Au pied du sapin de 31 mètres de haut qui domine la place Kléber, Michèle Pierron, 74 ans, prend des photos avec son petit-fils Matteo Bredow, 22 ans.
La situation politique, "c'est lamentable", se désole la septuagénaire originaire de la région parisienne.
"Censurer, c'est une chose, mais derrière il faut proposer quelque chose de durable... Si on enlève le Premier ministre, qui met-on ensuite ?" remarque son petit-fils, étudiant en sciences politiques à Strasbourg.
Il suggère de "nommer quelqu'un d'assez technique comme Thierry Breton", l'ancien commissaire européen et ministre de l'Economie sous Jacques Chirac (2005-2007).
Le jeune homme regrette en tout cas que la situation "participe à la défiance des Français envers la politique. C'est dommage".
"Rien ne bouge"
"La situation politique est lamentable. On est la septième puissance mondiale et on a une instabilité politique depuis la dissolution, on n'a pas de budget et rien ne bouge...", regrette Jean-Pierre, 78 ans, un verre de soupe à la main.
"On est en train de saccager l'image du pays et pour remonter la pente, ça va être dur", craint le retraité, qui ne souhaite pas donner son nom de famille. "Pour les vieux comme moi, ça ne change pas grand chose mais je suis très inquiet pour les jeunes, pour le futur. On est dans une situation inextricable."
"La solution serait qu'on ait des gens raisonnables, de tous bords politiques, qui mettent leur intérêt sous le mouchoir et se mettent d'accord pour mettre en place des mesures concrètes par rapport à la vie des Français", suggère-t-il.
"Il faut être raisonnable et mettre les égos de côté", plaide aussi Christine Lerval, 68 ans, qui vend des accessoires douillets: chaussettes, chaussons et bonnets.
Elle souhaiterait "qu'on laisse une chance au gouvernement en place", estimant qu'il ne peut pas "faire de miracles".
En écho à la coalition de Michel Barnier, qui appelle les députés à ne pas faire chuter le gouvernement pour éviter un "chaos" politique et budgétaire, la vendeuse s'alarme des éventuelles conséquences: "Si le gouvernement est censuré, ça va être une catastrophe".
"Un peu triste"
Si l'incertitude politique pèse sur le moral des Français, elle ne nuit en tout cas pas aux affaires, se félicitent les commerçants interrogés, qui écoulent bretzels, vin chaud ou encore produits artisanaux. Depuis son ouverture le 27 novembre, le marché ne désemplit pas.
"On fait du chiffre d'affaires, c'est une période très faste de l'année", se réjouit Christine Lerval.
Beignets, gaufres, chocolats, sucreries... "Les Français se lâchent", constate Emmanuel Parisot, 51 ans, confiseur. "Les gens pensent à autre chose, les problèmes politiques passent après", assure-t-il, ajoutant qu'il y a aussi "beaucoup de touristes et ça ne les touche pas, tout ça".
Lui juge la situation française "un peu triste" et pointe du doigt un coupable: Emmanuel Macron. "Tout est de la responsabilité du président. Il a voulu faire une dissolution, et on ne sait pas où ça va nous mener".
"Ce qui est triste, c'est que je ne vois pas de responsable politique capable de relever le pays. Il n'y en a pas un qui sorte du lot", selon le commerçant, pour qui "ça risque d'être difficile les prochains mois".
Face à la morosité ambiante, le confiseur invite à trouver un peu de réconfort dans les douceurs proposées sur son stand: "c'est fait pour ça!".