"Moi, j'ai toujours eu ce rêve: je n'ai jamais rêvé de NHL, j'ai rêvé des JO", affirme Bellemare. "Quand j'étais petit, tu n'avais pas le hockey à la télé. Donc moi, je voyais du hockey comme tout le monde, tous les quatre ans, aux JO. Tu avais un match ou un match et demi qui était coupé au milieu par du patinage artistique... Et donc moi je rêvais des JO", explique-t-il avant un tournoi de préparation à Budapest, qui débute vendredi pour les Bleus.
Formé à Rouen, avec qui il a remporté deux fois la Ligue Magnus, parti tenter sa chance en Suède, où il sera aussi deux fois champion, la trajectoire de Bellemare prend un tour inattendu en 2014 quand les Flyers de Philadelphie lui font découvrir la NHL, à presque 30 ans.
Durant dix ans, l'attaquant des Bleus trace un parcours solide dans le championnat nord-américain, avec Philadelphie, Las Vegas, Colorado, Tampa et Seattle. Finaliste de la Coupe Stanley à deux reprises, il revient finalement en Europe à l'été 2024 où il évolue à Ajoie, dans la ligue suisse.
"Leader sur la glace"
A 40 ans, il dispute sa dernière saison, mais avec un niveau physique encore impressionnant pour son âge.
"Pour durer j'ai une alimentation assez bizarre qui fait que je ne peux pas manger 80% de ce qui se trouve dans un magasin", explique le joueur qui s'astreint à une discipline de fer. "Du coup mon corps est vraiment très sain et le taux d'inflammation est tellement bas que je ne me lève pas le matin, comme beaucoup de joueurs avec 10 ans moins, à me dire: +Ah j'ai mal ici, j'ai mal là...+ Malgré les blessures et les cartilages qui manquent par-ci par-là j'ai réussi à gérer tout ça et à revenir."
Et depuis son retour en Europe, dans un cadre qui lui permet de concilier au mieux vie familiale et sport de haut niveau, ce père de deux enfants a dû réapprendre un nouveau rôle, celui de leader de son équipe, qui joue beaucoup plus qu'en NHL, où il patinait 11 à 12 minutes par match dans un rôle plus défensif.
"Là, je suis rarement en-dessous de 20 minutes, c'est un peu le temps de jeu que j'ai en sélection, donc c'est positif pour l'équipe de France, parce que je peux affûter ma façon de jouer du côté offensif", estime le joueur le plus expérimenté des Bleus. "Mais d'un autre côté, c'est aussi un peu plus épuisant parce que j'ai un rôle qui est totalement différent. Je suis un leader dans le vestiaire, comme je l'ai été en NHL. Mais là, je dois aussi être un leader sur la glace."
"Gros coeur"
Et après que les Bleus ont manqué d'un rien leur qualification pour les Jeux à plusieurs reprises, "Pi-Ed" va enfin goûter aux JO, ultime gourmandise d'une carrière unique dans le paysage du hockey français.
"Je suis fier et honoré de pouvoir y aller. Mais je ne me rends pas encore compte", sourit l'attaquant aux 194 sélections.
Cependant, pour que le rêve ne vire pas au cauchemar, la France, va devoir faire bonne figure contre trois adversaires de premier plan, Canada, Suisse et République tchèque.
"On n'est pas au niveau du foot, du basket ou du hand: pour nous, juste d'aller aux JO, c'est plus ou moins déjà une médaille d'or", souligne-t-il.
"Je pense qu'il faut qu'on reparte sur nos valeurs d'avant, qu'on joue comme des +chiens galeux+. On ne pourra pas faire jeu égal contre ces équipes constituées à 90 ou 100% de joueurs NHL", avertit Bellemare.
"Mais il faut qu'on ait plus de volonté, qu'on travaille plus fort, qu'on ait le cœur bien plus gros, pour aller énerver ces adversaires-là. Et puis, en allant chercher peut-être une victoire, ça serait magnifique. Et là on récupèrera un respect qu'on ne va pas nous donner."