19.11.2024 à 11:07
Maxime Friot
Les millions pleuvent.
- Publicité : dépendances économiques et éditoriales / Publicité et presse écrite, Bernard ArnaultLes millions pleuvent.
LVMH « arrose une bonne partie de la presse en pages de pub » : il y a quelques jours, L'Informé a publié, à partir de chiffres produits par Kantar, « la répartition des dépenses de LVMH dans la presse nationale ». Bilan : les millions pleuvent.
Ces recettes publicitaires bénéficient d'abord aux médias détenus par le groupe LVMH lui-même : entre janvier et septembre 2024, ce sont, toujours d'après L'Informé, 80 millions d'euros bruts [1] qui ont été fléchés vers Le Parisien, Le Parisien Dimanche et Les Échos.
Mais c'est aussi la régalade pour les groupes Le Figaro et Le Monde : « La régie média du Figaro a ainsi perçu 32 millions d'euros, dont la moitié pour Madame Figaro et Le Figaro et vous, le cahier spécial luxe et art de vivre du journal. Le groupe Le Monde a engrangé, de son côté, 9,5 millions d'euros bruts. » Paris Match, qui vient d'être racheté par LVMH, ne s'en sortait pas trop mal (3,9 millions), tout comme le JDD (3,5 millions) ou Le Point (1,7 million).
Et ce n'est pas fini, puisque L'Informé précise que L'Express, L'Opinion, Libération, La Croix, La Tribune dimanche ou encore Le Nouvel Obs ont aussi perçu entre quelques dizaines et quelques centaines de milliers d'euros bruts.
La presse est sous perfusion des annonceurs publicitaires – en particulier, on le voit ici, de LVMH. Ce n'est certes pas là son seul mode de financement, mais on ne saurait ignorer qu'elle se met, de la sorte, sous leur coupe. Pour en revenir à notre cas d'espèce, LVMH a déjà démontré sa capacité, en guise de rétorsion, à désinvestir et mettre la pression. L'Informé rappelle l'exemple de Libération : « En 2012, pour rappel, le magnat y avait coupé tous les budgets en rétorsion de la fameuse Une "Casse-toi riche con". Le manque à gagner s'était élevé à 150 000 euros, mettant en péril l'équilibre économique du journal. » Et celui du Monde : « Selon le Canard Enchaîné, le Monde aurait été soumis au même traitement en 2017, perdant 600 000 euros à la suite de ses articles sur les "Paradise Papers" évoquant le recours de Bernard Arnault à des paradis fiscaux. »
Vous avez dit « indépendance » ?
[1] Dans son article, L'Informé parle « d'investissements bruts - c'est-à-dire en se basant sur les tarifs catalogue des publicités avant ristournes ».
15.11.2024 à 10:00
Elvis Bruneaux
Critique des médias : une revue de presse hebdomadaire. Si ce n'est exhaustive, au moins indicative [1]. Au programme : du 08/11/2024 au 14/11/2024.
« Violences à Amsterdam : 24 heures d'hystérie et de naufrage médiatique », Arrêt sur images, 11/11.
« "Médias et féminicides : le temps presse" », NousToutes, novembre 2024.
« Médias de la haine : objectif, guerre civile ? », Off Investigation, 8/11.
« Louis Sarkozy, toutologue le plus pistonné de la télé ? », Arrêt sur images, 9/11.
« Victoire de Trump et "défaite du wokisme" : la voie à suivre en France selon CNews », Télérama, 8/11.
« Hanouna et Trump : d'indigné en 2016 à la fête de la "fin du wokisme" en 2024 », Télérama, 8/11.
« Trump réélu : "les journalistes ont du mal à apprendre de leurs erreurs" », Arrêt sur images, 8/11.
« Ahoo Daryaei : la lutte des femmes iraniennes mérite mieux que ces dessins », Arrêt sur images, 9/11.
« Victorine : 4 ans après sa mort, le roman-photo indécent de M6 », Arrêt sur images, 10/11.
« CNews, France Inter, Le JDD, Le Figaro : le CDJM publie cinq nouveaux avis », CDJM, 8/11.
« "Dites la vérité, vous êtes journaliste !" : En direct sur BFMTV, le député LFI Manuel Bompard corrige l'éditorialiste Yves Thréard sur les résultats de la présidentielle 2022 », Puremédias, 13/11.
« De Trump à Bardella : Jusqu'où l'extrême droite pourra mentir ? », Blast, 10/11.
« Harcèlement scolaire : Attal échappe à la question qui fâche », Arrêt sur images, 12/11.
« Amsterdam : quand les grands médias mentent, les citoyens font leur job », Le Média, 13/11.
« Rachat de "Marianne" : la société des rédacteurs demande l'arrêt des négociations avec J.-M. Lefranc », Le Monde, 12/11.
« Conflits d'intérêts, sous financements, censure : qui veut enterrer l'audiovisuel public ? », Blast, 14/11.
« Financement de l'Audiovisuel Public : Le retour de la vis sans fin des économies », SNRT-CGT, 12/11.
« "60 millions de consommateurs" ne passera "pas l'année 2025" sans aide de l'Etat, selon les salariés du magazine », Le Monde, 8/11.
« Plusieurs journaux dont "le Monde" et "le Figaro" poursuivent le réseau social X en justice », Libération, 12/11.
« Les pistes de Philippe Carli pour redresser Ebra », La Lettre, 14/11.
« En créant la "Filière audiovisuelle", le PAF veut faire front commun face aux Gafa », Libération, 13/11.
« La SDJ des Échos saisit le comité d'éthique sur les actions LVMH », La Lettre, 13/11.
« Anne Sinclair lâche le comité d'éthique de RMC et BFM TV », 12/11, La Lettre, 12/11.
« France Inter : la victoire de Noëlle Bréham après 40 ans de CDD », L'Humanité, 13/11.
« Contre le climatoscepticisme dans les médias, des députés proposent une loi », Reporterre, 13/11.
« L'Arcom prononce deux nouvelles sanctions pécuniaires contre CNews », Le Monde, 14/11.
« Le livre de Jordan Bardella, un objet marketing propulsé par Vincent Bolloré », Le Monde, 10/11.
« Législation européenne pour la liberté des médias (EMFA) : le droit à l'information fiable est consacré pour la première fois », RSF, 8/11.
« Israël-Gaza : doit-on "fact-checker" l'horreur de la guerre ?, Libération, 12/11.
« Fin de C8 et NRJ12 : les deux nouvelles numérotations envisagées pour la TNT », L'Informé, 12/11.
« Les auditeurs n'ont jamais autant écouté les antennes de Radio France », Le Monde, 14/11.
« Une nouvelle agence France Travail pour les journalistes : un progrès, surtout pour les journalistes pigistes, mais des écueils à corriger », SNJ-CGT, CFDT-Journalistes et Profession Pigiste, 14/11.
Et aussi, dans le monde : Royaume-Uni, États-Unis, Philippines, Bolivie, Bangladesh, Azerbaïdjan, RDC, Burundi, Chine...
Retrouver toutes les revues de presse ici.
[1] Précisons-le : référencer un article dans cette revue de presse ne signifie pas forcément que nous y souscrivons sans réserve.
13.11.2024 à 11:28
Un communiqué CGT.
- Télévisions publiques : Sous le règne d'Emmanuel Macron / CGT Radio France, SNJ-CGT, SNRT-CGTUn communiqué CGT du 12 novembre.
Le débat parlementaire bat son plein et chaque jour réserve son lot de mauvaises surprises sur le financement de l'Audiovisuel Public.
La CGT avait déjà évalué le manque à gagner pour l'Audiovisuel Public à plus de 100 M€ sur la base du projet de budget 2025 publié en septembre par le gouvernement. La ministre de la Culture a confirmé le 5 novembre que le gouvernement prévoit une coupe supplémentaire de 50 M€ pour l'audiovisuel public ! Elle estime que cela doit être absorbable sans trop de difficultés par les entreprises. C'est bien mal connaître la réalité du terrain !
La trajectoire budgétaire initiale des projets de contrat d'objectifs et de moyens (COM) entre l'État et les entreprises publiques définie à l'automne 2023 actait des budgets en hausse. C'est sur cette base qu'elles ont construit des projets stratégiques déjà très difficiles à tenir compte tenu des ambitions en termes de missions et de l'impact de l'inflation sur l'ensemble des coûts de production.
Nous avons eu un début de réponse le 6 novembre lors de l'audition des PDG des entreprises de l'Audiovisuel Public devant la commission Culture de l'Assemblée nationale.
Ainsi, la Présidente de FTV a confirmé qu'en l'état la perte budgétaire serait de 100M€ pour l'entreprise en 2025 à laquelle il faudra ajouter une baisse de 70 M€ de recettes publicitaires, l'année 2025 ne disposant pas de perspectives aussi réjouissantes par rapport à l'année olympique 2024. 170 M€ en moins, « On ne sait pas faire. C'est impossible à réaliser sans toucher à nos missions » conclut Mme Ernotte.
Même réaction du côté de Radio France, « Nous étions déjà dans une trajectoire d'efforts, on bascule dans une trajectoire de sacrifices » affirme Mme Veil qui estime devoir réinterroger les objectifs de soutien à la création et prévoit un déficit en 2025 ainsi qu'une trajectoire 2026-2027 insoutenable.
Le constat est identique à FMM où Mme Saragosse estime que l'Audiovisuel Public extérieur de la France ne sera pas à la hauteur de la concurrence britannique, allemande et surtout russe dans un contexte géopolitique très incertain. 10 M€ de coupes envisagées pour FMM correspondent « à 10 rédactions en langues de RFI, à tout le réseau de distribution de RFI ou à l'ensemble du budget des correspondants de FMM », a complété Mme Saragosse.
Enfin, M. Vallet, PDG de l'INA, estime que c'est l'existence même des COM qui est remis en question. Ceux-ci doivent assurer une « prévisibilité nécessaire aux entreprises, notamment celles réalisant des investissements technologiques importants ». La stratégie de l'INA ne serait pas remise en cause, selon lui, seulement le rythme de son déploiement.
La Présidente de la commission Culture, les rapporteur·es, les membres de la commission et les présidences des sociétés de l'Audiovisuel Public ont toutes et tous convergé vers une position commune : les COM sont caducs, les objectifs n'étant plus adaptés aux moyens désormais consentis par le Gouvernement. La commission Culture a rendu un avis défavorable sur les COM, tout comme la commission des Finances le même jour.
La ministre de la Culture aura beau agiter sa pensée magique du « tout va bien pour l'Audiovisuel Public » avec des budgets soi-disant sanctuarisés, la réalité est très claire : il s'agit d'une déstabilisation budgétaire de grande ampleur de l'Audiovisuel Public avec des conséquences majeures pour les entreprises et leurs salarié·e·s.
Ce sont toutes les missions et les projets à moyen ou long termes qui vont être impactés. Avec quelles conséquences pour l'emploi ? La transition climatique est remise en question en particulier en matière de rénovation immobilière, des projets d'investissements devront être reportés ou annulés, sans parler de la politique salariale qui va perdurer dans l'austérité. Il faudra aussi voir si les directions vont réviser leurs engagements d'investissements dans la création, avec l'impact substantiel que cela provoquera sur le secteur de la production audiovisuelle.
La Présidente de FTV a toutefois esquissé une solution pour pouvoir encaisser les difficultés budgétaires 2025 : une réforme de la gouvernance afin de rapprocher les différentes entités de l'Audiovisuel Public. Une belle démonstration qu'une telle restructuration vers une fusion des entités de l'Audiovisuel Public permettra de faire des économies et que cela est bien le but recherché par les promoteurs de ce grand mécano industriel.
Comme si ça ne suffisait pas, le gouvernement a officiellement confirmé le 7 novembre que les soldes des crédits de transformation 2024 (30M€) ne seront pas versés alors qu'ils ont été très largement dépensés par les entreprises, ce qui va plonger ces dernières en déficit dès cette année.
La CGT dénonce cette politique d'étranglement de l'audiovisuel public ! Ces restrictions financières ne peuvent que l'affaiblir ! La CGT milite pour un audiovisuel public puissant ! Tous les dirigeants, politiques comme ceux de nos entreprises publiques, devraient intégrer le fait que les personnels dont l'implication professionnelle dans des conditions contraintes dure depuis des années ne vont pas rester inactifs face aux conséquences de leurs décisions.
Paris, le 12 novembre 2024
SNRT-CGT Audiovisuel
SNJ-CGT
CGT France-Télévisions
CGT Radio France
CGT France Médias Monde
CGT INA