de 10 à 15 minutes, les tirs d’artillerie ont commencé et tout le monde s’est dispersé. J’étais perdu, je ne savais pas où se trouvaient mes compagnons d’armes.
En chemin, j’ai rencontré des personnes qui marchaient dans la même direction sur le boulevard Primorsky. Nous avons marché jusqu’à l’aube« , raconte Oleksyi. Selon lui, cette nuit-là, de nombreuses unités de l’armée n’ont pas réussi à atteindre Azovstal, si bien que certaines personnes se sont rendues en ville, tandis que d’autres ont tenté de quitter Marioupol par leurs propres moyens. Oleksiy a essayé de faire de même. Il se rendait compte que les Russes allaient peut-être lancer une opération de nettoyage. « J’ai d’abord rejoint Melekino, où je connaissais des gens. Je ne disais à personne que j’étais militaire, afin de ne pas les mettre dans l’embarras et de ne pas me mettre dans l’embarras », explique le jeune homme.
Novikov a réussi à s’éloigner de 70 kilomètres de Marioupol. Mais le 23 avril 2022, il a été arrêté à l’un des postes de contrôle russes. « Ils ont fouillé mes affaires. Ils se demandaient surtout pourquoi j’avais sur moi tout ce qu’il faut pour survivre. Ils n’aimaient pas non plus le fait que j’aie un couteau, raconte le jeune Ukrainien. Mais ce qui les a convaincus que j’étais probablement un militaire, c’est une photo dans mon téléphone. L’une de mes photos montrait un fragment de mon uniforme, et une autre mon pendentif en forme de trident6. Ils ont donc supposé que j’étais militaire. L’un d’eux s’est approché de moi avec un fusil, a enlevé la sécurité du fusil automatique, a tiré la culasse, l’a placé sur ma tête et m’a dit : Allez, avoue, salaud, que tu es un militaire, sinon que je vais te tirer une balle dans la tête », se souvient Oleksyi.
Après l’avoir gardé au poste de contrôle, l’armée russe a emmené Novikov au bureau du commandant à Kremenovka, dans le district de Marioupol. « Les premières semaines ont été normales. Sans compter les interrogatoires, ils m’ont traité normalement : ils ne m’ont pas battu, ils ne m’ont pas affamé, raconte Oleksyi. Parmi les Russes, il y avait à la fois des conscrits et des volontaires mobilisés, moins nombreux. Un jeune homme avait 19 ans. Je ne sais pas, peut-être que cela les a influencés d’une manière ou d’une autre, mais ils étaient plus compréhensifs à notre égard. Pendant tout le temps que j’ai passé là-bas, je n’ai été frappé à la poitrine qu’une seule fois. »
Selon Oleksiy, les cellules de Kremenovka étaient surpeuplées ; une cellule pouvait contenir jusqu’à 70 personnes, avec un nombre réduit de couchages. Certains étaient assis, d’autres dormaient à tour de rôle. Novikov a ensuite été emmené dans une prison de Donetsk. Oleksiy dit que c’est là qu’il a ressenti ce qu’était une véritable captivité.
« Dans les endroits précédents, mes affaires n’étaient pas confisquées, les gardiens ne me prenaient que mon téléphone et ma carte SIM, et je pouvais garder tout le reste. À Donetsk, ils m’ont pris mon Nouveau Testament, mes guêtres, mes chaussettes. Ils ont immédiatement écarquillé les yeux et se sont jetés sur mes affaires comme des vautours, ils ont tout pris, raconte-t-il. Ils ont pris des croix, des livres. Ils nous ont traités de “satanistes”, de “nazis”. Peu à peu, cet endroit a été de plus en plus terrible. Il est devenu cauchemardesque après la reddition d’Azovstal, explique Oleksiy. Nous n’avions aucun accès aux informations. Lors des interrogatoires, on me faisait du chantage en promettant de s’en prendre à ma famille. Nous n’avions pas de livres. Nous avions droit à une promenade une fois par semaine, voire toutes les deux semaines. Pour la douche, c’était pareil. Pour aller aux toilettes, il fallait mendier, mais ils pouvaient aussi refuser : il y a eu des moments où ils ne nous laissaient pas du tout aller aux toilettes pendant toute la journée. Heureusement, nous avions des bouteilles vides, alors nous les utilisions. »
Oleksyi se souvient qu’au fil du temps, les conditions de vie dans la prison sont devenues tellement insupportables que les prisonniers étaient prêts à se révolter à cause de l’épuisement, de la fatigue et de la faim. « Pour le dîner, on nous apportait des bols avec deux cuillères de purée de pommes de terre instantanée et une petite tranche de pain, dans le meilleur des cas, raconte-t-il. Souvent on était à la limite de l’évanouissement. La faim, la fatigue, la colère grandissaient. Un peu plus, et nous étions vraiment prêts à déclencher une mutinerie. Pourquoi n’avons-nous pas fait d’émeute ? Parce que tout le monde attendait un échange officiel. »
Selon Novikov, les cellules de la prison où il était détenu contenaient à la fois des prisonniers de guerre et des civils, pour la plupart originaires du Donbass. Oleksiy y a également rencontré des personnes originaires des régions de Zaporijjia et de Kherson, partiellement occupées par la Russie. « Les civils étaient traités de la même manière que les militaires : ils étaient frappés et humiliés. Une fois, les Russes ont emmené un homme de 60 ans parce qu’il ne voulait pas leur donner sa voiture. Il pouvait leur arriver d’attraper simplement quelqu’un dans la rue », explique Novikov à propos de ses codétenus.
Novikov note que les pires traitements infligés aux prisonniers de guerre ukrainiens l’ont été précisément sur le territoire russe. « C’est en Russie qu’ils ont été les plus maltraités. Il y a une différence entre les militaires russes et ceux de la république de Donetsk, souligne-t-il. Dans le territoire occupé de la région de Donetsk, les habitants nous ont traités avec une certaine compréhension. Et en Russie, il y a une attitude terrible envers tout le monde. La majorité absolue des centres de détention en Russie ne sont que des centres de torture. Certains inspecteurs déclaraient directement : “Je suis un sadique, je ne le cache pas, j’aime vous battre.” Parfois, j’ai rencontré des gardiens ou des inspecteurs normaux, qui pouvaient même donner une cigarette ou un bonbon à quelqu’un, se souvient Oleksiy. Mais la plupart d’entre eux étaient des brutes. »
En juillet 2022, Oleksiy a été transféré de Donetsk à la colonie de Elenovka (Olenivka), également dans la partie de l’oblast de Donetsk occupée par les Russes. C’était l’un des principaux lieux de détention des prisonniers de guerre ukrainiens. Le 28 juillet 2022, une explosion s’y est produite, tuant une cinquantaine de prisonniers. L’Ukraine estime que l’explosion a été organisée par les autorités russes ; Moscou affirme qu’elle a été causée par des tirs d’obus en provenance d’Ukraine. Novikov a été transféré à Horlivka, avec d’autres prisonniers de guerre, la veille de la tragédie. « On m’a dit que la majorité absolue parmi les victimes, c’étaient des combattants d’Azov. Certains sont morts, d’autres ont été gravement blessés, d’autres encore ont eu la moitié de leur corps touché. Je le sais d’après les témoignages de ceux qui étaient là. » Oleksiy est convaincu que l’explosion de la caserne de la colonie d’Olenivka était un acte terroriste planifié. Selon le bureau du procureur général ukrainien, la cause de l’explosion du bâtiment pourrait être une arme thermobarique. Mais il est impossible de l’établir avec certitude : les autorités russes ont refusé de laisser les experts de l’ONU se rendre sur le site de l’explosion, prétendument en raison de l’absence des garanties de sécurité nécessaires.
Oleksiy affirme que sa foi l’a aidé à rester en captivité et à ne pas se rendre. Dans la colonie de Horlivka, il s’est joint à un cercle religieux et s’est intéressé de plus près à la religion. « J’ai compris que chaque problème que je rencontre est une épreuve que je dois passer. J’ai ma propre croix à porter, mais je sais qu’à la fin il y aura un soulagement, explique-t-il. Et ce soulagement peut être plus satisfaisant et plus fort que les épreuves que je subis. Chaque fois que je traverse une période difficile, comme l’aggravation d’une maladie, ou que je suis vraiment en difficulté, ou que je m’effondre mentalement, je me tourne vers Dieu dans la prière. »
Oleksiy est rentré en Ukraine le 13 septembre 2024 à la suite d’un échange de prisonniers de guerre. Deux jours avant l’échange, lui et plusieurs autres prisonniers ont été convoqués au quartier général. Les militaires russes leur ont demandé s’ils voulaient rester en Russie et, en outre, rejoindre l’armée russe. Tous les combattants ukrainiens ont bien sûr refusé, raconte Oleksyi. Selon lui, il avait le pressentiment de cet échange, mais personne n’était sûr qu’il se produirait.
« Nous n’y avons pas cru jusqu’au bout. Mais j’ai eu une sorte de prémonition, dit-il. Il y a un mot grec qui s’appelle metanoia – un changement de conscience. J’ai essayé de changer ma conscience pour qu’elle soit plus proche des canons chrétiens. C’est pourquoi, au cours des deux semaines qui ont précédé l’échange, je me sentais déjà prêt. On s’attendait à ce que l’échange soit proche, mais c’est difficile à comprendre. C’est un problème propre à la captivité : plus on y est, moins on croit à la possibilité d’un échange, et plus il est difficile de l’accepter, explique Novikov. Vous êtes déjà habitué à un modèle de comportement : vous êtes une personne servile, vous n’avez aucun droit. Il est difficile de réaliser qu’il faut rentrer chez soi. Les gars et moi avons eu beaucoup de conversations à ce sujet avant l’échange. J’ai pensé à ce qui arriverait à ceux qui rentreraient chez eux dans six mois ou un an. Certains des gars de 2014 sont encore en prison. »
Selon Oleksiy, le transfert vers l’Ukraine fut très inconfortable. « Nous étions dans la position de la crevette. Nous étions recroquevillés, la tête en bas, les yeux bandés, les mains attachées devant soi, décrit-il. Je suis resté dans cet état pendant au moins 12 heures. Nous avons d’abord voyagé en voiture, puis en avion et enfin en bus pendant au moins quatre heures. C’était très fatigant. Mais j’étais animé par l’idée que j’allais bientôt rentrer chez moi. Je ne voulais ni manger ni boire, et tous mes besoins ont été relégués au second plan. »
« Pendant la procédure d’échange, nous avons vu devant nous les Russes contre lesquels nous étions échangés, raconte Oleksyi. J’ai été surpris de voir qu’ils étaient tous en uniforme, bien engraissés. Et nous, des squelettes vivants. Il y a eu une certaine confusion dans nos sentiments. Apparemment on se réjouit, mais avec beaucoup de prudence, de peur que tout cela ne s’arrête soudainement. En captivité, j’ai appris à me centrer, à me renfermer sur moi-même pour que mes émotions ne me déchirent pas. »
Oleksyi n’a fondu en larmes que lorsqu’il a appelé sa mère : « J’ai trouvé un bénévole qui a permis à tout le monde d’utiliser son téléphone. Je me souvenais du numéro de ma mère, je savais qu’elle n’en avait certainement pas changé. Je l’ai appelée et j’ai fondu en larmes. C’était un moment de faiblesse », admet-il.
Actuellement, Oleksyi Novikov s’occupe de sa santé et résout les problèmes liés à la reprise de ses études à l’université. À l’avenir, il souhaite toujours reprendre son service militaire.
Selon le siège de coordination ukrainien pour le travail avec les prisonniers de guerre, au 5 février 2025, Kyïv avait réussi à faire revenir 4 131 personnes de captivité russe, tant militaires que civiles.
Traduit de l’ukrainien par Desk Russie
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13.04.2025 à 17:54
Rikard Jozwiak
Le journaliste raconte l'histoire de sa famille en Pologne et la façon dont elle a été inspirée par Radio Liberty.
<p>Cet article Trois tentatives de fuite de la Pologne vers l’Ouest a été publié par desk russie.</p>
Aujourd’hui, Radio Liberty, source principale d’informations à l’époque soviétique pour tous ceux qui ne croyaient pas au « paradis socialiste », va être fermée par l’administration Trump. Or cette radio et les sites qu’elle a créés restent une source de première importance pour beaucoup de Russes, d’Ukrainiens, de Bélarusses, de citoyens d’Asie Centrale et du Caucase. C’est également une source inestimable pour les Occidentaux qui veulent savoir ce qui se passe dans les pays autoritaires issus de l’ex-URSS. Le journaliste Rikard Jozwiak raconte l’histoire de sa famille en Pologne et la façon dont elle a été inspirée par Radio Liberty.
Mon père naquit à Poznan en 1939, dans l’ouest de la Pologne, juste avant l’invasion de l’Allemagne nazie. Son père servit dans l’armée polonaise avant d’être fait prisonnier de guerre et sa mère fut emprisonnée pour avoir résisté au régime nazi. Mon père passa donc la majeure partie de la guerre sous la garde de son frère aîné et d’une infirmière de la Croix-Rouge suédoise, un lien qui s’avérera important par la suite.
Après la guerre, mes grands-parents et leur jeune fils, mon père, déménagèrent dans la ville portuaire de Gdansk, dans le nord de la Pologne, à la recherche de meilleures perspectives d’emploi. À cette époque, la Suède possédait l’une des plus grandes flottes marchandes d’Europe et, dans le sombre contexte d’une Pologne ravagée par la guerre, leurs navires étincelants dans le port firent forte impression sur mon père.
Comme beaucoup de personnes bloquées derrière le rideau de fer, mon père écoutait « les voix » : c’est ainsi que l’on appelait les émissions de radio de la BBC World Service, de Voice of America et de Radio Free Europe. Les gens écoutaient en secret, bien sûr, en collant une radio transistor à leurs oreilles dans leur lit la nuit. C’était une époque sombre, marquée par la censure et la répression, mais pour mon père, ces émissions étaient une aubaine. Elles l’informaient et l’inspiraient et, dans son cas, le convainquirent de fuir, vers l’Occident, vers la Suède.
Sa première tentative, alors qu’il avait 17 ans, fut de traverser à pied la mer Baltique, recouverte de glace, pour rejoindre l’île danoise de Bornholm depuis la Pologne. Il avait alors prévu de continuer jusqu’en Suède. Les hivers étaient bien plus rudes à l’époque et la glace recouvrait effectivement de grandes parties de la Baltique, mais c’était tout de même un plan téméraire. Les brise-glaces rendaient la traversée à pied presque impossible et il fut contraint de faire demi-tour, battu mais pas découragé.
L’année suivante, il retenta l’aventure, cette fois en essayant de traverser la mer en canoë avec un ami. Les adolescents furent capturés par un navire polonais et remis aux autorités. Au lieu de la Scandinavie, ils se retrouvèrent en prison en Pologne. Interrogés et passés à tabac, ils avouèrent être des espions de la CIA et furent condamnés à dix ans de prison.
Heureusement, à la fin des années 1950, des réformes libérales étaient en cours en Pologne et ils furent libérés au bout d’un an. Le rêve de mon père de vivre en Occident étant désormais suspendu, il fit des études et rencontra ma mère. Ils se marièrent et ont trouvèrent tous deux un emploi dans ce qui était alors le chantier naval Lénine à Gdansk. Pendant tout ce temps, il écoutait toujours « les voix », le jazz et le rock’n’roll qui parvenaient à échapper aux brouilleurs.
Les rêves de mes parents d’une nouvelle vie à l’étranger refirent surface et, en 1971, ils partirent pour la Yougoslavie, l’un des rares pays où on pouvait se rendre à l’époque. Sur une plage de Pula, en Croatie actuelle, ils aperçurent un couple allemand qui leur rappelait leur propre couple. L’homme était brun comme mon père ; la femme était blonde comme ma mère.
N’ayant rien à perdre, ils s’approchèrent d’eux et leur demandèrent s’ils venaient d’Allemagne de l’Ouest, ce qui était le cas. Ils leur adressèrent alors une demande si audacieuse que je n’arrive toujours pas à croire qu’ils aient eu le courage de la faire : ils demandèrent au couple allemand s’ils pouvaient prendre leur identité. Étonnamment, les Allemands acceptèrent. (Apparemment, aider les « Orientaux » de cette manière n’était pas rare pendant la guerre froide.)
Ainsi, avec les papiers d’identité du couple et leur voiture, ils traversèrent la frontière pour se rendre en Italie. Le couple allemand se rendit ensuite au consulat le plus proche en déclarant avoir été victime d’une agression. Quant à mes parents, après un an en tant que réfugiés politiques en Italie, ils furent autorisés à se rendre en Suède pour y demander le statut de résident, puis la citoyenneté.
À cause de la guerre, mon père a grandi en haïssant les Allemands. C’était donc une douce ironie que l’acte de générosité suprême qui lui permit de retrouver sa liberté vienne d’un Allemand. Ils restèrent en contact, envoyant une carte au couple allemand à chaque Noël.
Je suis né en Suède dans les années 1980, dans la paix et la prospérité dont mes parents ne pouvaient que rêver quand ils étaient jeunes. Comme beaucoup d’autres de ma génération, j’ai étudié à l’étranger, parlé quelques langues européennes et voyagé librement et largement à travers le continent, croyant en l’idée d’un « espace européen commun ». Il était donc logique que je me retrouve à Bruxelles.
Lorsque j’ai reçu une offre début 2011 pour travailler en tant que reporter freelance à Bruxelles pour RFE/RL, j’ai su que ce n’était pas une offre d’emploi ordinaire. Après avoir entendu toutes ces histoires sur l’importance de RFE/RL, j’avais l’impression de rejoindre un cercle familial.
Lorsque j’ai commencé, début 2011, la grande nouvelle était l’élection présidentielle frauduleuse au Bélarus en décembre de l’année précédente et la répression qui s’en était suivie contre les manifestants descendus dans la rue. L’UE imposait des sanctions au régime d’Alexandre Loukachenko et je me suis lancé dans la couverture de l’événement depuis Bruxelles. Depuis, je couvre l’UE et l’OTAN.
Certaines choses ne changent jamais. Actuellement, Alexandre Loukachenko est investi pour son septième mandat et fait toujours l’objet de sanctions de l’UE. Sous son régime répressif, on estime à 1 500 le nombre de prisonniers politiques dans le pays. L’un d’entre eux est mon collègue, le journaliste de RFE/RL Ihar Lossik, qui est derrière les barreaux depuis 2020. Un autre collègue, Andreï Kouznetchyk, a été libéré plus tôt cette année d’une prison bélarusse.
Quand je pense à Ihar et Andreï, ainsi qu’à Vladyslav Iessypenko, un contributeur de RFE/RL emprisonné en Crimée occupée par la Russie, je ne peux m’empêcher de penser à l’histoire de mon père et à tout ce qu’il a fait pour vivre libre.
Nous touchons chaque semaine quelque 50 millions de personnes dans des endroits où la liberté des médias n’existe pas, est mise à rude épreuve ou dans des environnements inondés de désinformation. RFE/RL est toujours aussi importante, tout comme elle l’était pour mes parents dans la Pologne communiste. Tout comme elle l’est pour Andreï, Ihar et Vladyslav, et toutes les personnes qu’ils ont touchées.
Traduit de l’anglais par Desk Russie
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<p>Cet article Trois tentatives de fuite de la Pologne vers l’Ouest a été publié par desk russie.</p>
13.04.2025 à 17:53
Vincent Laloy
Un certain nombre de ténors politiques et médiatiques français, connus pour leur position pro-russe, haussent le ton.
<p>Cet article Le parti de Moscou ne désarme pas a été publié par desk russie.</p>
L’auteur montre qu’avec l’arrivée de Donald Trump au pouvoir, un certain nombre de ténors politiques et médiatiques, des extrêmes à la droite gaulliste ou ce qui s’en prévaut, connus pour leur position pro-russe, haussent le ton au nom du « réalisme politique ». Leur plus cher souhait, c’est de composer avec le régime de Poutine, au détriment de nos valeurs.
Valeurs actuelles, que l’on croyait débarrassé de la complaisance envers Poutine de son directeur précédent, reste fidèle à son tropisme pro-russe. Passons sur Lellouche, en mal d’inspiration, pour aboutir en son édition du 12 mars à l’inévitable Sapir, qui s’étend sur deux pages. Il estime que l’Europe s’est « ridiculisée » en soutenant l’Ukraine et que « vouloir remplacer l’OTAN par une structure émanant de l’Union européenne est futile et dérisoire ». On le retrouve dans le dernier numéro de la revue Omerta, plus soumise que jamais à Moscou, où il dénonce le gouvernement de Kyïv, « aux abois […] avec un Zelensky qui ne serait pas réélu ».
La même livraison de Valeurs actuelles accorde à Piotr Tolstoï, interviewé par le complaisant Mériadec Raffray, quatre pages plus une photo pleine page. Tolstoï nous annonce que « la Russie propose la paix » et que « la menace pour la paix, ce sont les subventions et les aides militaires à l’Ukraine » ! Rappelons qu’il a travaillé pour Le Monde et l’Agence France-Presse, dont il fut correspondant à Moscou de 1994 à 1996. L’Union européenne le dépeint comme une « figure centrale de la propagande du gouvernement russe ». Le 19 mars, la même revue consacre deux pages, pleines de compréhension, à Xenia Fedorova, l’ex-présidente de RT France… L’oracle Onfray a droit à sept pages, où il met en parallèle, comme il l’a toujours fait, Russie et Amérique : « La fin de la guerre en Ukraine aura lieu quand un empire l’aura emporté sur l’autre… »
Dans son numéro du 5 mars, Valeurs actuelles offre au revenant Fillon de onze pages, où tout est de la faute de l’Oncle Sam, comme toujours : « Les États-Unis auront tour à tour jeté de l’huile sur le feu en manipulant le débat politique en Ukraine et en promettant une adhésion à l’OTAN irresponsable. » Pour l’ex-titulaire de Matignon, Zelensky « a sa part de responsabilité dans le déclenchement de la guerre et il se refuse aujourd’hui d’arrêter une guerre qu’il ne peut pas gagner », pas moins. Il dénonce « l’accumulation jusqu’à l’absurde des sanctions, l’inutile inculpation de Poutine devant la Cour internationale de justice », condamnant « l’atlantisme béat » des Européens et l’Amérique, « vecteur de désordre plus que de paix » avec ses « innombrables ingérences dans le monde ». Pour le ci-devant député de la Sarthe, « la Russie […] est une menace infiniment moindre ». Incroyable !
Thomas Legrand a été bien inspiré en titrant son éditorial de Libération du 6 mars « Heureusement, la France a échappé à Fillon », au russophile Fillon, ex-salarié de Moscou, où il ne s’est pas appauvri. Rappelons qu’il était le candidat le plus cité sur Russia Today, si l’on se réfère au courageux et éloquent ouvrage de Maxime Audinet, qui porte le titre de ce média russe.
Dans Le Monde diplomatique de juin 2024, l’« islamo-gaulliste » Galouzeau de Villepin – intime d’Edwy Plenel ! – exprimait-il une position différente ? Parmi ceux qui l’encouragent à présenter sa candidature à la présidentielle de 2017, un certain Aurélien Pradié, député ex-LR, pour lequel « dans l’histoire politique de notre pays, il y a de grands personnages, je vais en prendre deux : Marchais et Séguin7 ». Qu’un élu de droite célèbre, glorifie le stalinien Marchais, n’est-ce pas stupéfiant ? Quand l’on sait que Villepin participa à la dernière fête de L’Humanité – où il fut fort applaudi voire acclamé – et qu’il est célébré par La France insoumise, non, rien de stupéfiant.
Dans le genre, l’ex sous-ministre Philippe de Villiers, citant au passage Hubert Védrine, n’est pas mal non plus, s’en prenant au président Macron, qui « déclare la guerre au moment où le monde entier veut faire la paix. Le discours sur la menace russe était surréaliste. […] C’est un fantasme. Le fantasme de quelqu’un qui n’a plus tout à fait sa raison. Non, la Russie, insiste-t-il, n’est pas une menace ». Et de s’aligner sur Moscou à propos de la menace que ferait peser l’élargissement de l’OTAN8. N’est-ce pas plutôt Villiers qui, une fois de plus, perd le sens des réalités ?
Pour poursuivre avec les extrêmes, Dupont-Aignan s’aligne sur Villiers : « On nage en pleine folie. Il n’y a pas de menace russe pour l’Union européenne, c’est un délire inventé par le président de la République pour faire peur aux Français9 ». Et quand l’on voit le beau-frère et conseiller de Marine Le Pen, Philippe Olivier, admirer Mariani, « remarquable, il a un très bon réseau à l’international, c’est une carte valorisante10 », il est à craindre que la formation d’extrême droite comporte toujours autant de poutinolâtres patentés. D’autant que ledit Olivier a condamné la position favorable à l’Ukraine de l’eurodéputé RN, Pierre-Romain Thionnet11.
À la prétendue absence de menace russe, l’inventeur du poutinisme Vladislav Sourkov répond : « Nous nous étendrons dans toutes les directions, aussi loin que Dieu le voudra12. » Pour le terroriste Nemmouche, récemment condamné à la perpétuité, « Poutine a dit que l’Occident était l’empire du mensonge. Il a raison13 ! »
À l’extrême gauche, rappelons que les députés de La France insoumise et du parti communiste ont voté, le 12 mars à l’Assemblée nationale, contre l’aide à apporter à l’Ukraine, « mettant en garde contre les discours belliqueux contre la Russie14 », Mélenchon s’employant à minimiser sa responsabilité, s’en prenant à l’ancien président Hollande, qui avait favorisé l’installation du bouclier antimissile en Pologne, menace pour « les 75 % du territoire de la Russie15 ». Claude Malhuret a provoqué l’hilarité générale, à la tribune du Sénat, en qualifiant Mélenchon de « ministre des Affaires étrangères, de l’amitié avec la Russie, le Hezbollah et l’alliance bolivarienne », tandis que Marianne du 20 mars, où sévit toujours Natacha Polony, voit dans le sénateur de l’Allier un « fanatique de l’OTAN », ce qui est autrement plus grave pour le magazine — désormais aux mains du douteux Taddeï – que d’être un agent de Moscou.
Le 16 mars sur France 3, Mélenchon s’acharne moins sur Poutine que sur Trump, « qui nous menace physiquement, […] qui asphyxie une partie de notre économie ». Il a aussi déploré que l’Europe « nargue et diabolise Poutine […] dans sa servilité atlantiste16 ». Il est rejoint par le député LFI Arnaud Le Gall, pour qui « le gouvernement court en avant dans une vision purement belliciste ». Ou par un autre élu LFI, Bastien Lachaud, qui déclare que « notre vision ne peut pas être européocentrée ». Ce dernier est l’auteur du livre intitulé Faut-il faire la guerre à la Russie ?, dans lequel il épouse les thèses moscovites du genre : « On voit bien que les jugements catégoriques qui condamnent l’action de la Russie en Ukraine sont, au mieux, caricaturaux, au pire tout à fait partisans. […] Entend-on pour autant s’indigner en continu du risque que les États-Unis font peser sur la paix mondiale ? », fustigeant « les années d’encerclement agressif par les États-Unis des abords du territoire russe. […] On voudrait que les Russes voient sans broncher l’avancée de leur vainqueur : c’est absurde et humiliant17 ». Cet ouvrage a fait l’objet d’un compte rendu élogieux dans le Monde diplomatique de mars 2020.
Ainsi que le souligne Le Point du 13 mars 2025, l’axe Trump-Poutine « les embarrasse mais ils trouvent quand même moyen de s’aligner sur Moscou » ; et de citer, outre ceux déjà mentionnés dans notre article, Manon Aubry, Mathilde Panot, Manuel Bompard pour finir, à l’autre bord, avec entre autres Henri Guaino ou Bardella.
Rappelons aussi que le Rassemblement national s’abstint lors du vote du 12 mars précité, Marine Le Pen excluant toute forme d’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN comme à l’Union européenne. Visant le chef de l’État, elle réprouvait ces « va-t-en guerre, exagérant la menace russe18 ». Le complaisant Renaud Girard l’a rejointe dans Le Figaro du 18 mars, où il développe toujours les mêmes litanies : parler à Poutine mais, toutefois, ne pas lui céder, le préposé Girard tentant de donner le change, comme il en est coutumier.
Ne serait-il pas préférable de verser 15 € à une œuvre de bienfaisance plutôt que d’acquérir cette revue, dont le coûteux dernier hors-série s’intitule « Ukraine, la guerre sans fin » ?
« Omerta, la voix de Moscou », ainsi que nous intitulions notre article de Desk Russie du 17 novembre 2024. Ne l’est-elle pas plus que jamais ? On y retrouve toujours la même complaisance pour la Russie, avec des auteurs comme les nommés d’Anjou (pseudonyme ?), Le Sommier, Denécé, Tarnowski, Sapir, Michel Pinton…
Les deux premiers cités se sont rendus sur les lieux du combat, ce qui nous vaut d’interminables reportages illustrés, qui donnent l’impression que c’est Le Sommier qui lance les ordres tandis que ledit d’Anjou remarque que « sur le terrain, les Russes que nous rencontrons ont le calme des vieilles troupes », bref de braves types, bien inoffensifs.
Plus loin, une certaine Amélie Ismaïli consacre sept pages intulées « Ukraine : les petits télégraphistes de Kiev et Moscou ». L’autrice essaie de donner le change mais accorde seulement deux notices à des poutinophiles, comme Xavier Moreau et Adrien Bocquet, contre neuf à des auteurs pas vraiment agents, eux, du Kremlin, à savoir Alla Poedie, le général Yakovleff, Elsa Vidal, Julien Pain, Guillaume Ancel, Pierre Servent, Nathalie Loiseau, Raphaël Glucksmann et Nicolas Tenzer, présentés en « défenseurs zélés de la cause ukrainienne, adeptes de la surenchère belliqueuse ».
Mettre en parallèle des séides de Moscou et ses détracteurs est, là encore, stupéfiant. Il est reproché à l’intègre Elsa Vidal de dénoncer les compromissions de certains avec le Kremlin, ce qui lui vaut ce commentaire incroyable : « On serait tenté d’interroger sa propre compromission à l’égard de l’empire de l’Ouest… » Comme si défendre l’Occident, auquel on appartient, était aussi compromettant – voire plus – que d’être inféodé à la Russie ! Autre crime : Nathalie Loiseau est accusée d’être « radicalement alignée avec l’extrême-centre atlantiste ». Guillaume Ancel se voit reprocher, entre autres, ses révélations sur les compromissions de Védrine dans le génocide du Rwanda et, pour Raphaël Glucksmann, référence au Monde diplomatique à l’appui, son soutien au « dictateur géorgien Saakachvili », qui lutta courageusement contre l’agression russe. Le compétent Nicolas Tenzer est presque présenté comme un « agent de la CIA » ou à peu près.On ne reviendra pas sur Denécé et son Centre français de recherche sur le renseignement (Cf2R), dont on connaît la complaisance pour le sanguinaire Bachar el-Assad, et pour Thierry Meyssan and co, proche aussi de Dialogue franco-russe. Alain Soral le cite souvent de son côté. Denécé estime que « les décisions et l’attitude des États-Unis sont la principale raison du retour du risque d’un conflit nucléaire. […] Face à cette attitude et ces provocations américaines, depuis le début du conflit en Ukraine », les Russes ont osé réagir ! Même Politis, d’extrême gauche, l’a dépeint le 8 novembre 2023 comme « réputé pro-Poutine et proche de l’extrême droite ».
Cinq auteurs d’Omerta appartiennent à cette officine, le Cf2R. Ainsi Pierre-Emmanuel Thomann qui ose écrire que « si la France comme nation d’équilibre veut retrouver une marge de manœuvre, une victoire de Moscou est dans son intérêt ». Il enseigne à l’ISSEP, université privée créée par Marion Maréchal, où sévissent notamment Bruno Gollnisch et Jean-Frédéric Poisson.
Michel Pinton, ancien collaborateur de Giscard d’Estaing – qui n’avait jamais rien compris à la défunte Union soviétique – est sur la même lancée : « Arrachons-nous aux facilités de la tutelle américaine dont l’OTAN est l’outil ». Il s’en prenant surtout au président Biden, « vieillard entêté » né en 1942, tandis que notre Pinton est un jeune homme né en 1937… Cet ex-UDF a rallié Chevènement. Qu’on en juge : « Si l’UE veut survivre en 2030, elle n’a qu’une issue possible : l’entente avec la Russie. […] En nous soumettant à ce tuteur égoïste [l’Amérique], l’Union est conduite à renier ses trois objectifs : elle est happée dans l’engrenage de la guerre, compromet le bien-être de ses peuples et contribue au discrédit de la démocratie ». La solution : rechercher une entente avec Moscou contre « l’illusion atlantiste ».
Une note de lucidité empruntée – eh oui ! – à Valeurs actuelles, ou plutôt à Louis Sarkozy qui, lui, voit clair dans son article du 19 mars, lequel devrait être lu et médité par son père, devenu si bienveillant avec le Kremlin : « L’immense Russie […] brise et persécute ses voisins. […] Aucune expansion de l’OTAN – volontaire, prévisible, légitime – ne justifie l’asservissement des Ukrainiens. Que personne n’ose dire que cette alliance défensive représente une quelconque menace pour Moscou ; ce sont les peuples voisins qui se sentent menacés, d’où leur adhésion ! » Voilà qui va à l’encontre des positions habituelles de l’hebdomadaire.
Concluons plus tristement avec Raphaël Enthoven : « Parce que, grâce à lui [Trump], les émissaires du Kremlin, de François Fillon à Thierry Mariani, de ses idiots utiles, de Manuel Bompard à Jean-Luc Mélenchon, passent pour ce qu’ils sont : des traîtres19. »
<p>Cet article Le parti de Moscou ne désarme pas a été publié par desk russie.</p>