Publié par l’association Alter-médias / Basta !
12.12.2025 à 11:45
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Bonne lecture
Le 12 décembre 2025, nous fêterons le dixième anniversaire de l'adoption de l'Accord de Paris sur le climat.
À l'époque, l'Observatoire des multinationales avait consacré de nombreuses enquêtes aux préparatifs de la COP21 à Paris et au rôle joué par les grandes entreprises et leurs lobbys. C'était une époque d'unanimité apparente, où les grands industriels tricolores, même dans les secteurs les plus polluants, ont multiplié les professions de foi et les promesses pro-climat.
Nous avions examiné, en partenariat avec le Basic, la réalité des pratiques derrière les beaux discours, à travers un rapport intitulé « Gaz à effet de serre : doit-on faire confiance aux entreprises pour sauver le climat ? ». Ce rapport soulignait les limites de la transparence des entreprises françaises sur leurs émissions, la mauvaise prise en compte des émissions au niveau de toute la chaîne de valeur (amont et aval), et l'absence d'alignement sur les objectifs européens à long terme de réduction des émissions, avec souvent des paris sur des solutions technologiques incertaines pour atteindre ces objectifs.
Dix ans plus tard, nous nous sommes à nouveau penchés sur la question, sur la base d'un échantillon de douze entreprises représentatives de la diversité du CAC 40, avec une question simple : comment ont évolué les émissions de gaz à effet de serre déclarées par les groupes français depuis 2015 ?
Malheureusement la réponse n'est pas simple, et globalement négative. La moitié des entreprises de notre échantillon a vu ses émissions de gaz à effet de serre augmenter ou stagner depuis 2015. Dans l'autre moitié, les réductions d'émissions constatées sont parfois significatives, mais elles s'expliquent par la revente des actifs les plus polluants à d'autres acteurs (donc zéro bénéfice net pour le climat) ou par la chute des ventes de voitures et d'avions au moment de la pandémie de Covid, pas encore rattrapée.
On constate que les groupes français parviennent à peu près à baisser leurs émissions directes, par exemple en remplaçant de l'électricité polluante par de l'électricité renouvelable, mais que quand il s'agit de réduire les émissions indirectes, liées aux chaînes de valeur dans leur ensemble, les réponses manquent cruellement.
Un point positif : les entreprises sont plus transparentes sur toutes leurs émissions indirectes qu'il y a dix ans, mais c'est récent, grâce à la mise en œuvre d'une directive européenne aujourd'hui attaquée au nom de la « simplification ».
Lire l'enquête : Dix ans après l'accord de Paris, le CAC 40 a-t-il avancé ?
L'édition parisienne de la « Nuit du bien commun » s'est tenue le 4 décembre dernier aux Folies Bergères, sur fond de manifestations. Cette soirée caritative est en effet associée à Pierre-Édouard Stérin, le milliardaire désormais bien connu pour ses liens avec l'extrême droite et le soutien qu'il a apporté à une multitude d'associations intégristes, anti-droits sexuels et anti-migrants.
On a vu dans certains médias circuler le « narratif » - conçu par l'agence Image 7 d'Anne Méaux – selon lequel Pierre-Édouard Stérin serait depuis longtemps désengagé la Nuit du bien commun et qu'en s'attaquant à cette dernière on s'attaquerait en réalité à la philanthropie privée et au financement des associations en général.
Notre dernière enquête montre que ce n'est que de la poudre aux yeux. Même si Stérin n'est plus – depuis quelques mois seulement – au conseil d'administration de la « Nuit », qu'il a cofondée, il reste lié à l'événement de multiples manières, et notamment via la société organisatrice Obole, dont il est actionnaire.
De Stanislas de Bentzmann et Charles Beigbeder à Denis Duverne en passant des dirigeants de Domino RH, ManoMano ou Payfit, Pierre-Édouard Stérin a associé de nombreuses figures du monde des affaires à ses activités caritatives, dont beaucoup continuent de graviter dans cet écosystème. Certains partagent les visées de plus en plus clairement politiques de cette « philanthropie », d'autres ont choisi de les ignorer.
Parce que le débat démocratique mérite mieux que la com' du CAC 40.
Faites un donEnquête officielle sur Christophe Castaner et Shein. Il y a quelques mois, l'Observatoire des multinationales avait adressé, avec les Amis de la Terre, un signalement à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique au sujet du lobbying orchestré par Shein contre le projet de loi « fast-fashion » (lire Pourquoi il faut faire la lumière sur le lobbying de Shein et le rôle de Christophe Castaner). Plusieurs des acteurs de ce dossier ont mis à jour leurs déclarations de lobbying suite à cette alerte, et il est désormais confirmé qu'une enquête officielle est en cours sur le rôle exact de l'ex ministre Christophe Castaner. Recruté par le géant chinois, il a toujours prétendu, sans trop convaincre, que ce n'était pas pour faire du lobbying. Malheureusement pour lui, l'ex ministre Véronique Louwagie en a rajouté une couche dans le Complément d'enquête diffusé le 11 décembre sur France Télévisions (pour lequel nous avons été interrogé, et qui utilise des courriels que nous avons obtenus de l'Elysée) : elle raconte avoir reçu de nombreux SMS de son ex collègue lui demandant de lui parler de Shein pour « dédiaboliser » l'entreprise. À suivre.
Dans les coulisses du lobbying contre le devoir de vigilance. L'ONG néerlandaise SOMO s'est procurée des documents internes du cabinet de relations publiques Teneo, qui lèvent le voile sur une partie de l'offensive qui a conduit l'UE à vider de sa substance sa directive sur le devoir de vigilance des multinationales (voir ici et dans nos précédentes lettres). Une structure a été créée par Teneo, la « table-ronde sur la compétitivité » (Competitiveness Roundtable) regroupant surtout des multinationales pétrolières, majoritairement américaines, mais aussi TotalEnergies, pour coordonner le travail d'influence. Les entreprises se sont par exemple « répartis » les gouvernements des Etats-membres sur lesquels elles feraient pression, en fonction de leurs implantations dans les pays concernés. TotalEnergies s'est chargé de la France, mais aussi de la Belgique et du Danemark. Lire ici les révélations de SOMO et là l'article en français de Mediapart.
L'optimisation en chiffres. Les multinationales ne délocalisent pas seulement les usines, mais également les profits : 10 milliards d'euros de profits échappent chaque année à la France, selon une étude de l'Observatoire européen de la fiscalité basée sur des données fiscales en général inaccessibles aux chercheurs. Cela représente une perte de revenus fiscaux de 3,7 milliards. Cette optimisation passe par des transferts financiers intra-groupes, « notamment via des filiales spécialisées dans la propriété intellectuelle, la R&D ou des activités financières, permettant d'attribuer les profits à des juridictions à fiscalité réduite » (Luxembourg, Suisse, Singapour, Pays-Bas et Hong-Kong).
Pour 2,9 milliards t'as plus rien. En 2023, le gouvernement français annonçait en grande pompe une subvention de 2,9 milliards d'euros pour l'extension d'une usine de ST Microelectronics à Crolles, près de Grenoble. L'opération devait se faire en partenariat avec Global Foundries, un groupe ayant son siège outre-Atlantique mais propriété à 82% du fonds souverain émirati Mubadala. Depuis, Global Foundries semble s'être désengagé sans le dire. L'association Actionnaires pour le climat, a cherché à obtenir la convention encadrant la subvention et fini par mettre la main sur une lettre d'engagement de ST, qui table sur « la création d'un minimum de 1 000 emplois à temps plein nets » d'ici 2027. Ce dont le groupe, qui a annoncé en avril la suppression d'un millier d'emplois en France, semble très loin. Une raison de suspendre la subvention, dont 630 millions d'euros auraient déjà été versés ? C'est ce que pense l'association, même si la valeur juridique d'une telle clause reste incertain. Lire le récit de Libération. ST Microelectronics vient de recevoir un nouveau financement public d'un milliard d'euros de la Banque européenne d'investissement.
Gaz offshore au Mozambique : deux pays européens disent non à TotalEnergies. Le Royaume-Uni puis les Pays-Bas ont successivement annoncé la fin de leur soutien (sous la forme de crédit export et de garantie d'emprunt) au projet gazier de Cabo Delgado de TotalEnergies. Celui-ci-avait été gelé suite aux violences dans cette province du pays. Le traitement des populations civiles par l'armée a d'ailleurs donné lieu au dépôt d'une plainte pour « complicité de crime de guerre » contre l'entreprise, dont nous avons parlé dans une précédente lettre. Ce double retrait fragilise la relance annoncée du projet, dans un contexte d'insécurité persistante, même si l'administration Trump, elle, a accordé un prêt de 4,7 milliards de dollars au groupe pétrogazier français.
Idée cadeau. Comment est né le mouvement « anti-monopoles » aux États-Unis ? Comment le ketchup est devenu si sucré ? Comment Shenzhen a attiré les multinationales du monde entier avant de donner naissance à des géants chinois comme Huawei et BYD ? Comment Unilever a construit sa prospérité d'aujourd'hui sur le dos du Congo belge et de sa population ? Nous publions quelques nouvelles bonnes feuilles du livre Multinationales. Une histoire du monde contemporain, paru chez La Découverte. Un livre riche en substance et en infos intéressantes, à mettre sous tous les sapins. Toutes les infos ici.
Cette lettre a été écrite par Olivier Petitjean.
12.12.2025 à 00:08
À l'occasion du dixième anniversaire de l'Accord de Paris sur le climat, bilan des progrès accomplis (ou non) par les groupes du CAC 40 en matière de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre.
- Dix ans après l'accord de Paris, le CAC 40 a-t-il avancé ? / Climat et greenwashing, Airbus, ArcelorMittal, Danone, BNP Paribas, Carrefour, Engie, LVMH, L'Oréal, Michelin, Renault, Saint-Gobain, TotalEnergies, gaz à effet de serre, greenwashing, transparence, normes et régulations
À l'occasion du dixième anniversaire de l'Accord de Paris sur le climat, l'Observatoire des multinationales dresse le bilan des progrès accomplis - ou non - par les groupes du CAC 40 en matière de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre. Le chemin semble encore très long pour décarboner réellement le modèle productif et commercial des grandes entreprises françaises, et rares sont celles qui ont pris des mesures concrètes à la hauteur de leurs discours.
Le 12 décembre 2025, nous fêterons le dixième anniversaire de l'adoption de l'Accord de Paris sur le climat. Pour l'occasion, l'Observatoire des multinationales s'est penché sur la performance climatique d'un échantillon de douze entreprises du CAC 40, représentatives de différents secteurs d'activité : Airbus, ArcelorMittal, BNP Paribas, Carrefour, Danone, Engie, L'Oréal, LVMH, Michelin, Renault, Saint-Gobain et TotalEnergies. Avec une question simple : comment ont évolué les émissions de gaz à effet de serre déclarées par ces groupes français depuis 2015 ? Ont-elles baissé drastiquement, comme semblait le promettre la floraison d'engagements et d'initiatives qui ont accompagné la COP21 et la signature de l'Accord de Paris ? Ou bien constate-t-on un écart entre les discours et les promesses et la réalité concrète ?
Principales conclusions de l'étude :
Il y a dix ans, en amont de la conférence climat parisienne, l'Observatoire des multinationales avait publié avec le Basic un rapport intitulé « Gaz à effet de serre : doit-on faire confiance aux entreprises pour sauver le climat ? », portant sur un échantillon de dix grandes entreprises françaises (dont sept que l'on retrouve dans notre nouvel échantillon). Ce rapport soulignait les limites de la transparence des entreprises françaises sur leurs émissions, la mauvaise prise en compte des émissions au niveau de toute la chaîne de valeur (amont et aval), et l'absence d'alignement sur les objectifs européens à long terme de réduction des émissions, avec souvent des paris sur des solutions technologiques incertaines pour atteindre ces objectifs. La présente étude confirme, dix ans plus tard, une grande partie de ces constats.
Si aucune n'a officiellement abandonné ses objectifs climatiques, on assiste chez certaines entreprises à un mouvement de recul ou du moins de plus grande prudence par rapport aux objectifs et aux engagements affichés au moment de l'Accord de Paris et dans les années qui ont suivi. Au-delà du contexte politique immédiat, cette baisse relative d'enthousiasme affiché s'explique peut-être aussi par la prise de conscience par ces entreprises des difficultés concrètes à réduire véritablement leurs émissions et à atteindre la neutralité carbone en 2050, et les coûts induits.
09.12.2025 à 10:08
En 1980, en guise de premier acte de sa réouverture économique, la Chine inaugure la zone économique spéciale de Shenzhen, destinée à attirer les multinationales du monde entier. La ville deviendra la capitale de la mondialisation dans les années 1990, avec son côté obscur en termes d'exploitation des travailleurs, et le berceau de multinationales chinoises comme Huawei et BYD. Extrait de Multinationales. Une histoire du monde contemporain.
En 1979, la Chine décide d'ouvrir son économie (…)
En 1980, en guise de premier acte de sa réouverture économique, la Chine inaugure la zone économique spéciale de Shenzhen, destinée à attirer les multinationales du monde entier. La ville deviendra la capitale de la mondialisation dans les années 1990, avec son côté obscur en termes d'exploitation des travailleurs, et le berceau de multinationales chinoises comme Huawei et BYD. Extrait de Multinationales. Une histoire du monde contemporain.
En 1979, la Chine décide d'ouvrir son économie au monde. Deng Xiaoping se rend en visite aux États-Unis où il rencontre des investisseurs et des patrons de grandes entreprises. L'année suivante, le gouvernement chinois officialise l'ouverture d'une première zone économique spéciale, à Shenzhen, à proximité immédiate de Hong Kong et de Macao – ces deux territoires sont encore sous administration britannique pour le premier (jusqu'en 1997) et portugaise pour le second (jusqu'en 1999) – pour attirer les investissements occidentaux. Aujourd'hui, Shenzhen abrite une population de 17,5 millions de personnes (chiffre 2020) et est devenue la troisième ville de Chine après Pékin et Shanghai.
La zone économique spéciale de Shenzhen offre aux entreprises du monde entier un territoire d'implantation doté de son propre port et de ses propres règles. Elle leur offre aussi l'accès à une quantité immense de travailleurs migrants venus du monde rural chinois.
Un premier projet de zone industrielle voué à l'exportation est porté sur place par le groupe China Merchants, mais l'ambition est désormais bien plus vaste. Directement inspirée du modèle des zones franches et profitant du développement rapide de la conteneurisation, la zone économique spéciale de Shenzhen offre aux entreprises du monde entier un territoire d'implantation doté de son propre port, de droits de douane réduits, d'une fiscalité avantageuse et de ses propres règles. Elle leur offre aussi l'accès à une quantité immense de travailleurs migrants venus du monde rural chinois, dont les droits sociaux sont réduits à portion congrue et qui logent dans des dortoirs appartenant à leurs employeurs. Le tout est entouré de fils barbelés et de checkpoints pour contrôler les mouvements de population.
Forte de ses atouts, Shenzhen ne tarde pas à attirer entreprises et investisseurs, tout d'abord depuis Hong Kong et Taïwan, puis depuis le reste du monde. Les grandes marques occidentales y sous-traitent progressivement leur production à des entreprises chinoises ou du reste de l'Asie. Le port de Shenzhen devient l'un des plus importants du globe et envoie ses conteneurs aux quatre coins de la planète, approvisionnant notamment les supermarchés et enseignes de vêtements nord-américains et européens. On y produit de tout : des objets de consommation courante, des appareils électroménagers, des machines, des poupées Barbie pour Mattel, des chaussures pour Nike, des vêtements et des jouets pour Disney.
L'installation du groupe taïwanais Foxconn, en 1988, est une étape cruciale dans le développement des industries électroniques à Shenzhen. L'entreprise fondée en 1974 par Terry Gou y ouvre cette année-là sa première usine hors de Taïwan. Elle se spécialise dans la production d'appareils ou de composants pour toutes les grandes marques américaines, européennes, japonaises et chinoises, de BlackBerry et Apple à Xiaomi en passant par Nokia, Samsung, Nintendo, Sega et Sony. Foxconn et Shenzhen se font connaître du grand public occidental dans les années 2000 et 2010 comme l'un des principaux lieux de production de l'iPhone d'Apple. On a estimé en 2012 que le groupe taïwanais fabriquait 40 % de tous les gadgets électroniques vendus dans le monde. Si Foxconn possède désormais des usines également au Brésil, en Inde et en Europe, la Chine reste son principal site de production.
Foxconn et d'autres sous-traitants opérant à Shenzhen sont régulièrement épinglés par des organisations non gouvernementales et des journalistes pour les conditions de vie et de travail drastiques qu'ils imposent à leurs employés, particulièrement à l'approche des ventes de Noël en Occident, ainsi que pour le recours au travail de mineurs.
Le modèle des zones économiques spéciales est ensuite exporté ailleurs dans le monde au bénéfice des entreprises chinoises dans le cadre des « nouvelles routes de la soie ».
L'un des objectifs de la création de la zone économique spéciale était de constituer un terrain d'expérimentation en vue de l'introduction du capitalisme et des marchés internationaux en Chine d'une manière qui soit compatible avec les valeurs du « communisme » étatique chinois et le maintien du contrôle par le parti unique. Le succès de Shenzhen pousse le gouvernement chinois à créer d'autres zones économiques spéciales et d'autres dispositifs similaires le long du littoral et des grands fleuves. L'une des plus connues est le quartier de Pudong à Shanghai. Leur localisation coïncide souvent avec celle des ports sous concession étrangère du XIXe siècle, mais la nature des relations sino-occidentales a radicalement changé. Le modèle des zones économiques spéciales est ensuite exporté ailleurs dans le monde au bénéfice des entreprises chinoises dans le cadre des « nouvelles routes de la soie ».
Parce que le débat démocratique mérite mieux que la com' du CAC 40.
Faites un donShenzhen est aussi le lieu de naissance et le siège social de nombreuses multinationales chinoises. Huawei y voit ainsi le jour en 1987. L'entreprise s'inspire des équipements téléphoniques occidentaux qui sont produits ou revendus dans la zone économique spéciale pour développer ses propres modèles et partir ensuite, avec le soutien de l'État, à la conquête du marché chinois, puis du marché mondial. Le constructeur de véhicules électriques BYD est également fondé à Shenzhen en 1995, initialement comme producteur de batteries pour le compte de donneurs d'ordres internationaux.
Le contrôle social n'empêche pas des grèves souvent massives.
Aujourd'hui, le PIB de Shenzhen dépasse celui de Hong Kong. La ville est l'une de celles qui abritent le plus de milliardaires de la planète. Les autorités mettent l'accent sur sa spécialisation dans la finance et la haute technologie, en passant sous silence les centaines de milliers d'ouvriers qui continuent à y trimer. Les activités industrielles à faible valeur ajoutée sont de plus en plus délocalisées dans d'autres pays où les salaires sont plus bas. Shenzhen reste aussi extrêmement surveillée, les fils de fer barbelés ayant cédé la place à des milliers de caméras de vidéosurveillance. Ce contrôle social n'empêche pas des grèves régulières souvent massives dans la région, comme dans des ateliers fournissant le groupe textile japonais Fast Retailing (Uniqlo, Comptoir des cotonniers…) en 2005, ou de la part d'ouvrières produisant des chaussures Adidas, Nike ou New Balance en 2011, ou des ouvriers d'IBM en 2014. En 2023, l'organisation indépendante China Labour Bulletin (basée à Hong Kong) recense plus de 500 conflits sociaux dans la région de Guangdong, dont Shenzhen fait partie, soit un tiers des protestations sociales recensées dans l'ensemble de la Chine.
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