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24.12.2024 à 12:52

D’une motion de censure l’autre : 1962, 2024, deux crises et deux tournants dans l’histoire de la Vème République

snoel

Censure. L’Insoumission publie un nouvel article de sa rubrique « Nos luttes ont des histoires ». Son but est de porter attention aux processus historiques, analyser et connaitre les faits pour comprendre l’influence des évènements sur notre présent et notre futur. Dans ce nouvel article, l’Insoumission vous dresse une perspective historique autour des deux motions de censure de la 5ème République, celle de 1962 et celle, issue de la France insoumise, ayant contraint Barnier à la démission le 4 décembre dernier.

La crise politique que l’on vit, et qui a commencé bien avant l’été 2024, peut marquer la clôture du cycle « présidentiel », ouvert par la crise de l’automne 1962 avec la dissolution réussie du général De Gaulle. En cette fin d’année 2024, Emmanuel Macron continue de se croire investi d’un pouvoir qu’il n’a plus. Sans majorité, ni futur, ni légitimité et au fond colonialiste, raciste, sexiste et homophobe, le roi est nu.

Dans ces circonstances, pour sortir de la crise politique, voilà ce que le gaulliste Louis Vallon préconisait en 1972 : «  Le Président de la République a besoin du soutien d’une majorité parlementaire. Si ce soutien venait à lui manquer et si les élections nouvelles qui suivent la dissolution ne lui permettaient pas de l’obtenir, le Président ne pourrait plus gouverner et serait contraint de démissionner. ». Notre article.

Qu’est-ce qu’une motion de censure ?

Le 4 décembre 2024, une motion de censure votée par la majorité absolue des députés contraint le gouvernement Barnier à démissionner. Cela marque, techniquement, le rejet du projet de loi de finance de la Sécurité sociale présentée par le gouvernement et sur lequel il avait engagé sa responsabilité par l’utilisation de l’article 49.3 de la Constitution. Rappelons que cet article, devenu un substantif à part entière – on dit « le » 49.3 – permet au gouvernement de faire passer un projet de loi en se passant d’une sanction des parlementaires : ni discussion ni vote. C’est une façon, pour le pouvoir exécutif, de contourner la représentation nationale. Cette procédure est amplement utilisée quand le gouvernement n’est par sûr de sa majorité mais qu’il considère que la majorité des députés ne souhaite pas sa chute ou n’y a pas intérêt.

Cela a d’ailleurs parfaitement fonctionné pendant plus de 60 ans : depuis 1962, pas une seule motion de censure n’a été adoptée. Il est vrai qu’en temps « normal », un tel vote entrainerait presque automatiquement la dissolution de l’Assemblée nationale par le président de la République qui appliquerait alors l’article 12 de la Constitution. Seulement, en vertu de ce même article, « il ne peut être procédé à une nouvelle dissolution dans l’année qui suit » les nouvelles élections législatives. Or la dissolution d’E. Macron a eu lieu en juin 2024 ; les élections qui l’ont suivie se sont achevées le 7 juillet. Donc aucune dissolution n’est possible avant le 8 juillet 2025. Dit autrement, la dissolution est une arme à un coup et qui se recharge en un an. Ainsi, aucune riposte de ce genre n’est aujourd’hui possible pour l’exécutif face au législatif récalcitrant.

Ce n’est pas ce qui s’était passé en 1962. Nous nous proposons de rappeler les circonstances de la première – et pendant longtemps la seule – motion de censure adoptée par l’Assemblée nationale sous la Vème République. Les conséquences avaient été un renforcement de l’autorité et des pouvoirs du président de la République, ouvrant une pratique des institutions qui est peut-être en train de changer aujourd’hui, à la suite, justement, de la deuxième motion de censure qui ait fait mouche.

Un contexte important : l’immédiat après-guerre d’Algérie

Par les accords d’Evian signés le 18 mars 1962, le cessez-le-feu est décrété en Algérie, qui devient indépendante le 5 juillet suivant. C’est une ligne de fracture au sein de la droite française, une partie d’entre elle refusant, même sans le dire ouvertement, de faire le deuil de « l’Algérie française ».

La période qui suit les accords d’Evian est marquée par des attentats en grand nombre, et de plus en plus violents, menés par les terroristes de l’OAS (Organisation de l’armée secrète, proche de l’extrême droite, qui combat la solution de l’indépendance algérienne).

Le 8 avril 1962, un référendum entérine à une très large majorité les accords d’Evian. Renforcé dans son autorité, De Gaulle décide de renvoyer son premier ministre Michel Debré, principal rédacteur de la constitution de 1958, et partisan à la fois d’une Algérie française et d’un équilibre des pouvoirs entre le Président et le Parlement. Le 13 avril, il nomme Georges Pompidou pour le remplacer à Matignon.

Pompidou est un homme « nouveau », qui détonne dans le paysage politique d’alors. D’une part, il est issu du monde universitaire : normalien et agrégé de lettres, il a notamment enseigné à hypokhâgne (classe préparatoire littéraire) au lycée Henri IV, puis à Science Po Paris ; il est l’auteur d’une Anthologie de la poésie française. Après un passage dans les allées du pouvoir à la Libération puis dans la formation du RPF, le mouvement fondé par le général De Gaulle en 1947, il entre à la banque Rothschild en 1954 – appuyé, pour la petite histoire, par l’oncle de François Fillon. Pressenti pour former un gouvernement en 1962, la banque a « bien voulu [le] libérer pour le service de l’Etat », comme l’écrit Jean Lacouture, le biographe de De Gaulle. Circonstance aggravante pour lui, il ne vient pas de la Résistance, mais il ne s’est toutefois pas compromis dans la collaboration ; il a reçu la croix de guerre pour faits d’armes durant la campagne de 1940. Enfin, il n’a jamais été élu. Tout cela explique l’accueil très frais que lui réservent les députés lors de sa nomination à Matignon.

Georges Pompidou : un premier ministre choisi hors du « sérail » politique

Ainsi, alors que l’Assemblée penche nettement à droite et vers le gaullisme – le camp présidentiel compte 323 députés sur 576 – le vote de confiance n’est acquis qu’à une courte majorité de 259 contre 247. Le 5 octobre 1962, le gouvernement de Georges Pompidou est renversé par une motion de censure. Comment est-on arrivé à cette situation paradoxale qu’une partie de ce qui était jusque-là la majorité présidentielle se retourne contre le gouvernement voulu par le président ?

Une motion contre… De Gaulle

Dès le départ, la nomination de Pompidou est dénoncée comme la volonté de pouvoir personnel du général De Gaulle : « Vous formez un gouvernement De Gaulle », lui reproche Guy Mollet, le leader de la SFIO (ancêtre du Parti socialiste). Un mois après l’arrivée de Pompidou à Matignon, le 15 mai, les cinq ministres du MRP (mouvement de centre-droit issu de la Résistance) démissionnent à la suite des propos de De Gaulle sur l’Europe au cours d’une célèbre conférence de presse où il a moqué les partisans de la construction européenne parlant le « volapük intégré »[1]. Les membres du très pro-européen MRP se sont sentis visés, à commencer par le ministre d’Etat chargé de la Coopération également maire de Strasbourg, Pierre Pflimlin.

Mais le fait décisif a été la proposition de De Gaulle de faire élire le président de la République au suffrage universel direct. En effet, De Gaulle, profitant de l’émotion suscitée par l’attentat qui le visait, perpétré par l’OAS au Petit-Clamart le 22 août 1962, propose une semaine plus tard de modifier la Constitution en ce sens – le président était jusque-là élu par un collège de grands électeurs.

D’une part cela heurte, sur le fond, tout ceux qui, même dans sa propre majorité, sont opposés ou à tout le moins méfiants face à un régime qui deviendrait plus présidentiel : les membres du MRP, les républicains indépendants (libéraux), les radicaux de droite… Alliés de circonstance à la SFIO, ils forment alors un improbable « cartel des non » à la révision constitutionnelle. Il faut même y ajouter le ministre de l’Education nationale, Pierre Sudreau, qui faisait figure de successeur possible au chef de l’Etat, mais qui s’oppose frontalement à De Gaulle au cours de deux conseils des ministres[2] ; il démissionnera le 15 octobre.

Pire encore à leurs yeux, sur la forme, le général choisit une ratification par le seul référendum, en se fondant sur l’article 11 de la Constitution, qui stipule que le Président peut soumettre à référendum tout « projet de loi » « portant sur l’organisation des pouvoirs publics ». Or cela est contraire à l’article 89 de la même Constitution, qui prévoit, pour toute modification de la Constitution, d’abord un vote par les deux assemblées avant un référendum[3]. Arguant non sans raison que la modification de la Constitution n’est pas un simple « projet de loi », le président du Sénat, Gaston Monnerville, dénonce une « forfaiture » ; le souvenir du coup d’Etat de Louis-Napoléon Bonaparte en 1851 comme celui de la crise du 16 mai 1877 par Mac-Mahon (voir notre article sur la crise du 16 mai 1877) hantent les couloirs des assemblées.

« Le jeu normal des institutions est faussé, la Constitution est violée ouvertement, le peuple est abusé. Ce n’est pas une République qu’on nous propose, c’est au mieux un bonapartisme éclairé. […] Réunir en une seule main sur une seule tête, tous les pouvoirs, c’est proprement abolir la démocratie. » (Gaston Monnerville, discours au Sénat, 9 octobre 1962)

Le Conseil d’Etat, d’ailleurs, donne raison au président du Sénat mais le Conseil constitutionnel refuse de se prononcer, ce qui laisse ouverte la voie choisie par le Président – toutefois, à titre individuel, les deux anciens présidents Vincent Auriol et René Coty marquent leur opposition au projet, tout comme Paul Reynaud[4] qui avait présidé le comité constitutionnel de 1958. Bref, c’est presque toute la classe politique, à l’exception de la garde rapprochée du général, qui est vent debout contre la réforme de la Constitution. Le doyen Vedel, référence en matière de droit constitutionnel, précise même que « l’inconstitutionnalité de la procédure choisie est une certitude. » Mais le général n’en démord pas.

Ainsi, début octobre, tout s’accélère : le 2, le Conseil des ministres entérine la proposition de changement de la Constitution et la voie référendaire (art.11 de la Constitution). Le 4, une motion de censure est déposée contre le gouvernement Pompidou. Le 5 une majorité de 280 sur 480 députés l’adopte : Georges Pompidou doit présenter sa démission au Président. Le 6, De Gaulle décide de dissoudre l’Assemblée nationale. Le 28, le référendum est organisé :  le « oui » l’emporte avec 61,75 % des voix. Les 18 et 25 novembre, donc après le référendum, les élections législatives sont marquées par la victoire du camp présidentiel.

La présidentialisation du régime

De Gaulle enregistre une double victoire mais elle n’est pas écrasante. D’une part, du fait de l’abstention, importante pour l’époque (près de 23 %), ce sont moins de la moitié des citoyens qui se sont exprimés en faveur de l’élection du président au suffrage universel direct. D’autre part, aux législatives qui ont suivi, si les gaullistes de l’UNR (Union pour la nouvelle République) s’imposent dans 233 circonscriptions, il leur manque quelques élus pour disposer d’une majorité absolue : l’appoint devra être trouvé chez les républicains indépendants emmenés par le jeune Valéry Giscard d’Estaing. En outre, le reste de la droite s’effondre tandis que la gauche progresse légèrement.

Malgré ces réserves, fort du soutien du suffrage universel, le président peut confirmer Georges Pompidou dans ses fonctions de Premier ministre, qui tient ainsi son pouvoir du chef de l’Etat et non de l’investiture d’une assemblée que De Gaulle a su circonvenir et contre laquelle il n’a pas hésité à tordre la Constitution dont il était lui-même à l’origine. De Gaulle peut triompher, dans une conférence de presse en 1964 : « L’autorité indivisible de l’Etat est confiée tout entière au Président par le peuple. »

Les conséquences de cet séquence censure, dissolution, référendum et élections législatives de 1962 marquent la vie politique de la Vème République davantage qu’il y parait.

« Dans l’esprit du général de Gaulle, la réforme, comme on sait, était censée empêcher le retour au « régime exclusif des partis » et donner au chef de l’Etat les moyens, autant politiques que strictement institutionnels, de demeurer l’homme de la Nation, incarnant un idéal de rassemblement au-dessus des partis et des affrontements liés à leur compétition. S’il prend en considération l’ensemble de la période 1962-2012, l’historien a toutes les raisons de conclure à un double pari perdu. »  (Gilles Le Béguec, « La rupture de 1962 », dans Espoir, n°171, 2012)

En effet, les législatives de 1962 sont marquées par le retour de l’opposition droite – gauche, estompée depuis la fin de la IVème République. D’une part, la défaite de la SFIO (prédécesseur du Parti socialiste) la pousse à envisager un rapprochement avec le Parti communiste. D’autre part, les forces de droite sont plus ou moins contraintes à un soutien plus ou moins marqué à De Gaulle, à son corps défendant, certes, mais cela tend à ancrer le gaullisme à droite.

Il n’empêche, dans le bras de fer entre l’exécutif et le législatif, le premier l’a emporté et, au sein de l’exécutif, le président de la République devance le chef du gouvernement : cette hiérarchie des pouvoirs marque depuis lors le fonctionnement de la Vème République. C’est un peu un 16 mai 1877 qui aurait réussi, un « coup d’Etat permanent », comme l’écrit François Mitterrand dans un essai paru en 1964 – bien qu’une fois arrivé au pouvoir (1981-1995) il s’empressera de ne rien changer à ladite hiérarchie. Ainsi, quand un président est opposé à un premier ministre, celui-ci doit s’incliner, comme ce fut le cas de Jacques Chaban-Delmas en 1972 face à Georges Pompidou, malgré un vote de confiance massif de l’Assemblée nationale quelques mois plus tôt ; ou de Jacques Chirac à qui le président Valéry Giscard d’Estaing impose un gouvernement en 1976, ce qui le pousse à démissionner. Les seules périodes où l’Assemblée et le gouvernement responsable devant elle retrouvent la prépondérance, c’est lors des cohabitations (1986-1988 ; 1993-1995 ; 1997-2002) contre lesquelles l’exécutif a cru se mettre à l’abri par l’instauration du quinquennat présidentiel (référendum de l’an 2000) et l’organisation de l’élection présidentielle avant les législatives décidée en 2001.  

La situation actuelle est différente. Certes, le président Macron, fort du précédent créé par De Gaulle en 1962, a pu, entre 2017 et juin 2024, se comporter en « monarque républicain », quitte à ce que ses chefs de gouvernement utilisent « le 49.3 », massivement depuis 2022. Mais la comparaison avec les années De Gaulle doit s’arrêter en juillet 2024. D’une part, nettement désavoué par le vote populaire, le président décide de se maintenir en place – ce que De Gaulle avait refusé de faire en 1969, sur un scrutin (un référendum) qui n’engageait pas directement son pouvoir : il avait alors démissionné. D’autre part, la motion de censure votée contre le gouvernement de Michel Barnier le 4 décembre 2024 était en réalité, comme en 1962, largement orientée contre le chef de l’Etat : cela montre que le président ne dispose plus d’aucune majorité pour diriger le pays et aucune possibilité de dissoudre avant juillet 2025.

2024 : vers la fin de la prépondérance présidentielle ?

Dans une perspective historique, l’épisode politique que l’on vit depuis la dissolution de juin 2024 sembler devoir marquer une rupture dans le fonctionnement des institutions et des rapports de force politiques. A moins que l’on ne l’analyse comme la continuité des évolutions constatées depuis une dizaine d’années (peut-être davantage) avec le quinquennat de François Hollande. Celui-ci a été dominé par une gauche d’accompagnement de la société vers le libéralisme économique, ce qui se concrétise en 2017 par la formation d’une force politique en apparence nouvelle – en réalité très ancienne – autour d’Emmanuel Macron, que l’on peut lire comme la résurgence de « l’orléanisme » défini par René Rémond dès 1954, c’est-à-dire une droite libérale, à tendance sociale mais qui peut aussi dériver vers un exercice plus autoritaire du pouvoir.

L’élection présidentielle de 2017, à ce titre, marque l’effacement de forces politiques jusque-là au pouvoir depuis 1958 – voire depuis 1944 : la droite d’inspiration gaulliste ; les gauches autour d’un parti socialiste dominant. Le paysage politique français se recompose, si l’on suit Stefano Palombarini, selon trois blocs : un bloc bourgeois autour d’Emmanuel Macron, désormais clairement positionné dans « l’espace de la droite » ; un bloc d’extrême-droite, « davantage ancré dans les catégories populaires » et un bloc de gauche recomposé autour de la gauche de rupture.

Les manœuvres désespérées du président Macron, par la dissolution de l’Assemblée nationale, puis les nominations successives de premiers ministres de droite en l’absence de majorité, font suite aux utilisations répétées du « 49.3 » durant la législature précédente (2022-2024), au mépris évident de la volonté populaire, notamment lors de la réforme des retraites. L’usage, certes légal mais pas toujours légitime, de la Constitution (les articles 47.1, 44.3 et l’inénarrable 49.3 ainsi que, bien entendu, l’article 12, permettant la dissolution) à ces occasions montre l’affolement de l’Elysée qui pense reprendre la main alors qu’il perd pied, comme le suggère Jean-Luc Mélenchon le 20 décembre 2024. En cela, la crise politique que l’on vit, et qui a commencé bien avant l’été 2024, peut marquer la clôture du cycle « présidentiel », ouvert par la crise de l’automne 1962 avec la dissolution réussie du général De Gaulle.  

Le roi est nu !

A l’approche des fêtes de fin d’année, on nous permettra d’évoquer un conte qui, raconté au coin du feu, fait toujours rire les enfants. Dans Les habits neufs de l’empereur d’Andersen le souverain qui parade se pense vêtu d’un habit somptueux, or il ne porte aucun vêtement ; il feint de ne pas s’en apercevoir car des escrocs lui ont fait croire que seuls les plus intelligents perçoivent l’étoffe en réalité inexistante ; seul l’empereur est assez sot pour se convaincre de son élégance et ses courtisans assez lâches pour ne point l’en dissuader. Ainsi le président Macron s’est-il dessaisi de ses attributs principaux prenant le risque d’un avenir incertain pour notre République ; il se croit investi d’un pouvoir qu’il n’a plus : les députés n’ont pas à craindre de dissolution avant juillet ; le nouveau Premier ministre François Bayrou s’est imposé à lui ; la vacuité de ses discours ne trompe plus grand monde et le fond colonialiste, raciste, sexiste voire homophobe de ses sentiments a été mis à jour dans une récente série d’articles du Monde. Le roi est nu.

Dans ces circonstances, pour sortir de la crise politique, voilà ce que le gaulliste Louis Vallon préconisait en 1972 :  

« Sauf dans les circonstances exceptionnelles prévues par l’article 16 de la Constitution, le Président gouverne par le truchement d’un Premier ministre responsable devant l’Assemblée nationale. Il a besoin du soutien d’une majorité parlementaire. Si ce soutien venait à lui manquer et si les élections nouvelles qui suivent la dissolution ne lui permettaient pas de l’obtenir, le Président ne pourrait plus gouverner et serait contraint de démissionner. » (Louis Vallon, De Gaulle et la démocratie, La Table Ronde, 1972, p.52.)

Sébastien Poyard

Professeur d’histoire-géographie

Conseiller municipal et à la communauté d’agglomération de Vesoul

Quelques éléments bibliographiques

Lacouture, Jean, De Gaulle, t.3, Le souverain 1959-1970, Seuil, 1986.

Le Béguec, Gilles, « La rupture de 1962 », dans Espoir n°171, 2012.

Palombarini, Stefano, « Recomposition du paysage politique : trois blocs, deux perspectives », Billet de blog Médiapart, 20 avril 2022.

Vallon, Louis, De Gaulle et la démocratie, La Table Ronde, 1972.

Vandenbussche, Robert, « Crise politique de l’automne 1962 », dans Dictionnaire historique de la vie politique française, s. dir. Jean-François Sirinelli, PUF, 1995/2004.

Zancarini-Fournel, Michelle, Delacroix, Christian, La France du temps présent, 1945-2005, Belin, 2010.

Images :

De Gaulle lors de la conférence de presse du 15 mai 1962 : « Dante, Goethe, Châteaubriand appartiennent à toute l’Europe, dans la mesure même où ils étaient respectivement et éminemment italien, allemand et français. Ils n’auraient pas beaucoup servi l’Europe s’ils avaient été des apatrides et qu’ils avaient pensé et écrit en quelque esperanto ou volapük intégré. » Un état d’esprit qui déplait fortement aux partisans de l’intégration européenne, notamment au MRP, dont les ministres quittent le gouvernement le jour-même.

Georges Pompidou à la tribune de l’Assemblée nationale (ici en 1968)

Source : Assemblée nationale

Gaston Monnerville (1897-1991), sénateur de la Guyane, président du Conseil de la République puis du Sénat (1946-1968)

Source : Sénat

Affiche en faveur du « OUI » au référendum du 28 octobre 1962


[1] Voir la vidéo de la conférence de presse, sur le site de l’INA (vers 27’00)

[2] Selon Jean Lacouture, De Gaulle, t.3, Le souverain 1959-1970, Seuil, 1986, p.579.

[3] « Le projet ou la proposition de révision [de la Constitution] doit être examiné dans les conditions de délai fixées au troisième alinéa de l’article 42 et voté par les deux assemblées en termes identiques. La révision est définitive après avoir été approuvée par référendum. »

[4] Paul Reynaud était président du Conseil en mai 1940 : c’est lui qui a désigné le colonel De Gaulle, promu promptement général, pour faire partie de son gouvernement, ce qui lui a donné ensuite la légitimité, depuis Londres, d’appeler à la Résistance le 18 juin 1940.

23.12.2024 à 18:56

Valls, Retailleau, Darmanin, Rebsamen : Bayrou a son gouvernement de perdants et de revenants

snoel

Bayrou. Le casting des participants à la nouvelle saison de Walking Dead est désormais connu. Le nouveau et pourtant si vieux gouvernement des perdants a été nommé ce soir à 18h30, réuni autour de François Bayrou, déjà acculé, détesté par 76% des Français, jusqu’aux rangs même de la macronie. Valls, Retailleau, Borne, Bergé, Darmanin… Ce nouveau Gouvernement rassemble non seulement des champions de la défaite, mais aussi des sportifs olympiques de la détestation. Deux socialistes au bilan détestable et très droitier, Manuel Valls et François Rebsamen, sont nommés dans cette combinaison de recyclage.

Sans légitimité, ni futur, ce nouveau Gouvernement a sa feuille de route bien établie, connue de longue date, et rappelé par Emmanuel Macron le 5 décembre dernier. Il s’agit de défendre la retraite à 64 ans, couvrir le génocide à Gaza par l’inaction et poursuivre coûte que coûte la même politique en faveur des ultras riches et des multinationales. Le tout en donnant des gages racistes aux surveillants généraux du Gouvernement : Marine Le Pen et Jordan Bardella, ces derniers ayant sauvé Emmanuel Macron de la destitution et Barnier de la première censure insoumise en octobre. Sur l’échiquier politique, l’analyse de LFI est une nouvelle fois confortée : un Gouvernement de macronistes pur jus a été nommé. Les rendez-vous à l’Elysée – que seuls les insoumis ont boycotté dans les rangs du NFP – n’étaient qu’une comédie, avant la farce de ce soir.

Qu’est ce qui attend ce Gouvernement ? Déjà fragilisé par ses catastrophes en série, le Premier ministre Bayrou a désormais une équipe de pyromanes autour de lui. Pour les insoumis, le cap est clair : Bayrou ne passera pas l’hiver, selon les mots de Jean-Luc Mélenchon. Les mêmes causes produiront les mêmes effets : la censure, pour ensuite réaliser l’exigence de 64% des Français : la démission d’Emmanuel Macron. Tour d’horizon du Gouvernement. Notre article.

Gérald Darmanin, le rouleau compresseur de la répression

Répression féroce à Sainte-Soline, censure des manifestations contre le génocide à Gaza, loi Immigration votée avec le Rassemblement national, la liste des méfaits de Gérald Darmanin est trop longue pour prétendre à l’exhaustivité. Quant aux Gilets Jaunes, l’homme pour qui « le problème de la police, c’est la justice » est co-responsable de la féroce et inouïe répression à leur encontre. Son bilan est connu : 5 mains arrachés, 32 éborgnés et 11 morts.

A chaque mouvement social, Gérald Darmanin s’est illustré dans les bains de sang. En 2021, face aux mouvements sociaux en Guadeloupe, la seule réponse de Gérald Darmanin fut l’envoi de CRS et d’unités du RAID. Sur place, la population ne manque pas de CRS, mais de tout. Chaque année, les enfants guadeloupéens perdent un mois et demi de cours, faute d’accès à l’eau. Mais qu’importe, le ministre Darmanin déployait la troupe.

Tous ces actes sont des décorations dans l’univers macroniste. Pour preuve, Darmanin a une nouvelle promotion et devient ministre de la Justice.

Bruno Retailleau, raciste en chef

Réactionnaire, attaques contre la LDH (aussi) et contre le droit de manifester, vote contre l’interdiction des thérapies de conversion touchant les personnes LGBT+, opposé à la constitutionnalisation de l’IVG, parlant de « Français de papier », de « régression vers les origines ethniques» dans les banlieues d’« apartheid sexuel » au sujet du voile, entre autres. Retailleau est un ministre à l’agenda raciste assumé.

Fervent défenseur de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, il trouvait Manuel Valls trop mou, vis-à-vis du soutien de l’État au projet. Il qualifie les opposants au projet, tenants de la célèbre ZAD éponyme, de « minorité bornée et ultra-violente ». Il s’était alors dit prêt à utiliser la force pour expulser les zadistes.

Bruno Retailleau a été le premier à porter la fameuse loi dite « anticasseurs » au Sénat. Au départ, la loi visait à conférer le pouvoir au préfet d’interdire à une personne de manifester si elle représenterait une « menace pour l’ordre public » (article 3 de la loi). Des formules larges pour une répression maximale. Le Conseil constitutionnel avait fini par censurer la disposition, au grand dam de Bruno Retailleau.

Il a été reconduit ce jour comme ministre de l’Intérieur.

François Rebsamen, figure de proue du parti socialiste et fossoyeur des droits des salariés

Ministre du Travail sous François Hollande, maire de Dijon depuis 2001 (à l’exception d’une parenthèse gouvernementale) et soutien d’Emmanuel Macron en 2022, l’homme est notamment connu pour sa loi sur le « dialogue social » adoptée en 2015. Présentée comme une avancée dans les relations entre salariés et employeurs, elle simplifie les obligations des entreprises et fusionne les instances représentatives du personnel, affaiblissant de fait le pouvoir syndical. Ce cadeau offert au patronat, en pleine offensive contre le Code du travail, s’inscrit dans la lignée des réformes antisociales du quinquennat Hollande, dont la fameuse loi El Khomri.

Maire de Dijon, Rebsamen poursuit dans le même registre. S’il aime se targuer de son bilan local, notamment en matière de rénovation urbaine, ses projets favorisent souvent une vision élitiste de la ville. Sous couvert de modernisation, il a multiplié les partenariats public-privé, renforçant les inégalités sociales et l’exclusion des classes populaires.

Rebsamen est aussi un fervent défenseur d’une laïcité dévoyée, qu’il instrumentalise pour justifier des politiques sécuritaires et discriminatoires. Il se fait le porte-parole d’une ligne « républicaine » qui flirte dangereusement avec les discours de l’extrême droite, appelant à des politiques migratoires restrictives au nom d’un prétendu réalisme. François Rebsamen devient ministre de la décentralisation.

Manuel Valls, la meilleure preuve que le Gouvernement Bayrou ne passera pas l’hiver

Détesté par plus de 90 % des Français, le socialiste et ex Premier ministre Manuel Valls a été nommé dans un Gouvernement à son image. Perdant professionnel et caricature devenu un objet parodique sur les réseaux sociaux, l’ancien Premier ministre a été jusqu’à s’exiler à Barcelone pour tenter de conserver une place d’élu. Il a obtenu la cinquième place aux municipales de Barcelone, une condamnation à 227 000 euros d’amende pour financement illicite de sa campagne, et une chanson parodique dédiée.

Opportuniste professionnel, l’homme est responsable de la casse du droit du travail sous les années Hollande et du rapprochement assumé avec l’extrême droite. Quant aux massacres en Palestine, Manuel Valls est lui aussi, comme de nombreux membres du nouveau Gouvernement, un complice actif du génocide à Gaza. Ami français de Benjamin Netanyahu, il a écrit une tribune en janvier 2024 pour « condamner la convocation indigne d’Israël à répondre à des accusations d’actes génocidaires » face à la Cour internationale de justice.

L’homme que déteste chaque Français devient désormais… ministre des Outre-mer. Ultime preuve de mépris envers les citoyens des Outre-mer et notamment de Mayotte actuellement ravagée par le sous développement après le passage du cyclone.

Sébastien Lecornu, complice actif du génocide à Gaza

Depuis octobre 2023, les bombes du génocide pleuvent sur Gaza. Après avoir témoigné son soutien inconditionnel à Israël, le camp macroniste s’est rendu complice du génocide en acceptant de fournir armes, torpilles, matériel de tirs et autres équipements de guerre au criminel de guerre Netanyahu. Même après les alertes de la Cour internationale de Justice sur le risque génocidaire à Gaza, Sébastien Lecornu défend les exportations françaises vers Israël. Pour lui, aucun risque, ce ne sont que « des composantes élémentaires pour permettre à Israël d’assurer sa défense ».

Il omet de préciser que ces composantes servent également à construire les drones engagés dans l’offensive à Gaza. Le ministre se veut rassurant : ces transferts ne valent que 15 millions d’euros, soit 0,2 % des transferts globaux. Il oublie de préciser que la létalité ne se mesure pas au volume d’argent. Une pièce informatique équipant un drone ou un missile peut causer des centaines, voire des milliers de morts.

Avec une telle lecture, les plus de 200 000 morts Gazaouis (estimation selon les chiffres et la méthode de The Lancet) pourraient presque n’être qu’un chiffre. Amnesty International rappelle à l’ordre : « la France doit respecter un devoir de prévention du génocide ». Cela implique évidemment « de ne pas fournir à Israël des moyens lui permettant de commettre des actes entrant dans le cadre d’un risque de génocide ».

Pour aller plus loin : 111 millions d’euros d’armes françaises livrées à Israël, Macron complice du nettoyage ethnique à Gaza

Ce n’est pas la première fois que le ministre des Armées brille par ses déclarations : en juillet 2023, il affirme que l’opération Barkhane n’est « pas un échec ». Pour rappel, l’opération Barkhane est une opération militaire menée au Mali par l’armée française, entre 2014 et 2022. Elle succédait alors à l’opération Serval, étendant sa couverture du seul Mali au Sahel entier. Lancée pour combattre le terrorisme, l’opération Barkhane est abandonnée après 8 ans d’activités et 58 morts français.

Sur cette période, le nombre des violences, des victimes et des groupes armés terroristes ont augmenté. Leur aire d’influence aussi. Partout, la démocratie a reculé. Aucune solution politique n’a été construite. Pas un échec ? À ce stade, presque un franc succès !

Par ailleurs, Sébastien Lecornu s’est fait bien timide lorsque le député de la France insoumise Aurélien Saintoul l’a interpellé sur la présence de militaires français au Tchad. On le comprend bien, il ne faudrait pas fâcher le dictateur Mahamat Déby ! Cette posture coopérative est la honte de la France.

Il a été reconduit ce soir comme ministre des Armées.

Elisabeth Borne, le 49.3 chevillé au corps qui voulait résoudre la crise à Mayotte en distribuant des bouteilles d’eau

Nous sommes le 8 janvier 2024. Elisabeth Borne démissionne de ses fonctions. Emmanuel Macron salue en fanfare son « travail exemplaire ». Quel est son bilan ? Elisabeth Borne, désormais nouvelle ministre de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur et de la recherche, détient le record du monde de l’utilisation du 49.3.

À 23 reprises, l’ancienne Première ministre a utilisé cet article pour brutaliser les droits du Parlement, et notamment faire passer en force la réforme des retraites à 64 ans, actant le vol de deux ans de vie à tous les Français. Elle est aussi à l’initiative de l’adoption de la loi immigration, passée en décembre 2023. Une loi qui a repris ligne par ligne les mesures du programme RN/FN, et saluée en ce sens comme « victoire idéologique » par Marine Le Pen.

Elisabeth Borne est aussi connue pour son extrême mépris envers l’Outre-mer où elle considère l’ensemble des habitants comme des sous citoyens. C’est donc sans surprise que le 8 décembre 2023, alors qu’elle débarque à Mayotte, la foule lui scandale « On en a marre, on en a marre ! ». En question ? Sur place, l’eau est devenue une denrée des plus rares. Deux jours plus tôt, la préfecture interdisait partiellement la consommation d’eau du robinet à cause de la présence de métaux lourds, « au-delà des seuils d’alerte ».

Quelle fut l’une des premières annonces d’Elisabeth Borne à Mayotte ? Organiser les distributions d’eau en bouteille « aussi longtemps que nécessaire ». Comprendre : coller des sparadraps à une jambe coupée. Le matin même, la présidente de l’association Mayotte a soif sonnait une nouvelle fois l’alerte : « Ce n’est pas humain, c’est indigne de la France qu’on nous demande d’aller nous entasser par centaines dans des zones de distribution de bouteilles d’eau ». Face à la Première ministre, la colère était vive.

Depuis des années, à Mayotte, lorsque l’eau est consommable, elle n’est disponible qu’un jour sur trois. Telle était la situation en décembre 2023. Un an plus tard, l’abandon politique a continué, et le sous développement alimenté par les politiques macronistes aussi. La nomination de Borne est un énième signal de mépris colonial envers les habitants de Mayotte, privés d’eau, d’électricité et de toit après le passage dévastateur du cyclone Chido.

Catherine Vautrin, homophobe et anti-syndicaliste

En 2013, lors des débats autour du Mariage pour Tous, Catherine Vautrin défile fièrement avec la Manif pour tous. Le 30 janvier, elle monte au perchoir de l’Assemblée pour clarifier sa position. Elle ne se déclare pas contre les homosexuels, bien sûr… Mais on ne va quand même pas les laisser s’occuper des enfants !

Selon elle, le PACS peut progresser, changer de forme, se rapprocher du mariage, impossible que cela aboutisse à la filiation. Le message est clair : si les personnes homosexuelles peuvent se permettre la fantaisie du couple, il faut que cela reste entre eux, et que les enfants en soient à l’abri. C’est une position alors assez courante parmi les opposants au mariage pour tous, qui se targuent d’accepter les unions homosexuelles sans problème, pour peu qu’ils ne touchent pas à la famille.

Catherine Vautrin fait également partie de ceux qui ont promu, en 2005, le Contrat Première Embauche, celui-là même qui permet d’employer un jeune de moins de 26 ans pendant une « période d’essai » de deux ans avant de le licencier sans explication. Un long essai, ou une exploitation instable de jeunes précaires ? La mobilisation a tranché : la loi est retirée en 2006 suite aux résistances des étudiants et lycéens.

L’enthousiasme que ressentait la nouvelle ministre à l’idée du Contrat Première Embauche tombe sous le sens lorsque l’on connait la suite de sa carrière. En 2024, elle licencie deux inspecteurs du travail stagiaires après dix-huit mois de formation, dont six de stage, sans aucun avertissement. Ils présentaient pourtant de bons résultats, parfois au-dessus de la moyenne de leur classe. Leur engagement syndical à la CGT et leur participation aux grèves contre les dysfonctionnements de leur formation n’y sont surement pour rien non plus ; mais, dans le doute, autant les mentionner.

Aurore Bergé, une parjure nommée ministre déléguée à l’égalité femme-homme

Aurore Bergé, mise en cause pour avoir menti devant la représentation nationale au sujet de ses liens avec le lobby des crèches privées, a été renvoyée devant la justice le 9 octobre dernier. La députée macroniste et nouvelle ministre déléguée avait menti sous serment, devant la commission d’enquête du député LFI William Martinet sur le financement des crèches. Pour rappel, le « faux témoignage » est un délit, réprimé par les articles 434-13 et 434-14 du Code pénal. Elle risque jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende.

Le 1ᵉʳ octobre 2024, Aurore Bergé déclarait : « Ce qui me met le plus en colère, c’est que l’ère du soupçon et de la rumeur l’emporte sur les faits, sur les actes, sur la vérité », en affirmant entretenir des relations « professionnelles et non-amicales » avec Elsa Hervy,  représentante des crèches privées,. Mensonge en direct ? Deux jours plus tard, Victor Castanet révélait des documents accablants, dont un dans lequel Aurore Bergé parle d’Elsa Hervy en ces termes : « C’est surtout une copine, elle sera très aidante avec moi ». Dans un autre échange, Aurore Bergé parle du lobby des crèches privées comme ses « meilleurs alliés ». Caramba, encore raté. Au tour de la justice de se prononcer.

Un Gouvernement voué à la censure

« Censure, mobilisation, destitution de Macron ». C’est le triptyque rappelé par les insoumis, ce soir, en réaction à la nomination du nouveau Gouvernement. Avec une instabilité politique battant les records de la 4ème République, la 5ème République connait un nouveau Gouvernement dont le caractère éphémère est déjà compris par tout le monde. Interrogé ce soir par BFMTV, ni les journalistes, ni François Bayrou n’auront évoqué l’essentiel : le Premier ministre se soumettra t-il à un vote de confiance comme c’est le cas dans l’ensemble des démocraties du monde ?

https://twitter.com/JLMelenchon/status/1871278358052430224

Une chose est sûre, au vu des catastrophes en série et de la composition recyclage du nouveau Gouvernement, François Bayrou ne passera pas l’hiver. Les insoumis l’avaient prédit pour Barnier, et l’ont annoncé pour le nouveau locataire de Matignon. La motion de censure insoumise sonnera le glas de cette composition gouvernemental d’un niveau de recyclage inédit. Perdants et revenants sont réunis dans une ultime formation d’accompagnement de la chute d’Emmanuel Macron. 64% des Français exigent la démission de l’homme responsable du blocage du pays, ainsi que des personnalités politiques de tous bords.

Sylvain Noel, rédacteur en chef

23.12.2024 à 11:58

Propos racistes, misogynes et homophobes d’Emmanuel Macron : Matignon, nid d’espions

snoel

Macron. Dans son deuxième article sur une série de quatre consacré à Emmanuel Macron, Le Monde a révélé plusieurs propos du Président de la République, tenus en privé. On savait déjà Macron réactionnaire, xénophobe… Les révélations du Monde confirment ce que l’on savait déjà. Sous ses beaux atours, ses manières de bourgeois, il est à l’image de sa classe en pleine droitisation : grossier, raciste, machiste et homophobe jusqu’au trognon.

Depuis la dissolution de l’Assemblée Nationale en juin dernier, Emmanuel Macron multiplie les mécontents, jusque dans ses propres rangs. Tous ces ministres, députés, Gabriel Attal en tête, furieux d’avoir perdus leurs sièges ont vu leur Président nommer un LR à Matignon, Michel Barnier. Ce dernier a ensuite été censuré, une première depuis 1962, pour laisser la place à François Bayrou (MoDem).

Depuis, Président comme Premier ministre multiplient les sorties catastrophiques, notamment sur l’épouvantable ouragan qui a frappé Mayotte. Au lieu de faire la seule chose susceptible de sauver la démocratie (partir), Macron s’accroche au pouvoir, au peu qu’il lui reste. L’occasion est trop belle pour ses anciens soutiens, qui tentent de s’en émanciper, quitte à le jeter sous le bus. Notre article.

L’« ethos de droite » d’Emmanuel Macron

« Ethos de droite », c’est le joli mot pour dire, contrairement à ce qu’il a pu dire, qu’Emmanuel Macron n’a jamais été un homme « de gauche ». Certes, il a fait ses premières armes en politique au service de François Hollande, ce qui n’est pas un gage de qualité quand on se veut de gauche. Certes l’un de ses mentors fut Michel Rocard, qui dans les dernières années de sa vie avait pleinement adopté les idées néolibérales. Mais Macron demeure un banquier, issu d’une famille bourgeoise et connu pour ses idées et son entourage au moins conservateurs.

Ses hommages à Louis XVI, Napoléon, Pétain ou encore Maurras ont permis de gratter le vernis de l’homme de la « start-up nation », celui de 2016-2017. Au début de son mandat, Macron a réussi à faire croire que néolibéralisme économique et un progressisme « léger » étaient compatibles, ce qui lui a permis de piocher des électeurs autant au PS qu’à LR.

Qu’il semble loin le temps où certains voyaient en Macron un champion du libéralisme. Certains disaient même qu’il était de « centre gauche ». En général, ce sont les mêmes qui font semblant de ne pas se souvenir des propos de Macron sur les « comoréens » en 2017.

L’historien Johann Chapoutot a trouvé une expression pour décrire Macron et ses sbires, des « rebus de BDE [Bureau des étudiants, ndlr] d’école de commerce » (ces associations étudiantes sont souvent pointées pour leurs dérives et leurs scandales). Les deux derniers articles du Monde confirment la véracité de la comparaison. On y lit, effaré, les propos prononcés par le Président, affalé dans un fauteuil, un whisky à la main et entouré de son boy’s club de conseillers.

« Cage aux folles », « rabzouz » et « Mamadou » : les propos intolérables d’Emmanuel Macron

Les scènes évoqueraient presque un film OSS 117, notamment la dernière en date. Suite à l’ouragan qui a touché Mayotte, faisant des milliers de victimes, le Président Macron s’est rendu sur l’île. Devant une foule mécontente du manque de moyens déployés par l’État suite à la catastrophe, mais aussi depuis des années, le Président s’est emporté : « Si c’était pas la France vous seriez 10000 fois plus dans la merde ! ».

Ces propos coloniaux ont provoqué à juste titre la colère des habitants de l’île, mais aussi dans l’Hexagone. Après tout, elle fait ton sur ton avec les déclarations catastrophiques de François Bayrou. Mais ce n’est pas tout.

Les derniers articles du Monde révèlent aussi les tensions en Macron et l’ancien Premier ministre Gabriel Attal. D’après un ancien conseiller de ce dernier, Macron et ses plus proches conseillers surnommaient Matignon « la cage aux folles » lorsque Attal en était le locataire (étant ouvertement gay), le tout dans une ambiance de « boy’s club ».

C’est dans cette même ambiance que le Président aurait prétendu que le « Le problème des urgences dans ce pays, c’est que c’est rempli de Mamadou », comprendre : les noirs. Son ministre de la Santé de l’époque, le député Place Publique Aurélien Rousseau, se serait contenté de nuancer : « non, ce n’est pas le premier problème de l’hôpital ».

En 2019, Macron avait accordé une interview en privé au magazine d’extrême droite Valeurs Actuelles. Cet entretien est déjà scandaleux en soi, mais la version « officielle » publiée alors a « effacé » quelques phrases échanges entre Macron et le directeur de rédaction de VA de l’époque, G.Lejeune. Comme celle où le Président qualifie les Français d’origine maghrébine de « Rabzouz ». Encore un terme raciste pour désigner des non-blancs.

On se croirait effectivement dans un film OSS 117. A la différence près que dans ces films, le personnage campé par Jean Dujardin est sanctionné pour ses propos racistes, colonialistes… Ici, Macron est élu, réélu et s’accroche au pouvoir. Il continue de banaliser les idées d’extrême droite et de plonger le pays dans une crise démocratique, qu’il a lui-même provoqué.

Ces articles ont fait assez de bruit pour que l’Elysée démente les propos attribués au Président de la République. En retour, Le Monde et les témoins cités maintiennent ces propos.

Règlements de compte

Les révélations du Monde ne doivent tromper personne : ce sont des conflits internes à la macronie qui se jouent derrière. Il fait peu de doute que ce sont Gabriel Attal et ses proches qui ont décidé de « balancer » leur Président. Attal vient de prendre la tête du parti Renaissance (en piteux état), après le groupe des députés du parti (lui aussi réduit depuis la dissolution), et son désaccord avec la décision de dissoudre l’Assemblée en juin dernier est connu.

Depuis, le torchon brûle entre Macron et son ex-Premier ministre. Pour espérer prendre le leadership du macronisme après Macron, Attal tue le père pour mieux s’en distinguer. Comme ailleurs, la course de petits chevaux a commencé chez les macronistes, et risque de faire quelques victimes collatérales.

Ce règlement de compte aura eu le mérite de confirmer les côtés les plus réactionnaires, racistes et homophobes d’Emmanuel Macron. Comme le rappelle Le Monde, Geoffroy Lejeune (ex-Valeurs Actuelles, aujourd’hui au JDD) avait avoué au Président Macron : « Vous êtes très bon quand vous venez sur notre terrain » (celui de l’extrême droite). Réponse de l’intéressé : « C’est celui que je préfère. ». 

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