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13.04.2025 à 17:56

La dangerosité de la révolution trumpienne 

Galia Ackerman

L’analyse de la nature du régime que Trump impose à son pays nous amène à établir des parallèles avec les heures sombres de l’histoire.

<p>Cet article La dangerosité de la révolution trumpienne  a été publié par desk russie.</p>

Texte intégral (1819 mots)

La guerre des tarifs a dévié l’attention publique d’une analyse plus profonde de la révolution trumpienne. Personne ou presque ne doute plus qu’il s’agisse d’une véritable révolution : le but proclamé de Trump et de son administration est la destruction de « l’État profond » américain, à savoir de l’État tout court, et une révision totale de la politique étrangère, au nom d’un retour à la grandeur américaine et d’un « âge d’or » à venir. Cette destruction est menée avec une rapidité déconcertante : rien qu’en février 2025, 172 017 employés fédéraux ont été limogés dans les secteurs tels que la santé, l’éducation, les contrôles sanitaires, les opérations humanitaires dans le monde entier, etc. L’objectif est double : économiser des sommes énormes (mille milliards de $), mais également combattre les « idées progressistes » véhiculées par les agences concernées.

Même si le Congrès et le Sénat sont acquis à Trump, celui-ci préfère gouverner par décret, pour aller vite, et pour montrer que toute discussion est inutile. Son mépris pour la justice est manifeste, et les décisions judiciaires ne sont pas toujours appliquées. Les oppositions sont difficiles, car si l’on ne met pas encore des gens en prison pour leurs idées (mais on expulse allègrement des étrangers qui osent protester), les centres névralgiques de l’opposition sont lourdement sanctionnés, comme l’Université de Columbia. Les médias sont muselés, en partie en tout cas, et l’adhésion des fonctionnaires aux thèses complotistes de Trump est la condition sine qua non de leur maintien à leurs postes. Les objectifs traditionnels de la politique étrangère des États-Unis sont abandonnés : les alliés européens et autres sont trahis et abandonnés, les ennemis traditionnels comme la Russie sont en revanche adulés, seuls les « deals » gouvernent la ligne politique du pays.

Même si l’Amérique de Trump n’est pas un pays totalitaire, ni même autoritaire, malgré une réduction notable du champ des libertés publiques, quelques traits fondamentaux du régime actuel doivent nous alerter sur la marche de l’histoire américaine. J’aimerais comparer la révolution trumpienne et le régime qui en est issu à deux autres grandes révolutions du XXe siècle : la révolution bolchévique et la révolution nazie. Il y a au moins trois traits fondamentaux qui les unissent.

Le premier trait est le ressentiment et la haine sciemment cultivés au sein de société à l’égard d’une partie de la même société et des « ennemis » extérieurs dont il faut se débarrasser ou qu’il faut vaincre pour s’engager sur la voie menant vers un « avenir radieux ». Dans le cas des bolcheviks, c’était une haine de classe : il fallait détruire la classe des « exploiteurs » industriels et fonciers, ainsi que tous les éléments qui soutenaient cette classe : la presse, les administrations, l’appareil militaire, l’appareil éducatif, etc. Dans le cas des nazis, les ennemis premiers étaient les Juifs et le prétendu complot mondial de ceux-ci, mais aussi les homosexuels, les malades mentaux et, bien entendu, tous les opposants politiques. Les bolcheviks et les nazis partageaient une haine féroce du système démocratique qui est basé sur la loi, les élections libres, l’alternance du pouvoir, la liberté de la parole, etc. 

Le ressentiment dans les deux cas était dû à des causes réelles. L’exploitation des ouvriers et des paysans dans la Russie tsariste, le lourd héritage du servage, l’incompétence et la corruption des échelons supérieurs de l’armée pendant la Première Guerre mondiale, qui a causé des pertes énormes au sein de l’armée russe, l’oppression des peuples colonisés, tel était le sol fertile pour le ressentiment, arrosé par la propagande des partis de gauche, et surtout par celle des bolcheviks, la plus radicale. En Allemagne, le ressentiment a été causé non seulement par la défaite dans la Première Guerre mondiale, mais aussi, et surtout, par les conditions draconiennes de la paix de Versailles qui vouaient la population allemande à l’hyperinflation et à la misère. C’est ainsi qu’Hitler a su canaliser ce ressentiment et ce sentiment d’injustice en accusant la « juiverie mondiale » et les pays de l’Alliance des maux du peuple allemand.

Le ressentiment est également bien fondé dans le cas américain. La désindustrialisation, le passage au capitalisme financier qui n’a plus rien à voir ou presque avec la production des biens, la spéculation boursière, la défaillance du système de santé public, l’accès à la propriété de plus en plus difficile, la gangrène de la drogue, la dette extérieure abyssale dont le service pèse lourdement sur l’économie nationale, telle est la réalité qui a poussé tant d’Américains dans les bras de Trump. Le locataire de la Maison-Blanche a attisé sciemment ce ressentiment en accusant la bureaucratie américaine d’avoir permis des gaspillages colossaux et le monde entier d’avoir profité des « largesses » américaines au détriment du peuple américain. Dans sa démagogie, il est allé jusqu’à affirmer que l’Union européenne avait été créée spécialement pour nuire aux États-Unis !

Deuxième trait commun : la spoliation en tant que moyen de résoudre en partie les problèmes énumérés ci-dessus, et « remonter la pente ». Le régime bolchevik a allègrement aboli la propriété privée et nationalisé les moyens de production et les terres. Il a spolié non seulement les grands capitalistes, mais des millions de paysans et de citadins appartenant à la classe moyenne. Le pillage institutionnalisé a également été mené par l’Armée rouge dans tous les pays « libérés », avant l’instauration des régimes communistes « frères ». Le régime hitlérien a spolié les biens juifs, mais n’a pas confisqué les moyens à son propre peuple (les Juifs n’en faisaient pas partie). Sa spoliation a été dirigée vers l’étranger : la conquête du Lebensraum et le pillage sans vergogne des pays occupés a permis aux Allemands de vivre pendant quelques années dans l’aisance, avant le tournant de la guerre, en 1942-1943.

La spoliation est également une caractéristique essentielle du régime américain. Les tarifs prohibitifs et infondés imposés sur les importations américaines sont une spoliation. Trump a l’intention affichée (malgré la suspension de 90 jours) de piller 160 pays du monde, dans des proportions variables, afin d’engranger des bénéfices colossaux et de commencer à amortir la dette. Le caractère impérialiste rapace du régime américain s’est dévoilé dans le « deal » proposé à l’Ukraine exsangue. Pour rembourser l’aide américaine octroyée sans conditions par l’administration Biden, Trump a l’intention de s’approprier le contrôle des matières premières et des infrastructures ukrainiennes, afin de la transformer en colonie qui ne dit pas son nom. Et le chantage est un outil parfait de cette spoliation : si vous ne faites pas ce que je vous dis, je cesse toute aide.

Le troisième trait commun est le messianisme. Les bolcheviks exhortaient de leurs vœux le communisme, une société sans classes et sans exploiteurs, tout en exploitant sans pitié leur propre population. Les nazis rêvaient d’un Reich millénaire où la race aryenne serait maître et vivrait dans l’opulence, tout en envoyant à la mort des millions de ses hommes et en exterminant les Juifs et autres indésirables.

Pour instaurer « l’âge d’or », Trump appelle à expulser des millions d’immigrés accusés d’être « des criminels » (comme les Juifs sous Hitler), à détruire la bureaucratie qui assure le fonctionnement de l’État, à infliger des pénalités au monde entier et à rétablir l’Empire américain, d’où son désir d’annexer le Canada ou d’occuper le Groenland. Cet « âge d’or », qui par ailleurs n’a jamais existé, doit permettre aux Américains un plein retour à l’emploi, à l’aisance, dans l’atmosphère obsolète des idées conservatrices, comme le dénigrement des LGBTQ, l’interdiction de l’avortement, les pratiques racistes et discriminatoires, etc.

Il faut remarquer que l’idée messianique, dans tous ces régimes, est floue à dessein et ne sert qu’à faire rêver les masses grâce au travail de propagande omniprésente qui explique la nécessité de se serrer la ceinture par l’idée de bâtir une société meilleure pour les enfants et les générations futures. Trump, confronté à la chute des bourses et aux perspectives d’une hausse des prix massive, ne fait pas autre chose que cela : il exhorte le peuple américain à s’armer de patience pour que ses mesures portent ses fruits et que « l’âge d’or » advienne.

Il va de soi que les régimes de ce type ne permettent pas d’alternance du pouvoir. Il a fallu aux bolcheviks 70 ans et des millions morts au Goulag pour que leur régime tombe, il a fallu une guerre et 50 millions de victimes pour que le régime nazi soit vaincu. Trump a déjà plus ou moins annoncé son troisième mandat, et tout sera fait (y compris d’énormes manipulations algorithmiques sur les réseaux sociaux) pour que les Démocrates ne puissent pas revenir au pouvoir.  

Je n’ai pas parlé du régime de Poutine qui – bien qu’il s’apparente par certains aspects à ces trois cas de figure : bolcheviks, Allemagne nazie, Amérique trumpienne – n’est pas dans la même catégorie. Le régime russe, c’est la contre-révolution, et non la révolution, car il n’a pas su produire de vraie idée messianique qui anime les masses. Dans ce sens, le régime de Trump est bien plus dangereux, pour le peuple américain et pour le monde entier. Il est encore temps pour les Américains de se réveiller, mais le feront-ils avant qu’il ne soit trop tard ? 

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13.04.2025 à 17:55

Contre la nouvelle charge des « réalistes »

Jean-François Bouthors

Pour justifier l’abandon de l’Ukraine, les « réalistes » prétendent que le temps des Borgia et de Machiavel est de retour.

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Texte intégral (5039 mots)

Dernière mise à jour le 13 avril 2025

À ceux qui prétendent que le temps des Borgia et de Machiavel est de retour, il faut répondre que le véritable réalisme de l’auteur du Prince consistait non pas à décourager l’opinion publique de résister à l’oppression, mais à donner au peuple le moyen de comprendre comment et pourquoi mener le combat pour la liberté.

Où est passée l’Ukraine ? On pouvait se le demander pendant que les cours des bourses mondiales semblaient jouer aux montagnes russes, après les annonces et les revirements de Donald Trump sur les hausses brutales des taxes américaines à l’importation. Quel contraste avec, quelques semaines plus tôt, l’adoption d’une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU sur le sort de l’Ukraine qui avait vu les États-Unis voter avec la Russie, la Chine et la Corée du Nord ; avec ensuite la scène hallucinante de l’entretien dans le bureau ovale de la Maison-Blanche de Volodymyr Zelensky avec Donald Trump et son vice-président James David Vance ; et avec l’impressionnante série de réunions qui avait suivi entre partenaires occidentaux (à l’exception des États-Unis) l! Il s’agissait alors pour les Occidentaux, et en particulier pour les Européens, de marquer un soutien à Kyïv et de pourvoir, autant que possible, à la fourniture d’armes et d’équipements sans lesquels les Ukrainiens seraient en grande difficulté. Force est de constater que, pour le plus grand bonheur de Vladimir Poutine, l’agitation forcenée du président américain tend à faire du sort de l’Ukraine un sujet secondaire. Peu importe, semble-t-il, que l’offensive russe soit considérablement ralentie dans tous les oblasts annexés par Moscou. Peu importe même que, conséquence de la pagaille économique mondiale que Trump organise, le prix du pétrole s’effondre et mette – si elle se poursuit – la Russie en grande difficulté, comme l’explique elle-même Elvira Nabioullina, la présidente de la Banque centrale russe. Le monde regarde ailleurs. En quelque sorte, l’Ukraine, tout en étant confrontée à la guerre d’agression russe, devient une victime collatérale de la politique MAGA.

Il y aurait beaucoup de chose à dire des interactions entre les différentes crises et conflits planétaires et de leur caractère systémique, mais il faut, concernant l’Ukraine, s’arrêter sur le point suivant : la situation créée par les conséquences de la réélection de Donald Trump, dont on découvre chaque jour l’ampleur et les nouvelles facettes, voit revenir en force le discours d’un prétendu « réalisme », qu’on avait vu à l’œuvre avant et après le début de l’invasion russe de l’Ukraine, et dont le dernier avatar est la sortie tonitruante du nouveau livre de Giuliano da Empoli, L’heure des prédateurs. Celui-ci nous explique que le monde revient à sa tendance naturelle qui est d’être le terrain d’affrontement des puissants et que la prime va au cynisme et à la cruauté, comme l’aurait démontré Machiavel, grand admirateur de César Borgia. Pour le dire succinctement, les Borgia sont de retour, ils s’appellent Trump, Poutine, Ben Salman (le prince saoudien), Musk… c’est celui des présidents des empires qui se reconstruisent violemment et des patrons de la Tech qui rêvent d’un gouvernement par les algorithmes.

D’un mage à l’autre

Le livre de Giuliano da Empoli a fait l’objet dès le jour de sa sortie, d’une page entière d’entretien avec son auteur dans Le Figaro, sous ce titre éloquent : « Incapable de réagir, la vieille élite a mérité d’être balayée », et de deux pages d’interview dans L’Express, où l’auteur affirme que « les prédateurs représentent au fond le retour à la normalité du politique, régi par la force ». Notons au passage que celui qui fut conseiller de Matteo Renzi semble confondre la politique et le politique, c’est-à-dire, d’un côté, l’art de faire de la politique et, de l’autre, le champ dans lequel elle s’exerce et sa structuration. Ignorer cette nuance fondamentale peut conduire à de graves méprises dans la compréhension des situations et dans le choix des conséquences qu’il faut en tirer pour agir. Quelques jours plus tôt, paraissait un grand portrait de l’essayiste italo-suisse dans Libération, intitulé « Le mage de raison », clin d’œil, bien sûr à son livre qui rata d’une voix le prix Goncourt, portrait romancé et enjolivé de l’un des conseillers – mais non des moindres – de Vladimir Poutine. Livre dont Cécile Vaissié a critiqué solidement les « ambiguïtés gênantes » dans Desk Russie le 1er décembre 2022. Le Mage du Kremlin, sorti en avril 2022, a largement contribué à construire la légende de Vladislav Sourkov, qui s’était bien entendu prêté à la rencontre avec Giuliano da Empoli, sans doute parce qu’il pensait alors que ce projet de livre contribuerait à persuader les Occidentaux que soutenir l’Ukraine était peine perdue. Il ne s’agissait pas d’embellir le tableau du pouvoir russe actuel, le Kremlin n’en a que faire, mais, bien au contraire, de chercher à produire un effet de sidération pour saper les espoirs que pourrait susciter en Occident la résistance de l’Ukraine à l’agression russe. L’objectif russe a été globalement atteint, puisque le livre est devenu un best-seller mondial !

Quinze jours avant la sortie du dernier opus de Giuliano da Empoli, Vladislav Sourkov, qui ne s’était plus manifesté depuis longtemps, a opportunément accordé à L’Express un entretien publié sous le titre de Une suivant : « Le vrai mage du Kremlin parle. Entretien avec Vladislav Sourkov, l’homme qui a fabriqué Poutine ». En réalité, si les mots ont un sens, Sourkov n’a jamais « fabriqué Poutine », mais est lui-même une créature des « organes ». Selon l’ancien ministre russe de la Défense, Sergueï Ivanov, il a servi à la Direction générale des renseignements de l’État-Major des forces armées russes, plus connue par l’acronyme GRU, entre 1983 et 1985, période emblématique d’une réorientation des services de sécurité russes sous l’impulsion d’Andropov. Le chef du KGB, devenu en 1982 Premier secrétaire du PCUS après la mort de Brejnev, pensait que le pouvoir des siloviki devait se donner les moyens de survivre à l’effondrement du communisme. Ajoutons que le père de Sourkov a déclaré être entré au GRU après son service militaire (il aurait opéré au Vietnam), tandis que son grand-père aurait été un fidèle tchékiste. Bon sang ne saurait mentir…

Pour cet entretien « exceptionnel », Sourkov s’est fait longuement prier. Il aurait accepté de s’exprimer en apprenant que l’hebdomadaire avait accueilli les plumes de Malraux et de Sartre. L’Express, qui fait mine d’y croire, a accepté que l’entretien ne soit pas en face à face, mais réalisé par écrit, en deux temps, par l’envoi de deux séries de questions. Des conditions idéales pour que revienne de Moscou un texte parfaitement ciblé, calibré, non pas pour polir la langue de bois, mais pour mener une opération d’influence, un acte assumé de guerre psychologique. De fait, dans le texte signé par Sourkov, il ne s’agit toujours pas de séduire, de donner une image aimable de la Russie, on sait trop bien au Kremlin que ce n’est plus l’heure de faire risette, mais d’effrayer, d’afficher une détermination capable de décourager l’opinion publique française alors qu’Emmanuel Macron, revenu de ses errements du début de l’année 2022, se veut le fer de lance du soutien à Kyïv en Europe, et qu’il cherche comment les Alliés pourraient offrir à l’Ukraine, si un accord de paix était trouvé, les garanties de sécurité que Washington se refuse à fournir.

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Giuliano da Empoli // TF1, capture d’écran

Une séquence impressionnante

La publication de l’entretien de Sourkov est venue à point nommé, au moment où les Ukrainiens se retiraient d’une grande partie du territoire qu’ils avaient occupé depuis leur percée du 6 août 2024, dans l’oblast de Koursk, en territoire russe. Les circonstances et les causes de ce retrait rapide, interprété à chaud comme un effondrement et une défaite ukrainiens par nombre de commentateurs, restent obscures, même si la poussée russe est indéniable. Cet épisode de la guerre a donné lieu à une formidable opération de désinformation dont Donald Trump a été personnellement l’un des vecteurs, annonçant à tort l’encerclement de milliers de soldats ukrainiens, alors que des informations fiables démontrant le contraire étaient publiques. Ce qui semble sûr, c’est que, pour des raisons qui restent à éclaircir, les Ukrainiens ont été contraints à un repli tactique dans un moment crucial, qui était celui du début des manœuvres diplomatiques russo-américaines pour « régler » le conflit. Les guillemets, évidemment, s’imposent.

Rappelons que peu après l’altercation du Bureau ovale, le 28 février, le Président des États-Unis avait décidé de suspendre les livraisons d’armes et la fourniture de renseignements militaires à Kyïv, et que les négociations qui venaient de commencer entre Russes et Américains à Dubaï mettaient en scène une forme de lune de miel entre Moscou et Washington. Bref, tout visait à installer l’idée que sous la pression de Trump, les Ukrainiens n’auraient d’autre choix que de plier devant les exigences russes et que les Européens, laissés sur la touche, devraient se résigner à faire moins que de la figuration. Pourtant, à ce jour, les Ukrainiens tiennent encore une petite partie de territoire dans l’oblast de Koursk, ils ont commencé à porter le combat à la frontière russe en direction de Belgorod, ils ont presque stoppé les offensives russes autour de Pokrovsk et de Toretsk, et la réalité du terrain indique qu’après les énormes pertes enregistrées par les Russes depuis l’automne dernier en vue d’arriver à la table des négociations en quasi-vainqueurs, l’armée de Vladimir Poutine est dans une situation de grande fragilité, alors que la guerre a mis l’économie civile de la Russie en sérieux danger. On se trouve donc devant le paradoxe suivant : c’est au moment où le pays de Poutine est affaibli que Trump lui tend la main ! Le maître du Kremlin ne se contente pas de la saisir, il tente de faire croire que la partie est jouée et que l’heure est venue d’un nouveau partage du monde…

Ainsi donc, la séquence à laquelle on a assisté depuis l’altercation dans le Bureau ovale, avec le retrait ukrainien contraint d’une large partie du territoire conquis en août dernier dans l’oblast de Koursk, les négociations russo-américaines en Arabie saoudite, l’interview de Sourkov et enfin la publication en fanfare de L’heure des prédateurs de Giuliano da Empoli, contribue à installer dans l’opinion publique la conviction que l’Europe et ses alliés, au sein d’une OTAN dont les États-Unis veulent rester les maîtres tout en signifiant qu’ils ne se sentent plus tenus par les termes de l’Alliance, n’ont plus qu’à regarder passer les trains des grands carnassiers de la planète, en humbles herbivores incapables de se défendre qu’ils seraient.

Les faits et les interprétations

Il serait bien évidemment excessif de dire que tout cela est organisé ou concerté, mais il est évident que l’appareil de propagande russe ne se prive pas de fournir de manière abondante des lectures et interprétations des événements et de leur succession qui labourent non seulement les opinions publiques, mais aussi les représentations des acteurs politiques des différents pays concernés. Cela ne se borne pas, loin de là, aux déclarations publiques russes, cela passe par des commentateurs occidentaux impressionnés, et pour certains influencés, qui peinent à distinguer les faits des interprétations qui leur sont suggérées via les canaux les plus divers. Rappelons que tous les acteurs, y compris occidentaux, fournissent des éléments de langage qui les servent, mais qui ne constituent pas nécessairement « la vérité » des faits, et que des fuites organisées visent souvent à orienter la lecture des événements pour servir des objectifs déterminés. On l’a vu abondamment, et depuis des mois, par exemple, autour de la question de la légitimité prétendument douteuse du président Volodymyr Zelensky. Les effets de loupe sont multiples et répétés dans un système médiatique dominé par les questions d’audience dont les analyses sont guidées par les algorithmes, et par l’impact des réseaux sociaux eux-mêmes largement sous influence. Le scepticisme qui devrait s’imposer à l’observateur fait d’autant plus défaut que la profondeur historique manque fréquemment pour corriger les biais des interprétations « en direct ».

C’est sur ce « fond de sauce » que tend à s’imposer le discours sur le « réalisme » qui vise à nous persuader, comme le répète avec gourmandise et constance l’ancien ambassadeur de France aux États-Unis Gérard Araud, que l’on est revenu à ce que la politique internationale a toujours été, à l’exception d’une brève parenthèse « heureuse » dans la seconde moitié du xxe siècle et jusqu’à ce que Poutine passe à l’action : le combat sans morale de chaque nation ou empire pour ses intérêts, par la guerre ou par la diplomatie et la politique qui ne seraient que la poursuite de la guerre par d’autres moyens. C’est la thèse de Giuliano da Empoli qui se poursuit avec L’heure des prédateurs, sur la lignée d’une réflexion entamée depuis son livre Les ingénieurs du chaos paru en 2019. Mais l’écrivain et conseiller politique italo-suisse né en France ajoute aux « princes de ce monde » les grandes firmes de la Tech et leurs patrons, et il est vrai que ces derniers disposent de moyens qui excèdent ceux de nombreux États dans le monde. Da Empoli évoque la figure de César Borgia, dont, écrit-il, « Machiavel fera le modèle de son Prince : non pas le souverain idéal, mais la bête de pouvoir réelle, moitié renard et moitié lion, sachant utiliser l’astuce pour flatter les hommes et la force pour les subjuguer ». Notre temps serait donc celui des nouveaux « borgiens ». L’auteur choisit cette fois un procédé impressionniste. Non pas un discours méthodique, mais l’exposé de saynètes saisissantes, glanées au fil de ses fréquentations des puissants et de ses voyages. Effets-chocs garantis. Faut-il le créditer, comme le fait son éditeur en quatrième de couverture, de « la lucidité d’un Machiavel et [de] la hauteur de vue d’un moraliste » ?

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Édition de luxe de Machiavel en russe

Machiavel, un vrai républicain

De Machiavel, il semble avoir retenu, comme beaucoup, l’image d’un conseiller politique cynique et désabusé. L’inventeur du « machiavélisme ». Mais cette image est une légende que le philosophe Claude Lefort, pour ne citer que lui, a depuis longtemps démontée. L’auteur du Prince, semble oublier Giuliano da Empoli, était en réalité un républicain convaincu. Il n’a pas rédigé un manuel de la tyrannie, mais cherché à montrer que la République ne trouvait sa vérité que dans l’affrontement de deux désirs antagonistes, celui des grands qui veulent dominer et celui du peuple, derrière lequel il se rangeait, qui refuse d’être oppressé. Son « réalisme », loin d’être fataliste, visait à donner les éléments nécessaires pour engager en toute connaissance de cause le conflit qui était selon lui le ressort profond d’un bon fonctionnement de la République. Ce que défendent les soi-disant « réalistes », c’est une lecture borgne et tronquée de Machiavel.

L’auteur du Prince, mais aussi des importants Discours sur la première décade de Tite-Live croyait non pas aux idéologies, non pas aux leçons de morales, non pas aux valeurs chrétiennes – qu’il accusait d’être démobilisatrices –, non pas aux beaux discours et aux exemples fascinants, mais à la « veritá effettuale », à la vérité effective de la chose politique, aux effets de la nécessité. Pour lui, l’injustice, pente naturelle des grands, ne pouvait être tempérée que par la résistance du peuple, et s’il décrit l’art de la politique avec une précision clinique, c’est pour permettre que le conflit des désirs opère ses effets bénéfiques d’ajustement. Dans son esprit, il ne faut pas se résigner, mais combattre.

Il n’y a donc pas d’avènement d’une prétendue « heure des prédateurs » qui ne nous laisseraient que le choix de nous soumettre, puisque les élites – européennes et américaines – n’ont pas su agir à temps. Ce dont nous avons besoin, c’est plutôt d’une analyse lucide et courageuse pour mener le combat et donner au « peuple » une vraie culture de la liberté et de la responsabilité. Celle-ci s’est dissoute dans le fleuve de la société de consommation, et le phénomène s’est accéléré depuis la chute du mur de Berlin. En ce sens, Zelensky est plus authentiquement disciple de Machiavel que Giuliano da Empoli, qui soutient que « dans ce monde nouveau les borgiens ont un avantage décisif, car ils ont l’habitude d’évoluer dans un monde sans limites ». L’ancien conseiller de Matteo Renzi oublie que selon Machiavel, c’est précisément l’absence de limite, l’absence de résistance qui conduit les dominants à la catastrophe, à l’échec ou à l’enlisement dans les marais de leurs succès. Ce que l’on peut déjà observer avec Donald Trump qui pourrait bien se révéler comme le pire ennemi des États-Unis : le 47e président américain n’est revenu au pouvoir que depuis trois mois et déjà il a fait la démonstration que ses obsessions produisent une politique qui met son pays en grand danger, que ce soit en matière de sécurité ou du point de vue économique.

La démobilisation fait son œuvre

Certes, l’essayiste italo-suisse a raison : les élites européennes ont tardé à réagir alors que, depuis le début des années 2000, les avertissements ne manquaient pas quant à la nature du régime de Vladimir Poutine. Nombre de ceux qui en font partie (mais pas tous) ont été naïfs, veules, « idiots utiles », voire corrompus pour certains, plus attachés à leur confort, à leur carrière et à leur image que lucides, il est vrai. Mais faut-il en conclure que l’heure de la République au sens où l’entendait Machiavel est passée ? Faut-il en conclure que celle de la démocratie, pour laquelle l’écrivain chinois Liu Xiaobo, prix Nobel de la paix, est mort en prison en 2017, n’est plus d’actualité ? Faut-il considérer que l’équilibre des pouvoirs pensé par Montesquieu n’est plus qu’un outil dépassé à remiser au rang des vieilleries qu’on oublie ? Le livre de Giuliano da Empoli se termine sur l’image du vaillant maire de Lieusaint qui se bat courageusement contre l’envahissement de son bourg par les flots de voitures téléguidées par Waze, mais sans espoir de faire mieux que vider la mer avec une petite cuillère… Ce maire n’appartient pas au monde des puissants dans lequel l’auteur évolue à son aise, comme une sorte de « dissident agréé », d’un non-conformisme délibérément autolimité. L’élégance et la prudence de celui qui s’installe dans la posture du fou des nouveaux princes borgiens accordent à l’édile de Lieusaint une forme d’admiration désespérée : « la lutte continue », écrit-il pour conclure à la fois le bref portrait du maire et le livre. Mais, en définitive, cette manière de dénoncer les prédateurs en concluant sur l’impuissance de ceux qui voudraient s’y opposer conforte l’idée que la bataille est perdue.

N’en doutons pas, cette démonstration démobilisatrice fait son œuvre. Si les réunions organisées par Emmanuel Macron et Keir Starmer, le Premier ministre britannique, ont abouti à des déclarations de soutien à l’Ukraine, avec des promesses de livraisons d’armes, elles sont loin de déboucher sur un engagement décisif : Français et Anglais sont bien isolés lorsqu’ils évoquent l’idée d’envoyer des troupes au sol en Ukraine. Et encore n’y viendraient-elles pas prochainement pour renforcer Kyïv dans son combat contre l’agresseur, mais seulement pour garantir la mise en œuvre d’un accord de paix dont la signature reste aujourd’hui très hypothétique… On a surtout entendu répéter un nouvel élément de discours selon lequel l’armée ukrainienne était la première et la meilleure garantie de sécurité pour son pays. Autrement dit, l’aversion pour le risque et la réticence à agir continuent d’être les principaux ingrédients de la position occidentale sur l’Ukraine.

Servitude ou liberté ?

Là encore, il faut relire Machiavel. L’auteur du Prince, rappelle Lefort, misait sur la jeunesse, et c’est pour elle qu’il écrivait afin de lui donner les moyens de passer à l’action pour unifier l’Italie, car il avait vu que la « sagesse » des plus anciens les enfermait dans un conservatisme impuissant et morbide. Pour lui, la politique ne se concevait pas sans la prise de risque… Dans nos sociétés occidentales vieillissantes, la peur de mourir prend le pas sur le goût de la liberté. L’atermoiement l’emporte sur l’engagement. Pourtant nul n’échappera à la mort tandis qu’il appartient à chacun de participer à ouvrir dans l’histoire des temps et des espaces de liberté, non seulement pour lui-même, mais pour les générations à venir. Ce qu’Éluard avait bien compris lorsqu’il écrivit, en 1942, dans la France occupée par l’envahisseur allemand, son célèbre poème qui s’achève par « Je suis né pour te connaître/Pour te nommer/Liberté. »

Comprenons bien l’enjeu : ce qui se joue en Ukraine ne se limite pas à la question russo-ukrainienne. Il s’agit de savoir s’il existe encore, dans le monde occidental, dans ce monde né au début du premier millénaire, de la rencontre d’Athènes, Jérusalem et Rome, ce monde qui a inventé la République et la démocratie, le courage de vivre dans l’incertitude et le risque de la liberté qui caractérisent précisément l’une et l’autre. La question n’est pas de se demander si les chars de Poutine arriveront ou non un jour prochain à Berlin ou à Paris, mais si nous sommes déterminés à combattre ceux qui veulent aujourd’hui installer d’une manière ou d’une autre des régimes, des systèmes, des réseaux et des modes de domination sur toute la planète, que ce soit par la force, la démagogie ou la technologie – les trois se conjuguant souvent. Trouverons-nous en nous-mêmes l’énergie et le cran de nous insurger ou donnerons-nous aux générations futures le spectacle d’une nouvelle servitude volontaire, version contemporaine de celle que dénonçait en 1548 Étienne de la Boétie ? Car, comme l’écrit Lefort, commentant Machiavel, « c’est seulement là où le conflit trouve à se manifester, c’est-à-dire là où le peuple se montre capable de résister à l’oppression des grands, que se forgent de bonnes lois, que la République mérite vraiment son nom ». Nous n’en sommes donc pas au retour à une prétendue logique normale et cruelle « du politique » qui ferait de nous des spectateurs désarmés, sidérés par la marche du monde et le cynisme des puissants, mais au moment où l’histoire nous convoque à nous engager pour refuser toutes les logiques d’oppressions, qu’elles soient politiques ou technologiques. Les Ukrainiens ont fait leur choix. Et nous ?

<p>Cet article Contre la nouvelle charge des « réalistes » a été publié par desk russie.</p>

13.04.2025 à 17:55

Ukraine : l’éléphant dans la pièce

Philippe De Lara

La guerre des « tariffs » participe à la guerre contre l’ordre international menée par Poutine et ses amis dictateurs.

<p>Cet article Ukraine : l’éléphant dans la pièce a été publié par desk russie.</p>

Texte intégral (1809 mots)

L’auteur montre que la guerre commerciale de Trump participe dans ses effets, sinon dans son intention, à la guerre contre l’ordre international menée par Poutine et ses amis dictateurs, et augmente le chaos mondial, alors que la sécurité de l’Europe est en jeu.

Depuis que Donald Trump a lancé sa guerre des « tariffs » (droits de douane, le plus beau mot de la langue anglaise selon le président américain), une autre guerre, une vraie, la guerre d’Ukraine, a disparu des médias. Le temps de cerveau disponible des populations est accaparé par la guerre commerciale de Trump – d’abord contre le monde entier puis, aux dernières nouvelles, contre la Chine. Pour un peu, nous ne saurions pas que l’Ukraine occupe à nouveau un morceau de territoire russe, cette fois dans la région de Belgorod, une information pourtant importante. Même LCI, la chaîne de télévision qui consacrait le plus de temps d’antenne à l’Ukraine, suit désormais à plein temps le feuilleton des tariffs. Exit l’Ukraine. Cette amnésie soudaine est passablement irrationnelle et même, j’ose le mot, imbécile.

Évidemment, elle est funeste pour les Ukrainiens. L’attention des dirigeants et des opinions publiques passant à autre chose, les décisions militaires et financières des alliés, vitales pour l’Ukraine après le lâchage américain, risquent de tarder encore plus. La protection du ciel ukrainien, attendue depuis le premier jour de la guerre, attendra encore – où sont les missiles Patriot, les avions de chasse européens, indispensables pour empêcher la guerre sauvage de Poutine contre les villes ukrainiennes ? Comme dit le proverbe, « loin des yeux, loin du cœur ».

Mais il y a plus. Hypnotisés par les nouvelles manœuvres de Trump, nous oublions l’échec de la précédente, le cessez-le-feu en Ukraine. Pour y parvenir, Trump était prêt à toutes les concessions en faveur de la Russie dont – disons-le – le sacrifice de l’Ukraine et, d’abord, de son président, coupable d’avoir provoqué le conflit, de rechigner à rembourser le montant de l’aide américaine, et de ne pas porter de cravate dans le Bureau ovale. Trump et ses acolytes ne cachent pas leur mépris, voire leur haine vis-à-vis de l’Ukraine. Le général Kellogg, qu’on disait mieux disposé envers Kyïv, parle maintenant d’une partition de l’Ukraine, sur le modèle de Berlin après la Seconde Guerre mondiale1. Mais la Russie ne marche pas, elle refuse le cessez-le-feu, et exige en préalable à l’arrêt des combats que tous les problèmes de l’architecture de sécurité en Europe (sic) soient résolus aux conditions russes. En changeant de sujet, Trump s’exonère à bon compte de sa trahison, de sa mesquinerie et, pour finir, de son échec sur le « dossier » ukrainien – commentaire cynique d’un ambassadeur français, préposé depuis trois ans aux prédictions défaitistes, « Trump a décidé de lâcher l’Ukraine et il cherche le moyen de le faire de manière élégante » (sic), entendons : en détournant l’attention du monde. Et ça fonctionne : le monde n’a plus d’yeux que pour les tariffs. Et de discourir sur la cohérence ou l’absurdité de la politique américaine, sur la question de savoir si les tariffs sont un bluff du roi du deal ou une entreprise méthodique de destruction du libre-échange et de ses institutions de régulation. Jusqu’au prochain zapping : et maintenant chers téléspectateurs, voici l’invasion du Groenland et l’achat du canal de Panama (ou l’inverse).

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Iouri Ganf. À la barre atomique. 1962. Caricature soviétique anti-américaine // Domaine public

Non que la guerre des tariffs soit un sujet négligeable. Les risques de krach boursier, voire de krach bancaire sont bien réels, et la réaction de la Chine ne s’arrêtera pas à la hausse des droits de douanes sur les importations en provenance des États-Unis, notamment parce qu’elle devra trouver de nouveaux débouchés à ses excédents gigantesques, qui vont déferler sur le marché européen. C’est donc bien une promesse de chaos économique et géopolitique. C’est justement là que l’inconséquence médiatique est à son comble : on ne voit pas que les dangers de la guerre des tariffs ne sont si grands et inquiétants qu’à cause de la guerre mondialisée lancée par le Kremlin en février 20222. Sans l’invasion de l’Ukraine, sans les menaces de guerre en Europe, la guerre des tariffs serait une péripétie, grave sans doute, mais guère plus préoccupante que les mesures protectionnistes prises par Trump au cours de son premier mandat. C’est la guerre de Poutine contre l’Occident global qui rend les tariffs trumpiens si dangereux. La sécurité économique de l’Europe n’est un enjeu crucial que parce que sa sécurité tout court est menacée par la Russie. Autrement dit, la guerre russe contre l’Ukraine est l’éléphant dans la pièce, que personne ne voit ni ne veut voir, bien qu’il soit la cause du chaos mondial.

En réalité, la guerre commerciale de Trump participe dans ses effets, sinon dans son intention, à la guerre contre l’ordre international menée par Poutine et ses amis dictateurs. Ce n’est pas être un libre-échangiste béat que de rappeler que, dès l’origine, la fondation d’un ordre international fondé sur le droit, c’est-à-dire sur le principe de l’égale souveraineté de tous les États, allait de pair avec la promotion du commerce international et de l’abaissement des barrières douanières. Le FMI est créé en 1945, suivi par le GATT3, préfiguration de l’OMC, qui sera fondée en 1995. La mondialisation dominée par le dollar n’est pas sans défaut, elle a entraîné des déséquilibres sociaux et écologiques majeurs, elle doit être corrigée et sans doute ralentie, mais c’est un système qui a profité jusqu’à présent à la plus grande partie de l’humanité. Si elle était remplacée par la loi des empires, c’est-à-dire la loi du plus fort, ce serait un désastre pour le monde entier, aussi bien les bénéficiaires que les victimes de l’ordre international libéral.

<p>Cet article Ukraine : l’éléphant dans la pièce a été publié par desk russie.</p>

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