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01.12.2025 à 21:15

Contre un maccarthysme à la française – pour tous les Julien Théry à venir

Collectif

À la suite d’un communiqué mensonger paru le 21 novembre sur le compte X de la LICRA, repris dans une publication du journal Lyon Capitale (et depuis, par de très nombreux médias), l’historien Julien Théry est l’objet depuis plusieurs jours d’une violente campagne de diffamation et de harcèlement, d’insultes et de menaces de mort. Une […]
Texte intégral (9723 mots)

À la suite d’un communiqué mensonger paru le 21 novembre sur le compte X de la LICRA, repris dans une publication du journal Lyon Capitale (et depuis, par de très nombreux médias), l’historien Julien Théry est l’objet depuis plusieurs jours d’une violente campagne de diffamation et de harcèlement, d’insultes et de menaces de mort. Une situation d’autant plus préoccupante que l’adresse précise de son lieu de travail a été divulguée par Lyon Capitale, constituant un risque pour sa sécurité. Son Université de rattachement s’est immédiatement désolidarisée de lui publiquement et a effectué un signalement au Procureur de la République

La publication de la LICRA est un montage d’un post Facebook réalisé par Julien Théry le 20 septembre dernier, où il relayait la longue analyse faite par Sophie Trégan de la « lettre de la honte », cette tribune de 20 personnalités publiée dans le Figaro demandant au Président Emmanuel Macron de « ne pas reconnaître un État palestinien sans conditions préalables ». Rappelant un certain nombre de faits avérés et reconnus par les instances internationales, Sophie Tregan concluait ainsi : « quand on conditionne la reconnaissance d’un État à la libération de 49 otages au mépris de la vie de plus de 1,5 million de personnes en proie à un génocide, c’est ni plus ni moins qu’une hiérarchisation des vies humaines selon leur origine ethnique, du suprémacisme ». Julien Théry a reposté le texte, en copiant-collant la liste des signataires de la tribune, qui circulait alors partout à ce moment-là, et a ajouté « génocidaires à boycotter ». La LICRA a soigneusement omis le post initial, donnant ainsi l’impression que l’historien avait « fait une liste » de noms, au hasard, sans raison particulière. Et elle a ajouté ce commentaire : « On peut être professeur d’Université, se croire progressiste et faire des listes de noms comme sous l’Occupation ». L’effet de ce montage irresponsable de la LICRA a été de déclencher une campagne de harcèlement.

Mais pourquoi une telle démarche de la LICRA, maintenant, alors que le post initial qu’elle a tronqué avant de le diffuser est vieux de deux mois ? Réponse : cette offensive de la LICRA semble intervenir en représailles à la publication, sur le site Hors-Série.net le 23 octobre dernier, d’un chapitre de son livre intitulé En finir avec les idées fausses sur l’histoire de France paru le 17 octobre dernier aux éditions de l’Atelier. L’article en question – dont  le rédacteur en chef du journal de la LICRA, Emmanuel Debono, a rapidement tenté  une dénonciation sur le site Conspiracy Watch – est une réfutation de l’idée selon laquelle il existerait aujourd’hui un « antisémitisme de gauche », menée à partir d’une synthèse approfondie de l’histoire de l’antisémitisme, en particulier depuis le début du XIXe siècle. La conclusion en est (sans originalité) qu’il peut évidemment y avoir des cas d’antisémitisme de la part d’individus qui appartiennent à la gauche (antisémitisme à gauche, selon la distinction de Michel Dreyfus), mais que, depuis le tournant de l’Affaire Dreyfus, la gauche a abandonné l’antisémitisme pour des raisons structurelles, alors que la droite nationaliste, à l’inverse, a été et demeure structurellement antisémite. Plus douloureux : le texte conclut aussi que l’irruption de l’idée d’un « antisémitisme de gauche » dans le débat public depuis à peine plus de deux décennies est liée à la radicalisation de l’entreprise sioniste en Palestine depuis l’assassinat d’Itzhak Rabin et l’abandon des accords d’Oslo. La notion d’« antisémitisme de gauche » vise ainsi en réalité à neutraliser les oppositions à cette entreprise en les rabattant sur le judéocide européen de 1941-1945.

Depuis l’ébullition médiatique provoquée par la tribune des 20 signataires, moment où paraissent l’analyse de Sophie Trégan et le post de Julien Théry, les otages israéliens ont tous été libérés. Force est de constater que la guerre ne s’est pas terminée pour autant. Chaque jour, des dizaines de Palestinien.nes continuent de mourir, sous les bombes ou les balles des snipers, ce qui montre bien que l’enjeu dépassait les otages et concerne le nettoyage ethnique en vue de ce qui serait une colonisation totale de la Palestine. Quiconque souligne sérieusement cet état de fait se voit systématiquement exposé à l’accusation d’antisémitisme.

L’article de Julien Théry, qui démonte cette idée d’un « antisémitisme de gauche », est donc dérangeant pour les soutiens à l’État d’Israël et leurs stratégies de communication.

Nous assistons depuis quelques semaines à une nouvelle offensive générale contre la liberté des universitaires d’étudier et analyser la situation en Palestine. La LICRA et notamment Emmanuel Debono sont parvenus à faire annuler la tenue au Collège de France du colloque organisé par Henry Laurens. La campagne lancée contre Julien Théry par la LICRA poursuit cette attaque. Il est particulièrement inquiétant de constater que l’ensemble des grands médias reprend à son compte les accusations mensongères de la LICRA sans effectuer la moindre vérification.

Faute de réaction rapide de la communauté universitaire, cette vague de censure et de Maccarthysme à la française (voir également l’entreprise annoncée par le ministère revenant à ficher les universitaires sous couvert d’ « enquête nationale sur l’antisémitisme  dans l’enseignement supérieur et la recherche ») posera une chape de plomb sur la recherche et la vie intellectuelle. Le risque est alors de réduire les universitaires et les chercheurs à des agents d’une propagande d’État.

Signataires

Cette tribune dépasse désormais les 1500 signatures. Seules les 800 premières figurent ici. Pour une liste à jour, consulter la version publiée par le site de l’Union Juive Française pour la Paix ; elle est par ailleurs toujours ouverte à signature ; pour signer, envoyez un mail à soutienthery@gmail.com

* : personnalité politique

Signatures individuelles

Géraldine A Tagi

Samy Abbes, Mathématicien, MCF, Université Paris Cité

Kamil Abderrahman

Pierre Abécassis, Médecin, membre de l’Union juive française pour la paix

* Nadège Abomangoli, Première vice-présidente de l’Assemblée nationale

Albert Achten, Ingénieur

Éloïse Adde, Associate Professor, Historienne

Bernard Aghina

Najat Aguidi, écrivain

Sara Angeli Aguiton, Chargée de recherche CNRS, PHEEAC, Université des Antilles

Bérénice Alaterre

Michel Albagnac

Pierre Albertini, Historien, professeur de khâgne 

Gérard Alegre, Illustrateur

Gadi Algazi, Historien, Dept of History, Tel Aviv University 

Benjamn Alison

Eric Alliez, Philosophe, Professeur, Université Paris 8

Matthieu Allingri, Maître de conférences en histoire médiévale, université d’Aix-Marseille

Sarah Al-Matary, Professeur des Universités, Lettres, Le Havre

Tuna Altınel, MCF en Mathématiques, Université Lyon 1

Bruno Alonso, CNRS, Montpellier

Sabia Amar

* Gabriel Amard, Député du Rhône

Anne-Laure Amilhat Szary, Université Grenoble Alpes

Daniel Amoros

* Farida Amrani, Députée de l’Essonne

Aurélie Dianara Andry, Historienne

Jean-Christophe Angaut, Maître de conférences de philosophie, École Normale Supérieure de Lyon

Celine Aranjo, infirmière 

Fabien Archambault, Historien, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne

Fanette Arnaud, Médiatrice

Alain Arnaudet

Mathieu Arnoux, Historien, Professeur à l’université Paris Cité

Isabelle d’Artagnan, Présidente de l’IRELP, Historienne associée à Sorbonne Université

Florent Arthaud, OFB – USMB – INRAE

* Raphaël Arnault, Député du Vaucluse

Loïc Artiaga, Professeur en histoire contemporaine, Université de Pau

Jean Asselmeyer, Réalisateur

Simon Assoun, militant décolonial

Agnès Astrup

Marie-Andrée Auclair, retraitée Éducation Nationale

Samuel Autexier, Éditeur, Forcalquier

Azadî

Igor Babou, Professeur à l’université Paris Cité

Danielle Bailly-Salins, Enseignante retraitée

Christophe Baixas, Ingénieur Architecte dans l’industrie navale

Viviane Baladier, Mathématicienne, Directrice de recherches au CNRS à la retraite

Étienne Balibar, Philosophe

Bernard Barthalay, Économiste, Enseignant-chercheur à la retraite

Marie-Joëlle Barthuet, retraitée

Vincent Basabe

Isabelle Beaurepaire, Professeur

Jean-Luc Becquaert, Retraité, Syndicaliste, Tarn-et-Garonne

François Bégaudeau, écrivain

Gabriel Bellego, étudiant

Marina Belney-Ruiz

Leïla Benabed, Travailleuse sociale

Malika Benarab Attou, Ex-Eurodéputée

Yazid Ben Hounet, Anthropologue, Chargé de recherche-HDR CNRS, Lab. d’Anthropologie Sociale

Maxime Benatouil, Militant à Tsedek !, enseignant 

Omar Benderra, Économiste, membre d’Algeria Watch

Laila Benderra, Pédiatre

Yassir Benhima, Professeur, Université Lyon 2

Christian Benedetti, Acteur et metteur en scène

Christophe Benoit, professeur agrégé d histoire

Fabrice Bensimon, Sorbonne Université

Souad BENT-ABBES, chargée d’études au MEN

Badis BENYAHIA, Chef d’établissement scolaire public retraité

Philippe Bérard, Ingénieur

Bertrand Berche, EC, Université de Lorraine

Daniel Beretz, Retraité recherche publique

Jean Berger, enseignant et Historien

Judith Bernard, Enseignante

Noël Bernard, MCF Mathématiques retraité, poète.

Bertand Bernier, Chargé de production

Eric Berr, Économiste, Université de Bordeaux

Nathalie Berriau

Vincent Berthelier, MCF Lettres, Université Paris Cité

Arno Bertina, écrivain

Antoine Bertrand, Attaché de presse indépendant

Florian Besson

Philippe Besson

Magali Bessone, Professeure de philosophie politique, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 

Lorenzo Bianchi, Cinéaste, Producteur, Enseignant à l’Université Gustave Eiffel

Giuseppe Bianco, Philosophe, maitre de conférences à l’Université Ca’ Foscari de Venise 

Gaëlle Bidan, directrice des Éditions de l’Atelier

Alain Bihel, journaliste

Alain Bihr, Sociologue, Professeur honoraire, Université de Bourgogne Franche-Comté

Sylvain Billot, statisticien économiste

Bertrand Binoche, Professeur émérite, Université Paris I Panthéon-Sorbonne

Antonia Birnbaum, Professeure de philosophie, Université Paris 8

Daphné Bitchatch, artiste peintre, auteure

Magali Bizot, écrivain occitan, enseignante retraitée

Julien Blanc, Anthropologue, Maitre de Conférences du Muséum National d’Histoire Naturelle

Max Blechman, Directeur de programme, Collège International de Philosophie

Alexia Blin, MCF en Histoire des États-Unis, Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3

Étienne Bloc, Scénariste

Suzette Bloch, petite fille de Marc Bloch, ancienne journaliste à l’AFP

Erick Boiron, Ancien étudiant à l’Univ. Lyon 2

Livio Boni, psychanalyse, ancien dir. de programme au Collège international de philosophie

Christophe Bonneuil, Historien, DR CNRS

Arminé Boranian 

Rachele Borghi, Sorbonne Université

Sylviane Borie, Retraitée

Yannick Bosc, Historien, Université de Rouen Normandie

Véronique Bontemps, Anthropologue, CR CNRS, IRIS

Najla Bouakline, Normalienne, étudiante en Histoire Médiévale, ENS de Lyon

Saïd Bouamama, Sociologue 

Abdel. H. Boudoukha, Pr. Psychologie clinique,  Psychopathologie et Psychothérapie

Fadila Boucherak 

Jean-Christophe Boucly, Professeur de lettres modernes en lycée, docteur de l’École Pratique des Hautes Études

Sylvie Bouffartigue, Professeure des universités, études culturelles latino-américanistes et caribéennes. UVSQ-Paris Saclay.

Jean-Claude Bourdin, Professeur émérite de philosophie à l’Université de Poitiers

Vincent Bourdin, Ingénieur de recherches, CNRS – GeePs – Centrale – Supélec

Jérôme Boutin, gestionnaire de contrat de prévoyance

Boris Bove, Professeur d’Histoire médiévale, Université de Rouen Normandie

Gérard Bras, Philosophe, ancien professeur de classes préparatoire

Rony Brauman, Ancien président de Médecins sans frontières

Mark Bray, Assistant Teaching Professor, History Department, Rutgers University-New Brunswick

Jean Paul Brenelin, Chef d’entreprise, militant assiciatif

Thierry Brésillon, journaliste

Iléna Briday, Étudiante

Charlotte Brives, Directrice de Recherche CNRS, Anthropologue

Déborah V. Brosteaux, Chercheuse et enseignante à l’Université Libre de Bruxelles

Michel Broué, Mathématicien, professeur émérite à l’Université Paris Cité

Guy Bruit

Anne Brunswic, Journaliste et écrivaine

Déborah Bucchi, Université de Lorraine

Sebastian Budgen, Éditeur

Emmanuel Burdeau, Critique

Pascal Buresi, Historien, Directeur de Recherche CNRS

Julien Bugli

Laurence Burger, enseignante dans le secondaire

* Pierre-Yves Cadalen, député du Finistère

Séverine Cadier, artiste

Michel Calvès, retraité SNCF, syndicaliste

Monique Calvi

Pascale Camuset, citoyenne

Daniel Candas

Viviane Candas, cinéaste

Marco Candore, comédien, auteur

François Cansell, Professeur des universités, Bordeaux INP

Rémy Cardinal, Artiste musicien, militant Réseau salariat 

*Aymeric Caron, Député

Damien Carraz, Historien, Professeur à l’Université de Toulouse Jean-Jaurès

Lucette Castarlenas

Thierry Caruana, instituteur retraité

Arthur Casas, ENS Lyon

Irène Catach, Directrice de recherches émérite au CNRS

Simonetta Cerrini, Historienne

Myriam Chaabane

Gaëtane Chammas-Breysse, étudiante

Alexis Charansonnet, Historien à la retraite, Université Lumière Lyon 2

Marc Chavassieux 

Catherine Chavichvily, Collectif Palestine 69

Christine Charretton, Maîtresse de Conférences Honoraire

Denis Chartier, Géographe, Professeur des universités à l’Université Paris Cité

Francis Chateauraynaud, Sociologue, Directeur d’études à l’EHESS

Claire Chatelain, Chargée de recherches, habilitée,CNRS, Centre R. Mousnier/Sorbonne Université

Estelle Chauvey, IDE en hôpital psychiatrique

Sébastien Chauvin, Sociologue, Université de Lausanne

Sylvie Chazalette

Jean-François Chazerans, Professeur de philosophie

Farah Cherif Zahar, Maîtresse de conférences, Université Paris 8

Jean-Jacques Cheval, Professeur émérite des Universités, Université Bordeaux Montaigne

Sylvie Chevallier

Lucien Chich

Jacques Chiffoleau, Historien

Lounes Chiki, DR1 CNRS, Évolution et diversité biologique, UMR5300, Toulouse, UT3

* Sophia Chikirou, députée de Paris

Yves Chilliard, chercheur INRAE retraité

Mona Chollet, journaliste, essayiste

Guillaume Cingal, Maître de conférences en littératures africaines et traducteur.

Jocelyne Clavelloux

Jean-François Clopeau, Retraité de l’enseignement

* Hadrien Clouet, député de la Haute-Garonne

Isabelle Cochelin, Historienne, Université de Toronto

Deborah Cohen, MCF, histoire, Université de Rouen

James Cohen, Sciences politiques, Professeur émérite, Sorbonne Nouvelle

Sandra Cohuet, Médecin 

Chrystel Colomb, professeure de lettres modernes, retraitée

Sonia Combe, historienne, Berlin

Marie-Hélène Congourdeau, Historienne 

Pascal Connan, Instituteur retraité

Marie Constant, Pair aidante familiale

Anne Coppel, sociologue

Natacha Coquery, Historienne, Professeure émérite à l’université Lumière Lyon 2

Laurent Cordonnier, économiste, Professeur à l’Université de Lille

Jonathan Cornillon, Maître de conférences en Histoire romaine, Sorbonne Université

Christophe Cornut, CR / CNRS en Mathématiques

Bryan Cosman

Marie Cosnay, écrivaine

Christian Coudène, Professeur de Sciences Economiques et Sociales

Céline Coudreau

*Jean-François Coulomme, Député de la Savoie

Magali Coumert, Professeure d’Histoire, Université de Tours

Julien Cranskens, Libraire

 Julien Crépieux, Artiste

Alexis Cukier, Maître de conférences en philosophie, Université de Poitiers

Benoit Cursente, Dir. de recherche CNRS retraité- UMR FRAMESPA, Université Jean Jaurès Toulouse

André Curtillat

François Cusset, Historien

Thomas Cuvelier, Doctorant en Sociologie, Université de Paris 8 Vincennes Saint Denis

Philippe Cuziol

Xavier Czapla, Comédien et metteur en scène

Jeanne Da Col Richert, Strasbourg

Maxime Da Silva, Co-Président du Réseau national des élu·es insoumis·es et citoyen·nes

Nicolas Da Silva, Économiste

Ahmed Dahmani, militant des droits humains

Jocelyne Dakhlia, historienne et anthropologue

Marie-Émilie Dalby, Libraire

Olivia Martina Dalla Torre, PhD

Anne Dauphiné

Sonia Dayan Herzbrun, Professeur émérite, Université Paris Cité

Hélène Débax, Professeur d’histoire médiévale, Université Toulouse 2 Jean-Jaurès

Régine Dejour, Professeur d’EPS, retraitée

Yann Dejugnat, Maître de conférences, Historien, Université Bordeaux Montaigne

Christian Delacroix, Historien

Alexis Delahaye, réalisateur

Frédéric Delarue, Docteur en histoire contemporaine

Sameh Dellaï, MCF

Irène Delorme, Étudiante 

Guillaume Delteil, Professeur agrégé d’Histoire, Montpellier 

Camille Deltombe, Éditrice

Thomas Deltombe, Éditeur

Marc Demyttenaere, retraité

Laurent Denave, Chercheur indépendant en sciences sociales

Camille Descombes, Professeur des écoles dans les Alpes-de-Haute-Provence

Vinciane Despret, Philosophe, Professeur associé émérite, Université de Liège

Pierre-Marie Dessaint, retraité

Rosa Maria Dessi, Historienne, Professeur, Université de Nice

Yveline Dévérin, MCF géographie, retraitée Université Toulouse 2

Issahnane Djamal, Militant antiraciste, syndicat  Solidaires.

Adrien Delespierre, MCF de sociologie,Université de Tours

Emmanuel Deragne

Karima Direche, Historienne, directrice de recherche CNRS

Sophie Djigo, Philosophe, directrice de recherche au Collège international de Philosophie

Alain Dontaine, retraité Université Grenoble Alpes, enseignant en géopolitique 

Françoise Doray, Professeure d’Histoire retraitée

Charles Doron, Retraité

Coline Dottin, étudiante de l’ENS de Lyon

Yann Dourdet, Enseignant en Philosophie

Ariane Dreyfus, poète

Bruno Drweski, Professeur d’université, responsable de la Commission internationale de l’Union pour la Reconstruction Communiste.

Quentin Dubois, Doctorant et enseignant vacataire. Département de philosophie Paris 8

Nicolas Duffour, Journaliste 

Yoann Dumel-Vaillot, Docteur en philosophie, Université Lyon III

Stéphane Dumouchy, syndicaliste, SUD PTT

Olivier Dumoulin, historien, Professeur des Universités

Dominique Dupart, MCF Littérature française, Lille

Alexandre Dupont, MCF en histoire contemporaine, Université de Strasbourg

Laure Dupuis, Éducatrice spécialisée 

Cédric Durand, Professeur Associé d’Économie Politique, Université de Genève

Marie Duret-Pujol, MCF d’Études Théâtrales, Université Bordeaux Montaigne

Vincent Édin, Journaliste et esssayiste

Ivar Ekeland, ancien Président de l’Université Paris-Dauphine

Ilias El Faris – Scénariste, réalisateur 

Lina El Soufi, Doctorante en sociologie

Jean-Christophe Eon, écrivain

Camille Escudero, libraire

Frédéric Espi, militant insoumis

Marine Etchecopar, Libraire

Sylvain Excoffon, Maître de Conférences, Université Jean Monnet, Saint-Etienne

Isabelle Fakra

Jules Falquet, Professeure, Université Paris 8 St Denis

Marie Fare, Maitresse de Conférences en Économie, Université Lyon 2

Pierre Fargeton, Enseignant-chercheur, Musicologie, Université Jean-Monnet

Éric Fassin, Sociologue, Professeur à l’Université Paris 8 Saint-Denis

Sonia Fayman, porte-parole de l’Union Juive Française pour la Paix

Georges Yoram Federmann, Psychiatre Gymnopédiste, Strasbourg

* Mathilde Feld, députée de la Gironde

Mohamed Chérif FERJANI, Professeur Honoraire Université Lyon2, Président du Haut Conseil Scientifique de Timbuktu Institute, African Center for Peace Studies

Mathieu Ferradou, MCF en Histoire Moderne, Université Paris Nanterre

Elvire Ferrand Testoni, Éducatrice

Jérémy Ferrer, Bron

Olivier Filleule, Dir. de recherches au CNRS, Prof. ordinaire en sc. pol. à l’Université de Lausanne

Aline Fintz, Ingénieure d’étude, Univ. de Savoie Mont Blanc

Karin Fischer, Professeure des Universités en études irlandaises et britanniques, Université d’Orléans

Virginie Foloppe, Sorbonne Nouvelle

Jacques Fontaine, MCF honoraire de Géographie, Université de Besançon

Arnaud Fossier, Historien, MCF Université de Bourgogne

Maryline Fouché

Isabelle Fouquay, Professeure agrégée d’anglais retraitée

Benoît Fourchard, Écrivain

Françoise Fressonnet, anthropologue 

Bernard Friot, Économiste

Marie-Paule Fristot-Rousselot, retraitée de l’Éducation Nationale

Yves Fruchon, Humaniste, consultant retraité

Nora Galland, ATER, Université de Bretagne Occidentale

Davide Gallo Lassere, MCF en Politique Internationale, Université de Londres

Fanny Gallot, Historienne

Michelle Garcia, UJFP

Blanche Gardin, Humoriste, Actrice

Jocelyne Garnier

Julie Garnier, Historienne

Sébastien Garnier, MCF Paris 1

Isabelle Garo, Philosophe

Marina Garrisi, Éditrice

Aurore Gathérias, enseignante

Frank Gaudichaud, Professeur, Hist. et études latino-américaines à l’Univ. Toulouse Jean-Jaurès

Guillaume Gaudin, Professeur d’Histoire moderne, Université Toulouse Jean Jaurès

Jean-Luc Gautero, Maître de conférences émérite en Philosophie des sciences, Université Côte d’Azur

Florence Gauthier, Historienne de la Révolution française

Siegfried Gautier, enseignant

Xavier Gautier

Marylène Gauvin

Andrée Gaye, Retraitée Éducation nationale

Vincent Gayon, Universitaire

David Geoffroy, Auteur – réalisateur 

Sylvain George, Cinéaste

Christakis Georgiou, MCF contractuel, Institut d’Études Européennes, Université Sorbonne Nouvelle

Isabelle Gérard, Enseignante retraitée

Valérie Gérard, professeure de philosophie en CPGE

Catherine Ghidaoui

Pascale Gillot, MCF-HDR en philosophie, Université de Tours

Carlo Ginzburg, Historien

Marc Girod, retraité 

Éric Gobe, politiste, directeur de recherche au CNRS

Jean-Christophe Goddard, Professeur des Universités, Université de Toulouse 2 Jean Jaurès

François Godicheau, Historien, Professeur à l’Université de Toulouse Jean-Jaurès

Catherine Goldstein, DRCE émérite, Histoire des sciences mathématiques

Lionel Goutelle, retraité de l’éducation nationale

Isabelle Goutmann, directrice d’un média local & indépendant

Massimo Granata, Ingénieur de recherche CNRS

Corinne Grassi, chargée de projets socio-culturelle

Jordi Grau, Citoyen et Professeur de philosophie

Jean-Guy Greilsamer

Patrice Grevet, Professeur honoraire de sciences économiques à l’Université de Lille

Haud Guéguen, 

Nacira Guénif, Professeure des Universités, Université Paris 8 Vincennes – Saint-Denis, LEGS

* Clémence Guetté, Vice-présidente de l’Assemblée nationale

Claude Guilbaud, Enseignant retraité

Mourad Guichard, Journaliste indépendant

Georges Günther, militant associatif

Patrick Guyot Bitchatch, ancien administrateur de l’État dans les ministères sociaux

Emilie Hache, Maîtresse de conférences HDR 

Olivier Hache

Gérard Haddad, Psychiatre, Psychanalyste, Écrivain

Rachid Hadjij, Consultant

Jean-Louis Haguenauer, pianiste, Professor Emeritus, Indiana University Jacobs School of Music

Ouassim Hamzaoui, MCF Science politique, Avignon Université

Sari Hanafi, Prof. de Sociologie, American University of Beirut 

Colette Hasne, Doctorante

Fabrice Hauet, masseur bien-être

Clémence Hébert, Cinéaste

Xavier Hélary, Historien, Professeur, Sorbonne-Université

Frédéric Hélein, Professeur (Mathématiques), Université Paris Cité

Annick Hemon, Chanteuse Comédienne 

Antoine Hennion, École des Mines, Paris

Odile Henry, Sociologue, Professeure à Paris 8

Nicolas Hensel, assistant d’enseignement artistique

Marie Hesse, enseignante

Thomas Hippler, Professeur d’Histoire contemporaine à l’Université de Caen Normandie

Géraldine Hornberg, membre de l’Union juive française pour la paix

François Houbart, Psychologue

Jean-Claude Houdry, artiste auteur 

Arnaud Houte, Professeur d’histoire contemporaine, Sorbonne université

Etienne Hubert, Historien, Directeur d’études retraité de l’EHESS

ANNE Huck, Enseignante

Quentin Humbert, étudiant ENS Lyon, étudiant du master Mondes médiévaux

Benoit Huou, enseignant à TSE, Université Toulouse Capitole

Cassandre Hypeau, Étudiante

Sébastien Ibanez, Enseignant-chercheur, Université Savoie Mont Blanc

Nicole Ion, éducatrice retraitée

Georges Jablonski-Sidéris, Maître de conférences en histoire médiévale, Sorbonne Université

Laure Jabrane, enseignante de philosophie, retraitée, membre de la CAALAP

Ronan Jacquin, chercheur, Institut de hautes études internationales et du développement (Genève)

Armand Jamme, Historien, Directeur de recherches au CNRS

Chantal Jaquet, Philosophe, Professeure émérite à l’université Paris 1 Panthéon -Sorbonne 

Ghislaine Jarrige, LFI Saint Etienne 

Jacques Jaudon, enseignant

Sylvain Jean, Enseignant

Anne Jollet, Maîtresse de conférences émérite en Histoire moderne

Philippe Josserand, Historien, Professeur, Université de Nantes

Pierre Yves Joubaud, Directeur d’usine 

Maïwenn Jouquand 

Emmanuelle Jourdan-Chartier, Enseignante en histoire, Université de Lille 

Nolwenn Joyaut , enseignante et scénographe

Alain Jugnon, Philosophe 

Cathy Jurado, Autrice, enseignante

Nicole Kahn, membre de l’Union juive française pour la paix

Yannis Karakos, Auteur et Parolier

Razmig Keucheyan, Professeur de Sociologie, Université Paris Cité

Khalil Khalsi, Chercheur

Anna Knight, traductrice

Aurore Koechlin, MCF de Sociologie à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Marianne VL Koplewicz, Éditions du Souffle

Théophile Kouamouo, Journaliste

Stathis Kouvelakis, Philosophe

Abir Kréfa, Maîtresse de Conférences en Sociologie, Université Lyon 2

Thierry Labica, MCF Civilisation britannique

* Abdelkader Lahmar, Député du Rhône

* Bastien Lachaud, Député de la Seine-Saint-Denis

Annie Lacroix-Riz, Professeur émérite d’hist.contemporaine, Paris-Cité, petite-fille de Benjamin Arbessman, déporté et assassiné à Auschwitz

Annie Lafarge, Militante LFI 

Danielle Lafont

Claire Lagraula 

* Maxime Laisney, Député LFI de Seine-et-Marne

Elisabeth Lalou, Professeur d’Histoire médiévale, Université de Rouen

Claire Lamy, MCF Histoire du Moyen âge, Sorbonne Université 

Emilie Lanciano, Professeur des Universités, Sciences de gestion, Université Lyon 2

Diego Landivar, Enseignant – Chercheur, HDR, Origens Media Lab et Esc Clermont

Hervé Langlois, militant à l’AFPS

Yann Lardeau, cinéaste.

Galatée de Larminat, Chercheuse indépendante en Philosophie et Journaliste

Ramdane Lasheb, membre associé LIAgE

Maurice Latapie

* Pierre Laurent, Sénateur Honoraire

Sabine Laurent, Enseignante retraitée 

Michel Lauwers, Historien, Professeur, Université de Nice

Christian Lavault, Professeur de Universités

Vincenzo Lavenia, Historien, Professeur d’hist. moderne, Univ. de Bologne, Italie

Cécile Lavergne, MCF en Philosophie université de Lille

Clément Lavis, étudiant

Isabella Lazzarini, Professeure d’Histoire médiévale, Université de Turin

Judith le Blanc, Maîtresse de conférences, Université de Rouen Normandie

Olivier Le Cour Grandmaison, Historien, politiste, universitaire

Anne Le Guennec, Libraire 

Joëlle Le Marec, Professeure, Muséum National d Histoire Naturelle

Vincent Le Texier, Artiste lyrique

Sébastien Lebonnois, Planétologue, Directeur de Recherche CNRS

Jean-Jacques Lecercle, Philosophe, Linguiste, Ancien Prof. à l’Univ. Nanterre 

Michelle Lecolle

Xavier Lecoq, Enseignant

Jérémy Lefebvre, Écrivain et Musicien 

Julien Lefevre, Photographe

* Sarah Legrain, députée de Paris

* Jérôme Legrave, député de Seine-Saint-Denis

Jean-Marc Lelièvre, CR INRAE

Yves Lemarié, Maître de conférences à l’Université de Bretagne Occidentale

Claire Lemercier, Directrice de recherche en histoire, CNRS

Benjamin Lemoine, Chercheur, CNRS

Jean-Michel Lemoine, ingénieur CNES

Clément Lenoble, Historien

François Lescure, ancien Professeur à l’Université de Lille

Didier Lestrade, co-fondateur d’Act Up-Paris

Laurent Lévy, Avocat à la retraite

Cathy Liminana-Dembélé

Pierre Linguanotto, Cinéaste

Thomas Lienhard, MCF en histoire, Université Panthéon-Sorbonne

Chantal Locatelli

Henri Lombardi, MC en Mathématiques, retraité, à l’Université Marie et Louis Pasteur

Élisabeth Longuenesse, Sociologue arabisante, CNRS (retraitée)

Frédérique Longuet Marx, Anthropologue, Cetobac, Ehess

Helios Lopez

Isabelle Lorand, Chirurgienne

Françoise Lorcerie, DRE science politique, Aix-Marseille Université

Yannick Louesdon, Psychanalyste retraité

Michael Lowy, Sociologue

Viviana Lipuma, Postdoctorante à UFF Brésil, Docteure en philosophie de l’Univ. Paris Nanterre 

Arnaud Le Gall, député du Val d’Oise

Katia Le Mentec, Anthropologue, chargée de recherche au CNRS

Frédéric Le Roux, Mathématicien, Professeur à Sorbonne Université

Frédéric Lordon, Philosophe

Jean-Pierre Loustau, Ingénieur

Sandra Lucbert, écrivaine

Marie-Christine Luparello, membre de la Libre Pensée 79 et du Collectif Palestine 79

Armelle Mabon, Historienne

Fanny Madeline, Historienne, MCF, Université Panthéon-Sorbonne

Marta Madero, Ancien professeur de l’Universidad de Buenos Aires et de l’Universidad Nacional de General Sarmiento 

Elisabeth Magnin

Eliana Magnani, Directrice de recherche au CNRS

Olivier Maheo, Enseignant 

Alain Maire, Retraité humaniste, écologiste et naturaliste

Guilaine Maisse, Professeure d’allemand retraitée

Ziad Majed, écrivain et Professeur, The American University of Paris.

Jean Malifaud, MCF retraité Mathématiques, Paris 7

Kamila Mamadnazarbekova, doctorante, Sorbonne Université 

Brigitte Mancel, Professeure de lettres retraitée

Marianne Mangeney, chercheuse au CNRS

Odile Mangeot, association Alliance pour l’Emancipation Sociale Nord Franche-Comté 

Philippe Mangeot, professeur de littérature 

Patrice Maniglier, Philosophe, Université Paris Nanterre

Danielle Manoukian, psychologue/psychanalyste

Cathy Maquart, Enseignante retraitée 

Olivier Marboeuf, Écrivain, Commissaire d’exposition, Producteur

Audrey Marc, Professeur

Joelle Marelli, traductrice, autrice

Ivan Marin, Professeur des Universités, Amiens

Anne-Marie Marteil-Oudrer Syndicat National des Médecins Hospitaliers FO

Céline Martin, Historienne, Maîtresse de conférences à l’Université Bordeaux Montaigne

Gilles Martin, médecin retraité

Miguel Martinez, Maître de Conférences en Mathématiques, Université Gustave Eiffel

Joseph Martinod, Professeur

Robert Mascarell, Journaliste en retraite

Geneviève Massard-Guilbaud, historienne, directrice d’études émérite à l’EHESS

Arnaud Massin, Doctorant à l’Université de Liège 

Isabelle Mathieu, MCF Histoire du Moyen Âge – VP Formation et vie universitaire, Université d’Angers

Mickaël Matusinski, MCF Maths Université de Bordeaux

Florence Mauger, enseignante 

Danielle Maurice, doctorante, Université Lyon 2

Jean-Yves Maximilien 

Annie Mayar-Poteau, Infirmière scolaire retraitée

Nicolas Mayard, Journaliste

Gérard Médioni

Maria-Alice Médioni, formatrice, militante pédagogique

Anne-Lise Mege

Miriem Méghaïzerou, Doctorante, Sorbonne Nouvelle

Eliane Meillier

Hacene Mekhnache

Graziella Melis Roussel

Marion Ménard, pair aidante TSA/TDAH

Marie Menaut

Sophie Mendelsohn, Psychanalyste

Franck Mercier, Historien, Professeur, Université de Rennes

François Mérel, Médecin retraité

Daniel Mermet, Journaliste

* Marie Mesmeur, Députée d’Ille et Vilaine

Germain Meulemans, Anthropologue, CR CNRS

Gilles Meyer, bibliothécaire

Najoua Mhamedi

Alain Migus, Citoyen retraité

Christophe Mileschi, Professeur, Université Paris Nanterre

Pierre Millien, Chargé de Recherche en mathématiques, CNRS

Virginie MilliotAnthropologue, Maitresse de conférences, Université Paris Nanterre

Chantal Mirail

Estelle Miramond, Maîtresse de conférences en sociologie – Institut Humanités Sciences Sociétés, Université Paris Cité

Adlene Mohammedi, Chercheur et enseignant en géopolitique

Jacques Moisan, Retraité de l’enseignement

Olga Moll, Agrégée, MCF musique et musicologie, Université Paris 8, retraitée

Frank Moll, Dirigeant d’entreprise

Sylvie Monchatre, Sociologue, Professeur, Université Lumière Lyon 2

Mathilde Monge, Maître de Conférences en Histoire Moderne 

Lucile Mons, Psychanalyste et psychologue

*Bénédicte Monville, Élue municipale et communautaire à Melun, ancienne Conseillère Régionale d’île de France 

René Monzat, Chercheur indépendant

José-Luis Moragues, Dr en Psychologie, Maître de Conférences – Université Paul Valéry

Nathalie Morales

Gérard Mordillat

Éric Moreau, Université de Poitiers

Leonardo Moreira, MCF Philosophie, Université de Paris 8

Anne Morelli, Professeure honoraire de l’ULB

Haude Morvan, MCF Histoire de l’art médiéval

Marianne Morvan, Professeure agrégée d’anglais, UFR Médecine

Aimée Mouchet retraitée de l’EN, agrégée d’histoire

Damase Mouralis, Professeur des Universités, Université de Rouen-Normandie & CNRS

Guillaume Mouralis, Historien, Directeur de recherche au CNRS, CESSP, Paris

Jean-Noël Moureau

Marie-Hélène Mourgues, Maitre de Conférence, UPEC

Bertrand Müller, Historien, DR émérite, CNRS (historien de Marc Bloch et Lucien Febvre)

Marwan NACIRI – Post-doctorant CNRS

Dominique Natanson, animateur du site Mémoire Juive & Éducation

Philippe Naud, Professeur certifié d’Histoire Géographie

Fabien Navarro, Maître de Conférences, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Ron Naiweld, Chargé de recherches en études juives, CNRS

Annliese Nef, Historienne, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Josselin Neveux, diffusion de supports de communication concerts

Kim Vu Ngoc, étudiant

Jean-Philippe Nicolas, enseignant

Brigitte Nicolet, retraitée

Massimiliano Nicoli, Psychanalyste, Philosophe

Dominique Noly, retraité

Yannick Nué

Norbert Nusbaum, Assistant social retraité à Besançon

Joseph Oesterlé, Professeur émérite, Sorbonne Université

Christophe Oberlin, Chirugien, professeur

Christian Oillic 

Josiane Olff-Nathan, Ingénieur d’Etude retraitée, Université de Strasbourg

Béatrice Orès, Union Juive Française pour la Paix

Martine Ostorero, Historienne, Professeur, Université de Lausanne

Nilton Ota, Directeur de programme du Collège international de Philosophie

Michel Ouaknine, Ingénieur semiconducteurs, militant MRAP & UJFP

Mohamed Ouerfelli, Maître de conférences en histoire médiévale, Université d’Aix-Marseille

Louis-Gilles Pairault, Conservateur en chef du Patrimoine, adhérent du parti Les Républicains

Ugo Palheta, Sociologue, Université de Lille

Julien Pallotta, Philosophe et traducteur

Stefano Palombarini, Économiste, MCF Paris 8

Luca Paltrinieri, Maître de conférences Philosophie, Université de Rennes

Bruno Paoli, Professeur des Universités, Université Lumière Lyon 2

Ilan Pappé, Historien israélien, Professeur à l’Université d’Exeter

Corentin Parent

Pierre Parent, Maître de conférence, Université de Bordeaux

Frédéric Pasquet

Christophe Pébarthe, Historien, Université Bordeaux Montaigne

Julien Peccoud, enseignant de SVT en lycée, éducation nationale

Thierry Pécout, Historien, Professeur à l’Université de Saint-Etienne

Francis Peduzzi, directeur de scène nationale

Rodny Pélage

Michele Pellegrini, Historien, Professore associato, Université de Sienne (Italie)

Willy Pelletier, Sociologue, université de Picardie

Fernand Peloux, historien, CNRS

Maëlle Pennéguès, Doctorante en histoire moderne, Sorbonne Université

Charles Pennequin, écrivain

Catherine Perret, Professeure émérite, Université Paris 8

Lucien Perrin, Éditions Amsterdam

Marc Perrin, Écrivain, Éditeur

Annick Peters-Custot, Professeure d’Histoire médiévale, Nantes Université

Jean-François Pétillot, PRCE, Université Paul-Valéry Montpellier, retraité

Thomas Petitbon, Union Juive Française pour la Paix & France Insoumise

Nathalie Peyre, Prof de lettres

Roland Pfeffenkorn, Sociologie, Professeur émérite, Strasbourg

MICHEL Philippo, Coordinateur livret planification écologique

Emmanuelle Picard, Professeure d’histoire contemporaine, ENS de Lyon

Caecilia Pieri, PhD Associate Researcher, Ifpo Institut français du Proche-Orient, Erbil, Kurdistan irakien

Alexandre Piettre, Docteur en Sociologie politique et Professeur de Philosophie

Laure Piguet, Historienne, Université de Fribourg/Centre Marc Bloch

Brigitte Pignard

Philippe Pignarre, éditeur 

Michel Pinault, Historien, retraité

Jean-Daniel Piquet, Historien

Marie Plassart, maîtresse de conférences, Université Lyon 2

Jacques Pochard, Pédiatre

Christopher Pollmann, Prof. des Universités agrégé de Droit public, Université de Lorraine – Metz

Hugues Poltier, philosophe

Jean-Pierre Poly, ex-professeur, Histoire du droit, Université Paris-Nanterre

Julien Ponceblanc, Professeur de Français et d’Histoire & Géographie, CFA Hilaire de Chardonnet à Besançon

Alan Popelard, Enseignant

François Portefaix, retraité de l’éducation nationale

Raphaël Porteilla, Professeur de sciences politiques, Université de Bourgogne

* Thomas Portes, député de Seine-Saint-Denis

Elio Possoz, écrivain

Clément Poullet, Secrétaire général de la FNEC FP-FO Angers

Franck Poupeau, sociologue, DR CNRS, éditions Raisons d’agir.

* Philippe Poutou, militant NPA

Sébastien POYARD, Professeur agrégé d’Histoire-Géographie, Vesoul

Plínio W. PRADO Jr, Professeur émérite de Philosophie, Université de Paris 8

Renée Prangé, Directeur de recherches CNRS retraitée

Stefanie Prezioso, Historienne, Suisse

Nicolas Prignot, Enseignant et chercheur en philosophie, ERG/ ESA St-Luc, Bruxelles

Klervi Propice, Doctorante en psychologie

François Provansal

* Loïc Prud’homme, député de la Gironde

Serge Quadruppani, auteur et traducteur

Christelle Rabier, MCF EHESS

Geneviève Rail, Ph.D., Professeure émérite distinguée, Institut Simone-De Beauvoir, Canada

François Ralle Andreoli,conseiller des Français-es d’Espagne – 2e circonscription d’Espagne

 Nordine Raymond, tête de liste « Faire Mieux pour Bordeaux », La France insoumise

Antoine de Raymond, Sociologue

Eva RAYNAL, Maîtresse de conférences en Littérature comparée, Université de Mayotte, Dembéni

Isabelle Réal, Historienne, MCF, Université de Toulouse Jean-Jaurès

Thierry Reboud, UJFP

Gianfranco REBUCINI, anthropologue, Chargé de recherche au CNRS

Fanny Rebuffat, Psychiatre

Manuel Rebuschi, Enseignant-chercheur en Philosophie, Université de Lorraine

Myrto Reiss, Médiatrice culturelle 

Yannick Reix, Directeur festival de cinéma de Douarnenez 

Mathieu Renault, Philosophe, Professeur à l’Univ. de Toulouse Jean-Jaurès

Jean-Paul Renoux

Eugenio Renzi, Enseignant

Jordan Rezgui, pensionnaire de la Comédie-Française

Nassim Rezzoug

Fabrice Riceputi, Historien

Mathieu Rigouste, Sociologue

Laurent Ripart, Historien, Professeur à l’Univ. de Chambéry

Manu Riquier

Nathalie Rivoire

Agathe Roby, docteure en histoire médiévale, toulouse

Odile Rollet, Pédopsychiatre, Lyon

Françoise Romand, Cinéaste

Isabelle Rosé, Historienne, Professeur, Université de Rennes

André Rosevègue, membre de l’Union juive française pour la paix et de la CAALAP

André Rougier, blagueur 

Marie-Jeanne Royer enseignante retraitée 

Jérémy Rubenstein, Historien 

Damien Ruiz, Historien

Catherine Ruph

Alain Ruscio, Historien

Alain Rustenholz, Auteur

Gabriel Sabbagh, Professeur de logique mathématique (retraité) et Historien en activité, Université Paris Cité

Oreste Sacchelli, Professeur émérite, Université de Lorraine

* Arnaud Saint-Martin, député de la Seine-et-Marne

Marie-Claude Saliceti, psychologue clinicienne en retraite

Grégory Salle, sociologue, Directeur de Recherche CNRS.

Jean Salque, Cadre de la Fonction publique retraité

Victoria Saltarelli, retraitée de l’Éducation nationale

Akiko Sameshima, Traductrice pour La fabrique, Japon

Emilia Sanabria, Anthropologue, Directrice de recherche au CNRS

Alexandre Sanchez, éditrice

Thibault Sans, salarié du Média

Renaud-Selim Sanli, Éditions-librairie Météores

Jérôme Santolini, Directeur de Recherche, Biochimie

Ismahen Saouci 

Catherine Sauvage

Pierre Sauve, Professeur retraité de l’université Paris 12

Sbeih Sbeih, ATER, Lyon 2, chercheur associé Iremam

Dimitris Scarpalezos, retraité M.C de mathematiques et membre du snesup 

Valentin Schaepelynck, Maître de conférences en sciences de l’éducation (Université Paris 8), Directeur de programme au Collège international de philosophie.

Matthieu Scherman, historien

Jean-Marc Schiappa, Historien, Prix Guizot de l’Académie française (2023)

Nathalie Schlatter-Milon, Psychologue Clinicienne

Alain Schnapp, archéologue, Ancien professeur à l’Univ. Panthéon-Sorbonne

Joël Schnapp, Enseignant, Historien

Raphaël Schneider, Co-fondateur de Hors-Série

Peter Schöttler, Directeur de recherche honoraire au CNRS (biographe de Marc Bloch) 

Tod Shepard, Historien, Professeur, John Hopkins University

Guillaume Sibertin-Blanc, Philosophe, Professeur à l’Univ. Paris 8

Bernard Sibieude, Retraité, Strasbourg

Michèle Sibony, Union juive française pour la paix

Aude Signoles, MCF Sciences Po, AMU MESOPOLHIS

Stéphane Simard-Fernandez  Réseau Salariat

Yves Sintomer, Professeur de Science politique, Université de Paris 8

Stéphane Sirot, Historien

Tahar Si Serir, membre du mouvement “Les Humanistes”, co-fondateur du collectif “Libérons l’Algérie’”

Jean-Claude Slyper

Jérôme Soldeville, conseiller municipal délégué Grenoble

Gabriela Solis, Collectif 69 Palestine

Jon Solomon, Professeur en littérature chinoise, Université Lyon 3

Marco Spagnuolo, Doctorant, Université Paris 8/LLCP

Cornelie Statius Muller, Comédienne et metteure en scène, marionnettiste et machiniste

Isabelle Stengers, Philosophe, Professeur émérite de l’Université Libre de Bruxelles

Mélanie Stravato, Editrice à Avignon

Alina Surubaru, Sociologue, Université de Bordeaux

Annick Suzor-Weiner, Professeure émérite Université Paris-Saclay

Julien Syren, Ingénieur 

Stéphane Tabourin, Professeur des écoles, en REP+, conseiller syndical FSU-SNUipp54, militant LFI, militant associatif

Claire Talon, Psychanalyste, Docteure en Sociologie Politique

Julien Talpin, Directeur de recherche au CNRS

Moufida Tamou, Parente d’étudiants

Cécile Tannier, Directrice de recherche CNRS

*Andrée Taurinya, Députée de la Loire

Romain Telliez, MCF histoire, Sorbonne Université

Laurence Terk, Historienne

Anne Texier, Professeure de Philosophie

Pierre Thévenin Chargé de recherche au CNRS

Daniel Thin, Sociologue, Professeur Honoraire des Universités (Lyon 3)

Charlotte Thomas, Politiste, Chercheure indépendante associée au programme Asie de l’IRIS 

François Thoreau, Chercheur qualifié et Professeur associé, FNRS – Université de Liège (Belgique)

Mirabelle Thouvenot, militante décoloniale 

Hervé Tiberghien, Auteur, réalisateur de films documentaires

Mathieu Tilllier, Professeur d’Histoire de l’Islam médiéval, Sorbonne Université

Sylvie Tissot, Professeure au département de science politique, Université Paris 8

John Tolan, Historien, Professeur à l’Université de Nantes

Valentina Toneatto, Historienne 

Armando Torres Fauaz, Historien, Universidad Nacional de Costa Rica

Rémi Toulouse, Éditeur

Mireille Touzery Le Chenadec, Professeur émérite d’Histoire moderne, UPEC

Enzo Traverso, Historien, Cornel University (États-Unis)

Brigitte Trincard Tahhan, Retraitée éducation nationale 

Alessia Trivellone, Historienne, Université de Montpellier 3

Véronique Troyas

Françoise de Turckheim, Médecin

Jean-Christophe TURPIN

Martine Ullmann, Femmes en Noir Lyon, UJFP

Sébastien Ulrich, Menuisier

Maude Vadot, Maitresse de conf. en sciences du langage, Univ. Savoie Mont Blanc

Stanley Valbrun, Docteur en Sciences de l’éducation, travailleur social

Massimo Vallerani, Professore ordinario di Storia medievale, Université de Turin (Italie)

Stéphane Valter, Professeur en langues et civ. Arabes, Univ. Lyon 2

Yves Vargas, Philosophe

Amandine Vautaret, étudiante

Mélanie Vay, Docteure en Science politique

Graziella Vella, Anthropologue, U Mons

Manolo Vella, Enseignant

Anne Verjus, DR CNRS, laboratoire Triangle

Françoise Vergès, Autrice, militante féministe décoloniale

Joël Vernet, Écrivain

Jean-Baptiste Vérot, MCF en Histoire moderne, Université Marie & Louis Pasteur

Victor Verwaerde, étudiant, ENS de Lyon

Thomas Vescovi, Doctorant (Ehess/ULB)

Baptiste Veyssy, Éditeur

Camille Viallon

Jérôme Vidal, Éditeur, traducteur

Nicolas Vieillescazes, Éditeur

Fanny Vincent, MCF à l’Université de Saint-Etienne.

Léonard Vincent, Écrivain

Gilles Vinçon, Chercheur en Entomologie

Christiane Vollaire, Philosophe, Chercheure associée au CNAM et au LCSP de l’Université Paris Cité Fellow de l’Institut Convergences Migrations

Eric Vuoso

Dror Warschawski, Chercheur CNRS, Sorbonne Université, Paris

Jean-Marc Warszawski, musicologue, directeur du magazine musicologie.org

Abdourahman Waberi, écrivain

Tim Wandriesse 

Laurent De Wangen, enseignant

Laurent Weill, Médecin retraité, LFI, UJFP

Françoise Weill-Ponsin, Médecin retraitée, LFI, UJFP

Charles Wolfe, Professeur des Universités, Dépt de Philosophie, Université Toulouse Jean-Jaurès 

Yahya Yachaoui, Professeur retraité, Poète, Écrivain, Traducteur

Hèla Yousfi, Maître de conférences, Université PSL-Dauphine

Louisa Yousfi, Autrice, militante décoloniale

Nassera Zaidi, Coordinatrice du CNRCC (collectif national pour la reconnaissance des crimes coloniaux)

Barbara Zauli, Enseignante-chercheuse, Philosophie, Université Paris 8, vice-présidente du Collège International de Philosophie.

Mathilde Zederman, MCF Université Paris-Nanterre

Caroline Zekri, MCF, Université Paris-Est Créteil

Afifa Zenati IGE, ENS de Lyon

Laurick Zerbini, MCF – HDR, Université Lyon 2

Dominique Ziegler, Auteur, Metteur en scène

Alexis Zimmer, Professeur, Histoire environnementale, Université de Liège (Belgique).

Institutions :

CAALAP (Coordination Antifasciste pour l’Affirmation des Libertés Académiques et Pédagogiques)

Collectif 69 Palestine

Collectif Education Avec Gaza 

Éditions La Fabrique

Éditions Terre de feu

FNEC FP-FO Angers

La France Insoumise

Librairie La Gryffe, Lyon

Librairie Les 400 Coups, Bordeaux

Institut La Boétie

Union Juive Française pour la Paix

27.11.2025 à 15:31

Malcolm X à l’épreuve du cinéma hollywoodien

Nathan RENEAUD

Quand Spike Lee fait sienne la figure mythique de Malcolm X, la lettre qui aura servi de patronyme au leader prophétique a été phagocytée par le Capital : le « X » révolutionnaire des Black Muslims figure sur des bonnets, casquettes, T-shirts mais aussi, comme le rappelle le théologien James H. Cone, sur des « cadrans de montres, […]
Texte intégral (8146 mots)

Quand Spike Lee fait sienne la figure mythique de Malcolm X, la lettre qui aura servi de patronyme au leader prophétique a été phagocytée par le Capital : le « X » révolutionnaire des Black Muslims figure sur des bonnets, casquettes, T-shirts mais aussi, comme le rappelle le théologien James H. Cone, sur des « cadrans de montres, ventilateurs, réfrigérateurs et cartes à jouer ». Lee envisagera lui aussi de tirer profit de cette récupération en développant un merchandising autour du film, tout comme il n’aura pas hésité à lancer un commerce à son effigie, la boutique Spike’s Joint, toujours en activité.

Le réalisateur a le sens des affaires, c’est le moins qu’on puisse dire. Sa place de maître d’oeuvre du biopic Malcolm X, il l’aura gagnée en ruant dans les brancards, hurlant au tout Hollywood qu’il est le mieux placé pour mettre en scène le parcours du porte-parole charismatique de la Nation of Islam. Il a le capital symbolique pour en imposer. Il ne peste pas en outsider. Lee s’accommode d’ailleurs parfaitement du système : « there’s nothing like it in the world ! »1 a-t-il déclaré. Son « coup » ne déstabilise pas l’industrie qui y voit, après tout, l’opportunité de s’adresser à un public plus large – et tant mieux. Le canadien Norman Jewison, premier choix de la Warner pour tourner Malcolm X, se retire.

Loin de la classe ouvrière

Pour le réalisateur de Do the Right Thing, aucun blanc n’est assez « sensible » pour servir la cause. On tient là l’une des fameuses sorties de « premier concerné » de Lee, ce produit de l’élite sociale déguisé en homme de la rue, ce revendeur de militantisme didactique qui fait la leçon sur qui peut ou ne peut pas prendre en charge la blackness à l’écran. Sait-il que l’un des films préférés de Malcolm X est réalisé par Michael Roemer, un cinéaste allemand, juif, exilé aux États-Unis ? Son superbe Nothing but a man représente la classe ouvrière noire comme Spike Lee ne l’a encore jamais fait.

Il est tentant de spéculer sur les raisons de l’engouement de Malcolm : une romance entre un cheminot et une enseignante afro-américains (loin, donc, de l’horizon libéral-progressiste de l’amour interracial), une intrigue qui se construit autour de la question de la dignité, un regard aiguisé sur les disparités entre Noirs prolétaires et Noirs embourgeoisés, conservateurs, chrétiens, en cheville avec des blancs voulant maintenir le statu quo racial – ces « Oncle Tom » que Malcolm avait en horreur ! En 1964, une telle fibre marxiste ne pouvait s’exprimer que depuis les marges du cinéma indépendant. Si Lee vient de cette frange, il ne lui aura pas appartenu longtemps. 

Une servilité au canon hollywoodien

L’ouverture de Malcolm X est éloquente. Spike Lee, qui a pris l’habitude de jouer dans ses films, est le premier à apparaître à l’écran. On aurait pu s’attendre à ce que sa star, Denzel Washington, le précède. Quand on le découvre, Lee se fait cirer les pompes : il est clair, à travers ce premier plan, que c’est lui qui mène la danse et donne le tempo. L’ample mouvement d’appareil qui nous mène à lui ne reprend que lorsqu’il quitte son jeune shoeshiner pour traverser une grande artère de Boston, haut en couleurs, sapé comme un zoot (zazou, une mode à laquelle le jeune Malcolm sacrifie dans les années 1940). On peut se pâmer devant le lustre de ce plan-séquence. On peut aussi dire qu’il annonce une servilité au canon hollywoodien. Ici, la « vie de réinventions »2 de Malcolm est indexée sur l’histoire du cinéma américain. Un temps fort est associé à un genre. La jeunesse de « Detroit Red », noceur, dealer et cambrioleur, a le côté flamboyant du musical des années 1940-50 ; son Purgatoire avant son éveil spirituel reprend les codes du film de prison, en vogue dans les années 1980-90 ; quant à la représentation de la Nation of Islam, elle flirte avec l’imaginaire du Parrain, avec ses tractations, ses « soldats » tout en abnégation, ses meurtres fratricides.

Denzel Washington (Malcolm X) et Spike Lee (Shorty)

Dans la deuxième partie du film, Lee trouve un moyen frappant d’évoquer la stature divine d’Elijah Muhammad : celui-ci fait une apparition surnaturelle dans la cellule de Malcolm. On comprend que c’est une vue de l’esprit, qui confirme que le dialogue religieux entre le maître et le disciple est engagé, même s’ils ne se sont pas rencontrés. Cette vision ressemble à une théophanie de fresque biblique dispendieuse façon Les Dix Commandements : elle est au futur prophète Malcolm X ce que le buisson ardent est à Moïse. Drôle d’idée quand on connaît la détestation de Malcolm pour le judéo-christianisme, synonyme pour lui d’aliénation, de soumission à une divinité complice de l’esclavage et de l’effacement culturel des Noirs. Il est vrai qu’il n’aura pas pu se familiariser avec une théologie de la libération née à la fin des années 1960 – il meurt au milieu de la décennie. Elle introduit la radicalité du Black Power au sein de l’Église noire, elle refaçonne la divinité à l’aune de l’expérience noire américaine, en en faisant une alliée politique, une compagne de lutte. Même si l’on pourrait rétorquer que Moïse (Moussa) est une figure centrale du Coran, Spike Lee convoque une imagerie plus proche de la Bible, l’un des livres qui aura contribué à établir le canon hollywoodien, avec Shakespeare et la littérature populaire et feuilletonesque du XIXe siècle.

Al Freeman Jr. (Elijah Muhammad) et Denzel Washington (Malcolm X)

Une image peut en cacher une autre

Le monolithe de 2001, l’Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick (1968)

On peut y voir un symptôme de son époque : Malcolm X est sorti en 1992, soit la même année que Postmodernisme ou la logique culturelle du capitalisme tardif. Fredric Jameson y parle du congé donné à l’idée de profondeur, que ce soit dans la peinture, le cinéma ou l’architecture. L’image appelle l’image et dans le cas du cinéma, le real se confond avec le reel3. Une intuition géniale incitera Jameson à voir dans le monolithe de 2001, l’Odyssée de l’Espace la prophétisation d’une nouvelle ère culturelle où tout n’est que surface, platitude, dephtlessness. Le plus grand nom du pop art abonde dans son sens : « Si vous voulez tout savoir sur Andy Warhol, vous n’avez qu’à regarder la surface de mes peintures, de mes films, de moi. Me voilà. Il n’y a rien dessous. ». L’imagerie marchande de ses Diamond Dust Shoes se substitue à la glaise des Souliers de Van Gogh, usés, encore lestés du poids du réel, chargés d’un hors-champ : la vie de dur labeur, le travail harassant de la terre.

À gauche, Diamond Dust Shoes d’Andy Warhol (1980). À droite, Les Souliers de Van Gogh (1886)

Tout se passe comme si Spike Lee avait lui aussi cédé aux sirènes de cette postmodernité fin de siècle. En définitive, il n’y a pas loin entre Malcolm X et la manière dont Forrest Gump traversera (en courant) le récit national un an plus tard – son aïeul, dont il est le portrait craché, sort tout droit de Naissance d’une nation de D.W. Griffith, la Guerre du Vietnam est ici moins un fait historique qu’une réminiscence des films sur le sujet, avec leur bande-son rock à l’avenant (Jimmy Hendrix, les Rolling Stones et cie). Ce qui était marquant dans Forrest Gump, c’était aussi cette manière inédite d’intégrer le héros aux archives télévisuelles et, à partir de là, de faire basculer le récit dans l’uchronie. Le film de Spike Lee ne se livre pas à une telle réécriture mais il pense la trajectoire de Malcolm comme une somme d’éléments iconiques que le public aura tout le loisir de reconnaître : les déclarations à la presse, le langage corporel qui accompagne les prises de parole d’un monstre d’éloquence (regard concentré, index levé et posé près de l’oreille), le pèlerinage à la Mecque, Malcolm armé d’un M1 Carabine quand sa vie est en danger. Les agents du FBI qui prennent « le démagogue irresponsable » en filature jusque sur le continent africain sont eux aussi des faiseurs d’images : ils « shootent » Malcolm de loin. Ce sont des filmeurs embusqués.

À gauche, Malcolm X photographié à Harlem par O’Neal L. Abel (1964). À droite, Malcolm, armé, dans sa maison (1964)

La rivalité entre les mastodontes Malcolm X et JFK d’Oliver Stone, dont on a tant parlé à l’époque, se joue aussi sur ce terrain : celui du pastiche, de la refabrication mimétique. Il faut se demander avec Baudrillard s’il n’y a pas là une sorte de « crime parfait » dont ces œuvres se sont rendues complices alors même que le meurtre était leur grande affaire, le dossier qu’elles entendaient instruire. Le meurtre en question, le voici : le cinéma a supplanté le réel, il l’imite si bien que nous pouvons continuer de croire à son existence, sans savoir que sous la chair du plan, sous sa surface, gît un cadavre. En un sens, James Baldwin ne se trompait pas : toute adaptation hollywoodienne de L’Autobiographie de Malcolm X équivaudrait à un « deuxième assassinat ». Dans l’imaginaire collectif, le visage du leader n’a-t-il pas fini par se confondre avec celui de la star de cinéma Denzel Washington ?

Pacte faustien

En définitive, Malcolm X rend compte de la montée en puissance de Spike Lee mais aussi de l’embourgeoisement – voire de l’essence bourgeoise – de son cinéma. L’extraction sociale du réalisateur se devine d’ailleurs dans l’ambiance « Ivy League » de School Daze, son deuxième long métrage, tout comme dans la bohème chic dans laquelle grandit le saxophoniste de Mo’ Better Blues. Mais on ne peut pas le lui contester : au début des années 1990, Lee est en effet bien placé pour réaliser Malcolm X ; on pourrait même penser qu’il s’y préparait depuis longtemps. Le début de sa filmographie est émaillé de références à Malcolm. On voit ce dernier en photo et on le mentionne dans School Daze. Le carton final de Do the Right Thing réunit les propos « non-violents » de Martin Luther King Jr, et les déclarations de sa (supposée) Némésis sur la nécessité pour les Noirs de se défendre, de réaffirmer leur dignité « par tous les moyens nécessaires ». Pour Lee, il s’agit moins de renvoyer ces deux approches dos à dos que de les mettre en tension, avec l’idée que Martin et Malcolm formeraient une sorte de Janus de la révolution noire américaine des années 50-60. Mais il y a le revers de la médaille : plus on avance dans l’oeuvre de Lee avant Malcolm X, plus il s’entiche de la grande forme hollywoodienne, plus les aspirations et enjeux s’individualisent – art, amour et argent forment la sainte trinité des héros de Lee. La révolution que l’Amérique noire appelait de ses vœux peut attendre…

Spike Lee dans Do the right thing, 1989 (photo : David C. LEE)

Dans Malcolm X, les masses se résument à une clameur anonyme, à une horde de figurants mettant en valeur le luxe de la production value. Lee n’aspire à rien d’autre qu’à donner chair à la figure héroïque et humaniste qui se dessine en filigrane dans L’Autobiographie co-écrite avec Alex Haley4 : du pain béni pour cette « usine à rêves » dans laquelle Malcolm voyait une manufacture de mensonges, une fabrique de personnages noirs oncletomisés. A ce titre, l’entente entre Lee et le producteur Marvin Worth, le propriétaire des droits L’Autobiographie à partir de 1967, est révélatrice : le réalisateur chante les louanges de son collaborateur dans un documentaire consacré à la genèse du film.

À droite, Malcolm X photographié par Gordon Parks (1963)

Malcolm par Baldwin : le biopic impossible

Worth est l’homme qui découragea James Baldwin dans ses efforts de porter la vie de Malcolm à l’écran. Ce dernier pressentit la nature diabolique, faustienne de cette expérience avant même d’écrire une seule ligne. Comme il l’écrit dans Chassés de la lumière : « L’idée que Hollywood puisse faire une œuvre honnête sur Malcolm ne pouvait que paraître saugrenue. Et pourtant – je ne voulais pas passer le restant des mes jours à me dire : ça aurait pu être fait si t’avais pas été si froussard. Je sentais que Malcolm ne m’aurait jamais pardonné pour ça. Vivant, il avait confiance en moi et j’estimais qu’il me faisait encore confiance, mort, et cette confiance, en ce qui me concerne, m’obligeait. ».

Dans son scénario, Baldwin organise une structure complexe, faite d’enchâssements successifs, d’allers-retours dans le temps. Elle est anti-hollywoodienne, plus proche des cinémas de la modernité européenne ou du Nouvel Hollywood que du classicisme adopté par Lee. Le montage aurait parachevé l’image diffractée de Malcolm et en cela représentative de sa complexité. Il avait « tant de noms » rappelle Baldwin à plusieurs reprises : Malcolm Little, Detroit Red, Malcolm X, Omowale (« le fils qui est revenu »), Al-Hâjj Mâlik al-Shabazz الحاج مالك الشباز . Ce récit deviendra l’ouvrage Le jour où j’étais perdu. A l’instar de Worth, Spike Lee trouve lui aussi la chose confuse. Il en fait cas mais il veut la retravailler. Il privilégiera la linéarité, l’approche chronologique, malgré quelques flash-backs inclus ici et là. D’une durée ogresque, comparable à celle de JFK, Malcolm X est une courbe instable avec ses creux et ses pics. Le film souffre des travers inhérents au biopic, ce compromis entre la page Wikipédia et la nécro – le genre rappelle que le récit d’une vie n’a d’extrémités que celles que la mort peut offrir. Paradoxe du biopic : il opère depuis la tombe et, depuis vingt ans, il est l’un des genres les plus vivants qui soit.

Le patrimoine au détriment de la vérité

Il y a un monde entre un James Baldwin qui a vécu dans le ghetto et fréquenté les sommités de la révolution noire américaine et un Spike Lee issu des classes aisées qui gère la chose en business man, en cinéaste-notaire garant des intérêts moraux et financiers des héritiers. En se plaçant sous l’autorité de Betty Shabazz, créditée comme consultante, il se préoccupe moins de cinéma que de patrimoine. Cela relèverait de l’anecdotique si la mainmise de l’épouse n’engendrait pas deux choix significatifs : le couple Betty-Malcolm s’en trouve idéalisé, tandis que la sœur Ella Collins est reléguée dans le hors-champ, alors qu’elle fut un soutien moral et financier de premier plan. C’est elle qui fut la mécène du Hajj de Malcolm, que le film reconstitue avec grandeur, en marchant sur les traces de l’immense fresquiste David Lean. Si Ella est absente du film, c’est parce que Betty la déteste : « Je n’ai aucun respect pour cette femme » déclarera-t-elle au Boston Globe en 1992. De son côté, Ella pense que « Spike Lee ne recherche que l’argent et le prestige. Il n’y connaît rien ».

Malcolm Little (à gauche), deux femmes inconnues et Ella Little-Collins (à droite) à Franklin Park, Roxbury.

La mésaventure baldwinienne nous enseigne que tout commerce entre la question « Malcolm X » et Hollywood doit susciter la plus grande méfiance. C’était le cas dans les années 1960, quand l’industrie envisagea un Charlton Heston tout en blackface pour le rôle principal.

De gauche à droite : Charlton Heston, Harry Belafonte, James Baldwin et Marlon Brando
à la Marche sur Washington pour l’emploi et la liberté (1963)

C’est encore le cas trente ans plus tard, quand Lee donne l’illusion de retravailler l’image de Malcolm à l’aune des luttes présentes : dans le générique de début, le tabassage de Rodney King par la police se juxtapose à la rhétorique incendiaire du « brillant prince noir ». En alternance, le « X » légendaire se forme à la faveur de l’embrasement du drapeau américain. La prochaine fois le feu ! semble promettre cette ouverture saisissante, quand en réalité elle se contente d’attraper l’actualité brûlante au vol, pour créer un choc de courte portée5.

Rodney King lynché par la police de Los Angeles en 1991 (photo : Kevork Djansezian)

Pendant ce temps, l’Amérique noire s’enflamme, le conservatisme de l’administration Bush père tente de saccager le Civil Rights Act de 1964, arguant que la minorité a droit à moins d’égards que la majorité, et ce après huit années de reaganisme délétère pour les couches les plus pauvres de la communauté noire. C’est cette indignité permanente qui relança l’intérêt pour Malcolm X du côté des classes populaires, tandis que celui pour Martin Luther King Jr. déclinait. La deuxième insurrection de Watts, déclenchée par les violences suprémacistes subies par Rodney King, est le signe que l’Amérique n’a pas les moyens de s’offrir la color-blindness dont rêvent les hautes instances, au prétexte que des icônes comme Michael Jordan ou Michael Jackson arrivent bien, elles, à transcender les barrières raciales.

Quand il fait appel à des stars de cet acabit pour boucler le budget de Malcolm X, Spike Lee est héroïque parce qu’il peut se le permettre. Il vit dans un luxe auquel Malcolm lui-même n’aura pas goûté, si ce n’est au cours de ses voyages visant à internationaliser la lutte. Portée devant l’ONU, la cause avait une autre gueule : il n’était plus question de « droits civiques » mais de droits humains et, en se rapprochant des pays africains libérés, il s’agissait de subvertir la ligne de partage. Dans la perspective du panafricanisme, les Noirs des États-Unis ne forment plus une humanité minoritaire, et l’Islam, pratiqué dans les nations-sœurs, n’est plus une spiritualité de troisième catégorie. Le film ne dit rien de cette révolution aux accents décoloniaux qui n’a pu ou n’a su se matérialiser. La mort de Malcolm est passée par là, et le soutien qu’on lui apporta fut tout relatif. Son retour sous les traits d’un autre acteur dans un autre film pose toutefois une question à laquelle il faut tenter de répondre : à défaut d’une révolution en acte, pourrait-on envisager une manière proprement révolutionnaire de faire du cinéma ?

Malcolm nouveau millénaire

Si le film de Spike Lee ne représente pas l’alpha et l’oméga du cinéma de Malcolm X (ce n’est pas ce qu’on lui demande), il s’impose comme une étape majeure dans la grande séquence de « reconstruction de l’image posthume » du leader prophétique, initiée dès les années 1960 avec le jazz. Ne remettons pas en question son statut de monument culturel : c’est grâce à Spike Lee que, pour la plupart, nous avons découvert une telle figure, non en lisant des ouvrages sur le sujet.

Revenons maintenant sur la timeline du cinéma de Malcolm X : il y a le précédent baldwinien déjà évoqué, il existe un documentaire réalisé en 19726 et il y aura en 2001 le Malcolm X figurant dans le biopic Ali. Cette présence appelle quelques commentaires. La démarche relève à la fois de la rupture et de la continuité : Ali ne serait pas ce qu’il est sans Malcolm X. Ce qui est fait n’est plus à faire ; c’est parce que Spike Lee a pavé le chemin que Michael Mann a les coudées franches et peut réinventer Malcolm, l’éclairer sous une autre lumière. 

Ali, c’est d’abord une scène d’exposition aussi longue qu’époustouflante. Elle est bâtie autour d’une « sainte trinité ». Chaque pilier de cette trinité fait ce qu’il sait faire : Mohammed Ali court et boxe, Malcolm X prêche de ne pas tendre l’autre joue, Sam Cooke chante et fait chavirer les coeurs. En s’appuyant sur la musique du soulman, en pleine performance au Copacabana, Mann dessine un portrait vibrant et incarné de l’Amérique noire des années 1960. A l’ivresse procurée par la soul music et le montage, d’une extrême fluidité, s’ajoute cette idée folle consistant à insérer des plans tournés en caméra DV. Ils montrent les foulées d’Ali sous un ciel nocturne presque hostile, en adéquation avec le sentiment provoqué par le passage d’une voiture de police (l’un des deux flics interpelle l’athlète d’un « son»7  bien paternaliste). Ici, la texture numérique fait l’effet d’un coup de tonnerre, d’une greffe inhabituelle et qui prend instantanément. Le concentré de Black History imaginé par Mann se présente sous une forme hybride que personne n’avait osé proposer.

Sam Cooke, chanteur et militant pour les droits civiques,
assassiné par balle dans des conditions mystérieuses en 1964 dans un motel californien

A nouveaux siècle et millénaire, nouveau cinéma ? Il est permis de le penser tant le geste de Mann est radical : d’un côté, réaliser une œuvre à l’effigie d’un Black Muslim et membre de la Nation of Islam dans l’immédiat après-11 septembre, alors qu’on entre dans un nouvel âge de l’islamo-arabophobie, et, de l’autre, imaginer un dispositif de mise en scène révolutionnaire qui célèbre la culture noire américaine dans toutes ses strates – spirituelle, sociale, artistique, politique. Quand il aspirait à être un documentariste et non ce styliste que l’on connaît désormais, Mann a filmé mai 68 (Insurrection, toujours invisible), il s’est imprégné de la pensée des Black Panthers. Plus tard, la blackness fera partie intégrante de son oeuvre. Mann ne pouvait pas ignorer la postmodernité – ou ne pouvait pas être ignoré d’elle – mais il la prendrait par le col, en pointant l’accès à la fortune comme une aliénation de classe. Chez Mann, on s’enrichit à la manière de Faust, au détriment du principe de réalité. Mann donnerait à ses « mirages contemporains » (Jean-Baptiste Thoret) une couleur marxiste, nourrie par ses lectures et par une culture politique qui est celle de sa jeunesse – les années 1960-70. Aussi, à bien des égards, Ali apparaît comme un retour aux sources.

Comme l’annonce la séquence d’ouverture, l’une des arches narratives d’Ali est la relation entre Malcolm X et Mohammed Ali, alors qu’elle était l’un des angles morts du biopic de Spike Lee. Ce lien fraternel est connu du public mais il trouve ici une expression renouvelée, grâce à la présence magnétique de l’acteur  qui interprète de Malcolm, Mario Van Peebles, lui-même légataire d’une histoire au confluent du cinéma et des luttes noires (il est le fils de Melvin Van Peebles, réalisateur de Sweet Sweetback’s Baad Asssss Song et musicien). Le Malcolm de Lee prenait forme laborieusement, sur la durée, par accumulation. Pour donner une identité forte à celui d’Ali, il s’agit cette fois de procéder par soustraction, en faisant beaucoup en peu de temps. Mario Van Peebles apparaît durant les cinquante premières minutes, jusqu’au moment où Mann se confronte à son tour à la reconstitution de la tragédie du 21 février 1965. Elle ne souffre pas de la comparaison avec le film de Spike Lee. Mann est rivé à Malcolm, à son point de vue, à son corps, à son regard. Il saisit avec force le moment où la vie le quitte, il a l’intelligence de reléguer hors-champ la préparation du meurtre et l’identité des tueurs, encore incertaine. Ce point aveugle est une belle manière de rendre compte de l’inachevé de l’oeuvre politique de Malcolm, en même temps qu’elle laisse entrevoir la vaste trame dans laquelle fut prise sa mort précoce8. Le cinéma de Mann baigne dans l’imaginaire du film de complot post-JFK et Ali ne déroge pas à la règle. 

 Mario Van Peebles (Malcolm X) dans Ali de Michael Mann (2001)

Une figure centrale

            On se souvient que James Baldwin ouvrait son adaptation de l’Autobiographie avec la mort de Malcolm. Dans la première page, il précisait qu’on entend une « musique soul ». Laquelle ? Avait-il en tête l’hymne « A Change is Gonna Come » ? C’est ce que laissent penser les choix de Spike Lee et de Michael Mann, frappants dans leur similitude autant que par leur différence. Lee intègre l’original de Sam Cooke lorsque Malcolm se rend en voiture vers une mort certaine (l’Audubon). Le moment est solennel. Éteint, épuisé, l’homme n’est déjà plus. Mann opte, lui, pour une reprise live d’Al Green. Le contexte d’apparition du morceau est légèrement différent : il saisit les réactions, le contrechamp émotionnel du drame. Informé par un piéton en furie, Mohamed Ali immobilise son véhicule. Même s’il avait tourné le dos à un Malcolm tombé en disgrâce, le boxeur Black Muslim est envahi par la tristesse et la colère.

            Les résonances entre les deux films appellent une dernière remarque : depuis les années 1990, l’univers audiovisuel autour de Malcolm X a généré ses propres patterns. Angela Bassett, qui interprète Betty Shabazz chez Lee, remet ça dans Panther de Mario Van Peebles. Chez Mann, le rôle d’Elijah Muhammad est confié à Albert Hall, lequel jouait Baines, l’homme qui éveille Malcolm Little à la sagesse islamique dans Malcolm X. Plus récemment, c’est l’excellent Nigel Thatch qui prête ses traits et sa voix rauque idoine au porte-parole de la Nation of Islam dans la série Godfather of Harlem, après avoir convaincu dans Selma d’Ava DuVernay. La création de Thatch est remarquable, et elle gagne en profondeur en s’inscrivant dans la répétition du récit sériel. Difficile de savoir s’il faut s’agacer ou se réjouir de ces doublons. Ils figent les représentations, ils se situent à l’opposé de ce que l’homme incarnait – la réinvention de soi. En même temps, ces doublons donnent chair à l’idée qu’il avait plusieurs visages, ils témoignent de l’intérêt renouvelé pour Malcolm.

À gauche, Angela Bassett (Betty Shabazz) et Denzel Washington (Malcolm X). À droite, affiche de Panther de Mario Van Peebles (1995)

Son centenaire ainsi que la nouvelle traduction française de son Autobiographie arrivent dans un moment d’intense islamophobie et arabophobie, et de centralité de la lutte palestinienne. Il faut combattre l’une et il faut embrasser l’autre, il en va de notre âme : « A travers Malcolm X, nous reconnaissons ce que nous sommes et nous reconnaissons nos espérances. Chaque indigène partage un peu de sa fierté retrouvée et recouvre sa dignité. Le portrait de Malcolm X accroché à un mur incite à la résistance. Et à ce titre, la figure mythique de Malcolm X est essentielle. » écrit Sadhi Khiari. Il faut réinvestir Malcolm. Nous avons encore besoin de lui.

Malcolm X dessiné par Sadri Khiari (2014)

Pour prolonger


  1. « Il n’y a rien de comparable au monde ! » ↩
  2. J’emprunte l’expression à Manning Marable, à qui je dois également la formule de « reconstruction posthume de son image », mobilisée dans cet article. ↩
  3. En anglais, ces deux mots désignent respectivement la « réalité » et la « bobine de film ». bell hooks reprendra cette confusion à son compte en intitulant son premier ouvrage sur le cinéma Reel to Real. Race, Class and Sex at the Movies.   ↩
  4. Il faut préciser que cet auteur républicain n’a été ni un compagnon de lutte, ni un complice pour Malcolm. Il est moins mû par des convictions politiques que persuadé de collaborer à un ouvrage au fort potentiel commercial. ↩
  5. Les événements surviennent le jour d’une projection-test de Malcolm X. Lee prendra acte sur la table de montage. ↩
  6. Malcolm X d’Arnold Perl est constitué exclusivement d’images d’archives. Le résultat est concis, efficace et au final poignant. Car l’éloquence jazzy, les discours incendiaires, les traits amaigris, l’humour et le large sourire même dans la pire des adversités sont ceux du vrai Malcolm. Qui peut rivaliser avec ça ? Il est évident que cette adaptation purement documentaire de l’Autobiographie a constitué une base de travail pour Spike Lee (et pour un Denzel Washington plus investi que jamais). Les deux films privilégient la linéarité et ils se terminent avec la superbe oraison funèbre d’Ossie Davis qualifiant Malcolm de « brillant prince noir ». ↩
  7. « Fils », en anglais, qu’on peut traduire ici par « petit » ↩
  8. Le mystère autour de la mort de Malcolm X perdure. Elle ne se résumerait pas à des représailles sanglantes de la part de la Nation of Islam ou de quelques-uns de ses membres ayant agi de manière isolée, dévorés par le ressentiment. En 2024, ses filles ont porté plainte contre le FBI, la CIA et la police de New-York pour complicité de meurtre. Il semble que l’herméneutique de son martyr ait encore de beaux jours devant elle. ↩

19.11.2025 à 11:40

Tu n’as rien vu au Bataclan

Judith BERNARD

Le projet était prometteur : 8 épisodes d’une heure chacun, pour revenir, dix ans après, sur ce trauma collectif et les mille et une manières de s’en remettre ou pas, c’était sur le papier une assez belle occasion de regarder en face ce qui nous était arrivé. On a intensément besoin de ça, que les […]
Texte intégral (5290 mots)

Le projet était prometteur : 8 épisodes d’une heure chacun, pour revenir, dix ans après, sur ce trauma collectif et les mille et une manières de s’en remettre ou pas, c’était sur le papier une assez belle occasion de regarder en face ce qui nous était arrivé. On a intensément besoin de ça, que les séries permettent : un récit largement déployé dans le temps et un dispositif choral sont en principe les gages d’une précieuse polyphonie où profondeur, complexité et conflictualité trouveront à s’articuler.

Une chorale totalitaire

Las : au lieu d’une riche polyphonie, c’est l’unisson d’une chorale indigente dans son propos, et totalitaire dans sa vision. Le cœur prétendument paradoxal de cette « reconstitution », c’est la résilience : le récit accompagne cette partie des rescapés qui se trouvaient dans le couloir du Bataclan, où ils ont été retenus en otages pendant près de 2h30, par deux des assaillants, équipés de kalashnikovs et de gilets explosifs.

Dans la série comme dans la vraie vie, ils s’appellent Arnaud, Marie, David, Sébastien, Grégory, Stéphane, Caroline. Si ces survivants ont aperçu la vision d’épouvante de la fosse jonchée de cadavres atrocement mutilés, s’ils ont senti l’odeur de poudre et de sang qui s’en élevait, ils n’ont, pour leur part, « que » des blessures psychiques, et c’est à leur souffrance morale que se consacre la série. Souffrance indiscutable, souffrance irrémissible, que le spectateur épouse d’épisode en épisode avec d’autant plus d’empathie qu’il y est très entraîné – c’est la grande spécialité des récits de nos contrées : l’âme et ses tourments, que la société veut voir guérir sans trop de délai (ainsi va la « résilience ») tandis que le sujet, lui, éprouve le présent perpétuel du trauma, que rien ne peut abolir.

De gauche à droite : Félix Moati (Sébastien), Thomas Goldberg (David), Megan Northam (la compagne de David), Benjamin Lavernhe (Arnaud), Anne Steffens (Caroline), Antoine Reinartz (Gregory) et Alix Poisson (Marie)
(photo : What’s Up Films)

Le faux paradoxe est là, donc : les personnages sont assignés à une condition qu’ils refusent explicitement, ils ont en horreur le mot « résilience », et le disent encapsulés dans une série qui la met pourtant en scène, lentement, sûrement, inexorablement. Que l’un des vrais rescapés du couloir ait découvert, après coup, que cette série s’était faite sans qu’il soit consulté ni qu’il y consente1 (alors qu’il y est représenté de manière précise et reconnaissable) dit assez la puissance de bulldozer de l’injonction narrative : il y a sur cette expérience collective UNE histoire à raconter, elle sera racontée qu’on le veuille ou non, et de la seule manière que la doxa prévoit : sous le signe de la résilience. Ce rapport subjectif au trauma accueille suffisamment de facettes pour peupler la fresque d’un châtoiement d’émotions et de troubles divers, cinquante nuances de culpabilité, de honte, de colère, de rage, de haine – c’est normal : c’est ce que fait à l’âme le fracas d’un traumatisme, ici amplifié par sa dimension collective et son ampleur démesurée.

« Il ne faut pas chercher à comprendre »

Tous les professionnels qui ont été en contact direct avec cette nuit d’horreur et qui s’expriment actuellement dans les médias le disent : ce qu’ils ont vu là, c’est « une scène de guerre », des « blessures de guerre », nécessitant une « médecine de guerre ». La guerre offre à cet événement un cadrage technique, sémantique, analytique ; de la guerre, donc, il pouvait être question dans la série. La dimension polyphonique de son dispositif permettait de faire entendre, parmi d’autres, l’une des clefs de lecture de cet attentat : c’était un acte de guerre, s’inscrivant dans une guerre plus vaste, dont les assaillants ont fait état dans les propos qu’ils ont tenus durant l’attaque, mentionnant les bombardements en Irak et en Syrie, leurs victimes civiles, la responsabilité du président Hollande.

Ces propos d’ailleurs sont audibles dans la série, qui s’est efforcée à une certaine fidélité dans la reconstitution de l’événement : on les entend de la bouche des acteurs qui incarnent les assaillants, dans les flashes back qui hantent la mémoire des rescapés. Mais cette percée de réel est comme forclose : les victimes, qui sont les héros de la série et nos vecteurs exclusifs d’identification, ne les citent qu’en de rarissimes occasions, et bien sûr pour en disqualifier immédiatement toute pertinence. Marie parle fugacement à sa psy des « conneries qu’ils ont dit sur l’Irak, sur la Syrie », n’en dit pas plus et n’y reviendra plus. Quand Arnaud fait part des obsessions qui le tourmentent au chef de la B.R.I qui lui a sauvé la vie (« Je n’arrive pas à comprendre comment ces mecs ont pu faire ce qu’ils ont fait »), le professionnel de l’ordre le ramène aussitôt dans le droit chemin : « Il ne faut pas chercher à comprendre. Jamais ».

Redire la messe

La messe est dite, mais il faudra la redire, autant de fois que nécessaire, par tous les moyens : Sébastien est le seul rescapé représenté à l’écran à tenter de s’échapper de ce cadrage rhétorique (parfaitement conforme à celui qui domine le traitement médiatique mainstream de ces événements) ; un soir, au bar où se retrouvent les « potages » (potes otages), il ose : « Si la France elle bombardait pas les civils en Syrie, tu crois qu’elles auraient eu lieu les attaques terroristes ? »2. La fiction déploie alors l’artillerie lourde d’un recadrage sans appel. Dialogue : Arnaud : « J’en peux plus de ces clichés à deux balles. Tu te rends compte que c’est pas des arguments ? » – Sébastien : « C’est quoi alors ? « – Arnaud : « C’est des conneries monstrueuses. C’est de la bouillie prémâchée par des tarés du net ». Mise en scène : ils en viennent aux mains et se réconcilient aussitôt sous la pression amicale des potages. Construction du personnage de Sébastien : c’est un journaliste « pigiste » décoiffé, un peu rocker, façon rebelle – et ses propos semblent toujours plus relever du flou artistique et de la petite différence punk que de l’analyse politique… Avant d’en venir aux mains avec Arnaud, il a trahi sa vanité dans une dernière réplique : « Je comprendrai jamais c’est quoi le plaisir d’être un mouton ». On ne s’étonnera pas qu’il s’amourache ensuite d’une complotiste, elle aussi victime d’attentat, qui considère que « les séances de psy c’est fait pour nous rentrer dans la tête ». Ainsi tous les procédés dont dispose la fiction sont convoqués pour disqualifier la seule voix dissonante dans la chorale du trauma psychique, et forclore définitivement tout ce qui pourrait relever d’une analyse politique – sur la totalité des 8h de fiction, il n’est pas une occurrence du mot « politique » qui ne soit associée au mot « conneries ».

L’épisode terminal rejouera dans les grandes largeurs cette procédure de recadrage et de forclusion de l’analyse politique : alors qu’il témoigne à la barre du procès des attentats, Sébastien tente à nouveau d’interroger le contexte des bombardements opérés par l’armée française en Syrie, et le juge qui l’écoute paraît disposé à la patience. Pas la caméra, qui opte aussitôt pour un plan sur les potages assis dans l’audience, qui réprouvent bruyamment cette sortie de route – « C’est n’importe quoi ! » ; la parole de Sébastien, qui poursuit mezzo voce ses questions, est refoulée dans le hors-champ, recouverte par les murmures d’indignation de ses amis, meilleurs juges que lui.

Et pour bien verrouiller le dispositif, Arnaud, qui n’avait pas prévu de témoigner, bondit à la barre pour condamner les propos de son ami : « Contrairement à lui, moi je n’ai pas du tout envie de comprendre pourquoi des inconnus se sont permis de tuer des innocents. Moi je n’avais rien demandé. Je ne suis pas responsable de la guerre en Irak, en Syrie ou ailleurs. Ces gens-là m’ont condamné à un cauchemar qui s’arrêtera jamais. Je dois dire que j’ai été heureux, après l’explosion, de baigner dans le sang et les tripes des gens qui étaient venus pour nous massacrer (…). Quand je me suis rendu compte que l’explosion avait emporté une partie de la tête d’un terroriste et que moi je pouvais bouger, je pouvais me lever, et ben je crois que j’ai rarement été aussi heureux. C’était comme une forme de justice ». La caméra cette fois ne quitte pratiquement pas le visage de celui qui témoigne, sinon très brièvement pour des plans sur les potages qui opinent gravement du chef : consensus sans faille sur ce témoignage affectif d’une victime qui paraît valider implicitement (c’est assez naturel) la peine de mort : « c’est une forme de justice ».

Ajoutons qu’Arnaud est interprété par Benjamin Lavernhe, la seule star du casting ; il est dans la série l’époux de Marie, interprétée par Alix Poisson, qui est à la ville l’épouse de Jean-Xavier Lestrade, le réalisateur de la série : tous ces choix font plus qu’une signature du réalisateur, paraphant son geste et sa vision. C’est l’épitaphe de la série : je ne veux pas comprendre, je veux pouvoir haïr, et dire que mon mal est incurable3.

Benjamin Lavernhe (Arnaud) dans Des Vivants

Politique du refus de la politique

Ce refus de l’analyse politique est évidemment une position politique, et de la politique, bien sûr, la série en fait copieusement – comme toujours quand on prétend ne pas en faire, et très droitière comme il est d’usage.

Non seulement elle nous invite à nous réjouir avec tous les protagonistes de ce que Gregory, malgré le traumatisme du Bataclan (qui lui a fait louper la première fois son entretien d’embauche), ait l’insigne honneur d’être enfin recruté comme ingénieur chez Dassault4 – son rêve d’enfant !, mais elle déploie un amour de la police presque embarrassant ; les personnages de la B.R.I sont absolument magnifiques, courageux, humbles, virils sans être insensibles, vraies gueules et belles voix crevant l’écran – alors que dans la vraie vie on ne saurait y avoir accès puisqu’ils doivent protéger leur anonymat5.

Ils opèrent en héros épiques infiniment admirables, sur le sort desquels la psy – pourtant très professionnelle, d’une neutralité frôlant la froideur – s’effondre en larmes : « On n’imagine pas le nombre de séparations, de divorces, de dépression chez les flics depuis le 13 novembre. Et rien n’est fait pour les aider ! ». Alors que traumatisés, ils le sont aussi bien sûr ; l’un des flics entrés dans le Bataclan en est sorti bouleversé, raconte-t-elle : « Il a tout de suite pensé aux photographies qui avaient été prises à l’ouverture des camps. Et ce n’est pas le premier, ce n’est pas le seul, à faire ce rapprochement avec les images de la Shoah » (Episode 5).

Retour à la Shoah

On tombe un peu de sa chaise devant une telle analogie : au delà du motif commun de l’amoncellement de cadavres, comment des corps déchiquetés à la kalashnikov baignant dans une mare de sang peuvent-ils consonner avec les traces visuelles de la découverte des camps, que nous avons vues par exemple dans Nuit et Brouillard6, qui, tout aussi insoutenables, sont d’une autre nature – corps émaciés par la dysenterie, d’une pâleur funèbre, orbites creusées par une interminable maltraitance ? On ne s’appesantira pas ici sur le discret pivot permis par cette analogie, qui assimile les djihadistes islamistes aux nazis, pivot sans doute trop inconscient pour être disséqué… Mais on peut s’interroger : peut-être cette citation est-elle « réelle » ; peut-être un policier choqué a-t-il vraiment dit ça, qui en dit long sur le caractère borgne de notre mémoire collective, qui nous ramène toujours au sol européen, à nos suppliciés historiques, à nos traumas sacrés, à notre Shoah.

Survivants du camp de concentration de Dachau devant les baraques du camp nouvellement libéré, 1945
(collections du Musée national de la Seconde Guerre mondiale)

Car cette vision d’épouvante de la fosse du Bataclan, on peut supposer qu’elle se rapproche bien davantage, visuellement, des scènes de guerres tout à fait contemporaines dont les images nous parviennent via les réseaux : corps démembrés, déchiquetés, par des frappes de drones, des bombardements ou des tirs de snipers. Certes, ces images ont connu un essor récent dans le cadre de la guerre menée par Tsahal contre la population palestinienne de Gaza, et le flic de 2015 ne pouvait en être imprégné comme nous le sommes maintenant.

Mais en 2015, n’y avait-il vraiment aucune image, aucune perception, aucune conscience des conséquences, sur les corps des civils, des guerres que menait notre armée dans les pays que la coalition avait décidé de frapper ? Il faut croire que : non7. Ce qui décidément est significatif de notre opiniâtre cécité, que la série reconduit avec méthode. Cette zone blanche dans notre champ perceptif, on peut proposer de l’appeler : notre Blanchité.

Terminus : le sanctuaire de la Blanchité

On ne s’étonnera pas que la série s’achève en apothéose, sur la réalisation d’un fantasme qui assure les conditions matérielles de sa persistance : Arnaud et Marie s’offrent (probablement en partie grâce à l’indemnité financière à laquelle leur statut de victime d’attentat leur ouvre droit8) une jolie petite maison à la campagne, où tous les « potages » se retrouvent autour d’un joyeux barbecue où ils chantent en chœur (comme à peu près à chaque épisode : résilience par la chorale, vertus de l’unisson).

Tous les signes (barbecue compris) convergent pour faire de cet espace un sanctuaire – loin du tumulte de la cité, de sa « politique », de ses risques, de ses indésirables : plus la moindre trace d’altérité – et convertir cette résidence secondaire en une résidence principale. Arnaud veut désormais s’installer à demeure et devenir paysagiste : ainsi pourra-t-il cultiver, outre des arbres-des buissons-un potager, sa volonté de ne surtout pas comprendre, et sa blessure psychique, intacte – et si précieuse.

Reclus dans cet écrin où nul ne pourra jamais le faire dévier de son programme, il vivra avec les siens comme la Blanchité veut vivre : gentiment lobotomisée, ayant abdiqué tous les raisonnements de causalité, trop susceptibles de nous jeter hors de l’irresponsabilité que nous chérissons – dût-elle nous faire persister dans l’incurable trauma de « l’incompréhensible ».

Service public de la propagande fascisante

Qu’en conclure ? Que l’audiovisuel public qui produit et diffuse une série si parfaitement verrouillée dans son propos idéologique ne se met nullement au service de « l’interêt général » qui est officiellement censé lui servir de boussole, et qu’il sert au contraire une visée partisane parfaitement située – très très à droite de l’échiquier politique, comme ses concurrents de l’audiovisuel privé. Héroïsation dégondée des forces de l’ordre, admiration larmoyante pour notre industrie d’armement, déshumanisation systématique des adversaires renvoyés à une impénétrable barbarie, confusément associée à la barbarie nazie, jouissance revendiquée de leur mise à mort, éradication systématique de tout effort de rationalité : tout est en place, imaginairement parlant, pour une société fasciste, armée pour le « choc des civilisations », persuadée que ce sont sa « liberté » et sa « démocratie » qui lui valent que des obscurantistes décérébrés tournent contre elle leur violence absurde.

Les violons insistants qui accompagnent la séquence de la « cérémonie d’accueil dans la nationalité française » par laquelle David, l’un des rescapés (chilien de naissance), obtient sa naturalisation sous les yeux embués de ses potages (épisode 7), ne doivent pas nous tromper : derrière la douceur lyrique de cette harmonie de cordes, c’est le bruit des bottes islamophobes et le fracas des guerres impérialistes qui s’échauffe tranquillement au creux de nos âmes, alanguies par la douceur de nos canapés.

Ainsi va le travail de l’hégémonie, qui s’impose avec d’autant plus de force que ses formes sont onctueuses, s’insinuant de psyché à psyché en se lovant avec grâce autour du motif faiblement polémique, au fond inoffensif, de la « résilience » : la fausse bataille contre le trauma opère ici en cheval de Troie, simulacre nous pénétrant intimement en dérobant à nos yeux la véritable armée qui nous enrôle insidieusement  – au cœur de la Blanchité, et de sa guerre permanente contre l’altérité qui menace son empire.


  1. https://www.leparisien.fr/culture-loisirs/series/je-ressens-de-la-colere-un-rescape-du-bataclan-victor-anclin-zanotelli-apparait-malgre-lui-dans-la-serie-des-vivants-15-11-2025 ↩
  2. Des Vivants, Episode 2 ↩
  3. Le témoignage d’une autre rescapée du Bataclan, recueilli par Guillaume Pley dans l’émission en ligne Legend, révèle qu’un autre positionnement dans le rapport de la victime à son bourreau peut s’avérer relativement réparateur : évoquant la prise de parole finale, lors du procès, de Salah Abdeslam, qui y a retracé son parcours et demandé pardon aux victimes, Stéphanie livre cet aveu : « Ça m’a fait un bien fou qu’il parle, parce que ça m’a sortie de mon statut de victime : ce n’était plus une relation bourreau-victime, c’était une relation d’être humain à être humain, et je n’avais plus qu’une idée en tête c’était de parler à son avocate pour qu’elle lui dise de ma part « merci d’avoir parlé, que moi ça m’avait fait du bien, et que je n’avais pas de colère particulière contre lui. » L’avocate a proposé à Stéphanie de le dire directement à Abdeslam, ce qu’elle a fait : elle relate cet échange troublant, précisant qu’elle « avait pris le parti de croire ce qu’il avait dit » – « c’est juste mon point de vue », s’excuse-t-elle presque. Elle évoque son émotion alors, et celle qu’elle a vue chez Abdeslam, leurs remerciements réciproques, le « coucou » qu’ils se sont fait de la main en s’éloignant, lui vers la prison, elle vers ses amis rescapés. « Pour moi, conclut-elle, le procès était fini. J’ai compris plus tard que c’était ce qu’on appelle la justice restaurative, et c’est ce qui permet de clore le chapitre définitivement, de passer à autre chose ». Du bien que ça lui a fait, elle dit qu’il était « incroyable » : « toute la tension que j’avais accumulée pendant les mois qui ont précédé est partie (…), ça va mieux ». – « Je ne sais pas quoi dire », lui répond alors spontanément l’interviewer, manifestement désemparé par ce témoignage complètement hors cadre. Entretien ici : https://www.youtube.com/watch?v=-RLcOqr3IwM&t=5103s ↩
  4. Dassault Aviation se classe parmi les premiers industriels de l’armement au monde. ↩
  5. Dans la vraie vie surtout, en tout cas en manif, on croise plutôt des forces de l’ordre façon Sainte-Soline, suant la haine et la violence gratuite (voir la vidéo Médiapart : https://www.youtube.com/watch?v=TT8j4a10aKE…) Ceux-là n’existent évidemment pas dans l’imaginaire de la série – à charge pour nous de comprendre comment une même institution peut produire des corps collectifs aussi diamétralement opposés. ↩
  6. Nuit et Brouillard, Alain Resnais, 1957 ↩
  7. Peut-être convient-il de préciser ce que la grande messe médiatique nationale ne permet pas toujours de mesurer : « Ce qui est perçu comme « lutte contre le terrorisme » par le gouvernement qui intervient est simultanément considéré comme un acte de terrorisme d’État par la population cible » (Christopher J. Coyne et Abigail Hall, The Drone Paradox : Fighting Terrorism with Mechanized Terror, The Independant Review. A Journal of Political Economy, 2018 ; cité par Mathias Delori dans La guerre contre le terrorisme comme rivalité mimétique, ed Peter Lang, 2025). Mathias Delori cite plusieurs témoignages de civils terrorisés dans divers pays frappés par la coalition ou par la seule armée française, qui permettent d’apercevoir ceci : les scènes d’horreur que nous subissons à l’occasion des attentats terroristes ressemblent à celles que subissent les populations civiles des pays que nous bombardons ou visons par nos drones tueurs, nos armes font à leurs corps ce que les leurs font aux nôtres, et leurs traumas ne sont pas moins durables que les nôtres. On pourrait, si ce n’était obscène, consacrer des milliers d’heures de série à l’histoire de leur « résilience » et de ses échecs ↩
  8. Je précise, à l’attention des lecteurs malveillants (nombreux à la LICRA, qui me poursuit de sa colère indignée), que mes propos ne visent ici nullement l’indemnité réelle que les rescapés réels ont pu percevoir – rescapés réels à qui je souhaite le plus sincèrement du monde qu’ils puissent jouir de la vie autant qu’il est possible après cet épouvantable traumatisme. Je ne mentionne cette indemnité que parce qu’elle est thématisée dans la série ; elle fait l’objet de discussions, d’hésitations, de projets de négociations entre les personnages, d’épisode en épisode. Par ailleurs, les difficultés économiques d’Arnaud et Marie (sujette à des achats compulsifs, surendettée…) sont aussi thématisés dans le scénario : le couple est présenté comme ayant du mal à joindre les deux bouts, Arnaud ayant lâché son job dès le premier épisode, des scènes de ménage illustrent régulièrement le motif. Quand ils achètent la maison de campagne dans le dernier épisode, le spectateur, guidé par le motif de la galère économique que le scénario a méticuleusement tricoté d’épisode en épisode, ne peut pas ne pas penser que c’est l’indemnité qui a permis cette salutaire réparation. Il ne s’agit ni de s’en réjouir ni de s’en offusquer : c’est juste ce que la série raconte et met en scène. D’où ma formulation « probablement grâce à l’indemnité… ». En conclure, comme le fait la LICRA dans le portrait qu’elle me consacre, que je me serais « aussi illustrée par la publication d’un texte odieux sur les attentats du 13-Novembre, les assimilant à un acte de guerre en réplique aux bombardements de la France contre Daech et reprochant en des termes à peine voilés aux ex-otages de chercher à reprendre une vie normale avec l’argent de leurs indemnités » n’est pas seulement ignominieux : c’est aussi très révélateur de la profonde bêtise de ses zélateurs, qui ne savent lire ni une série, ni un article, aveuglés qu’ils sont par leur compulsion à calomnier. ↩

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