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08.12.2023 à 14:18

Chapitre 8 : Enquêtes et reportages sur les problèmes spécifiques aux femmes

Alcyone Wemaere

GIJN a compilé une liste de récentes enquêtes et reportages sur des questions qui affectent les femmes.
Texte intégral (634 mots)

GIJN a compilé une liste de récentes enquêtes et reportages sur des questions qui affectent les femmes. Consultez régulièrement les mises à jour.

08.12.2023 à 13:38

8 méthodes pour consulter gratuitement les publications scientifiques et universitaires

Denise-Marie Ordway

Dans cet article, vous découvrirez huit méthodes destinées aux journalistes pour consulter gratuitement les publications scientifiques et universitaires.
Texte intégral (2055 mots)

Des méthodes sont à la disposition des journalistes pour consulter gratuitement les publications scientifiques

Dans cet article, vous découvrirez huit méthodes destinées aux journalistes pour consulter gratuitement les publications scientifiques et universitaires.

Note de la rédaction : Cette fiche de conseils, sur les différentes manières dont les journalistes peuvent consulter gratuitement les publications scientifiques et universitaires, a été publiée pour la première fois en septembre 2018 et a été mise à jour depuis. Initialement publiée par The Journalist’s Resource, elle est reproduite ici avec son autorisation.

Nous qui travaillons pour The Journalist’s Resource, nous apprécions beaucoup les publications scientifiques, en particulier celles qui ont été validées par un comité de lecture . Nous savons que les travaux de recherche constituent un outil des plus précieux pour les journalistes, pour la couverture des questions de politique générale et la vérification des faits.

Hélas, les journalistes ont souvent du mal à avoir accès aux travaux publiés dans les revues scientifiques. En effet, un grand nombre de ces revues proposent un accès payant aux publications des chercheurs, et les abonnements peuvent être trop onéreux pour les rédactions en général et les budgets des journalistes en particulier. Par exemple, l’abonnement à la revue américaine Proceedings of the National Academy of Sciences, publiée par la National Academy of Sciences, coûte plus de 200 dollars par an pour une personne, et pour son unique usage personnel. On dénombre des milliers de revues scientifiques dans le monde.

Les journalistes débrouillards peuvent cependant utiliser d’autres moyens pour accéder à ces publications. Nous vous en livrons huit ci- dessous.

1. Allez à la bibliothèque

Les bibliothèques publiques sont souvent abonnées aux revues scientifiques, et il suffit d’avoir une carte de lecteur pour pouvoir les consulter. La bonne nouvelle, pour les journalistes trop occupés pour se déplacer, c’est que certaines bibliothèques autorisent leurs usagers à consulter en ligne des bases de données d’articles scientifiques revus par un comité de lecture.

Aux Etats-Unis, les instituts d’enseignement supérieur et les universités proposent ainsi un accès en ligne aux revues scientifiques, par le biais de leurs bibliothèques. Les bibliothèques universitaires sont ouvertes à tous. Souvent, les instituts privés offrent aussi à leurs anciens étudiants un accès gratuit à leurs ressources.

2. Demandez un compte gratuit aux revues scientifiques

Beaucoup de revues scientifiques parmi les plus lues permettent un accès gratuit aux journalistes, même si certaines limitent leur offre aux seuls journalistes spécialisés dans des sujets ou domaines particuliers. L’American Economic Association (AEA), par exemple, propose un accès gratuit aux journalistes, et ce pour ses huit revues, dont l’American Economic Review. Vous pouvez faire une demande d’ouverture de compte sur la page de l’association réservée aux médias.

“Je pense que beaucoup de gens ne le savent pas, et c’est un message que nous voulons faire passer”, indique Chris Fleisher, rédacteur en chef web de l’AEA. “Nous voulons que les journalistes sachent qu’ils peuvent avoir accès à nos revues s’ils le souhaitent.”

A noter qu’un grand nombre de revues scientifiques diffusent des articles sous embargo auprès des journalistes et les préviennent quand elles publient de nouvelles études sur leur sujet de prédilection. Contactez la revue qui vous intéresse pour en savoir plus.

3. Faites vos recherches sur les sites des revues scientifiques et des plateformes scientifiques en libre accès

Un nombre croissant de revues savantes qui sont en libre accès mettent leur contenu gratuitement à la disposition de tous. Notez qu’il y a certes beaucoup de revues scientifiques de qualité en libre accès, mais que certaines ont des pratiques peu éthiques. Le Directory of Open Access Journals (Annuaire des revues scientifiques en libre accès) recense les revues scientifiques de qualité en libre accès.

Parmi les meilleures revues scientifiques en libre accès, on compte PLOS One, qui est la première revue scientifique pluridisciplinaire en libre accès, et BMC Biology.

Plusieurs plateformes en ligne permettent aussi au grand public d’avoir accès à des recherches scientifiques gratuitement. Par exemple, Unpaywall.org est une base de données gratuite de près de 48 millions d’articles publiés par les chercheurs et qui sont gratuits

4. Consultez Google Scholar

Google Scholar est un moteur de recherche qui indexe les travaux scientifiques publiés par différentes sources. Souvent, Google Scholar propose la version PDF d’articles publiés par les chercheurs. Toutefois, certains PDF correspondent à des versions antérieures d’un article, notamment des ébauches qui n’ont été ni publiées, ni revues par un comité de lecture.

Ces versions antérieures peuvent certes être utiles, mais il est important de contacter leur auteur avant d’utiliser ses conclusions. En effet, les conclusions mises en avant dans un document de travail sont provisoires et peuvent être très différentes de celles qui figureront dans la version définitive, publiée dans un article de revue scientifique. (Pour mieux comprendre la différence entre un document de travail et un article publié dans une revue scientifique, reportez-vous à notre explicatif.)

5. Installez des extensions de navigateur

Certaines extensions de navigateur peuvent vous aider à chercher sur le web des versions gratuites d’articles publiés dans des revues scientifiques. L’extension de navigateur Unpaywall recueille les contenus de plus de 50 000 revues scientifiques et les archives en libre accès dans le monde. Il suffit de cliquer sur le bouton Open Access (Libre Accès) pour effectuer des recherches dans des “millions d’articles” dans des sources qui comprennent “toutes les archives réunies du monde, les articles hybrides, les revues scientifiques en libre accès et les publications qui se trouvent sur les pages personnelles des auteurs”, selon son site.

Si le bouton Open Access ne trouve pas de versions gratuites des articles que vous recherchez, il contactera les auteurs et leur demandera de partager leurs travaux en les mettant dans une archive en libre accès.

6. Contactez les auteurs de la publication scientifique

Si vous souhaitez lire un article donné dans une revue scientifique, mais que vous ne trouvez que son résumé en ligne, appelez les auteurs ou envoyez-leur un email pour leur demander l’article en version intégrale. Les résumés publiés par les revues scientifiques comprennent généralement les coordonnées des auteurs ou, à tout le moins, l’adresse mail de l’auteur principal.

En général, les chercheurs sont tout à fait disposés à envoyer leurs articles aux journalistes. Si un chercheur vous envoie une version d’un article avant publication dans une revue scientifique, veillez à lui demander en quoi elle diffère de la version publiée, et si les conclusions sont les mêmes.

Autre option : les chercheurs publient souvent sur leurs pages personnelles des liens vers leurs recherches. Ceux qui travaillent dans des instituts ou des universités ont tendance à indiquer la liste de leurs publications sur le site même de l’institution.

7. Appelez le bureau des relations avec les médias

Le service des relations médias d’une université ou d’un organisme de recherche peut vous aider à retrouver un article publié par l’un de ses chercheurs. Il peut aussi vous aider à contacter les auteurs.

Principal inconvénient : les services des relations médias sont certes sensibles aux délais impartis aux rédactions, mais il est possible qu’ils soient sollicités par beaucoup de journalistes au même moment. Il est souvent plus rapide et plus facile de contacter les auteurs directement. Si vous avez du mal à obtenir une réponse de leur part, les services des relations médias sont généralement disposés à les relancer.

Les universités envoient aussi des communiqués de presse pour promouvoir les articles de leurs chercheurs. Demandez-leur de vous prévenir dès qu’un article sur les sujets qui vous intéressent est publié.

8. Abonnez-vous aux newsletters et aux communiqués de presse des organismes de recherche qui font la promotion des travaux de leurs chercheurs

Vous pouvez aussi obtenir rapidement des informations sur les nouvelles publications d’un grand nombre d’organismes de recherche en souscrivant un abonnement auprès d’organisations comme Futurity et EurekAlert!

Futurity est un partenariat entre 47 universités aux USA, au Canada, en Europe, en Asie et en Australie. Il met en exergue le travail réalisé par des chercheurs dans quatre domaines : culture, santé, environnement et science.

EurekAlert! est une plateforme de distribution de communiqués de presse gérée par l’American Association for the Advancement of Science (Association américaine pour la promotion de la science). Elle héberge des communiqués de presse provenant de l’enseignement supérieur, d’organismes publics, d’éditeurs de revues scientifiques, de grandes sociétés et d’autres structures actives de la recherche scientifique dans tous les domaines.

Resources complémentaires

L’essor international des centres universitaires dédiés au journalisme d’investigation

Des journalistes primés s’associent à des étudiants pour réaliser des enquêtes (en anglais)

Comment former des étudiants au journalisme d’investigation en seulement 15 semaines (en anglais)


Denise-Marie Ordway a rejoint The Journalist’s Resource en 2015 après avoir travaillé comme reporter pour des journaux et des stations de radio aux États-Unis et en Amérique centrale, notamment pour le Orlando Sentinel et le Philadelphia Inquirer. Son travail a également été publié dans des publications telles que USA TODAY, le New York Times, le Chicago Tribune et le Washington Post.

08.12.2023 à 13:04

Conseils pour faire parler des sources réticentes et fidéliser des sources nouvelles

Rowan Philp

Dans cet article, plusieurs journalistes d'investigation chevronnés livrent leurs conseils et astuces pour faire parler une source qu'elle soit réticente à s'exprimer, nouvelle ou ayant vécu un traumatisme. 
Texte intégral (2685 mots)

Faire faire parler des sources nouvelles ou réticentes à s’exprimer peut être un défi.

Dans cet article, plusieurs journalistes d’investigation chevronnés livrent leurs conseils et astuces pour faire parler une source qu’elle soit réticente à s’exprimer, nouvelle ou ayant vécu un traumatisme. 

Pour chaque source qui accepte de répondre aux questions des journalistes d’investigation, il existe des dizaines de responsables, de victimes et de potentiels lanceurs d’alerte bien informés auxquels les journalistes ne s’adressent jamais.

À l’occasion de deux tables rondes dédiées à ce sujet lors de la récente conférence IRE23 à Orlando, en Floride – sommet annuel du journalisme d’investigation organisé par Investigative Reporters and Editors – des journalistes d’investigation chevronnés basés aux États-Unis ont présenté une grande variété de techniques qu’ils mettent à profit pour trouver des sources parfois inattendues et les inciter à révéler les informations dont elles disposent. Parmi ces conseils : présenter un cahier vierge aux victimes de traumatismes, rendre visite à des policiers sur leur lieu de travail secondaire, ou encore faire un repérage des issues de secours avant des entretiens impromptus avec des responsables politiques qui pourraient tenter de vous semer.

Image: Capture d’écran, IRE

Un conseil est cependant revenu en boucle : utiliser au maximum les reportages que vous avez déjà réalisés et vos contacts existants pour convaincre de nouvelles personnes de se livrer à vous. Sans jamais perdre de vue cette foule de sources trop rarement utilisées : les introvertis.

Trouver des sources qui n’ont jamais parlé aux médias

  • Demandez à vos sources de vous mettre en relation avec d’autres personnes. « À la fin de tout entretien avec un contact existant, demandez toujours : ‘A qui d’autre devrais-je m’adresser pour en savoir plus sur ce sujet ? », recommande ainsi Andie Judson, journaliste d’investigation à ABC10 à Sacramento, en Californie.
  •  Servez-vous de vos articles publiés comme carte de visite. « Envoyez aux personnes que vous auriez aimé interviewer les reportages dont vous êtes fiers, même si vous estimez qu’il y a peu de chance qu’elles vous répondent », poursuit Andie Judson.
  • Pensez à laisser des notes manuscrites sur les voitures dans les parkings d’agences gouvernementales. Tony Kovaleski, journaliste d’investigation en chef au KMGH 7 à Denver, écrit parfois les mots « Auriez-vous quelque chose à me confier ? » sur ses cartes de visite avant de les glisser sur les pare-brises des voitures garés dans les parkings d’agences gouvernementales. « Cela peut vraiment fonctionner quand on ne dispose d’aucune source en interne », confie-t-il.
  • Emportez des objets pouvant aider à briser la glace, comme un briquet ou une bouteille d’eau supplémentaire. « J’ai pris l’habitude d’amener un briquet aux procès que je couvre, parce qu’il y a des espaces extérieurs pour fumer et déjeuner, et qu’il est angoissant d’être impliqué dans une procédure judiciaire : les personnes y prenant part ont souvent envie d’une cigarette », poursuit Jesse Jones, journaliste d’investigation chevronné qui traite désormais les questions de consommation pour KIRO 7 à Seattle. Il ajoute : « Avoir une bouteille d’eau à offrir lors d’une journée particulièrement chaude peut vous ouvrir des portes. »
  • Rendez visite aux policiers sur leur lieu de travail secondaire. « Les policiers comme les pompiers ont souvent un deuxième travail », explique Jesse Jones. “Informez-vous sur le sujet. Il vous sera probablement beaucoup plus aisé d’accéder à ces personnes dans le cadre de leur deuxième emploi. J’ai notamment connu un policier propriétaire d’un vignoble – je passais le voir et on parlait merlot. Cela aide à tisser des liens.”
  • Contactez des retraités. “Les retraités peuvent vous mettre en relation avec des personnes pertinentes et vous expliquer comment fonctionnent les milieux qui vous intéressent”, poursuit Jesse Jones.
  • Trouvez les personnalités plus « discrètes ». Les introvertis figurent rarement parmi nos sources. Les moins bavards peuvent pourtant être une mine d’informations. « Quand je me rends à un conseil municipal ou sur une scène de crime, je ne regarde pas ceux qui sont au cœur de l’action mais les personnes à la marge », explique Jesse Jones. “Soyez attentif à leurs réactions et dites bonjour à la personne qui se hérisse ou qui semble mal à l’aise lorsqu’un fonctionnaire prend la parole.” Elle pourrait avoir de bonnes raisons de réagir ainsi.

Note de l’auteur : En parlant à un couple qui avait l’air mal à l’aise lors d’un rassemblement organisé par la campagne présidentielle de John McCain en 2008, ils m’ont révélé que le cœur de leur fils décédé – l’ancien chauffeur de bus du candidat républicain – avait été transplanté chez un patient de Pennsylvanie qui était un fidèle partisan de Barack Obama mais avait juré de voter pour McCain afin de rendre hommage à son donneur d’organes. Parler aux gens « discrets » peut révéler des informations pour le moins étonnantes.

Quelques conseils pour fidéliser de nouvelles sources

Jesse Jones de KIRO a également donné des conseils pour entretenir ses relations avec de nouvelles sources, tirés de sa longue expérience de journaliste d’investigation dans les villes de Baltimore, Cincinnati et Seattle.

  • Supposons que vos sources ne connaissent rien de votre travail. « Envoyez des liens vers vos reportages à vos sources et aux personnes qui, selon vous, pourraient vous aider dans la prochaine étape de votre enquête », préconise Jesse Jones. « Nous autres journalistes, on a tendance à penser que tout le monde suit notre travail, mais ce n’est vraiment pas le cas. »
  • Renseignez-vous sur les heures de travail de votre source. “Pour que vos sources vous soient utiles, il faut qu’elles soient disponibles”, rappelle-t-il. « Vous devez donc impérativement vous renseigner sur leurs horaires. »
  • Appelez des contacts potentiels uniquement pour leur faire part d’une information qui pourrait les intéresser – et ne demandez rien en retour. “Présentez-vous, sans donner l’impression d’être à la recherche de quelque chose”, précise-t-il. « Intéressez-vous à ce qu’ils font dans leur temps libre. »
  • Appelez les personnes qui ne sont que brièvement citées dans d’autres médias. « Si vous voyez une personne citée ailleurs, n’hésitez pas à la contacter pour lui dire ‘J’ai aimé ce que vous aviez à dire, pouvez-vous m’en dire davantage ?' », conseille Jesse Jones. « Pour de nombreuses personnes, passer à la télévision ou dans d’autres médias d’information est l’événement d’une vie. » Suite à cette première expérience, elles se sont peut-être rendues compte qu’elles avaient bien d’autres connaissances à partager avec le public.

Faire parler des sources sur des sujets sensibles face caméra

Contrairement aux entretiens de responsables politiques, il n’y a aucune obligation pour les victimes d’abus sexuels ou d’autres traumatismes de partager leurs témoignages avec les journalistes. « Ils ne nous doivent rien », rappelle Jenna Bourne, journaliste d’investigation au WTSP 10 à Tampa Bay, en Floride. « Ne perdez pas cette vérité de vue lors de ces entretiens. »

  • Exprimez-vous simplement, en faisant preuve d’humanité. Ne vous souciez pas de paraître professionnel dans votre reportage une fois monté ; pensez uniquement à mettre votre source à l’aise quand elle vous raconte ce qui lui est arrivé. « Abandonnez complètement votre posture de journaliste », conseille Jenna Bourne. Selon elle, il vaut mieux utiliser des mots simples du quotidien et des réponses qui montrent votre empathie avec ce genre de source. « Et bien sûr, n’oubliez jamais que vous vous adressez à des êtres humains – ne les traitez pas comme des personnages de votre reportage. »
  • Expliquez votre projet. « Dites-leur pourquoi vous étudiez ce sujet et qui y a déjà pris part », conseille Jenna Bourne. « Aidez-les à comprendre comment leur contribution pourrait faire avancer les choses, sans non plus faire de promesses excessives. »
  • Montrez-leur un cahier vierge. Lorsque vous parlez à des sources qui ont subi un traumatisme, montrez-leur d’emblée la première page vierge de votre bloc-notes, pour souligner qu’elles maîtrisent ce que vous y inscrirez, et qu’il ne s’agit en aucun cas d’un interrogatoire. “Quand j’ai eu l’occasion de m’entretenir avec une personne ayant vécu un abus sexuel dans l’enfance, je voulais qu’elle sache que mes questions dépendraient de ce qu’elle voudrait bien me dire”, explique Jenna Bourne. Ismael Estrada, producteur chevronné d’ABC News, suggère aux intervieweurs télé comme radio de mémoriser les questions clés et de ne pas avoir de cahier en main du tout. « Il suffit de jeter un coup d’œil à votre producteur à la fin pour vérifier que vous n’avez rien oublié », complète Estrada. “Il est important de garder les yeux sur le sujet et de ne pas constamment vérifier vos notes.”
  • Habillez-vous simplement. Une allure trop sérieuse ou trop chic peut créer une distance entre vous et votre source. « En général, vous voulez vous habiller de manière décontractée lorsque vous écoutez quelqu’un qui a vécu quelque chose de terrible – c’est tout simplement bizarre de s’habiller trop formellement dans ce contexte-là », poursuit Jenna Bourne.
  • N’ayez pas de “réaction marquée” aux révélations. “Si votre source vous révèle quelque chose d’énorme en cours d’interview, gardez-vous de réagir de manière impulsive ou émotionnelle : une réaction du type ‘Oh mon Dieu !’ est à bannir”, explique Jenna Bourne. « Restez calme et flegmatique en toute circonstance. »

Conseils pour un entretien musclé et spontané avec un responsable politique 

Chris Papst, journaliste d’investigation principal du WBFF 45 dans l’État du Maryland, aux Etats-Unis, a partagé les leçons qu’il avait tirées d’une récente enquête révélant qu’aucun élève scolarisé dans 23 établissements de la ville de Baltimore n’était « compétent » en mathématiques l’an dernier. L’enquête a également montré que le ministère de l’Éducation de l’État avait rapidement expurgé les données publiques sur ces résultats embarrassants après la parution du rapport – il a donc fallu concevoir une stratégie prudente pour interviewer le discret fonctionnaire qui avait caché ces données. Puisque l’interview risquait de tourner court, voire d’être musclée, il a fallu réfléchir en amont à la meilleure manière d’organiser les questions.

  • Avant toute chose : préparez votre question d’ouverture. « C’est peut-être la seule question qui obtiendra une réponse avant que le responsable ne s’enfuie, alors planifiez la formulation au mot près, et répétez-la si nécessaire », conseille Chris Papst. “Anticipez la réponse qu’on pourrait vous faire, pour relancer sans attendre avec une question claire et factuelle.”
  • Prévoyez assez de questions pour un long entretien, au cas où. « La personne pourrait vous répondre : ‘D’accord, allons-nous asseoir pour en discuter' », souligne Chris Papst. « Préparez vos questions, et soyez intransigeant tout en restant poli : l’emploi de “Monsieur” ou “Madame” donne le bon ton. Ne soyez pas trop agressif, car vous risqueriez, en tant que journaliste, de faire vous-même l’actualité à la place de votre sujet.
  • Renseignez-vous sur les « issues de secours » que pourrait emprunter le responsable. Si vous réalisez un reportage filmé, Chris Papst conseille au préalable de parcourir l’endroit où aura lieu l’interview afin d’y repérer les sorties et d’y positionner des caméras pour capturer toute fuite de l’intéressé.
  • Prévoyez les limites d’une course-poursuite. « Au préalable, posez-vous les questions suivantes : ‘Allons-nous le suivre par cette porte ou par cet escalier ? Quelle ligne ne franchirons-nous pas ?’ Et assurez-vous que tous les membres de l’équipe connaissent ces limites. »
  •       Voir l’article de conseils de GIJN sur les techniques pour mener à bien des entretiens spontanés : “Comment obtenir – et réussir – un entretien musclé.

« Les sources nous sont indispensables, elles sont l’huile dans notre moteur », résume Jesse Jones. « Ne soyez pas avares de vos cartes de visite, distribuez-les à tout le monde. »

Ressources complémentaires

15 conseils pour interviewer les victimes et témoins de drames

Comment confronter les personnes citées dans votre enquête à ce que vous comptez publier


Rowan Philp est journaliste au sein de la rédaction de GIJN. Il était précédemment grand reporter du journal sud-africain Sunday Times. En tant que correspondant étranger, il a couvert l’actualité politique, économique et militaire d’une vingtaine de pays.

28.11.2023 à 12:57

Après la Suède, appels à propositions pour GIJC25 et GIJC27

GIJN

Pour la première fois, le GIJN accepte des propositions simultanées pour accueillir ses deux prochaines conférences internationales sur le journalisme d'investigation, qui se tiendront en 2025 et en 2027.
Texte intégral (817 mots)

La conférence internationale sur le journalisme d’investigation est le premier rassemblement international de journalistes d’investigation. Organisées tous les deux ans, ces conférences ont formé des milliers de journalistes, déclenché des centaines d’enquêtes et de projets de collaboration, et joué un rôle clé dans la diffusion mondiale du journalisme d’investigation au cours des 22 dernières années. Axée sur la formation et le networking, la GIJC23 a accueilli, en septembre 2023 en Suède, un nombre record de plus de 2.100 participants venus de plus de 130 pays et territoires.

L’organisation d’un tel événement nécessite une planification intense, une collecte de fonds et des compétences opérationnelles de la part des organisateurs, mais l’effort en vaut la peine en raison du haut niveau des intervenants et des sessions du GIJC, de son impact mondial et de la façon dont l’événement met en lumière la stature des organisateurs.

GIJN accepte, dès à présent, les propositions pour accueillir les deux prochaines GIJC : la 14ème Conférence internationale sur le journalisme d’investigation, qui se tiendra en 2025, et la 15ème Conférence internationale sur le journalisme d’investigation, qui aura lieu en 2027.

Pour la première fois, en raison de l’intérêt croissant, de l’ampleur et de la complexité de cet événement, le Réseau international de journalisme d’investigation, qui supervise les conférences, accepte, dès à présent, les propositions pour accueillir les deux prochaines GIJC : la 14ème Conférence internationale sur le journalisme d’investigation, qui se tiendra en 2025, et la 15ème Conférence internationale sur le journalisme d’investigation, qui aura lieu en 2027.

Les hôtes potentiels doivent être membres de GIJN. Il est possible pour les organisations membres de s’associer et de partager le rôle d’hôte dans un pays.

La date limite pour soumettre une proposition est le 5 février 2024.

La décision concernant les hôtes des conférences de 2025 et 2027 sera prise par GIJN en consultation avec son conseil d’administration.

Les propositions seront publiées sur le site GIJN.org.

Les organisations sélectionnées pour accueillir la GIJC25 ou la GIJC27 feront équipe avec le Secrétariat de GIJN pour financer et organiser la conférence. Nous recommandons des propositions détaillées d’au moins huit pages (en format PDF) qui abordent les points suivants :

  • La stratégie de financement, y compris la capacité de l’organisation hôte à trouver des fonds et des sponsors. (Le coût moyen d’une GIJC varie entre 750 000 et 1 000 000 de dollars américains, voire plus).
  • La capacité de l’organisation hôte à obtenir un soutien local.
  • L’expérience de l’organisation hôte en matière d’organisation de conférences.
  • L’expérience de l’organisation hôte en matière de gestion.
  • Avantages de la tenue de la GIJC dans la ville proposée, y compris l’environnement, le transport, la logistique, la sécurité, l’accessibilité des visas et le coût.
  • Budget estimé pour la conférence.
  • Une description du lieu potentiel (hôtel, centre de conférence) pour la conférence.
  • L’orientation et la structure proposées pour les panels, les ateliers et les autres événements de la conférence.
  • Capacité à travailler avec le secrétariat du GIJN sur la planification, la programmation, la collecte de fonds et la logistique.

Lignes directrices pour la soumission des propositions

  1. Remplissez ce formulaire.
  2. Faites une copie de cette feuille de calcul et préparez un budget détaillé.
  3. Préparez toutes les informations relatives à la proposition (soumises dans le formulaire intégré) avec des images pertinentes du lieu potentiel de la conférence au format PDF.
  4. Envoyez par courriel la feuille de calcul du budget et le fichier PDF contenant les informations relatives à la proposition à secretariat@gijn.org.

GIJN est heureux de répondre aux questions pendant que les organisations membres préparent leurs propositions. Si vous avez des doutes ou si vous avez besoin d’éclaircissements sur les exigences, veuillez nous contacter à l’adresse suivante : secretariat@gijn.org.

 

28.11.2023 à 08:22

Guide pour enquêter sur les crimes de guerre : la recherche d’informations en sources ouvertes

Sam Dubberley ; Başak Çalı

Des experts dévoilent leurs conseils et leurs outils pour faire des recherches en sources ouvertes lors de conflits armés et éventuellement prouver l'existence de crimes de guerre.
Texte intégral (6384 mots)

Des cadavres découverts dans différents quartiers de Boutcha, en Ukraine, sont conduits au
cimetière pour y être inventoriés. Les autorités enquêtent pour savoir si des crimes de guerre
ont été commis par les forces russes en Ukraine. 2022. Photo : avec l’aimable autorisation de
Ron Haviv, VII

Note de la rédaction : Voici la première partie du Guide du reporter pour enquêter sur les crimes de guerre, réalisé par GIJN. L’un des auteurs, Sam Dubberley, et la directrice des programmes de GIJN, Anne Koch, ont évoqué certains aspects de ce chapitre lors de la table ronde intitulée “Enquêter sur les crimes de guerre », organisée dans le cadre du Festival international de journalisme qui s’est tenu à Pérouse, en Italie, le 20 avril 2023. Ce guide a été publié dans son intégralité en anglais en septembre à l’occasion de la Conférence mondiale sur le journalisme d’investigation

Le 15 août 2017, la Cour pénale internationale (CPI) a lancé un mandat d’arrêt contre Mahmoud Mustafa Busayf Al-Werfalli, commandant de la brigade Al-Saiqa de l’armée nationale libyenne, l’accusant d’avoir commis ou commandité 33 meurtres entre 2016 et 2017. Sept vidéos de sept incidents, publiées sur les réseaux sociaux, ont constitué des éléments de preuve déterminants pour la CPI, qui a inculpé Al-Werfalli de meurtre qualifié de crime de guerre en vertu de l’article 8(2)(c)(i) du Statut de Rome. Dans les faits, ce mandat d’arrêt a ainsi été lancé sur la base de ressources en libre accès. Bien qu’Al-Werfalli n’ait jamais pu être arrêté ni jugé – il a été tué par balle en 2021 à Benghazi par des hommes armés non identifiés -, cette affaire est considérée comme l’une des premières où des informations en sources ouvertes (open source) ont été utilisées comme preuve dans le cadre d’une procédure judiciaire relative à des infractions au droit international humanitaire, ou à des crimes relevant du droit international, à savoir, des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et des génocides.

Les informations en sources ouvertes peuvent permettre d’établir des faits en rapport avec toutes sortes de situations dans le contexte des conflits armés.

Evidemment, les journalistes faisaient déjà des recherches en sources ouvertes, bien des années avant que ce mandat d’arrêt ne soit émis. Les organes de presse ont par exemple couvert les attentats de Londres en 2005, en partie grâce à une vidéo filmée par des témoins dans les transports publics londoniens. Cette tendance s’est accélérée au début des années 2010, lors des mouvements de protestation du Printemps arabe en Tunisie et en Egypte. Par ailleurs, les conflits en Libye et en Syrie ont été filmés puis publiés sur les réseaux sociaux grâce à des téléphones portables bon marché et à des connexions internet rapides. Dans le même temps, les premières sociétés commerciales ont aussi lancé des satellites capables de prendre des photos de la Terre avec une résolution inférieure à un mètre. Au fur et à mesure que le coût d’accès à ces photos a diminué, les rédactions les ont utilisées de plus en plus fréquemment pour analyser des endroits éloignés. Les organes de presse se sont mis à collecter des contenus publiés sur les réseaux sociaux et à les utiliser dans leurs reportages. Quand il est apparu que l’authenticité de ces contenus devait aussi être vérifiée, les équipes de journalistes spécialisés dans la vérification des informations ont commencé à jouer un rôle crucial.

Image: Courtesy of Oxford University Press

Pendant les premières années du conflit en Syrie, il est devenu évident que les contenus en libre Press accès pouvaient non seulement être utilisés dans le cadre d’un reportage, mais qu’ils pouvaient aussi jouer un rôle prépondérant dans les enquêtes diligentées sur les infractions au droit humanitaire international et sur d’éventuels crimes de guerre. Cela n’avait rien de nouveau. Comme Alexa Koenig, Daragh Murray et Sam Dubberley l’ont indiqué dans leur ouvrage publié en 2019, “Digital Witness” [“Témoin numérique”], des vidéos ont ainsi été diffusées dans la salle d’audience de la Cour pénale internationale pour l’ex-Yougoslavie. Les dix années suivantes ont vu une codification de ces techniques d’investigation grâce à l’émergence de normes et de pratiques de formation, comme le Berkeley Protocol on Digital Open Source Investigations [Protocole de Berkeley sur les enquêtes menées à partir de documents numériques en libre accès] (dernière mise à jour en 2022) par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH). Ce texte est aujourd’hui disponible en anglais et en russe. Les recherches en sources ouvertes font maintenant partie intégrante du travail des rédactions, des organisations de défense des droits humains, des missions exploratoires internationales et des organes juridiques internationaux qui enquêtent sur les infractions au droit humanitaire international et les crimes relevant du droit international.

Pour ou contre les recherches en sources ouvertes

Avantages

Quand il s’agit d’enquêter sur les infractions au droit humanitaire international ou sur les crimes relevant du droit international, les informations en sources ouvertes peuvent se révéler très efficaces pour établir des faits, quand elles sont utilisées conjointement avec d’autres paramètres, comme par exemple le nombre d’interviews ou de visites sur un site donné. Les informations en sources ouvertes peuvent ainsi permettre d’établir des faits en rapport avec toutes sortes de situations dans le contexte de conflits armés. Cela va des enquêtes sur des attaques contre des civils et des structures civiles, en passant par l’identification des armes utilisées et les enquêtes sur les auteurs d’actes délictuels, ou enfin les enquêtes pour savoir si les attaques contre les civils sont généralisées ou systématiques, une des principales caractéristiques des crimes internationaux contre l’humanité.

Pour tous ces aspects, les informations en sources ouvertes constituent une ressource cruciale pour établir de nombreux faits. En ce qui concerne les attaques contre des civils ou des structures civiles, par exemple, les informations en sources ouvertes (photos, vidéos et images satellite), peuvent permettre de déterminer à quel endroit et à quelle heure un événement s’est produit, le nombre de personnes présentes à un endroit donné, si des acteurs civils, militaires ou autres étaient impliqués, ainsi que d’éventuelles cibles militaires légitimes ou encore l’ampleur des conséquences qui peuvent être observées suite à des opérations militaires sur le terrain. Dans le cas d’éventuelles infractions au droit humanitaire international ou d’exécutions extrajudiciaires et de torture, on sait depuis longtemps que les auteurs eux-mêmes ou leurs complices filment leurs actes et publient les vidéos sur les réseaux sociaux. Ces vidéos sont aussi en libre accès et peuvent constituer d’importants éléments de preuve, non seulement pour prouver qu’un individu a commis un acte qui enfreint le droit humanitaire international, mais aussi pour prouver l’intention criminelle des auteurs de délits ou de leurs supérieurs, preuves qui sont indispensables pour prouver qu’un crime relève du droit international.

Les informations en sources ouvertes peuvent permettre de répondre à la question suivante: “Cet incident doit-il faire l’objet d’une enquête plus approfondie pour savoir si le droit humanitaire international a été bafoué ?”

Les activités militaires, en particulier en zone urbaine, sont souvent filmées à l’aide des téléphones portables, ou peuvent aussi être visibles sur des images satellite, ce qui fournit des éléments clés pour comprendre ce qui s’est passé. A ce stade, les informations en sources ouvertes peuvent permettre de répondre à la question suivante : “Cet incident doit-il faire l’objet d’une enquête plus approfondie pour déterminer si le droit humanitaire international a été bafoué, ou bien peut-il s’agir d’une attaque militaire légitime ?” Si, par exemple, des informations en sources ouvetes peuvent conforter l’hypothèse d’une attaque contre une cible militaire clairement identifiable, ces constatations peuvent être en défaveur de l’ouverture d’une enquête plus approfondie. Toutefois, il convient de consulter des experts en droit humanitaire international avant d’arriver à une telle conclusion. Si, au contraire, il subsiste un doute, une enquête plus approfondie est justifiée, et les informations en sources ouvertes pourront aussi permettre de déterminer si le droit humanitaire a été bafoué.

Les journalistes peuvent utiliser les informations en sources ouvertes pour faire des recherches sur certains détails cruciaux :

  • Les militaires. Des militaires en tenue sont-ils visibles sur des vidéos ou sur des photos ? Des uniformes, emblèmes et autres équipements sont-ils identifiables ?
  • Des cibles militaires possibles. Quand le lieu de l’opération militaire a été identifié, les informations en sources ouvertes peuvent s’avérer utiles pour vous aider à identifier les éventuelles cibles militaires qui s’y trouvaient. Avec quelques compétences, il est aussi possible d’identifier ces cibles en utilisant des outils de cartographie et les images satellite à haute résolution : les camps militaires, les installations, le type de véhicules militaires, comme les camions, les chars et autres véhicules blindés, ou encore les avions militaires.
  • Les civils. Où l’attaque a-t-elle eu lieu — dans un quartier résidentiel, à un point d’évacuation, contre un immeuble, un hôpital ? Des civils, comme des enfants ou des personnes âgées, sont-ils concernés ? Que font-ils ? Dans ces informations en sources ouvertes, pouvez-vous dénombrer les civils survivants et ceux qui sont morts ?
  • Identification des armes. Il arrive souvent que les victimes d’attaques qui ont filmé la scène publient sur internet des images de restes d’armes ou d’autres équipements militaires. Il peut s’agir d’éclats de missiles ou de roquettes, de douilles, de munitions à fragmentation, d’emballages de munitions, etc. Cela peut être déterminant pour savoir si, plus généralement, une attaque a été proportionnée ou aveugle.
  • Blessures et médecine légale. On le sait, il est très délicat de déterminer la cause d’un décès à partir de documents numériques. Cela exige le concours d’experts en médecine légale. Bien que ces derniers soient limités dans leur travail par la nature de tels documents, leurs analyses peuvent toutefois contribuer, par exemple, à identifier des signes de torture ou à établir des hypothèses sur la cause du décès ou à en exclure d’autres. Cependant, toute analyse, dans ce domaine, doit être évaluée avec prudence, pour corroborer d’autres données obtenues par les journalistes.
  • Nature de la zone ciblée par l’attaque. Les informations en sources ouvertes peuvent permettre de déterminer si les commandants militaires savaient auparavant si la zone cible était de nature civile ou militaire. Par exemple, d’anciennes images satellite ont permis à des journalistes de révéler que le mot Дети” (“Enfants”) avait été peint sur le sol à l’extérieur du Théâtre de Marioupol, en Ukraine, dans les jours qui ont précédé l’attaque aérienne qui a détruit le bâtiment où des centaines de civils avaient trouvé refuge, en mars 2022. Cette attaque a été dénoncée par certaines organisations internationales de défense des droits humains comme un probable crime de guerre.

Le bombardement, par la Russie, d’un théâtre à Marioupol, en Ukraine (reconnaissable à son toit rouge, deux jours avant l’attaque), et qui abritait des enfants, a conduit à des accusations de crimes de guerre par des organisations comme Amnesty International. Image: Capture d’écran, The Moscow Times.

Inconvénients

Les journalistes doivent prendre des précautions quand ils utilisent des ressources en libre accès lors d’enquêtes sur des violations du droit humanitaire international ou sur des crimes relevant du droit international. Même si les recherches en libre accès sont maintenant considérées comme convaincantes à part entière dans le cadre de reportages, les journalistes doivent éviter de ne dépendre que de celles-ci. Ils doivent plutôt les considérer comme une partie seulement du processus d’investigation. Pour que les ressources en libre accès puissent jouer leur rôle, les journalistes doivent collaborer avec toute une série d’acteurs, tels que les enquêteurs sur le terrain, les experts en armement, les médecins légistes et les juristes, pour n’en citer que quelques-uns.

Les journalistes doivent aussi identifier les limites de ces enquêtes. Par exemple, les recherches à partir des ressources en libre accès présentent peu d’intérêt s’il s’agit de savoir de quelles informations les militaires disposaient au moment où ils ont décidé de lancer leur attaque. De même, elles n’ont pratiquement aucune utilité si l’on veut comprendre quel avantage militaire était recherché en visant telle ou telle cible, ce qui est un élément indispensable pour prouver certains types de crimes relevant du droit international.

Par ailleurs, les reporters doivent prendre en considération les éventuels arguments de poids, de nature juridique ou déontologique, qui rendent impossible la publication de certaines ressources qui sont en libre accès. L’utilisation publique de certains documents peut être purement et simplement interdite en vertu du droit humanitaire international, comme l’utilisation d’images et de vidéos qui permettent d’identifier facilement des prisonniers de guerre. Il peut aussi exister des problèmes liés au droit qui garantit que nul ne peut être soumis à des traitements inhumains ou dégradants, ou au droit au respect de la vie privée des personnes qui ont été filmées. Parallèlement, des questions de déontologie peuvent se poser, par exemple le risque encouru par les personnes filmées dont les visages sont téléchargés ou reproduits dans la ressource en libre accès si le contenu est diffusé largement par un organe de presse. Les journalistes doivent aussi garder à l’esprit que, même dans le cadre d’un conflit armé, les questions de droits d’auteur sont d’actualité si un contenu doit être utilisé dans un reportage.

Au-delà de ces limites générales à l’utilisation de ressources en libre accès, il existe aussi des limites techniques.

Qualité de l’image. Les photos et les vidéos publiées sur les réseaux sociaux sont compressées et n’ont plus la même qualité qu’à l’origine. Ce qui veut dire, à titre d’exemple, qu’il peut être difficile, voire impossible, de vérifier les logos ou les inscriptions sur les uniformes d’une unité militaire, ou que l’on peut confondre des armes avec des outils agricoles.

Mauvaise analyse. L’analyse géospatiale à partir de ressources en libre accès est un domaine qui nécessite une formation préalable pour pouvoir la réaliser correctement. C’est aussi un domaine dans lequel le manque de maîtrise peut conduire à de mauvaises interprétations. Par conséquent, il est important que les journalistes soient conscients des limites d’une image satellite, et qu’ils puissent analyser correctement ce qu’ils voient. Par exemple, il est important que les journalistes comprennent que même si l’on voit depuis l’espace une zone dont le sol apparaît remanié, cela ne signifie pas forcément qu’il s’agit d’une fosse commune. Le sol peut avoir été remanié pour de nombreuses raisons, et la présence de cratères peut être expliquée par différents événements qui auraient pu avoir lieu avant toute attaque présumée.

En utilisant des images satellite de Planet Inc., un membre de GIJN, Texty, a identifié un grand nombre de wagons (en rouge), de camions (en bleu) et de cargos (en vert) qui pourraient être en train d’exporter en contrebande du blé volé en Ukraine par la Russie. Image : capture d’écran, Texty via Planet Inc.

Conseils et outils

L’approche, plus importante que la boîte à outils 

Nous présentons ci-dessous des conseils et des outils pour utiliser les réseaux sociaux en libre accès dans le cadre d’enquêtes. Mais l’une des principales difficultés réside dans le fait que les méthodes et les outils employés pour effectuer ces recherches et procéder aux vérifications peuvent évoluer très rapidement. Cela est dû principalement à la gratuité d’un grand nombre d’outils, qui sont mis à disposition par les réseaux sociaux eux-mêmes. En conséquence, il est plus pertinent de suivre la démarche de quelqu’un qui mène une enquête à partir d’une ressource en libre accès, plutôt que de dépendre des outils. Ce qui signifie qu’il faut faire preuve de créativité pour trouver des solutions et qu’il faut apprendre en permanence, réfléchir à de nouvelles manières d’effectuer des recherches et de collecter les informations. Si elle ne travaille pas dans cet état d’esprit,  la personne qui effectue de telles recherches sera rapidement dépassée.

Rechercher un contenu

Les utilisateurs des réseaux sociaux ont une préférence pour une  plateforme plutôt qu’une autre en fonction de la région du monde où ils se trouvent. Par conséquent, il est crucial de comprendre quels types de ressources en libre accès sont susceptibles d’être publiées, et comment fonctionnent les moteurs de recherche du réseau social qui a la préférence dans un endroit donné. Par exemple, dans le cadre du conflit en Ukraine, c’est Telegram qui est le réseau social le plus utile, et de loin, pour trouver des vidéos, photos et autres textes publiés par des témoins, des militaires et les autorités. On peut obtenir des renseignements pertinents sur cette guerre, ainsi que sur des incidents particuliers, en utilisant une combinaison de mots clés en anglais, en ukrainien et en russe. Des villes de toutes tailles, partout en Ukraine, ont créé des chaînes Telegram qui font office d’agrégateurs là où les habitants publient un contenu. (Note : Certaines de ces chaînes locales ont aussi été signalées comme étant des robots ou de potentiels sites de désinformation russes.) En identifiant ces chaînes, les journalistes ont pu trouver et vérifier un grand nombre de vidéos et de photos sur lesquelles on voyait des victimes civiles mortes ou blessées, des infrastructures civiles détruites, et des restes de munitions.

Trouver un contenu

Les vidéos et les photos qui représentent des crimes de guerre sont souvent, par définition, violentes, troublantes ou éprouvantes. Par conséquent, il n’est pas étonnant que, souvent, elles disparaissent rapidement.

Etant donné la quantité de photos et de vidéos de conflits du monde entier qui sont publiées sur les réseaux sociaux, il est fondamental d’utiliser une méthode rigoureuse de collecte et d’analyse de l’information. Sinon, les journalistes auront souvent une impression de chaos, le sentiment d’être dépassés. Il existe des systèmes de gestion de contenus conçus spécialement pour les recherches à partir de ressources en libre accès, comme Truly Media, de Deutsche Welle, ou Uwazi, d’HuriDocs, mais on peut aussi obtenir de très bons résultats en utilisant un tableur bien conçu sur Excel ou Google. La personne qui effectue des recherches pourra plus facilement trier les données et effectuer une analyse par catégorie, ce qui lui permettra de tirer des conclusions sur les armes utilisées, les tendances éventuelles concernant les violations commises, etc.

Archivage des documents

Les vidéos et les photos qui représentent des crimes de guerre sont souvent, par définition, violentes, troublantes ou éprouvantes. Par conséquent, il n’est pas étonnant que, souvent, elles disparaissent des réseaux sociaux sur lesquels elles ont été publiées initialement, et ce pour toutes sortes de raisons. (Les conditions d’utilisation de la plupart des réseaux sociaux interdisent de publier des contenus violents ou choquants, ce qui signifie que les messages de ce type sont souvent effacés par le réseau lui-même.) Il est donc crucial d’effectuer rapidement une copie du contenu qui vous intéresse. Des outils comme Internet Archive ou archive.today sont utiles pour faire des copies de photos ou de textes publiés sur les réseaux, ce qui présente également l’avantage que ces documents seront aussi sauvegardés pour d’autres journalistes. Toutefois, pour ce qui est des vidéos, les journalistes doivent se débrouiller par leurs propres moyens pour faire des copies. Ceux qui sont à l’aise avec les lignes de commande peuvent utiliser un outil en libre accès appelé YouTube-DL pour copier des vidéos. Si un organe de presse utilise beaucoup de vidéos en libre accès, il peut être rentable d’investir dans la mise en place d’une interface utilisateur pour YouTube-DL, qui permette d’effectuer des copies sur ses propres serveurs pour des raisons de sécurité. (Note : YouTube-DL a failli être fermé par le passé, en raison d’atteintes présumées aux droits d’auteur et, récemment, un tribunal en Allemagne a jugé que l’hébergeur du site pouvait être tenu pour responsable des violations de droits liés au contenu.)

Vérifications des ressources en libre accès

Les journalistes qui ne vérifient pas les contenus en libre accès courent un très grand risque. Cette pratique est à proscrire. Le risque est encore plus important quand de graves accusations sont portées, comme des violations du droit humanitaire international ou des crimes de guerre. On a déjà beaucoup écrit sur les processus de recherche d’image inversée, de vérification de métadonnées, de géolocalisation et de chronolocalisation, des techniques toutes fondamentales dans le processus de vérification et qui sont pertinentes ici. Mais une enquête sur les activités de belligérants nécessite de faire des vérifications supplémentaires. Par exemple, s’ils sont géolocalisés, les outils générés par les utilisateurs qui cartographient les installations militaires comme Open Street Map ou Wikimapia peuvent déterminer si une attaque qui a causé des morts parmi les civils a eu lieu à proximité d’une cible militaire légitime. Camopedia se présente comme une base de données de “motifs de treillis militaire et paramilitaire utilisés dans le monde entier depuis le début du 20e siècle” et elle est essentielle pour vérifier si les uniformes militaires que l’on voit dans une ressource en libre accès correspondent bien aux forces armées du pays qu’ils sont censés représenter.

Études de cas

‘Bonbons envoyés’ : des enregistrements dans les cabines de pilotage montrent que des pilotes russes ont bombardé des civils syriens — The New York Times

Pour cette enquête de 2019 du New York Times, des ressources en libre accès ont été utilisées, notamment des analyses de vidéos, des images prises par des drones et des enregistrements de messages radio dans des cabines de pilotage pour montrer, selon toute vraisemblance, que des pilotes de combat de l’armée de l’air russe étaient responsables de frappes aériennes qui ont causé des morts parmi les civils dans un camp de familles syriennes déplacées la même année, et ce en toute illégalité. L’équipe du New York Times a passé des mois à déchiffrer les enregistrements des pilotes qui auraient pris part à l’attaque.

Le New York Times a obtenu les enregistrements de communications de pilotes de combat russes pour enquêter sur des soupçons de bombardement illégal de zones civiles en Syrie en 2019. Image: Screenshot, The New York Times

Mort à la gare : attaque russe aux munitions à fragmentation à Kramatorsk — Human Rights Watch et SITU Research

Human Rights Watch et l’agence d’enquête visuelle SITU Research, qui a son siège à New York, ont recréé méticuleusement une attaque avec des munitions à fragmentation contre la gare ferroviaire de Kramatorsk, dans l’est de l’Ukraine, en avril 2022. Leur reportage a infirmé les dires du Ministère de la défense russe selon lequel ses forces armées n’avaient pas utilisé cette arme en Ukraine. Des ressources en libre accès et des analyses géospatiales ont été associées aux recherches menées sur place pour apporter la preuve irréfutable que la gare était connue pour être un point d’évacuation de civils, que les forces russes avaient déployé cette arme, et que les munitions à fragmentation avaient touché des civils.

Deux balles suffisent — CNN International, Amnesty International

Ces deux organisations ont travaillé ensemble pour vérifier cinq vidéos censées montrer des soldats de l’armée gouvernementale éthiopienne en train d’exécuter plusieurs dizaines d’hommes sur une falaise, à proximité d’une petite ville dans la province du Tigré, début 2021. Elles ont démontré l’intérêt d’une collaboration lorsque l’on enquête à partir de ressources en libre accès. L’utilisation de maquettes 3D et d’outils de géolocalisation pour déterminer le lieu du massacre, a joué un rôle déterminant pour exploiter au mieux les ressources en libre accès dans cette enquête.

Focus sur : Couvrir l’invasion de l’Ukraine par la Russie

Interview de Valentina Samar, par Olivier Holmey

Avant l’annexion de la Crimée par la Russie début 2014, l’Centre de presse d’information (IPC) et le Centre pour le journalisme d’investigation de Crimée (CIJ) ont tiré parti d’un vaste réseau d’antennes sur la péninsule – à Yalta, Sébastopol, Yevpatoria, Feodosia, Dzhankoi et Simferopol – pour enquêter sur la corruption, malgré les pressions exercées par le président ukrainien de l’époque, Viktor Yanukovych.

Valentyna Samar, Crime

Valentina Samar, rédactrice en chef du Centre de Crimée pour le journalisme d’investigation. Image : Capture d’écran, Union nationale des journalistes d’Ukraine.

Le 1er mars de la même année, des hommes en treillis portant le drapeau russe ont pénétré de force dans le siège commun de l’IPC et du CIJ. « Les activités des centres médiatiques de toutes les villes, à l’exception de Simferopol, ont été interrompues », se souvient Valentina Samar, rédactrice en chef du CIJ. « Les journalistes ont été menacés de représailles physiques par des formations paramilitaires contrôlées par les services spéciaux russes. À la fin de l’année, la majeure partie de l’équipe des médias s’est réinstallée à Kiev. Le CIJ a continué à couvrir la Crimée en profondeur – à distance. De cette expérience, Samar dit qu’elle a appris à évaluer les risques et à rechercher les possibilités de les minimiser au quotidien, voire plusieurs fois par jour. « Les décisions prises hier peuvent être erronées aujourd’hui », explique-t-elle à GIJN.

Les outils open source se sont avérés essentiels pour les enquêtes de son équipe, dit-elle, tout comme le travail avec des sources russes et des sources vivant dans les territoires occupés. Ces années de couverture à distance lui ont également appris à se séparer de ceux qui ne respectent pas les règles de sécurité et les normes professionnelles. « Une ‘chance de plus’ pour une personne irresponsable peut ruiner toute l’équipe », met-elle en garde.

Après l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie en février 2022, presque tous les médias d’investigation ukrainiens ont commencé à travailler comme le CIJ l’avait fait pendant les huit années précédentes d’occupation de la Crimée.

« De nombreuses méthodes d’enquête se sont avérées utiles dans les nouvelles conditions du conflit armé », explique Valentina Samar. « Par exemple, nos compétences en matière d’enquêtes maritimes ouvertes sur les violations de l’interdiction des sanctions par les navires dans les ports de Crimée se sont révélées très utiles pour enquêter sur le « grain express » – l’exportation de céréales ukrainiennes pillées par la Russie.

Le CIJ veille à ce que les rédacteurs en chef à Kiev aient accès aux comptes de réseaux sociaux des reporters sur le terrain, afin de pouvoir supprimer leur contenu à distance en cas de danger. Les reporters déposent même leurs rapports dans le dossier « brouillons » des comptes de messagerie partagés, de sorte que les rédacteurs puissent y accéder et les supprimer sans jamais les envoyer par courrier électronique.

Pour ceux qui souhaitent couvrir la guerre de la Russie contre l’Ukraine, Valentina Samar recommande d’abord d’apprendre le droit et la terminologie de base des crimes de guerre. « Il est impossible d’écrire professionnellement sur la guerre sans avoir une connaissance de base des lois et des coutumes de la guerre », dit-elle.

 


Sam Dubberely journalist war crimesSam Dubberley est le directeur du Digital Investigations Lab at Human Rights Watch. Avant de rejoindre Human Rights Watch, Sam dirigeait le Evidence Lab d’Amnesty International où il a mené un grand nombre de recherches en sources ouvertes pour Amnesty notamment des enquêtes collaboratives avec des médias tels que CNN ou la NHK. Sam est passé par le Human Rights Centre de l’Université d’Essex et par le Tow Center for Digital Journalism de l’Université de Colombia. Il est le co-éditeur du livre ‘Digital Witness: Using Open Source Information for Human Rights Investigation, Documentation, and Accountability’ publié par Oxford University Press en 2020.

Başak Çalı academic war crimes journalistBaşak Çalı est professeure de droit international à l’École Hertie et co-directrice du Centre for Fundamental Rights. Elle est une experte reconnue en droit et institutions internationales et en politique et droits humains. Autrice de plusieurs ouvrages sur ces questions, elle préside le European Implementation Network et elle est passée par le Human Rights Centre de l’université d’Essex. Elle est experte du Conseil de l’Europe sur la Convention européenne des droits de l’homme depuis 2002. Elle possède une vaste expérience dans la formation de membres du pouvoir judiciaire et d’avocats à travers l’Europe dans le domaine des droits humains. 

27.11.2023 à 19:54

Guide d’enquête sur les menaces numériques : cas de la désinformation

Jane Lytvynenko

Ce chapitre traite de la désinformation et la mésinformation, des outils pour les contrer; ainsi que des études de cas.
Texte intégral (4428 mots)

Au cours des 15 dernières années, l’utilisation des réseaux sociaux a connu une croissance sans précédent avec l’augmentation du nombre d’internautes dans le monde. Ces utilisateurs sont devenus vulnérables à l’exploitation, car les plateformes ont tardé à investir dans la modération, la protection et d’autres mesures de sécurité. La manipulation en ligne est un prolongement des tactiques de propagande traditionnelles, telles que les méthodes lugubres de relations publiques et la diffusion de fausses informations, portées à de nouvelles vitesses et à de nouvelles échelles. Sans les vérifications et l’équilibre qu’offre l’information journalistique, les problèmes de désinformation qui peuvent sembler insurmontables le deviendront réellement.

Remarque importante : le terme « désinformation » ne doit pas être confondu avec celui de « mésinformation ». Bien que les deux termes soient souvent utilisés de manière interchangeable, il existe des nuances distinctes entre les deux définitions que les journalistes d’investigation doivent s’efforcer de comprendre. La mésinformation est généralement comprise comme un terme plus large qui fait référence à toute information fausse ou trompeuse, qui peut être partagée ou diffusée de manière non intentionnelle. La désinformation, quant à elle, est plus précisément identifiée comme un contenu délibérément faux ou malveillant, conçu à dessein pour répandre la peur ou la suspicion ou la méfiance au sein d’une communauté ou d’une population. L’expression « manipulation en ligne » est un bon terme générique à utiliser, en particulier lorsqu’il s’agit de parler de faux comptes ou de faux sites web. En effet, ces derniers diffusent parfois des informations exactes, mais de manière manipulatrice.

La façon dont nous traquons de la manipulation en ligne a changé au fil des ans avec l’adoption de lois sur la protection de la vie privée, l’essor de nouvelles plateformes de réseaux sociaux et une constante évolution de la compréhension du problème. Les sites web sont toujours utilisés pour diffuser de fausses informations, mais il en va de même pour les influenceurs et les nouvelles formes de vidéo et d’imagerie. Dans de nombreux pays, Facebook reste l’une des principales plateformes de diffusion de fausses informations. Mais TikTok, Telegram et les applications de messagerie sont également devenus de puissants vecteurs pour diffuser des mensonges ou semer délibérément la confusion.

Alors, comment pouvons-nous, en tant que journalistes, nous plonger dans cet écosystème gargantuesque ?

Tout d’abord, nous devons le considérer comme tel : un écosystème. Une diffusion délibérée et en réseau de désinformation ou de propagande est différente d’un dérapage ponctuel et involontaire. La première question que tout journaliste devrait se poser est de savoir s’il s’agit d’un incident isolé ou d’une tentative de manipulation à grande échelle. Un écosystème peut représenter de nombreuses choses, et nous devons veiller à bien le décrire dans le cadre de notre enquête. La façon la plus courante de le décrire est de déterminer l’existence d’une connexion entre des comptes sur différents réseaux de médias sociaux qui se coordonnent pour diffuser le même message. Plusieurs indicateurs et questions peuvent être utiles à cet égard : quand les comptes ont-ils été créés ? Quand le contenu est-il partagé ? Qui a amplifié le contenu sur les différentes plateformes ? Et quels sont les points communs dans le contenu lui-même ? Il peut s’agir d’un même site web promu à la fois sur Facebook et sur Twitter, ou d’influenceurs sur TikTok qui utilisent un langage presque identique pour parler d’un sujet. Le timing peut également être révélateur : certains contenus ont-ils été partagés en l’espace de quelques minutes, voire de quelques secondes, par des comptes présentant des caractéristiques similaires ?

Pendant que vous enquêtez sur les manipulations en ligne, vous devriez utiliser toutes les méthodes traditionnelles et numériques disponibles pour se rapprocher le plus possible des questions épineuses de l’origine et de l’intention. Les campagnes soutenues par des acteurs étatiques ou des entreprises privées se distinguent de ceux des acteurs individuels qui, au fil du temps, peuvent être devenus de fervents adeptes de la conspiration. Tous ces types de manipulation ont un impact, mais avec des intentions et des portée différentes. Il n’est pas toujours possible de remonter à l’origine d’une campagne. Des cabinets de relations publiques sont de plus en plus souvent utilisés comme officines de désinformation pour protéger leurs clients, ce qui ajoute une difficulté supplémentaire à l’exercice déjà délicat qui consiste à déterminer qui est qui sur le web.

La désinformation numérique est un outil puissant qui a été utilisé pour faciliter le nettoyage racial, la violence et la guerre. Elle a eu des répercussions sur les systèmes de santé dans le monde entier, a joué un rôle dans des élections majeures au cours de la dernière décennie et a contribué à saper la liberté de la presse. Pour l’identifier avant qu’elle ne fasse des ravages, les journalistes doivent comprendre les communautés qu’elle est susceptible de cibler. Comme dans le cas des reportages à l’ancienne, il ne suffit pas d’être parachuté, de regarder autour de soi et de comprendre la profondeur du problème. En effet, la manipulation en ligne joue sur les clivages sociétaux existants, en les exacerbant, souvent dangereusement. Nous ne pouvons pas rendre compte de la manipulation et de la désinformation sans comprendre ces clivages.

Les outils et les approches décrits ci-dessous sont conçus comme des aides à la découverte d’informations et à l’examen approfondi de données. Ils ne peuvent pas remplacer le travail minutieux du journalisme traditionnel et n’ont pas vocation à le faire. Les enquêtes sur les manipulations en ligne sont le plus efficace lorsque les techniques d’investigation en ligne sont combinées à des enquêtes de terrain à l’ancienne, impliquant des sources et de la documentation. La bonne nouvelle, c’est que vous n’êtes jamais seul. Un nombre croissant de chercheurs, de journalistes et d’universitaires découvrent des aspects de plus en plus accablants de la manipulation en ligne. En lisant ce guide, vous devenez l’un d’entre eux. N’ayez jamais peur de demander et de proposer de l’aide dans ce domaine.

Restez organisé : Avant de commencer votre enquête, décidez de la manière dont vous allez suivre les comptes de médias sociaux et les autres entités en ligne sur lesquelles vous enquêtez. Les onglets du navigateur peuvent s’empiler rapidement, et il est essentiel de disposer d’un système d’organisation et d’archivage. Hunchly, un outil payant, est l’un des favoris du secteur en raison de sa capacité d’archivage automatique. Une autre approche consiste à disposer d’une feuille de calcul détaillée regroupant les comptes, les sites web, les images, les vidéos et tout ce qui vous intéresse en un seul endroit. Pensez à inclure les dates de création des comptes, ainsi que les dates et heures de publication des différents messages, afin de pouvoir consulter facilement la chronologie. Veillez à faire des captures d’écran et à prendre des notes au fur et à mesure que vous recueillez des informations pour votre enquête, car les messages et les comptes peuvent être supprimés à tout moment.

Il est également important de garder une trace de ce que vous voyez et d’organiser vos pensées. Vous pouvez utiliser un ou plusieurs Google Docs comme dépôt central pour vos notes et pour les captures d’écran ou les intérêts. Il est également important d’archiver publiquement ce que vous voyez. Si vous ouvrez un compte auprès d’Internet Archive, vous aurez accès à leur outil gratuit d’archivage en masse. Il se connecte à Google Sheets et enregistre chaque lien que vous avez collecté. Archives sont un meilleur moyen de conserver des informations que les captures d’écran, car il est beaucoup plus difficile de les manipuler et vous pouvez créer des liens vers le contenu dans votre enquête. Toutefois, certains réseaux sociaux, tels que Facebook, Instagram et LinkedIn, ne facilitent pas l’archivage. Envisagez de conserver un dossier séparé pour les captures d’écran. N’oubliez pas non plus que les vidéos ne sont pas automatiquement archivées et que vous devrez également les conserver dans un dossier distinct.

Comprendre la communauté : L’une des tactiques les plus courantes de ceux qui propagent la désinformation consiste à identifier un sujet de discorde sociale existant dans un pays ou une communauté et à s’efforcer d’exacerber les tensions et les divisions. L’un des meilleurs moyens d’attirer un public sur les médias sociaux est de publier des contenus qui sèment la discorde ou qui sont hyperpartisans. Il est donc essentiel de comprendre les communautés ciblées par la manipulation. Parlez aux membres des communautés ciblées et essayez de comprendre leur réalité. Qu’est-ce qui est à l’origine de ces problèmes et qu’est-ce qui rend la tentative de manipulation efficace ? Y a-t-il des conversations qui semblent manipulatrices mais qui sont en fait normales ? En vous immergeant dans ce type d’ethnographie numérique, vous serez en mesure de mieux comprendre la désinformation et, dans de nombreux cas, de voir venir des situations de particulièrement graves avant qu’elles n’ait une chance de se produire.

Tenez compte de l’impact : Décider de couvrir ou non une fausse information est une science inexacte. D’une part, vous pouvez faciliter sa diffusion. D’autre part, vous pouvez contribuer à la contrecarrer. Demandez-vous si l’information a des répercussions potentielles ou mesurables. Est-elle sortie de l’écosystème ou de la communauté où vous l’avez vue pour la première fois ? Est-elle susceptible de causer des dommages physiques ? A-t-elle bénéficié financièrement à ceux qui l’ont publiée ? A-t-elle été amplifiée par une personne particulièrement influente ? Il s’agit d’une décision qui doit être prise en équipe, en pesant tous les avantages et les inconvénients potentiels.

Minimiser le préjudice : Une fois que vous avez pris la décision de couvrir la fausse information, vous devez appliquer les meilleures pratiques du secteur en matière de journalisme responsable. Si vous produisez un contenu de vérification des faits (factchecking), par exemple, placez l’information exacte dans le titre. Dans le corps du texte, adoptez l’approche du « sandwich de vérité » : exact – inexact – exact. Cela aidera les lecteurs à se souvenir de l’information vraie plutôt que de l’information fausse. Lorsque vous créez un lien, renvoyez vos lecteurs vers une version archivée de la fausse information afin d’éviter d’attirer le trafic vers les désinformateurs. Enfin, si vous incluez une capture d’écran, placez une ligne rouge ou le mot « fake » en travers de l’image. L’objectif est de s’assurer que votre enquête « ne fait pas de mal » et évite de propager par inadvertance des informations inexactes ou nuisibles plus loin.

Fixer un standard élevé pour les preuves. Imaginez la situation suivante : plusieurs comptes Twitter anonymes partagent à l’unisson le contenu d’un même site web. Ce site est rempli d’informations trompeuses et, après avoir consulté les registres de domaine, vous constatez qu’il a été enregistré en Russie. Venez-vous de découvrir une campagne de propagande russe ? Pas nécessairement. Dans les enquêtes numériques, tout comme dans les enquêtes hors ligne, plus vous êtes en mesure de rassembler de preuves, plus le dossier est solide. Ne pointez pas du doigt une personne si vous n’avez pas de preuves à l’appui.

Supposons maintenant que ce site web soit également partagé sur Facebook. Lorsque vous ouvrez le menu de transparence de la page pour les messages en question, vous voyez qu’ils ont tous des administrateurs situés en Russie et qu’une société russe de relations publiques est répertoriée en tant que propriétaire de la page. Les preuves commencent à s’accumuler. Mais vous savez aussi que les signaux numériques, tels que les enregistrements de domaines et les informations sur les gestionnaires de pages Facebook, peuvent être manipulés. Vous trouvez ensuite d’anciens employés de l’agence qui révèlent les détails de l’opération et vous disent qui est le propriétaire de la société de relations publiques et confirment les autres informations. Vous disposez alors d’un dossier beaucoup plus solide sur les origines de la campagne. Posez-vous toujours la question suivante : existe-t-il d’autres explications possibles quant à l’identité des auteurs de cette opération ? Ou avons-nous des preuves irréfutables ?

Cherchez la motivation : La désinformation est une stratégie. Elle peut être utilisée à des fins d’enrichissement financier ou politique, pour gagner en influence, voire pour modifier des lois. Si vous avez trouvé le nom d’une personne menant une campagne de manipulation en ligne, ne vous arrêtez pas là. Recherchez les entreprises, les appels de dons et les affiliations politiques. Ce n’est pas toujours possible, mais plus vous vous rapprochez de la motivation, plus vous vous rapprochez de la vérité.

Franchissez les frontières des réseaux sociaux : Les journalistes ont tendance à étudier les plateformes les plus accessibles. Twitter fait partie des entreprises de médias sociaux les plus étudiées, en partie parce que ses données ont été plus faciles à obtenir que celles d’autres plateformes. (Toutefois, grâce à de récents changements dans l’accès à l’API de Twitter, ce n’est plus le cas). En revanche, YouTube ou les plateformes de podcast font l’objet d’une attention relativement limitée en raison du volume de contenu qu’un journaliste doit regarder et de l’absence de flux de données. Mais en évitant les plateformes qui nous sont moins familières ou qui nécessitent un investissement en temps plus important, nous risquons de passer à côté d’informations cruciales pour nos enquêtes. Sur les réseaux sociaux, personne ne se contente d’une seule plateforme, et les journalistes ne devraient le faire non plus.

Recherche avancée : Les outils d’investigation en ligne sont notoirement instables. Ils sont soumis aux caprices des responsables des médias sociaux, qui peuvent à tout moment modifier le type de données qu’ils rendent accessibles au public. C’est pourquoi il n’est pas judicieux de se fier uniquement aux outils d’investigation. Mais il existe quelque chose qui peut s’avérer utile dans presque toutes les enquêtes : la recherche avancée. Utilisez la recherche avancée de Twitter pour suivre les dernières nouvelles en direct. Utilisez la recherche avancée de Google pour obtenir des informations sur des sites web qui peuvent être difficiles à naviguer. La recherche est au cœur du travail d’investigation numérique et vous devez vous familiariser avec l’élaboration de requêtes et l’utilisation des opérateurs spécifiques aux différentes plateformes. GIJN propose un tutoriel fantastique pour vous aider à démarrer.

Outil Junkipedia : Développé par l’Algorithmic Transparency Institute, Junkipedia a été conçu à l’origine pour surveiller la désinformation et les « fausses nouvelles ». Il permet désormais aux utilisateurs de suivre et d’établir des listes de comptes de médias sociaux à partir d’une douzaine de plateformes différentes, y compris des sites marginaux tels que GETTR et Gab, ainsi que des sites majeurs tels que TikTok, Facebook et Telegram. Junkipedia peut également transcrire et rechercher automatiquement des podcasts en anglais. [GIJN a également abordé les capacités de recherche de Junkipedia de manière plus approfondie].

Outil WeVerify : L’autre outil fiable et irremplaçable est WeVerify. Il a été créé par des vérificateurs de faits pour des vérificateurs de faits. Vous pouvez l’utiliser pour effectuer des recherches inversées sur des images ou des vidéos, comparer des images pour vérifier si elles ont été manipulées et effectuer des analyses sur Twitter. C’est un couteau suisse pour les journalistes spécialisés dans la désinformation. Il fonctionne mieux avec des options avancées, donc si vous avez une adresse électronique professionnelle, n’oubliez pas de vous inscrire pour un compte gratuit.

Il existe de nombreux autres outils et le domaine des enquêtes sur la manipulation en ligne est en constante évolution. Les plateformes de réseaux sociaux évoluent, et notre journalisme doit évoluer avec elles. Dans ce domaine, il est essentiel de toujours rechercher de nouvelles approches. Ce que vous avez appris ici n’est qu’un début.

Études de cas

Ukraine : Un projet novateur du média d’investigation ukrainien Texty a montré comment de fausses chaînes Telegram ont été créées peu après l’invasion massive de l’Ukraine par la Russie. Ces canaux se présentaient comme des sources d’informations locales, mais « étaient en fait utilisés pour diffuser des récits russes et renforcer le soutien aux occupants ». L’enquête a révélé que les chaînes ont cessé de fonctionner une fois les localités pour lesquelles elles étaient créées ont  été libérées. Les données de Telegram sont parmi les plus accessibles de tous les réseaux sociaux et vous n’avez pas besoin d’outils spéciaux pour télécharger le flux d’une chaîne entière ou recueillir des données sur son contenu et son engagement.

Texty a cartographié les données de Telegram pour montrer la relation entre les troupes sur le terrain et la propagande en ligne.

Palestine : En 2021, après que les forces israéliennes ont attaqué la mosquée Al-Aqsa et blessé plus de 150 personnes, Israël et la Palestine ont convenu d’un cessez-le-feu précaire. Mais ce qui a temporairement empêché les roquettes de voler dans les airs n’a guère permis de contrecarrer ce qu’un chercheur a appelé des « lynchages inspirés par l’Internet ». Le groupe de surveillance de la désinformation FakeReporter a recensé plus de 100 groupes WhatsApp et Telegram en hébreu coordonnant des attaques contre des Arabes à Bat Yam, une ville côtière au sud de Tel-Aviv. Les appels à la violence ont précipité les actes de violence, et un homme – un père de quatre enfants qui se rendait à la plage – a été hospitalisé après avoir été battu, apparemment parce qu’il était arabe. Des personnalités israéliennes ont continué à alimenter la haine en ligne, y compris dans les médias qui couvraient l’événement. Il n’y a jamais eu suffisamment d’informations pour déterminer qui avait lancé les groupes Telegram et WhatsApp, mais l’affaire a clairement montré comment la manipulation et la haine en ligne contribuent à causer des dommages dans le monde réel.

États-Unis : On a beaucoup parlé des affirmations sans fondement de l’ancien président américain Donald Trump concernant la fraude électorale lors des élections de 2020, et de la manière dont elles ont alimenté la violence et l’anarchie du 6 janvier. Une enquête de Jim Rutenberg du New York Times sur le sujet est particulièrement remarquable. Il retrace les efforts déployés par les républicains pour saper les institutions démocratiques depuis 2016 jusqu’à la veille des élections de 2020. M. Rutenberg examine les fausses allégations dans plusieurs États, cherche à savoir d’où elles proviennent et décortique les changements législatifs qu’elles ont servi à justifier. Cette histoire est un cours magistral sur la manière de comprendre la désinformation en relation avec le pouvoir politique.

République démocratique du Congo : dans cet exemple alarmant, une poignée d’administrateurs congolais de pages Facebook ont lancé une campagne de désinformation très efficace pendant la pandémie de COVID-19. En attribuant de fausses citations à des personnalités publiques de premier plan, dont un expert français en maladies infectieuses, le directeur de l’OMS et les présidents de Madagascar et de France, ce petit groupe a diffusé une propagande anti-vaccinale sans fondement et des théories conspirationnistes sur de faux remèdes. L’équipe des Observateurs de FRANCE 24 a finalement retrouvé l’un d’entre eux, un étudiant de 20 ans originaire de Kinshasa, qui a confié que sa motivation pour répandre des mensonges était d’accroître la présence de ses pages sur les médias sociaux et de générer du « buzz ».

Philippines : Bien qu’il s’agisse d’un rapport universitaire et non d’un article de presse, il est néanmoins important pour ceux qui creusent la désinformation. Les auteurs Jonathan Corpus Ong et Samuel Cabbuag ont révélé le rôle des trolls avec des pseudonymes lors des élections de 2019 aux Philippines. Ils constatent que ce segment très négligé de l’Internet joue un rôle crucial dans l’animation des débats en ligne et la promotion des messages politiques. L’article établit certains parallèles avec la campagne de Michael Bloomberg pour la présidence des États-Unis en 2020 et vaut la peine d’être lu, tant pour ses techniques d’investigation que pour ses conclusions.

Costa Rica : Ce livre blanc rédigé par deux universitaires documente l’ingérence de ce que l’on appelle les cybertroupes dans les élections et la politique du Costa Rica depuis 2018. Ces cybertroupes, définies comme des « acteurs du gouvernement ou des partis politiques chargés de manipuler l’opinion publique en ligne », ont non seulement joué un rôle dans les élections présidentielles de 2018, mais ont été utilisées par les partis politiques d’extrême droite pour favoriser une opposition féroce aux projets de réforme fiscale et de réforme de la fonction publique du président entrant. En diffusant de faux sondages politiques, pour dérouter l’opinion public, et d’autres fausses nouvelles, visant à nuire à la réputation de leurs adversaires, ces acteurs locaux de la désinformation ont semé le chaos et la discorde dans l’un des pays les plus stables d’Amérique latine.

Ressources additionnelles :

Élections : enquêter sur la désinformation politique

Comment enquêter sur la menace croissante de la propagande par “selfies”


Jane Lytvynenko est journaliste indépendante et chercheuse au Centre Shorenstein de Harvard. Ses articles ont été publiés dans le Wall Street Journal, le Guardian, The Atlantic et d’autres publications. Auparavant, elle était rédactrice senior en technologie pour BuzzFeed News, où elle couvrait la désinformation. Jane est originaire de Kiev, en Ukraine, et vit à Varsovie, en Pologne.

 

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