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13.05.2025 à 14:49

[Fact-checking] Le Brexit a-t-il gravement nui à l'économie du Royaume-Uni ?

Boran Tobelem
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"Take back control" ("reprendre le contrôle"), tel était le slogan des Brexiters, les partisans de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, lors de la campagne électorale pour le référendum britannique sur le Brexit en 2016. Une promesse de souveraineté retrouvée, de contrôle des frontières et de prospérité. D'un point de vue économique, la sortie […]

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Texte intégral (3111 mots)
Une majorité de Britanniques considèrent désormais que le Brexit fut une erreur - Crédits : melis82 / iStock
Selon une enquête de l'institut de sondages YouGov, 55 % des Britanniques considéraient fin mars 2024 que le Brexit fut une erreur - Crédits : melis82 / iStock

"Take back control" ("reprendre le contrôle"), tel était le slogan des Brexiters, les partisans de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, lors de la campagne électorale pour le référendum britannique sur le Brexit en 2016. Une promesse de souveraineté retrouvée, de contrôle des frontières et de prospérité.

D'un point de vue économique, la sortie de l'UE devait signifier la fin de la contribution au budget européen. Et donc plus d'argent pour le Royaume-Uni et plus de liberté dans sa gestion. Si la croissance de l'économie britannique a été très faible en 2023, marquée par une période de récession au deuxième semestre, le PIB a rebondi en 2024.

Toutefois, il convient de considérer avec mesure l'impact du Brexit sur l'économie britannique, eu égard à certains indicateurs économiques ou tendances. Qu'en est-il réellement aujourd'hui ?

Le Brexit, un choc direct à encaisser

Dès la victoire du “Leave” (quitter) le 23 juin 2016, les premières répercussions économiques du Brexit se manifestent. Les marchés financiers, anticipant les effets négatifs de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, réagissent immédiatement. La livre sterling chute de 7 % par rapport à l'euro. L’incertitude liée à l’issue des négociations sur la nouvelle relation qui se dessine entre Londres et Bruxelles provoque aussi une baisse significative de l’investissement outre-Manche.

Dans une note confidentielle révélée par la presse en 2018, le Trésor britannique évalue la perte de croissance du Royaume-Uni de 2 à 8 % dans les quinze années suivant la sortie de l'UE. L'année suivante, une étude menée par six économistes des universités de Stanford, de Nottingham, de la London School of Economics et de la Banque d'Angleterre estime le recul des investissements causé par l'anticipation du Brexit à 11 %.

La sortie du Royaume-Uni s'est déroulée en deux temps, avec le retrait de l'UE le 31 janvier 2020, puis de son marché unique le 31 décembre de la même année. Selon les termes de l'accord de commerce et de coopération entre Londres et Bruxelles, les deux parties continuent leurs échanges sans droits de douane ni quotas. Mais de nombreuses formalités administratives et contrôles douaniers, inexistants auparavant, font leur apparition. Ce qui complique significativement le commerce.

Dans les semaines qui suivent la sortie du marché unique, des pénuries de fruits et légumes frais, importés depuis le continent, sont constatées dans les supermarchés britanniques. En cause, les difficultés d'acheminement dues aux nouveaux obstacles commerciaux liés au Brexit. La fin de la libre circulation avec les autres pays européens impacte également la distribution d'essence ou aggrave encore la pénurie de médecins.

Une économie encore fragile…

Rapidement, la pandémie de Covid-19, puis la guerre en Ukraine provoquent un choc économique qui affecte lourdement les économies européennes, dans et hors de l'UE, avec une forte inflation et un ralentissement de la croissance. Dès lors, difficile au Royaume-Uni de séparer l'impact de ces phénomènes mondiaux de celui du Brexit. À partir de la mi-2023, le pays enchaîne deux trimestres consécutifs de croissance négative, ce qui le fait entrer en récession technique.

Sur l'ensemble de l'année 2023, la croissance n'aura atteint que 0,1 %. Un chiffre plus faible que dans l'Union européenne et la zone euro, à 0,5 % de croissance en 2023. Au niveau national, les "grands" pays d'Europe de l'Ouest font alors tous mieux que le Royaume-Uni : 0,9 % en France et en Italie, 2,5 % en Espagne… à l'exception notable de l'Allemagne, qui fait pire, avec -0,2 % de PIB.

En 2024, l'économie britannique a montré des signes de reprise, avec une croissance de 0,7 % au premier trimestre (0,3 % dans la zone euro) et de 0,5 % au deuxième trimestre (0,2 % dans la zone euro), portée par la demande intérieure. La croissance est cependant restée nulle au troisième trimestre, période marquée par la crainte de fortes hausses d’impôts, confirmées depuis par le gouvernement travailliste de Keir Starmer. À cette embellie relative s'est par ailleurs ajoutée une inflation persistante, passée de 2,3 % à 2,6 % en décembre 2024, augmentant la pression sur le gouvernement pour stabiliser l'économie. Cette tendance s'est confirmée au début de l'année 2025. Selon des chiffres communiqués mercredi 19 février par l’Office national des statistiques (ONS), l’inflation est repartie à la hausse en janvier, à 3 % sur un an. Selon l'économiste Grant Fitzner, ce chiffre s'explique "par une diminution moins importante que d’habitude des tarifs aériens à cette période de l’année" et par la hausse du coût des aliments et des boissons non alcoolisés.

Le 16 janvier 2025, une étude de l'Institute for Public Policy Research a par ailleurs révélé une baisse significative des échanges commerciaux entre le Royaume-Uni et l'UE, appelant à une révision fondamentale des règles commerciales post-Brexit pour mieux aligner les relations avec Bruxelles. D'après les estimations, les exportations de biens britanniques vers l'UE ont diminué de 27 % entre 2021 et 2023, tandis que les importations ont baissé de 32 %. Selon la Chambre de Commerce et d'Industrie Franco-Britannique, cette situation est restée pratiquement inchangée en 2024.

Pour atténuer ces retombées du Brexit, il est suggéré aux ministres britanniques de négocier un accord vétérinaire avec l'UE afin de réduire les contrôles sur les aliments qui traversent la Manche. Les exportations agroalimentaires britanniques vers l'UE pourraient ainsi croître de 22,5 %, précise le rapport de l'Institute for Public Policy Research.

…Mais des données à relativiser

Si la fluidité des échanges et la confiance des investisseurs ont donc bien pâti du Brexit, certains chercheurs invitent cependant à la prudence. En d'autres termes, il serait assez juste de considérer que si l'accord conclu avec l'UE n'a pas tenu les promesses d'une transformation économique majeure au Royaume-Uni, il n'a pas non plus provoqué une véritable catastrophe économique comme certains le prédisaient.

D'abord parce qu'en données cumulées, le PIB britannique a globalement suivi les courbes des grandes économies de la zone euro depuis 2016, comme la France ou l'Italie. Les principaux analystes économistes, à savoir les grandes institutions internationales que sont le FMI et l’OCDE, ainsi que l’Office for Budget Responsibility (OBR) et la Banque d’Angleterre (BoE), prévoient même respectivement une croissance annuelle du PIB du Royaume-Uni pour 2024 de +0,7 %, +1,1 %, +0,8 % et +1,25 %.

Plus optimiste encore, selon les dernières prévisions du Fonds monétaire international (FMI), la croissance prévue pour le Royaume-Uni en 2029 serait de 1,3 %, comparable à celle de la France et deux fois supérieure à celle de l'Allemagne. De quoi nuancer les propos de certains détracteurs du Brexit, convaincus que les promesses de prospérité en quittant le wagon européen seraient vaines.

De la même manière, la dette publique britannique devrait représenter 103,8 % du PIB en 2025, soit environ 12 points de moins que la France.

Jeudi 8 mai, le premier ministre britannique, Keir Starmer, et le président américain, Donald Trump, ont annoncé un accord commercial "historique". Premier texte signé par les États-Unis avec un pays partenaire économique depuis le "Jour de la libération", cet accord pourrait donner un léger coup de boost à l'économie du pays. Dans la pratique, il concerne l'ouverture de nouveaux marchés britanniques pour 5 milliards de dollars, incluant 700 millions pour l’éthanol et 250 millions pour des produits agricoles comme le bœuf américain. Les véhicules britanniques bénéficieront d’une taxe réduite à 10 % (au lieu de 27,5 %) pour un quota annuel de 100 000 voitures. En contrepartie, le Royaume-Uni s'engage à acheter 10 milliards de dollars d'avions Boeing. L’accord donne en outre un avantage au Royaume-Uni par rapport à d’autres pays, notamment ceux de l’Union européenne, toujours soumis aux taxes à l’importation de 25 % sur l’acier, l’aluminium et l’automobile.

La conclusion de cet accord pourrait occuper une partie des discussions lors d'un sommet jugé capital, le 19 mai à Londres, entre l'Union européenne et le Royaume-Uni. De nombreux économistes s'interrogent cependant sur la portée de ce compromis. Une grande partie des produits manufacturés du pays feront toujours l'objet de droits de douane de 10 %, autrement dit la taxe "réciproque" imposée en avril par le dirigeant américain et suspendue actuellement pour une période de 90 jours.

Le premier ministre britannique et le Brexit

Le Premier ministre actuel du Royaume-Uni est Sir Keir Starmer, chef du Parti travailliste. Il a pris ses fonctions le 5 juillet 2024.

Le dirigeant de 62 ans a clairement indiqué que le Royaume-Uni ne rejoindra pas l'Union européenne, le marché unique ou l'union douanière, et qu'il n'y aura pas de retour à la libre circulation des personnes.

Cependant, il s'est engagé à améliorer les relations avec l'UE en renforçant la coopération économique, diplomatique et militaire. Par exemple, il a exprimé son intention de renégocier l'accord commercial post-Brexit pour réduire les frictions commerciales et a proposé de reconnecter le système britannique d'échange de quotas d'émission avec celui de l'UE.

L'opinion publique britannique de plus en plus hostile au Brexit

Si l'impact réel du Brexit sur l'économie britannique est difficile à évaluer, les Britanniques sont quant à eux de plus en plus nombreux à considérer que quitter l'UE fut une erreur. Le 23 juin 2016, ils étaient déjà 48,11 % à vouloir rester dans l'Union. Ils étaient même majoritaires en Irlande du Nord (55,8 %) et en Écosse (62 %).

Aujourd'hui, la part de Britanniques réfractaires au Brexit semble prendre durablement le dessus. Depuis janvier 2020, l'institut de sondages YouGov réalise par exemple une enquête avec pour question "Avec le recul, pensez-vous que la Grande-Bretagne a eu raison ou tort de voter en faveur de la sortie de l'Union européenne ?". Dès le 26 janvier 2020, 40 % pensaient que le pays avait eu raison quand 47 % considéraient le contraire (13 % ne savaient pas). Puis les partisans de la sortie de l'UE ont repris l'avantage dans le sondage… jusqu'en mars 2021, période à partir de laquelle les deux courbes se sont durablement éloignées. Au 1er mai 2024, 55 % des sondés estimaient que le Brexit était une erreur, contre seulement 31 % déclarant qu'il s'agissait d'une bonne décision.

Selon une enquête de l'institut Redfield & Wilton relayée par le quotidien The Independent en septembre 2024, cette tendance est encore plus marquée chez les jeunes, dans l'incapacité de voter en 2016. Alors que 56 % des personnes interrogées déclarent qu’elles voteraient pour une réadhésion à l’UE si un autre référendum était organisé aujourd’hui, ils sont 61 % parmi la "génération Z" (personnes nées entre la fin des années 1990 et le début des années 2010) à la vouloir (contre 28 % pour le statu quo).

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