10.11.2024 à 21:25
Human Rights Watch
(Nairobi) – Les Forces de soutien rapide (RSF), un groupe armé soudanais, ont tué, blessé et détenu illégalement des dizaines de civils et violé des femmes et des filles lors d’attaques dans l’État d’Al Gezira situé dans le centre du pays, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Compte tenu de l’ampleur et de la gravité de la menace qui pèse sur les civils, le Royaume-Uni devrait profiter de sa présidence du Conseil de sécurité des Nations Unies en novembre pour faire pression sur l’ONU, afin de déployer une mission de protection des civils au Soudan.
Depuis la défection le 20 octobre 2024 d’un allié important des RSF dans l’est d’Al Gezira, les RSF ont attaqué au moins 30 villages et villes, un nombre certainement sous-estimé, dont Rufaa, Tamboul, Al-Sireha et Azrag. L’ONU a déclaré que plus de 130 000 personnes ont fui les attaques vers d’autres régions du Soudan.
« Cette récente recrudescence massive des attaques odieuses des Forces de soutien rapide contre les civils montre qu’il est futile d’espérer une cessation de ces crimes sans une réponse internationale forte », a déclaré Mohamed Osman, chercheur sur le Soudan à Human Rights Watch. « Il est clair que les faibles mesures prises à ce jour par le Conseil de sécurité de l’ONU ne suffisent pas à protéger les civils. Le Conseil devrait autoriser d’urgence le déploiement d’une mission de protection des civils. »
Les forces RSF, qu’un conflit oppose aux Forces armées soudanaises (SAF), ont pris le contrôle de Wad Madani, la capitale de l’État d’Al Gezira, en décembre 2023 et ont depuis lors commis de graves abus, notamment des violences sexuelles et des meurtres, dans cet État. Le 20 octobre, Abu Agla Keikel, le commandant d’une force alliée des RSF dans l’État, a fait défection et a rejoint les SAF ; ceci a déclenché la récente recrudescence des attaques de représailles contre les civils, notamment ceux de la même communauté ethnique de Keikel.
Alors que les limitations des communications et de l’accès entravent la couverture des événements en temps réel, Human Rights Watch a mené des entretiens avec six personnes, dont des témoins et des observateurs locaux des droits humains. Human Rights Watch a également vérifié deux vidéos montrant des combattants RSF qui arrêtaient des hommes dans le village d’Al-Sihera, et a examiné des images satellite de nouveaux sites de sépultures possibles dans le village.
Une femme de 55 ans de Tamboul a déclaré que des combattants des RSF ont tiré sur des maisons alors qu’ils entraient dans la ville le 22 octobre. Les forces ont rassemblé des hommes et des garçons près de sa maison. « J’ai vu un soldat des RSF tirer une balle dans la poitrine d’un homme », a-t-elle déclaré. « Ils n’arrêtaient pas de crier en nous ordonnant de quitter la ville. Ils ont dit que quiconque resterait ici ne serait pas considéré comme un civil. »
Un autre habitant a déclaré que les combattants étaient venus chez lui le même jour : « Les soldats des RSF étaient furieux… ils n’arrêtaient pas de me demander si j’étais de la famille de Keikel ou si je savais où se trouvait sa famille. Ils ont menacé de tuer toute personne qui aurait des liens avec lui. » Selon le Sudan Protection Cluster, les RSF ont affronté les SAF à Tamboul le 23 octobre. Ce site a rapporté que les attaques et les combats ont fait environ 300 morts parmi les civils.
Les 25 et 26 octobre, les RSF ont attaqué le village d’Al-Sireha, se heurtant à des habitants armés, faisant 124 morts et plus de 200 blessés parmi les civils. Un habitant a vu des véhicules des RSF tirer avec des fusils montés sur châssis et des grenades à propulsion par roquette alors qu’ils entraient dans le village le matin du 25 octobre. Il a pris la fuite plus tard dans la journée. « Nous avons vu des piles de corps, dont deux enfants, près d’un des canaux d’irrigation », a-t-il déclaré.
Click to expand Image Une image satellite enregistrée le 31 octobre 2024 montre des structures qui semblent être des tombes récentes dans le cimetière d'Al Sireha, dans l’État d’Al Gezira au Soudan. Ces tombes n'étaient pas visibles sur les images satellite enregistrées le 28 mai 2024. © 2024 Planet Labs PBC (image satellite) / Human Rights Watch (graphisme).Selon des observateurs locaux, les RSF ont arrêté plus de 150 personnes à Al-Sireha. Deux vidéos publiées sur Facebook le 26 octobre et vérifiées par Human Rights Watch montrent des combattants des RSF arrêter une centaine d’hommes dans le village d’Al-Sireha.
La première vidéo montre au moins 68 hommes détenus à l’intersection nord-ouest du village. Une vingtaine d’entre eux sont assis par terre, certains avec des vêtements tachés de sang. Le combattant RSF qui les filme, dit en arabe : « Keikel… regarde, ce sont tes gens », et force les détenus à imiter des cris d’animaux.
Une deuxième vidéo filmée par le même soldat montre six combattants RSF et 26 hommes détenus non armés, dont plusieurs hommes âgés, dans un champ à l’ouest du village. De nombreux détenus semblent avoir les mains liées dans le dos, et deux hommes détenus ont des vêtements tachés de sang. Human Rights Watch n’a pas été en mesure de déterminer ce qui est arrivé aux détenus.
Les combattants RSF auraient également infligé des violences sexuelles à des femmes et des filles au cours de ces attaques. Au 4 novembre, l’ONG Strategic Initiative for Women in the Horn of Africa (« Initiative stratégique pour les femmes dans la Corne de l’Afrique »), un groupe régional de défense des droits des femmes, avait recensé 25 cas de viols et de viols collectifs commis par les RSF, dont 10 filles parmi les victimes. Cette organisation a également recensé au moins six cas dans lesquels des survivantes d’actes de violence sexuelle se sont suicidées. Le 30 octobre, l’ONU, citant des responsables locaux de la santé, a indiqué que « plus de 27 femmes et filles âgées de 6 à 60 ans » avaient été « victimes de viols et d’agressions sexuelles ».
Hassan (dont le nom de famille n’est pas cité pour des raisons de sécurité), âgé de 51 ans, a fui Al-Sireha le 22 octobre avec sa femme et ses trois filles. Les RSF les ont arrêtés à un poste de contrôle : « L’un des combattants des RSF a regardé ma plus jeune fille, qui a 15 ans, et a dit : "Laisse-la ici, pour que nous puissions en profiter, et tu pourras partir." Ils ont commencé à faire des commentaires sexuels sur ma fille. » Hassan et sa famille ont réussi à s’échapper.
Des groupes de défense des droits humains et des médias ont déclaré avoir reçu des informations faisant état de pillages généralisés dans l’est d’Al Gezira. Ces attaques aggravent une situation humanitaire déjà désastreuse, qui a été exacerbée par les restrictions imposées par les FAS sur l’accès aux zones contrôlées par les RSF et par les pillages perpétrés par les RSF.
Le Royaume-Uni est le « penholder » (pays chargé de rédiger des projets de résolutions) concernant le Soudan, au Conseil de sécurité de l’ONU et assure la présidence du Conseil pour le mois de novembre. Durant cette période, le Conseil débattra des moyens de mieux protéger les civils au Soudan, suite à la publication en octobre d’un rapport du Secrétaire général de l’ONU. Compte tenu de la recrudescence massive des attaques brutales contre les civils, il est urgent que le Royaume-Uni, en coopération avec les États membres de l’Union africaine, fasse pression sur le Conseil de sécurité pour qu’il autorise une mission de protection des civils au Soudan. Les États membres de l’ONU devraient également renforcer leur soutien à la Mission internationale indépendante d’établissement des faits des Nations Unies pour le Soudan, comme l’a recommandé le Secrétaire général.
« Le Royaume-Uni, chargé de rédiger les projets de résolution sur le Soudan, devrait intensifier ses efforts en ce moment de crise et veiller à ce que les appels des personne ayant désespérément besoin de protection au Soudan ne soient pas ignorés », a conclu Mohamed Osman. « Les dirigeants mondiaux et régionaux ne peuvent pas se permettre de rester inactifs, face aux événements alarmants dans ce pays. »
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07.11.2024 à 06:30
Human Rights Watch
(Berlin) – Les gouvernements participant à la 29e Conférence annuelle des Nations Unies sur les changements climatiques (COP29) devraient s’engager d’urgence à réduire considérablement leurs émissions de gaz à effet de serre, notamment en éliminant immédiatement et équitablement les combustibles fossiles, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. La conférence sur le climat se tiendra à Bakou, en Azerbaïdjan, du 11 au 22 novembre 2024.
« Les gouvernements qui préparent leurs plans nationaux sur le climat devraient veiller à ce qu'ils soient cohérents avec la limitation du réchauffement climatique à 1,5 °C », a déclaré Richard Pearshouse, directeur de la division Environnement et droits humains à Human Rights Watch. « L’augmentation de la production de charbon, de pétrole et de gaz aggrave les dommages causés à la santé humaine, entraîne des violations des droits des communautés vivant à proximité des sites de production de combustibles fossiles et accélère la dégradation du climat à l’échelle mondiale. »
À l’issue de la COP28 tenue en 2023, le document final clé a appelé les pays à entamer une « transition vers l’abandon des combustibles fossiles ». Bien que ce soit la première fois depuis plus de 30 ans de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) que les pays prenaient une décision clé mentionnant explicitement les « combustibles fossiles », cet engagement n’a pas été à la hauteur de ce qui est nécessaire pour contenir la hausse de la température mondiale au seuil de 1,5 °C et éviter les pires conséquences de la crise climatique. Depuis la COP28, il n’y a toutefois eu que peu de progrès au niveau national, à l’égard de cet engagement.
Les combustibles fossiles sont le principal moteur de la crise climatique, représentant plus de 80 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone, et ils peuvent être associés à de graves atteintes aux droits humains à toutes les étapes de la production. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat a affirmé que les projets actuels de combustibles fossiles sont déjà au-delà de ce que le climat peut supporter.
En 2021, l’Agence internationale de l’énergie (IEA, ou AIE en français) a déclaré qu’il ne pouvait y avoir de nouveaux projets liés aux énergies fossiles si les pays voulaient atteindre les objectifs climatiques existants et éviter les pires conséquences de la crise climatique. Malgré le consensus scientifique, les gouvernements continuent d’autoriser la construction de nouvelles infrastructures liées aux énergies fossiles et de mal réglementer les opérations existantes.
Un récent rapport de l’ONU a souligné que les pays devraient « faire preuve d’une ambition et d’une action considérablement plus fortes » dans leurs plans climatiques nationaux, et que s’en abstenir risquerait de provoquer une augmentation de la température de 2,6 °C à 3,1 °C au cours de ce siècle, avec des conséquences dévastatrices pour les populations et la planète.
COP29 Conférence sur le climat (Bakou)Selon diverses sources, l’Azerbaïdjan, pays hôte de la COP29, prévoit d’augmenter sa production de pétrole et de gaz au cours de la prochaine décennie. Les revenus pétroliers et gaziers représentaient 60 % du budget de l’État de l’Azerbaïdjan en 2021 et environ 90 % de ses recettes d’exportation. Lors d’une réunion de haut niveau en avril 2024 pour préparer la COP29, le président azerbaïdjanais Ilham Aliyev a affirmé que les réserves de pétrole et de gaz du pays étaient « un don de Dieu », suggérant que l’Azerbaïdjan a le droit d’accroître sa production de pétrole et de gaz alors que tous les pays sont appelés à éliminer progressivement la production et l’utilisation des combustibles fossiles.
« Les gouvernements participant à la COP29 ne devraient pas permettre à l’Azerbaïdjan d’utiliser sa position d’hôte de la COP29 pour continuer à promouvoir l’expansion des combustibles fossiles et saper les efforts visant à faire face à la crise climatique et à protéger les droits humains », a déclaré Richard Pearshouse.
Une action climatique respectueuse des droits requiert la participation pleine et significative des activistes, des journalistes, des défenseurs des droits humains, de la société civile et des groupes de jeunes, ainsi que des représentants des peuples autochtones, pour garantir un contrôle minutieux des mesures gouvernementales et faire pression afin d’obtenir des résultats ambitieux de la COP29. Cela inclut les personnes qui sont en première ligne de la crise climatique et les populations les plus exposées aux impacts du changement climatique. La liberté d’expression, l’accès à l’information, la liberté d’association et de réunion pacifique doivent être protégés, car ces droits sont essentiels pour concevoir des politiques inclusives et ambitieuses visant à lutter contre la crise climatique.
Toutefois, l’Azerbaïdjan est régi par un gouvernement autoritaire qui fait preuve depuis longtemps d’intolérance à l’égard de la dissidence. Ces derniers mois, les autorités ont intensifié la répression contre les derniers vestiges de la société civile et des médias indépendants en arrêtant des dizaines de personnes sur la base de fausses accusations criminelles à motivation politique et en appliquant arbitrairement des lois très restrictives régissant les organisations non gouvernementales. Parmi les personnes détenues arbitrairement figurent un militant anti-corruption critique du secteur pétrolier et gazier azerbaïdjanais, ainsi qu’un défenseur des droits humains qui a cofondé une initiative qui plaidait en faveur des libertés civiques et la justice environnementale en Azerbaïdjan avant la COP29.
L’hostilité du gouvernement azerbaïdjanais à l’égard de l’activisme indépendant suscite des inquiétudes quant à la capacité des organisations de la société civile à participer de manière significative à la COP29 et quant aux possibilités de l’activisme environnemental en Azerbaïdjan après la conférence, selon Human Rights Watch.
Pour respecter leurs engagements en matière de droits humains, les hôtes des conférences sur le climat, dont l’Azerbaïdjan, ainsi que le Secrétariat de la CCNUCC, devraient respecter les droits humains de tous les participants, notamment leurs droits à la liberté d’expression et à se rassembler pacifiquement à l’intérieur et à l’extérieur du lieu officiel de la conférence.
En août 2024, le Secrétariat de la CCNUCC a signé un accord d’accueil avec l’Azerbaïdjan pour la COP29, mais il ne l’a pas rendu public. Human Rights Watch en a obtenu une copie révélant des lacunes importantes en matière de protection des droits des participants. Bien que l’accord accorde l’immunité juridique pour les déclarations et les actions des participants, il leur impose de respecter les lois azerbaïdjanaises et de ne pas s’immiscer dans ses « affaires intérieures ».
Pourtant, nul ne sait exactement ce qu’implique cette « ingérence » et si les lois azerbaïdjanaises s’appliquent dans la zone de conférence de l’ONU. Étant donné les restrictions imposées par l'Azerbaïdjan à la liberté d'expression et de réunion, les participants pourraient faire l'objet de représailles en dehors de la zone, a indiqué Human Rights Watch.
Le Secrétariat de la CCNUCC et les gouvernements participant à la COP29 devraient appeler publiquement le gouvernement azerbaïdjanais à respecter ses obligations en matière de droits humains et à faciliter une conférence sur le climat respectueuse des droits.
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Articles
Reporterre L'Humanité
07.11.2024 à 06:00
Human Rights Watch
(Genève, le 7 novembre 2024) – Les pays préoccupés par les graves dommages physiques, psychologiques, socioéconomiques et environnementaux causés par les armes incendiaires devraient s’efforcer de renforcer le traité international qui les régit, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui. Les États parties à la Convention sur certaines armes classiques (CCAC) devraient condamner l’utilisation d’armes incendiaires et évaluer l’adéquation du Protocole III de la CCAC sur les armes incendiaires, lors de leur réunion annuelle qui se tiendra du 13 au 15 novembre, au siège européen des Nations Unies à Genève.
7 novembre 2024 Beyond BurningLe rapport de 28 pages, intitulé « Beyond Burning : The Ripple Effects of Incendiary Weapons and Increasing Calls for International Action » (« Au-delà des brûlures : Effets domino des armes incendiaires et appels croissants à une action internationale »), examine l’utilisation récente d’armes incendiaires dans des conflits armés et ses vastes répercussions. Human Rights Watch présente des études de cas sur l’utilisation par l’armée israélienne de phosphore blanc – une arme aux effets incendiaires – dans la bande de Gaza et au Liban depuis octobre 2023, ainsi que sur l’utilisation en Ukraine et en Syrie d’autres types d’armes incendiaires. Le rapport évoque également l’intérêt croissant de nombreux pays pour répondre aux multiples préoccupations humanitaires soulevées par les armes incendiaires.
« Les armes incendiaires sont utilisées dans plusieurs conflits, mettant en danger la vie et les moyens de subsistance des civils », a déclaré Bonnie Docherty, conseillère senior auprès de la division Armes à Human Rights Watch et auteure du rapport. « Les gouvernements devraient prendre des mesures immédiates pour protéger les civils, les infrastructures civiles et l’environnement contre les effets horribles de ces armes. »
Play VideoLes armes incendiaires comptent parmi les armes les plus cruelles de la guerre moderne. Elles infligent des brûlures atroces, des lésions respiratoires et des traumatismes psychologiques. La mise à feu de maisons, d’infrastructures et de cultures cause des dommages socioéconomiques et environnementaux. Les personnes qui survivent souffrent souvent toute leur vie.
Le rapport s’appuie sur des entretiens menés par Human Rights Watch avec des survivants, des professionnels de la santé et des membres de groupes de la société civile qui ont décrit les effets de l’utilisation d’armes incendiaires.
Depuis octobre 2023, l’armée israélienne a utilisé des munitions au phosphore blanc à explosion aérienne lancées depuis le sol contre des zones peuplées du Liban et de Gaza, comme le montrent des preuves vidéo et photographiques. Human Rights Watch a vérifié l’utilisation de munitions au phosphore blanc par les forces israéliennes dans au moins 17 municipalités, dont 5 où des munitions à explosion aérienne ont été utilisées illégalement au-dessus de zones peuplées du sud du Liban entre octobre 2023 et juin 2024.
Des armes incendiaires lancées depuis le sol et larguées depuis le ciel continuent d’être utilisées en Ukraine. Il n’est pas possible d’attribuer précisément la responsabilité de leur utilisation, mais la Russie et l’Ukraine possèdent toutes deux les mêmes types de roquettes incendiaires que celles utilisées dans les attaques. Les deux camps ont également utilisé des drones, dont un type familièrement appelé « drone dragon », pour larguer des munitions incendiaires sur le champ de bataille. Le drone dragon survole la zone ciblée et largue de la thermite ou un composé incendiaire similaire qui brûle à des températures exceptionnellement élevées, dispersant des étincelles ou du gaz chaud après l’allumage.
Les forces gouvernementales syriennes continuent d’utiliser des armes incendiaires lancées depuis le sol en Syrie. Au cours de la dernière décennie, Human Rights Watch a également documenté l’utilisation d’armes incendiaires en Afghanistan, en Irak et au Yémen.
À ce jour, 117 pays ont adhéré au Protocole III de la CCAC sur les armes incendiaires, mais il contient deux lacunes qui compromettent sa capacité à protéger les civils. Tout d’abord, la définition de ces armes par le Protocole exclut les munitions polyvalentes, notamment le phosphore blanc, qui ne sont pas « principalement conçues » pour mettre le feu ou brûler des personnes ; toutefois, elles provoquent les mêmes terribles effets incendiaires. En outre, le Protocole contient des réglementations plus faibles pour les armes incendiaires lancées depuis le sol que pour celles larguées par voie aérienne.
Au Liban, des centaines de civils ont été déplacés à la suite d’attaques au phosphore blanc. Les survivants ont été confrontés à des problèmes de santé, notamment des lésions respiratoires, des mois après avoir été exposés à des armes incendiaires. Le phosphore blanc a brûlé des oliveraies et d’autres cultures, détruisant les moyens de subsistance des agriculteurs et affectant les communautés locales. Le phosphore blanc menace également l’environnement car le feu et la fumée peuvent nuire à la faune, détruire les habitats et altérer la qualité du sol, de l’eau et de l’air. Ses produits chimiques toxiques peuvent produire une contamination dangereuse dans certaines situations.
La volonté de répondre aux préoccupations concernant les armes incendiaires s’est accrue ces dernières années. Lors de la dernière réunion de la CCAC en novembre 2023, plus de 100 pays ont critiqué les conséquences humanitaires de l’utilisation d’armes incendiaires et ont appelé à l’ouverture de discussions pour répondre à ces préoccupations.
Les États parties au traité devraient lancer des consultations informelles qui, au minimum, évalueraient l’adéquation du Protocole III et chercheraient à créer des normes internationales plus strictes, a déclaré Human Rights Watch. Ils devraient tenir des discussions en dehors de la réunion du traité pour envisager des mesures nationales et internationales visant à résoudre les problèmes posés par les armes incendiaires.
« Les gouvernements devraient saisir cette occasion pour réitérer leurs inquiétudes concernant les armes incendiaires et discuter des moyens de renforcer le traité afin de mieux protéger les civils », a conclu Bonnie Docherty. « Une interdiction totale des armes incendiaires aurait sans aucun doute les plus grands avantages humanitaires. »
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