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Rubrique «À LIRE AILLEURS»

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05.11.2025 à 13:51

Soupe citoyenne contre l'extrême-droite à Ivry

Le RN organise une réunion publique à l'espace Robespierre. Il n'est pas le bienvenu dans notre ville.
Retrouvons-nous mercredi 5 novembre 2025, à partir de 18h30, devant le métro Mairie d'Ivry.

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Le RN organise une réunion publique à l'espace Robespierre. Il n'est pas le bienvenu dans notre ville.
Retrouvons-nous mercredi 5 novembre 2025, à partir de 18h30, devant le métro Mairie d'Ivry.

Mobilisons-nous contre l'extrême-droite !!

Grande soupe solidaire et festive !

Le RN organise une réunion publique à l'espace Robespierre. Il n'est pas le bienvenu dans notre ville.

Contre la venue de l'extrême-droite à Ivry et la normalisation du RN et de ses idées, montrons leur le véritable visage d'Ivry : une ville solidaire, joyeuse, antiraciste et antifasciste !

Retrouvons-nous mercredi 5 novembre 2025, à partir de 18h30, devant le métro Mairie d'Ivry.

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05.11.2025 à 11:00

Revendiquer la liberté dans la révolution et la guerre : une introduction au Groupe Anarchiste au Soudan.

Dans un article rédigé en consultation avec les camarades au Soudan, le groupe Black Rose / Rosa Negra (U.S.A) fournit un compte rendu écrit de la manière dont l'organisation aujourd'hui connue sous le nom d'Anarchist Group in Sudan (AGS) a vu le jour. Cette publication en est la traduction directe.

Texte intégral (4060 mots)

Dans un article rédigé en consultation avec les camarades au Soudan, le groupe Black Rose / Rosa Negra (U.S.A) fournit un compte rendu écrit de la manière dont l'organisation aujourd'hui connue sous le nom d'Anarchist Group in Sudan (AGS) a vu le jour. Cette publication en est la traduction directe.

La Révolution soudanaise compte parmi les grands soulèvements révolutionnaires du XXIᵉ siècle. Comme trop de nos grandes révolutions, elle a — du moins pour l'instant — été étouffée dans le sang et la dictature. Mais, à l'instar de toutes les grandes révolutions, elle a aussi été un creuset où se sont forgées de nouvelles idées, pratiques et tendances politiques pour le moins significatives.

Bien que l'anarchisme ne soit pas chose nouvelle en Afrique, comme dans de nombreuses autres régions du monde, il peine encore à dépasser le stade de tradition intellectuelle ou de mode de vie pour devenir un mouvement porteur de recommandations stratégiques et concrètes. En s'impliquant pleinement dans les mouvements sociaux qui ont porté la Révolution soudanaise, tout en développant leur propre organisation politique formelle, les anarchistes au Soudan ont réussi à élaborer une pratique révolutionnaire ancrée dans la lutte des classes de leur pays. Malgré des conditions radicalement différentes de celles que nous connaissons ici, leurs expériences nous offrent des leçons précieuses, tant sur le processus de lutte révolutionnaire que sur la survie en temps de guerre civile et d'intense répression.

Avant le déclenchement des manifestations massives de décembre 2018, le Soudan connaissait déjà une opposition grandissante à la dictature d'Omar el-Bechir et aux conditions économiques accablantes auxquelles la population était confrontée sous son régime. Cette atmosphère, marquée par des éclats successifs de protestations étudiantes et ouvrières incita de jeunes militants étudiants à chercher des systèmes de pensée capables de les aider à surmonter les nombreux obstacles auxquels ils/elles étaient confronté·e·s. C'est durant cette période que certains des membres fondateurs du Groupe Anarchiste au Soudan (AGS) ont découvert l'anarchisme, et que ce groupe a été fondé en avril 2017, d'abord en un petit cercle de cinq camarades.

L'AGS était au départ une petite organisation étudiante. Ses membres ont commencé par se concentrer sur l'implantation dans les universités soudanaises, en agissant dans la clandestinité et en ciblant les petits campus à la périphérie, là où la présence de l'État était moins marquée. Dans le contexte de l'opposition soudanaise, la clandestinité est une pratique tout à fait courante. L'AGS a évité stratégiquement la confrontation directe avec le pouvoir, préférant s'immerger dans les espaces de lutte populaire, notamment les syndicats étudiants. Le groupe a élargi son influence en entrant en contact avec de jeunes activistes en quête d'alternatives aux idéologies politiques perçues comme infructueuses et dépassées.

À mesure que l'organisation grandissait, elle a attiré des professionnel·le·s comme des avocats et des ingénieurs qui, par le biais de l'Association des professionnel·le·s soudanais, formaient une couche sociale clé dans la dynamique révolutionnaire. L'AGS a alors intensifié ses efforts de recrutement, s'est implantée dans de nombreuses universités et a gagné en influence au sein de la coalition des syndicats étudiants. Pendant cette période, le groupe a d'abord utilisé le nom de « Fédération anarchiste du Soudan », sous lequel plusieurs de ses communiqués sont toujours disponibles en ligne, avant d'adopter le terme de « groupe » plutôt que de « fédération », afin de mieux refléter son organisation unifiée et sa cohérence interne.

La fondation et la croissance initiale de l'AGS coïncidèrent parfaitement avec l'explosion de la Révolution soudanaise en décembre 2018. La Révolution a été menée par des mouvements sociaux de base : syndicats ouvriers et étudiants, organisations de femmes et comités de résistance de quartier.

Des manifestant·e·s célèbrent l'effondrement du gouvernement du président Omar el-Beshir en 2019.

Les comités de résistance méritent une attention toute particulière. Comparables aux comités de coordination locaux de la Révolution syrienne de 2011, les comités de résistance soudanais sont essentiellement de petits groupes de quartiers auto-organisés, créés pour participer aux manifestations et au processus révolutionnaire. En se regroupant sous forme de centaines de comités locaux, ils ont ont été au cœur du mouvement qui renversa el-Beshir. Nous les considérons comme un exemple emblématique de pouvoir populaire en action : un réseau de voisin·e·s qui affrontent le pouvoir étatique tout en prenant progressivement le contrôle de leur propre quartier en y créant les structures organisationnelles d'autogestion susceptibles de pouvoir remplacer l'État. 

Tout en restant clandestine, l'AGS a milité activement au sein des comités de résistance et des organisations étudiantes durant les premiers mois de la Révolution. Les militant·e·s ont pu défendre des positions anarchistes et influencer l'orientation des groupes sans se revendiquer publiquement comme anarchistes. En participant à cette vague massive d'auto-organisation couplée à des confrontations de rue, l'anarchisme est passé d'une idée à une pratique stratégique vécue. Pour l'AGS, l'anarchisme représentait un moyen concret de s'engager dans la lutte sociale tout en combattant toutes les forces autoritaires qui oppressent les populations soudanaises — qu'elles soient tribales, culturelles, militaires ou religieuses — une lutte globale pour la liberté et les droits individuels.

Les stratégies proposées par les anarchistes au Soudan sont sans précédent face à la crise sociale complexe du pays. Le principe même de rejeter les autorités les plus locales et informelles, comme la domination tribale ou le racisme ethnique, constitue le cœur du démantèlement des structures de pouvoir dans la société soudanise. Cela a des effets psychologiques sur les individus et des conséquences sociales qui peuvent les amener à affronter directement les autorités en place. Parce que, notre lutte ne se limite pas à combattre les autorités extérieures. Nous partons du principe que la liberté est indivisible : chaque personne mérite d'être libre, non seulement face aux institutions oppressives, mais aussi dans ses relations quotidiennes, où se jouent souvent des rapports de domination interiorisés. L'autorité, en réalité, est un comportement social fondé sur le désir de monopoliser la violence et d'empêcher les autres de vivre pleinement leur liberté.

— Membre de l'AGS, en dialogue avec des membres du BRRN, septembre 2025

Au sein des comités de résistance, l'AGS a coordonné des actions anarchistes afin de les orienter vers des perspectives plus anti-autoritaire. Les comités de résistance étaient, dans une large mesure, le reflet des dynamiques propres à la société soudanaise — des éléments fondamentaux de solidarité et d'entraide, indispensables pour survivre dans un pays où l'État ne fournit aucune aide à sa population. Bien que cette base ait pu leur donner une certaine force, elle signifiait aussi qu'un travail était nécessaire pour leur fournir le pouvoir organisationnel et la vision nécessaires afin de défier l'État. L'AGS a, par exemple, œuvré pour élargir la nature de nombreux comités, les faisant passer de structures restreintes et hiérarchisées (président·e, vice-président·e, etc.) à des espaces ouverts à toutes et tous les habitant·e·s du quartier.

Les manifestants s'affrontent avec les forces de sécurité après le coup d'État militaire initié par le général Abdel Fattah al-Burhan en 2021.

Parallèlement au travail d'organisation pratique, l'AGS initia l'organisation de « cercles de réflexion » pour discuter des idées anarchistes et travailla à rendre les textes anarchistes disponibles en arabe. Les modestes cotisations des membres servirent à imprimer des brochures anarchistes et à organiser des événements universitaires.

Alors que les mouvements sociaux soudanais réussirent à renverser el-Beshir dès le mois d'avril, l'armée prit le contrôle du gouvernement et la lutte s'intensifia. Le 3 juin 2019, les forces gouvernementales menèrent un massacre lors d'une manifestation de sit-in à Khartoum, faisant plus de 100 morts et plus de 70 victimes de viol. Ce fut le plus grand d'une série de massacres durant lesquels de nombreux·ses manifestant·e·s et camarades furent assassinés·e·s par les forces de l'État. En réponse au massacre du 3 juin, les travailleur·euse·s déclenchèrent une grève générale qui paralysa le pays et força la direction militaire à négocier. C'est dans ce contexte, celui d'un pays au bord du gouffre et où les comités de résistance prenaient le contrôle de territoires, que l'AGS se révéla publiquement lors d'une marche massive à Khartoum le 30 juin.

Évidemment, l'AGS essuya un important contrecoup après s'être revendiquée publiquement comme organisation anarchiste. Mais parce qu'elle s'était ancrée dans les syndicats étudiants et les comités de résistance, et qu'elle était connue de ses camarades et voisin·e·s comme un groupe engagé portant des idées cohérentes, elle réussit à recruter de nombreux·ses nouveaux·elles membres. Beaucoup de jeunes, désillusionné·e·s par les faux choix présentés par les soi-disant dirigeants — y compris les communistes « de libération nationale » qui avaient soutenu la dictature — furent attiré·e·s par la position principielle des anarchistes en faveur de la liberté.

Néanmoins, l'anarchisme au Soudan n'a pas pu se développer librement bien longtemps. Le soulèvement populaire obtint une victoire historique en juillet 2019, forçant la chute de la dictature militaire et instaurant un gouvernement de transition civilo-militaire. Mais cette solution était intrinsèquement instable, et l'armée ainsi que les Forces de soutien rapide (RSF) menèrent une contre-révolution en octobre 2021, rétablissant une dictature absolument brutale. [1] Mais, là encore, cette solution se révéla aussi instable que fragile, et les RSF et les Forces armées soudanaises (SAF) ne tardèrent pas à s'affronter dans une lutte de pouvoir, déclenchant ainsi une guerre civile en avril 2023. Les tragédies qui dévastèrent le pays depuis lors furent trop profondes et nombreuses pour être détaillées dans ce récit.

Des membres lourdement armés des Forces de Soutien Rapide (RSF).

La guerre civile, dont les racines plongent aussi bien dans l'héritage du colonialisme britannique que dans les histoires locales de domination, est également une guerre pour la survie des Noir·e·s face à une tentative de génocide. Les pouvoirs en place au Soudan, en particulier les RSF, sont des suprémacistes arabes qui cherchent à dominer et à éradiquer les groupes ethniques soudanais à la peau plus foncée. Nos camarades rapportent que l'esclavage est perpétué contre les Noir·e·s au Soudan, et voient donc la lutte actuelle comme une lutte pour la libération face à un autoritarisme fondé sur le racisme.

Cette période de lutte acharnée contre le retour du pouvoir militaire a fait de nombreuses victimes, dont des camarades anarchistes comme Omar Habbash, médecin à El-Fasher, Sara, militante de premier plan à Khartoum, et tant d'autres. Les camarades, où qu'elles/ils soient, sont constamment menacé·e·s de prison — une détention qui, en règle générale, conduit à la mort dans le mois qui suit. Face à ces pertes, l'AGS reste déterminée à poursuivre la lutte avec dévouement et courage. Avec l'extension du conflit armé, les camarades anarchistes ont adopté deux approches principales : combattre aux côtés des milices de résistance indépendantes pour défendre la population contre les exactions des RSF et des Forces armées soudanaises, ou éviter la confrontation armée en semant des idées et en mobilisant les actions à la base afin de développer le mouvement. L'AGS soutient actuellement ces deux approches stratégiques.

Alors que le pays est déchiré par une guerre par procuration menée par des puissances extérieures comme les Émirats arabes unis et l'Égypte, déterminées à exploiter ses ressources naturelles, et que sept factions militaires différentes déchaînent la terreur sur les populations soudanaises, l'AGS a malgré tout survécu. Ses membres, dispersé·e·s comme réfugié·e·s internes ou parfois à l'étranger, parviennent à rester en contact et à coordonner leurs actions. Lorsqu'ils/elles le peuvent, ils/elles gèrent des cuisines communautaires, aident les réfugié·e·s à atteindre des zones sûres, fournissent des soins médicaux, soutiennent les résistances et continuent de diffuser de la propagande anarchiste.

Black Rose / Rosa Negra a coordonné des actions de solidarité avec l'AGS, en collaboration avec des organisations camarades au sein de la Coordination internationale pour l'anarchisme organisé (ICOA), notamment Die Plattform en Allemagne et l'Union communiste libertaire en France. Une campagne publique de levée de fonds a permis de récolter plus de 20 000 dollars pour aider l'AGS à acquérir une presse industrielle, destinée à la fois à diffuser de la propagande anarchiste et à assurer une autonomie économique sur le terrain. Bien que la presse d'impression ne soit pas encore pleinement opérationnelle en raison de lignes de front mouvantes et des vagues de répression continues, elle symbolise la détermination de l'AGS à poursuivre la lutte révolutionnaire anarchiste, considérée comme une nécessité pratique, même au cœur de l'une des pires catastrophes humanitaires de la planète.

Image de la presse d'impression achetée par l'AGS grâce aux fonds récoltés par la campagne de solidarité de Black Rose / Rosa Negra.

Les anarchistes au Soudan pensent que la solidarité internationale est cruciale pour mettre fin au conflit, en mettant particulièrement l'accent sur les puissances qui alimentent la guerre civile :

Combattre l'intervention étrangère dans la guerre au Soudan nécessite un soulèvement mondial des réseaux en lutte pour exposer les entités qui profitent du sang versé — non seulement au Soudan, mais dans toute la région. Idéalement, ce sont leurs propres populations qui devraient se dresser contre leurs gouvernements pour mettre fin à ce bain de sang, largement motivé par l'accumulation de richesse. Chacun·e peut contribuer à dénoncer ce crime de financement de la guerre dans son propre pays et sensibiliser les gens : la guerre au Soudan peut cesser si le soutien extérieur prend fin — et alors, la paix suivra.

— Membre de l'AGS lors d'un dialogue avec les membres du BRRN, septembre 2025.

L'objectif politique immédiat de l'AGS est la fin de la guerre et des massacres perpétrés par les RSF et l'armée. À plus long terme, le groupe continue de lutter pour surmonter les divisions tribales et ethniques exacerbées par le colonialisme raciste, afin de remporter la révolution sociale et de construire une société libertaire, féministe et autogérée au Soudan et en Afrique.

Pour nous, révolutionnaires issu·e·s de pays impérialistes, la réalité de nos camarades soudanais·e·s semblent bien éloignée. Pourtant, nous avons beaucoup à apprendre de leur expérience : leur insertion au cœur d'un mouvement populaire, la transformation de l'anarchisme en une pratique vécue et significative pour toute la classe ouvrière, leur action collective en tant que force politique influençant la lutte et leur détermination à poursuivre le combat anarchiste dans les conditions les plus difficiles... Tout cela devrait non seulement renforcer notre respect, mais aussi nous inspirer profondément.

Soutenir nos camarades au Soudan est essentiel pour tou·te·s celles et ceux qui souhaitent voir l'anarchisme redevenir un véritable moteur de libération mondiale.

—> pour les soutenir des liens sont disponibles dans l'article suivant :


[1] Les Forces de Soutien Rapide (RSF) furent créées en tant que groupe paramilitaire principalement composé de membres des tribus Janjaweed. Auparavant, elles agissaient en tant que force auxiliaire de l'État soudanais et étaient utilisées par la junte militaire qui prit le pouvoir en 2019 pour réprimer violemment les manifestations populaires. Depuis 2023, elles sont en conflit armé avec les Forces armées soudanaises (SAF).

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05.11.2025 à 10:00

A Bobigny, un viol filmé commis par deux policiers en plein tribunal

Le 19 juin dernier, Disclose en partenariat avec L'œil du 20h de France 2 révélait le résultat d'un an d'enquête des journalistes Leïla Miñano, Sarah Benichou et Sophie Boutboul sur les violences sexuelles commises par les forces de l'ordre. Résultat : elles avaient recensé au moins 429 victimes, et 215 agresseurs. Précision d'importance, il ne s'agit là bien sûr que des affaires pour lesquelles les victimes ont porté plainte.

Texte intégral (1704 mots)

Le 19 juin dernier, Disclose en partenariat avec L'œil du 20h de France 2 révélait le résultat d'un an d'enquête des journalistes Leïla Miñano, Sarah Benichou et Sophie Boutboul sur les violences sexuelles commises par les forces de l'ordre. Résultat : elles avaient recensé au moins 429 victimes, et 215 agresseurs. Précision d'importance, il ne s'agit là bien sûr que des affaires pour lesquelles les victimes ont porté plainte.

Or, quand on sait qu'une petite minorité de victimes de violences sexistes et sexuelles dépose plainte, encore moins lorsque l'agresseur est un représentant de l'autorité publique, on ne peut que penser aux milliers de victimes anonymes. Hier, on apprenait que deux de ces prédateurs sexuels avaient de nouveau fait une victime au tribunal de Bobigny, dans la nuit du 28 au 29 octobre.

Un viol filmé en plein Tribunal

Dans la nuit du 28 au 29 octobre, une jeune femme « déférée au parquet de Bobigny pour des faits de soustraction par un parent à ses obligations légales » d'après le communiqué du procureur Eric Mathais, était victime de viols par deux agents de police. Le préfet de police de Paris Patrice Faure a déclaré sur X qu'ils avaient été suspendus et placés en garde à vue. L'IGPN a été saisie. Le ministre de l'Intérieur et ancien préfet de police Laurent Nunez a déclaré qu'il s'agissait là « d'agissements extraordinairement graves et inacceptables ». Il ajoute que si l'enquête « conclut que des faits criminels ont été commis, et que l'honneur des policiers a été sali, il va de soi que des sanctions seront prises ». Comble de l'horreur, on apprend ce 31 octobre que l'un des deux policiers a filmé la scène et sauvegardé la vidéo sur son téléphone. Leur garde à vue a été prolongée.

Mais on connaît la musique : l'enquête sera bâclée, les preuves risquent d'être effacées, la parole de la victime remise en question, et les policiers ne verront sans doute pas l'ombre d'une cellule. La machine est déjà en branle : une source proche du dossier a affirmé que les deux agents incriminés avaient écrit leur propre rapport administratif pour exposer leur version des faits. Les deux hommes reconnaissent les relations sexuelles, mais assurent « qu'elles étaient consenties ». C'est sûr que lorsque l'on passe la nuit dans une cellule insalubre au sous-sol d'un tribunal en attendant une comparution immédiate, dans un état de stress extrême, la première chose que l'on souhaite c'est avoir des relations sexuelles avec les policiers qui nous enferment.

La machine médiatique leur trouve déjà des excuses : « Les deux fonctionnaires placés en garde à vue sont âgés de 23 et 35 ans, et ne seraient pas dans le métier depuis longtemp », peut-on lire dans Le Parisien, qui donne la parole à des avocats pour qui « il y a un vrai défaut d'encadrement au dépôt de Bobigny […] Les policiers sont souvent très jeunes ». Parce que quand on est jeune, on est plus prompt à violer ? Quelle étude peut étayer ces accusations très graves envers la jeunesse ?

La presse évoque également la vétusté du tribunal, le 2e plus important après celui de Paris. On peut lire dans les colonnes du Monde qu'il est « réputé perclus de problèmes (d'organisation, d'effectifs, de vétusté, etc.) mais doit bénéficier des prochains travaux d'extension du palais de justice ». On cherche le rapport entre la vétusté d'un tribunal et le fait que des hommes, représentants de l'ordre qui plus est, violent une femme.

Les violences sexuelles de la police, une impunité organisée

Dans aucun de ces articles on ne mentionne que les violences sexuelles au sein de la police font système et qu'elles sont utilisées comme arme de maintien de l'ordre, comme le révélait l'enquête de Disclose et l'Oeil du 20h. Et qu'elles sont largement autorisées, puisque jamais punies.

En 2010 à Marseille, un policier se rend au domicile d'Anna pour une fausse reconstitution. Il place alors son arme de service sur la table, puis la viole. La jeune femme se retrouve enceinte, et le policier la contraint à avorter. Comme toujours, lors de l'instruction, il invoque que la relation était consentie. La justice conclut à un non-lieu. Il est toujours en poste.

En 2015 à Drancy dans le 93, Adam se retrouve plaqué sur la banquette arrière d'un véhicule de police par deux agents, pendant qu'un troisième le viole avec sa matraque. « J'ai dit non, j'ai crié, j'ai pleuré » raconte Adam. « Tu te souviendras de nous » lui répondent les policiers municipaux. Il ressort de l'hôpital avec 10 jours d'ITT dus à une lésion anale. Placé en garde à vue pour viol, l'agent municipal voit la qualification ramenée à de simples « violences volontaires ». Il travaille toujours à ce jour. En 2017 à Aulnay-sous-Bois en région parisienne, Théo est violé à coups de matraque métallique en pleine rue, et est aujourd'hui handicapé à vie. Les policiers n'écopent que de sursis.

En 2018 au sous-sol du tribunal de Toulon, Claude M., brigadier-chef de 55 ans, impose une fellation à Angélique, 36 ans, effondrée en apprenant sa prochaine incarcération. Elle le supplie de pouvoir appeler sa fille pour pouvoir la prévenir. Il l'emmène dans les toilettes, lui assène : « Fais la gicler cette salope, après tu pourras téléphoner », rajoutant à la violence de l'enfermement, la violence de l'agression.

La liste de ces agressions sexuelles est encore longue, et révèle un système que personne ne veut remettre en question. À l'heure actuelle, il est aberrant de constater qu'aucune loi n'interdit factuellement à un policier ou gendarme d'avoir des relations sexuelles avec une personne placée en garde à vue ou en détention. En sachant que ces moments représentent en soi un acte de privation de liberté souvent humiliant et traumatisant, y ajouter le vécu de violences sexuelles rend l'expérience insoutenable. Ces violences sont en outre presque systématiquement couvertes par les collègues des agents incriminés. L'enquête révèle que “tous les policiers ont profité de leur statut et du climat d'impunité qui règne au sein de l'institution”.

Le ministère de l'Intérieur choisit de laisser faire : « Pas la moindre circulaire ou note interne consacrée au sujet » n'a jamais été envoyée, révèle encore Disclose dans son enquête parue en juin, qui explique que la seule réponse du ministère a été « une enquête est ouverte dès que l'administration a connaissance d'une plainte pour des faits de violences sexuelles ». Aucune enquête sérieuse n'a jamais été réalisée sur les violences sexistes et sexuelles au sein de la police. « La direction générale de la police n'a enregistré que 63 condamnations de fonctionnaires pour des faits allant du harcèlement sexuel au viol au cours des dix dernières années ». 63.

Depuis 2021, seuls 18 policiers ont été sanctionnés pour des faits de violences sexuelles. Seulement 10 expulsés de l'institution ou mis à la retraite. En 2023, 46 gendarmes ont été sanctionnés. Combien ont été radiés ? Seulement 3. Il s'agit bien d'une impunité générale organisée. Disclose rappelle également un fait capital : les sanctions envers les forces de l'ordre sont validées par les plus hautes instances. « Le préfet examine les blâmes, les sanctions contre des sous-officiers sont étudiées par la direction générale de la police nationale, quant aux décisions prises pour des officiers, elles remontent jusqu'au ministère de l'intérieur. Enfin, quand le dossier implique un commissaire de police, c'est à la Présidence de la République de trancher ».

Mais qu'attendre d'un président de la République qui adule les violeurs comme Gérard Depardieu et les fait entrer au gouvernement comme Gérald Darmanin ?

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05.11.2025 à 09:00

Oaxaca 2006 : entretien avec L., activiste autonome

Dans cet entretien extrait du livre ¡ Duro Compañer@s ! Récits d'une insurrection mexicaine de Pauline Rosen-Cros, paru en 2010 aux éditions Tahin-Party, L. nous raconte ce qu'il a vécu pendant ces mois d'insurrection. Ce qui nous intéresse dans ses propos, ce n'est pas le récit d'une révolution exotique. C'est au contraire ce qui nous concerne directement, ce en quoi nous pouvons nous reconnaître, et ce qui pourra enrichir nos pratiques de lutte.

Texte intégral (1651 mots)

Dans cet entretien extrait du livre ¡ Duro Compañer@s ! Récits d'une insurrection mexicaine de Pauline Rosen-Cros, paru en 2010 aux éditions Tahin-Party, L. nous raconte ce qu'il a vécu pendant ces mois d'insurrection. Ce qui nous intéresse dans ses propos, ce n'est pas le récit d'une révolution exotique. C'est au contraire ce qui nous concerne directement, ce en quoi nous pouvons nous reconnaître, et ce qui pourra enrichir nos pratiques de lutte.

Oaxaca, 2006 : une grève de profs qui installent un campement dans le centre-ville, une attaque de la police contre ce campement, la population qui se solidarise et repousse l'attaque... C'est le point de départ d'une lutte qui dura presque six mois. Une lutte multiforme, contre un gouverneur haï, et contre tout un système social et économique invivable. Une lutte à laquelle prirent part des secteurs extrêmement variés de la population : indigènes et punks, femmes au foyer, profs, étudiant-es, pères de familles...

Les formes d'organisation et d'action aussi bien que les enjeux sont multiples. L'APPO, Assemblée populaire des peuples d'Oaxaca, qui fédère le mouvement, se veut une organisation d'organisations, sur des bases autogestionnaires et assembléistes.

Des radios, et même une chaîne de télé, sont prises par les insurgé-es, et défendues avec rage (une attaque de flics contre la radio Universidad est repoussée après sept heures de combat).

La ville se couvre de barricades.

De la défense contre les raids meurtriers de pistoleros à l'apprentissage de la prise de décision collective, c'est toute la vie quotidienne qui est bouleversée.

Pour des militant-es autonomes, comment se fondre dans un tel mouvement ? Comment y participer, quelle place y prendre ?

Extrait :

D'abord, de par sa présence, une barricade impressionne. Certains disent qu'il y en a eu deux mille, d'autres disent quatre mille, d'autres cinq mille... En réalité il est très difficile de savoir combien il y en a eu. Mais ce que je peux t'assurer, c'est qu'il y en a eu dans tous les endroits de la ville, et de toutes les tailles. Il y en avait de très petites, avec cinq ou dix personnes, mais elles étaient là, sur le pied de guerre. Et puis il y avait des barricades impossibles à franchir. Celles qui ont été les mieux organisées, c'était surtout celles des avenues très importantes, celle de Brenamiel par exemple était bien organisée, c'est reconnu. Je ne parle pas que des jeunes, hein, quand je parle d'une barricade, je ne me réfère pas juste aux jeunes, ou aux hommes, je parle de celui ou celle qui est derrière les casseroles, à faire du café, je parle de celui ou celle qui est derrière une pierre, je parle de tous ceux et celles qui étaient attentifs à ce qui pouvait arriver. Et bien sûr, le ou la barrikader@, le ou la bazuker@, avait une importance cruciale, notamment dans les alertes, ou pour éloigner ceux qui arrivaient pour nous agresser. Le seul fait d'être présent sur une barricade est... C'est un espace de fluidité, de revendication d'une lutte, mais c'est aussi un lieu de vie. Des familles voisines depuis dix ou quinze ans, qui ne se parlaient jamais, se sont retrouvées à préparer un feu ou un café ensemble, à discuter, à prendre soin de la nuit. Je crois que ça a été un espace naturel de confluences et de lutte, de résistance. Il y a eu des grand-pères, des grand-mères, qui donnaient ce qu'ils pouvaient donner. Dans tous les quartiers, dans toutes les colonias, tous étaient énervés, tous en avaient marre : “Nous allons réussir à le mettre dehors, oui, on va gagner ! Ce que l'on fait est juste, on fait quelque chose de bien !”.

La barricade, ça va plus loin que le fait d'être un obstacle. C'est un espace où les gens se sont connus, croisés, où ils ont pleuré, où ils ont ri, où on s'est motivés, où on a cru, ensemble, à cette lutte. Moi, c'est là que j'ai senti ce que c'était de faire partie d'une barricade. Et en termes d'auto-défense, on peut dire qu'elles ont bien fonctionné. Pendant des mois, ils n'ont pas pu rentrer : ils se sont absentés, ils y réfléchissaient à deux fois avant de s'approcher d'une barricade, ils réfléchissaient bien. S'il y a eu des morts et des barricades, c'est aussi que nous étions tous disposés à cela. Ils avaient des balles, des armes, et nous on avait nos bâtons, nos pierres.

Une barricade qui a été très importante, et où il y a eu beaucoup de participation, c'était celle du Canal 9, avant qu'ils ne détruisent les antennes. Celle de Símbolos Patrios également, qui bouchait une très grande avenue menant à l'aéroport. Il y a eu aussi des barricades qui n'ont pas été permanentes, mais qui ont été des pièces clés. À chaque fois qu'il y avait une agression, on les mettait en place, par exemple à la station essence de l'avenue Juárez. Là, on a empêché un bon nombre de convois d'arriver au centre ville pour agresser je ne sais quelle autre barricade. À chaque fois qu'ils frappaient, on allait barricader ce croisement, on savait que c'était un passage obligé pour les convois. Il y avait aussi celle du Periférico, une avenue très grande, vers le Ministère des finances. Celles-ci ont été les premières, mais il y en a eu partout : à San Martín [quartier de ce qu'on appelle la périphérie du centre], à l'Infonavit [équivalent des quartiers HLM], à la Reforma [quartier plus riche], dans le centre aussi.

De toute façon, elles ont toutes eu un rôle primordial pour cette guerre. Quelque chose est né là-bas, un espoir. [...] Quand la PFP [Police fédérale préventive] est entrée dans la ville le 29 octobre, elle a avancé barricade après barricade, et la résistance a commencé à se mettre en place. La première qu'ils ont traversée malgré la résistance fut celle de Brenamiel. Il a fallu qu'il y ait un mort pour qu'ils y arrivent. Quand on est sortis de la Okupa, cette nuit-là, et qu'on est arrivés à Cinco Señores, on s'est dit que ce carrefour était très important et que la PFP allait entrer aussi par là. À ce moment-là, le seul endroit qui était à nous, le seul bastion de l'APPO, c'était la Cité Universitaire. Tout le monde appelait à un repli stratégique dans l'université, tout le campement du zócalo s'est déplacé vers la fac. On a donc pensé qu'il fallait une barricade à ce carrefour (qui menait directement au campus), pour ne pas finir coincés comme dans une souricière. Une fois arrivés à l'université, on a pris une garde dont personne ne voulait, à savoir celle de la rue de l'Université – tout le monde préférait garder la radio. Vers sept heures du matin, on a commencé à mettre en place cette barricade qui fut si importante.

Cinco Señores, ce sont cinq avenues qui se rejoignent, c'est énorme, c'est un des carrefours les plus grands de la ville. On n'a pas consulté l'université, c'était logique qu'il fallait protéger l'endroit, sinon ils allaient pouvoir entrer là comme dans un moulin. Avec les gens de la Okupa essentiellement, on a fermé le carrefour à l'aide de dix-huit bus et un poids lourd. Voilà, la ville était coupée en deux avec cette barricade. Nous sommes ensuite allés fermer l'autre côté qui était à découvert, le côté du centre commercial. Au fur et à mesure, on a vu arriver à Cinco Señores des bandes de jeunes qui travaillaient dans le coin, qui ont commencé à s'organiser, à vouloir faire partie de tout ça, et nous nous sommes alors concentrés sur la barricade du centre commercial. Cette autre barricade a été très symbolique, parce qu'en plus de la fermer avec des voitures et des bus, on l'a renforcée avec tous les caddies du supermarché. On a passé la journée à emboîter les caddies, rangée après rangée. Peu à peu, on s'est organisés, pour voir comment on allait y vivre, comment on allait se répartir les tâches, parce que cette barricade-là a été permanente. Au bout d'une semaine, on s'est rendu compte que la barricade de Cinco Señores allait être très problématique.

L'intégralité de l'entretien est à lire sur infokiosques.net. Une version brochure/PDF est disponible au format cahier imprimable/photocopiable et au format page par page.

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04.11.2025 à 12:00

Soirée de lancement du livre « Personne n'est illégal ». Photographies et récits de Sans-Papiers en lutte

La Coordination 75 des Sans-Papiers et l'Intercollectif d'Île-de-France des Sans-Papiers organisent une soirée de lancement pour présenter leur livre sur les luttes actuelles des Sans-Papiers ce samedi 8 novembre de 19h à 22h à l'AERI (57 rue Etienne Marcel, à Montreuil).

Texte intégral (931 mots)

La Coordination 75 des Sans-Papiers et l'Intercollectif d'Île-de-France des Sans-Papiers organisent une soirée de lancement pour présenter leur livre sur les luttes actuelles des Sans-Papiers ce samedi 8 novembre de 19h à 22h à l'AERI (57 rue Etienne Marcel, à Montreuil).

Au programme :
Musique, présentation du livre, discussion avec les délégués des 8 collectifs composant l'intercollectif (CSP75, CSP17, CTSPV, CSP Montreuil, CSP93, le Collectif des Jeunes du Parc de Belleville, les Gilets Noirs, Droits devant !!) et repas à prix libre.

Le livre :
Depuis le mouvement des sans-papiers de 1996, qui a vu l'occupation de l'église Saint-Bernard, le mouvement s'est structuré au sein de collectifs et de coordinations de collectifs. Leurs revendications : la régularisation de tous les sans-papiers, la liberté de circulation et la liberté d'installation. Ce qui les pousse à agir : sortir de l'aliénation du travail au noir, échapper à l'arbitraire des préfectures et à la peur des contrôles policiers.

À travers les photographies et la parole des délégués de la Coordination 75 des Sans-Papiers et de l'Intercollectif d'Île-de-France, ce livre donne à voir et à entendre une lutte continue pour des droits mais aussi les acteur.ice.s de cette lutte. Les photographies, exclusivement prises en manifestation entre 2020 et 2025, permettent de voir évoluer un collectif formé d'individualités ; elles montrent la nécessité de la lutte, qui se lit dans les regards, et la force que donne l'action collective. Les entretiens permettent de comprendre cette lutte et de saisir ses formes et ses enjeux actuels. Ils se sont déroulés entre novembre 2024 et juillet 2025 et ont permis de récolter les récits de 20 délégués, de 8 collectifs et associations de la région parisienne.

« Personne n'est illégal ». Photographies et récits de Sans-Papiers en lutte (2002-2025), un livre d'Anne Volery et de la Coordination 75 des Sans-Papiers, avec la participation de l'Intercollectif des Sans-Papiers, 160 p, 2025, 20EUR - ISBN : 979-10-979706-0-4

Pour tout renseignement :
personne.n.est.illegal@gmail.com
Pour commander le livre :
règlement par chèque à l'ordre de DIEL d'un montant de 29EUR (livre+frais de port) à envoyer par voie postale à : DIEL (Droits Ici Et Là-bas) - Boîte 158, Maison des associations du 11e, 8 rue du Général-Renault 75011 Paris.

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04.11.2025 à 11:00

[Livre] Essai d'écologie politique antifasciste

L'introduction du livre récent “Essai d'écologie politique antifasciste” disponible en téléchargement gratuit sur le site www.antifa.eco

Texte intégral (1616 mots)

L'introduction du livre récent “Essai d'écologie politique antifasciste” disponible en téléchargement gratuit sur le site www.antifa.eco

La situation est désespérante. Alors que les conséquences désastreuses du réchauffement climatique sont de plus en plus manifestes, les origines de cette crise sont occultées et les moyens d'y remédier semblent plus lointains que jamais. Les illustrations de cela sont partout.

Dans un meeting de campagne, deux jours avant son élection en 2024, Donald Trump affirme ainsi que le réchauffement climatique est un canular. Pour le prouver, il indique les températures relativement basses enregistrées au moment où il parle [1]. Lors de sa visite à Mayotte après le passage de l'ouragan Chido, Marine Le Pen critique le plan de reconstruction gouvernemental. Elle soutient qu'il n'aborde pas la question de « l'immigration clandestine », comme si la catastrophe n'était pas naturelle, mais migratoire [2]. En Espagne, après les inondations désastreuses en octobre 2024, c'est le parti d'extrême droite climatonégationniste Vox qui profite de la catastrophe. Il réussit à blâmer la gauche pour la gestion de la crise, malgré la responsabilité évidente du gouvernement de droite au pouvoir [3]. Sur les réseaux sociaux, des théories du complot viennent ajouter une couche supplémentaire de confusion. Ainsi, lors des incendies dévastateurs à Los Angeles en décembre 2024, des vidéos très populaires sur TikTok expliquaient que les feux avaient été allumés volontairement pour détruire les preuves de crimes sexuels commis par « l'élite hollywoodienne » [4].

Pour ne rien arranger, ce renforcement de l'extrême droite et la diffusion de ses idées servent aussi à criminaliser des mouvements écologistes et sociaux qui se battent pour une véritable sortie de la crise. Dans les médias français, les activistes radicaux qui s'opposent à des bassines de rétention d'eau illégales ou occupent des sites d'entreprises responsables de la crise climatique sont ainsi dépeints comme étant « terroristes » [5]. Alors, qu'en parallèle, les médias minimisent le vrai terrorisme d'extrême droite, comme le montre le traitement journalistique de l'attentat à Magdebourg par un sympathisant du parti extrémiste allemand AfD [6]. De même, la légitimation du discours d'extrême droite pousse une partie de l'électorat à préférer une vision raciste, dans laquelle les problèmes seraient causés par les étrangers et les migrants, à celle des forces progressistes qui tentent d'allier la justice sociale avec la transition écologique.

En fait, la crise actuelle semble avoir deux faces. D'un côté, c'est la planète qui se réchauffe, causant des effets dévastateurs sur les habitants de la Terre. De l'autre, ce sont les idéologies les plus morbides de l'histoire qui renaissent, entraînant notre système dans un effondrement au ralenti et nous éloignant encore plus d'une solution véritable. Le réchauffement global et la multiplication des catastrophes à l'échelle mondiale coïncident avec l'essor spectaculaire d'une force politique qui nie fermement ces réalités et qui n'a aucune solution à offrir. Une telle chose était difficilement prévisible. Comme le remarque le « Zetkin Collective » : la « montée de l'extrême droite n'apparaît dans aucun modèle climatique » [7].

Ce constat engendre différentes questions. D'abord viennent des questions analytiques. Comment ces crises écologiques et politiques sont-elles liées ? Comment expliquer que la crise génère des explications et des schémas de pensée qui ne permettent, non seulement, pas de comprendre les causes de celle-ci, mais renforcent aussi des forces réactionnaires qui n'ont aucune solution à proposer ? Puis viennent des questions stratégiques. Comment, dans ce flou politique, serait-il possible de construire un mouvement écologiste et social qui propose de véritables solutions ? Comment les écologistes pourraient-ils convaincre la majorité de la nécessité d'agir contre la crise climatique, si les gens attribuent celle-ci à des causes qui n'en sont pas ? Comment faudrait-il s'opposer aux forces sociales qui mènent à cet état de fait ?

C'est à ces questions que tente de répondre le nouvel Essai d'écologie politique antifasciste disponible en téléchargement gratuit sur antifa.eco.


[1] McDonald, J. (2024, septembre 9). Trump Clings to Inaccurate Climate Change Talking Points. FactCheck.Org. https://www.factcheck.org/2024/09/trump-clings-to-inaccurate-climate-change-talking-points/

[2] A Mayotte, Marine Le Pen critique le plan de reconstruction du gouvernement. (2025, janvier 5). Le Monde. https://www.lemonde.fr/politique/article/2025/01/05/a-mayotte-marine-le-pen-critique-le-plan-de-reconstruction-du-gouvernement_6482763_823448.html

[3] Cassard, J. (2024, novembre 5). Inondations en Espagne : Les lourdes erreurs de la droite au pouvoir. Reporterre. https://reporterre.net/Inondations-en-Espagne-les-lourdes-erreurs-de-la-droite-au-pouvoir

[4] Doan, L., & Delzer, E. (2025, janvier 16). Wildfire conspiracy theories are going viral again. Why ? - CBS News. CBS News. https://www.cbsnews.com/news/wildfire-conspiracy-theories-viral-fact-check/

[5] Cazorla, A. (2023, juin 21). Comment la presse de droite construit l'«  ennemi écolo  ». Reporterre. https://reporterre.net/Comment-la-presse-de-droite-construit-l-ennemi-ecolo

[6] Vincent, T. (2025, janvier 29). Magdebourg : Le profil du tueur ne correspond pas aux attentes des médias français et de l'extrême droite. Blast. https://www.blast-info.fr/articles/2024/magdebourg-le-profil-du-tueur-ne-correspond-pas-aux-attentes-des-medias-francais-et-de-lextreme-droite-aca0Dud0Q_y29nGzuaSAAg

[7] Zetkin Collective. (2020). Fascisme fossile : L'extrême droite, l'énergie, le climat. La fabrique éditions, p.12.

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