14.11.2024 à 06:01
Human Rights Watch
(Jérusalem) – Depuis octobre 2023, les autorités israéliennes ont provoqué le déplacement forcé massif et délibéré de civils palestiniens à Gaza, ce qui les rend responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport rendu public aujourd’hui. Ce rapport est publié alors même qu’une campagne militaire israélienne dans le nord de Gaza a très probablement créé une nouvelle vague de déplacements forcés de centaines de milliers de civils.
14 novembre 2024 “Hopeless, Starving, and Besieged”Le rapport de 154 pages, intitulé « ‘‘Hopeless, Starving, and Besieged’’: Israel’s Forced Displacement of Palestinians in Gaza » (« ‘‘Désespérés, affamés et assiégés’’ : Le déplacement forcé de Palestiniens à Gaza ») examine la manière dont les autorités israéliennes ont provoqué le déplacement de plus de 90 % de la population de Gaza – soit 1,9 million de Palestiniens – et ont causé la destruction généralisée d’une grande partie de ce territoire au cours des 13 derniers mois. Les forces israéliennes ont procédé à des démolitions délibérées d’habitations et d’infrastructures civiles, y compris dans des zones qu’elles souhaitent apparemment convertir en « zones tampons » et de « couloirs sécuritaires », et d’où les Palestiniens sont susceptibles d’être définitivement déplacés. Contrairement aux affirmations des responsables israéliens, leurs actions ne sont pas conformes aux lois de la guerre.
« Le gouvernement israélien ne peut prétendre assurer la sécurité des Palestiniens alors qu’il les tue le long des voies d’évacuation, bombarde les prétendues zones de sécurité et coupe l’accès aux vivres, à l’eau et aux installations sanitaires », a déclaré Nadia Hardman, chercheuse auprès de la division Droits des réfugiés et migrants à Human Rights Watch. « Israël a violé de manière flagrante son obligation de garantir le retour des Palestiniens chez eux, en rasant pratiquement tout dans de vastes zones. »
Human Rights Watch a mené des entretiens avec 39 Palestiniens déplacés à Gaza, et a analysé le système d’évacuation mis en place par Israël, notamment en examinant 184 ordres d’évacuation. Human Rights Watch a également examiné des images satellite qui confirment les destructions généralisées, et vérifié des vidéos et des photographies d’attaques contre des zones de sécurité et des voies d’évacuation désignées comme telles.
Play VideoLes lois des conflits armés applicables dans les territoires occupés n’autorisent le déplacement de civils qu’à titre exceptionnel, en cas d' « impérieuses raisons militaires » ou pour la sécurité de la population, et exigent des garanties et des « installations convenables » pour accueillir les personnes déplacées. Les responsables israéliens affirment que, parce que les groupes armés palestiniens combattent en se déployant parmi la population civile, l’armée a évacué les habitants en toute légalité pour attaquer les combattants des groupes armés, tout en limitant les dommages causés aux civils. Les recherches de Human Rights Watch montrent toutefois que cette affirmation est en grande partie fausse.
Il n’existe pas d'« impérieuses raisons militaires » qui pourraient justifier de manière plausible le déplacement massif par Israël de la quasi-totalité de la population de Gaza, souvent à de multiples reprises, selon Human Rights Watch. Le système d’évacuation mis en place par les autorités israéliennes a gravement nui à la population, et n’a souvent servi qu’à répandre la peur et l’anxiété. Plutôt que d’assurer la sécurité des civils déplacés, les forces israéliennes ont ciblé à plusieurs reprises les itinéraires d’évacuation désignés et les zones qualifiées de « sûres ».
Les ordres d’évacuation ont été incohérents, inexacts et souvent communiqués aux civils trop tard pour permettre leur évacuation ; dans certains cas, les civils n’ont même pas reçu de tels ordres d’évacuation. En outres, ces ordres n’ont pas tenu compte des besoins des personnes handicapées et d’autres personnes, qui ne peuvent partir de chez eux sans assistance.
En tant que puissance occupante, Israël garantir des installations adéquates pour accueillir les civils déplacés à Gaza, mais les autorités ont bloqué en grande partie l’acheminement de l’aide humanitaire requise, de l’eau, de l’électricité et du carburant, n’autorisant qu’une livraison très limitée de ces biens essentiels. Les attaques israéliennes ont endommagé et détruit de nombreuses ressources vitales à Gaza, notamment des hôpitaux, des écoles, des infrastructures de transport d’eau et d’énergie, des boulangeries et des terres agricoles.
Click to expand Image La route Salah al-Din (ligne jaune), principale voie d'évacuation désignée par l'armée israélienne en tant que voie de « passage sûr » pour les personnes fuyant du nord vers le sud de la bande de Gaza, du 13 octobre 2023 au 4 janvier 2024. Entre le 4 janvier 2024 et le 7 août 2024, les autorités israéliennes ont fermé cette route et désigné la route côtière d'Al Rashid comme une voie d’évacuation durant cette période, jusqu’à la réouverture de la route Salah al-Din, le 7 août 2024. © 2024 Copernicus Sentinel Data (image) / Human Rights Watch (graphisme).Israël doit également assurer le retour des personnes déplacées dans leurs foyers dès la cessation des hostilités dans la région. Mais au lieu de cela, les actions d’Israël ont rendu inhabitables de vastes zones de Gaza. L’armée israélienne y a intentionnellement démoli ou gravement endommagé des infrastructures civiles, notamment en se livrant à des démolitions contrôlées d’immeubles, dans le but apparent de créer une « zone tampon » étendue le long du périmètre de Gaza avec Israël et un corridor qui divisera le territoire. Les destructions sont d’une telle ampleur qu’elles indiquent une intention de déplacer de manière permanente de nombreuses personnes.
Israël devrait respecter le droit des civils palestiniens à retourner dans les zones de Gaza d’où ils ont été déplacés. En outre, depuis près de 80 ans, les autorités israéliennes refusent à près de 80 % des habitants de Gaza le droit de retourner dans leurs régions d’origine ; il s’agit de réfugiés palestiniens, ou de descendants de réfugiés qui en 1948 ont été expulsés ou ont fui leurs foyers situés dans ce qui est aujourd’hui Israël, lors des événements que les Palestiniens appellent la « Nakba » (« catastrophe »). Cette violation de leurs droits continue de peser sur l’expérience des Palestiniens à Gaza ; plusieurs personnes interrogées par Human Rights Watch ont décrit les événements actuels comme une deuxième « Nakba ».
Dès les premiers jours des hostilités, de hauts responsables du gouvernement et du cabinet de guerre israéliens ont annoncé leur intention de déplacer la population palestinienne de Gaza, des ministres ayant déclaré que son territoire diminuerait, que le faire exploser et l’aplatir était « magnifique », et que des terres seraient transférées aux colons. « Nous avons maintenant lancé la Nakba de Gaza », a déclaré le ministre israélien de l’Agriculture et de la sécurité alimentaire, Avi Dichter, en novembre 2023.
Human Rights Watch a constaté que les déplacements forcés sont généralisés, et les éléments de preuve démontrent qu’ils sont systématiques et font partie d’une politique d’État. De tels actes constituent des crimes contre l’humanité.
Organisés par les autorités israéliennes, les déplacements violents de Palestiniens de Gaza, qui sont membres d’un autre groupe ethnique, sont probablement planifiés pour être permanents dans les zones tampons et les couloirs de sécurité. De telles actions de la part des autorités israéliennes constituent une forme de nettoyage ethnique.
Les victimes de graves abus en Israël et en Palestine sont confrontées à un mur d’impunité depuis des décennies. Les Palestiniens de Gaza vivent sous un blocus illégal depuis 17 ans, qui constitue une partie des crimes contre l’humanité continus d’apartheid et de persécution que les autorités israéliennes commettent contre les Palestiniens.
Les gouvernements étrangers devraient condamner publiquement le déplacement forcé de la population civile de Gaza par Israël, en tant que crime de guerre et crime contre l’humanité . Ils devaient faire pression sur Israël pour que ce pays mette immédiatement un terme à ces crimes et se conforme aux nombreuses ordonnances contraignantes de la Cour internationale de justice (CIJ), et aux obligations énoncées dans son avis consultatif de juillet.
Le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) devrait enquêter sur le déplacement forcé et l’entrave au droit au retour par Israël, en tant que crime contre l’humanité. Les gouvernements étrangers devraient également condamner publiquement les efforts visant à intimider ou à entraver le travail de la Cour, ses responsables et ceux qui coopèrent avec cette juridiction.
Les gouvernements étrangers devraient imposer des sanctions ciblées et prendre d’autres mesures, y compris la révision d’accords bilatéraux avec Israël, pour pousser ce pays à respecter ses obligations internationales en matière de protection des civils.
Les États-Unis, l’Allemagne et d’autres pays devraient immédiatement suspendre leurs transferts d’armes et leur aide militaire à Israël. En continuant à livrer des armes à Israël, ils risquent de se rendre complices de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et d’autres graves violations des droits humains.
« Personne ne peut nier les atrocités que l’armée israélienne commet contre les Palestiniens de Gaza », a conclu Nadia Hardman. « La vente d’armes supplémentaires et la poursuite de l’aide à Israël par les États-Unis, l’Allemagne et d’autres pays sont un chèque en blanc pour commettre de nouvelles atrocités, et exposent de plus en plus ces pays à des accusations de complicité d’abus. »
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11.11.2024 à 17:00
Human Rights Watch
La semaine dernière, une source gouvernementale a déclaré aux médias que la junte militaire du Burkina Faso envisage de rétablir la peine de mort, qui avait été abolie dans le Code pénal de 2018. Les dernières exécutions avérées au Burkina Faso remontent à 1988. Il s'agit du dernier coup porté à la situation dégradante des droits humains de ce pays d'Afrique de l'Ouest.
La source a déclaré que le gouvernement discutait du rétablissement de la peine de mort avant de soumettre une proposition pour son adoption à l'Assemblée législative de transition. Aucun calendrier n'a été fourni. Le 8 novembre, le ministre burkinabè de la Justice, Edasso Rodrigue Bayala, a corroboré les propos des médias, déclarant que « la question de la peine de mort ... est discutée et ... va être instaurée » dans le projet de Code pénal, « pour aller dans le sens de la vision et des instructions données par le chef de l'État, le capitaine Ibrahim Traoré ».
Des sources judiciaires et de la société civile au Burkina Faso ont indiqué à Human Rights Watch que le gouvernement envisage d'appliquer la peine de mort aux crimes liés au terrorisme.
Les forces armées du Burkina Faso combattent des groupes islamistes armés liés à Al-Qaïda et à l'État islamique dans le Grand Sahara (EIGS) depuis près d'une décennie. L'organisation non gouvernementale Armed Conflict Location and Event Data (ACLED) a indiqué que plus de 26 000 personnes ont été tuées dans le cadre de ce conflit depuis 2016, dont environ 15 500 personnes depuis que la junte militaire a pris le pouvoir en septembre 2022.
L’Assemblée générale des Nations Unies et la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (CADHP) n'ont cessé d'appeler les gouvernements à instaurer un moratoire sur la peine de mort, à progressivement restreindre cette pratique et à réduire les infractions pour lesquelles elle peut être imposée, en vue de son ultime abolition. À l'heure actuelle, environ 170 pays ont aboli la peine de mort ou ont instauré un moratoire à son sujet, que ce soit en droit ou en pratique, ou ont cessé les exécutions depuis plus de dix ans. Human Rights Watch s'oppose depuis longtemps à la peine capitale dans tous les pays et dans toutes les circonstances, en raison de sa cruauté inhérente et de son irréversibilité.
En 2007, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté une résolution affirmant « qu'il n’y a pas de preuve irréfutable que la peine de mort a un effet dissuasif et que toute erreur judiciaire dans l'application de la peine de mort est irréversible et irréparable ».
Le Burkina Faso est confronté à de réelles préoccupations en matière de sécurité, mais ce pays devrait reconnaître la cruauté inhérente de la peine de mort et rejeter tout projet visant à la rétablir.
10.11.2024 à 21:25
Human Rights Watch
(Nairobi) – Les Forces de soutien rapide (RSF), un groupe armé soudanais, ont tué, blessé et détenu illégalement des dizaines de civils et violé des femmes et des filles lors d’attaques dans l’État d’Al Gezira situé dans le centre du pays, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Compte tenu de l’ampleur et de la gravité de la menace qui pèse sur les civils, le Royaume-Uni devrait profiter de sa présidence du Conseil de sécurité des Nations Unies en novembre pour faire pression sur l’ONU, afin de déployer une mission de protection des civils au Soudan.
Depuis la défection le 20 octobre 2024 d’un allié important des RSF dans l’est d’Al Gezira, les RSF ont attaqué au moins 30 villages et villes, un nombre certainement sous-estimé, dont Rufaa, Tamboul, Al-Sireha et Azrag. L’ONU a déclaré que plus de 130 000 personnes ont fui les attaques vers d’autres régions du Soudan.
« Cette récente recrudescence massive des attaques odieuses des Forces de soutien rapide contre les civils montre qu’il est futile d’espérer une cessation de ces crimes sans une réponse internationale forte », a déclaré Mohamed Osman, chercheur sur le Soudan à Human Rights Watch. « Il est clair que les faibles mesures prises à ce jour par le Conseil de sécurité de l’ONU ne suffisent pas à protéger les civils. Le Conseil devrait autoriser d’urgence le déploiement d’une mission de protection des civils. »
Les forces RSF, qu’un conflit oppose aux Forces armées soudanaises (SAF), ont pris le contrôle de Wad Madani, la capitale de l’État d’Al Gezira, en décembre 2023 et ont depuis lors commis de graves abus, notamment des violences sexuelles et des meurtres, dans cet État. Le 20 octobre, Abu Agla Keikel, le commandant d’une force alliée des RSF dans l’État, a fait défection et a rejoint les SAF ; ceci a déclenché la récente recrudescence des attaques de représailles contre les civils, notamment ceux de la même communauté ethnique de Keikel.
Alors que les limitations des communications et de l’accès entravent la couverture des événements en temps réel, Human Rights Watch a mené des entretiens avec six personnes, dont des témoins et des observateurs locaux des droits humains. Human Rights Watch a également vérifié deux vidéos montrant des combattants RSF qui arrêtaient des hommes dans le village d’Al-Sihera, et a examiné des images satellite de nouveaux sites de sépultures possibles dans le village.
Une femme de 55 ans de Tamboul a déclaré que des combattants des RSF ont tiré sur des maisons alors qu’ils entraient dans la ville le 22 octobre. Les forces ont rassemblé des hommes et des garçons près de sa maison. « J’ai vu un soldat des RSF tirer une balle dans la poitrine d’un homme », a-t-elle déclaré. « Ils n’arrêtaient pas de crier en nous ordonnant de quitter la ville. Ils ont dit que quiconque resterait ici ne serait pas considéré comme un civil. »
Un autre habitant a déclaré que les combattants étaient venus chez lui le même jour : « Les soldats des RSF étaient furieux… ils n’arrêtaient pas de me demander si j’étais de la famille de Keikel ou si je savais où se trouvait sa famille. Ils ont menacé de tuer toute personne qui aurait des liens avec lui. » Selon le Sudan Protection Cluster, les RSF ont affronté les SAF à Tamboul le 23 octobre. Ce site a rapporté que les attaques et les combats ont fait environ 300 morts parmi les civils.
Les 25 et 26 octobre, les RSF ont attaqué le village d’Al-Sireha, se heurtant à des habitants armés, faisant 124 morts et plus de 200 blessés parmi les civils. Un habitant a vu des véhicules des RSF tirer avec des fusils montés sur châssis et des grenades à propulsion par roquette alors qu’ils entraient dans le village le matin du 25 octobre. Il a pris la fuite plus tard dans la journée. « Nous avons vu des piles de corps, dont deux enfants, près d’un des canaux d’irrigation », a-t-il déclaré.
Click to expand Image Une image satellite enregistrée le 31 octobre 2024 montre des structures qui semblent être des tombes récentes dans le cimetière d'Al Sireha, dans l’État d’Al Gezira au Soudan. Ces tombes n'étaient pas visibles sur les images satellite enregistrées le 28 mai 2024. © 2024 Planet Labs PBC (image satellite) / Human Rights Watch (graphisme).Selon des observateurs locaux, les RSF ont arrêté plus de 150 personnes à Al-Sireha. Deux vidéos publiées sur Facebook le 26 octobre et vérifiées par Human Rights Watch montrent des combattants des RSF arrêter une centaine d’hommes dans le village d’Al-Sireha.
La première vidéo montre au moins 68 hommes détenus à l’intersection nord-ouest du village. Une vingtaine d’entre eux sont assis par terre, certains avec des vêtements tachés de sang. Le combattant RSF qui les filme, dit en arabe : « Keikel… regarde, ce sont tes gens », et force les détenus à imiter des cris d’animaux.
Une deuxième vidéo filmée par le même soldat montre six combattants RSF et 26 hommes détenus non armés, dont plusieurs hommes âgés, dans un champ à l’ouest du village. De nombreux détenus semblent avoir les mains liées dans le dos, et deux hommes détenus ont des vêtements tachés de sang. Human Rights Watch n’a pas été en mesure de déterminer ce qui est arrivé aux détenus.
Les combattants RSF auraient également infligé des violences sexuelles à des femmes et des filles au cours de ces attaques. Au 4 novembre, l’ONG Strategic Initiative for Women in the Horn of Africa (« Initiative stratégique pour les femmes dans la Corne de l’Afrique »), un groupe régional de défense des droits des femmes, avait recensé 25 cas de viols et de viols collectifs commis par les RSF, dont 10 filles parmi les victimes. Cette organisation a également recensé au moins six cas dans lesquels des survivantes d’actes de violence sexuelle se sont suicidées. Le 30 octobre, l’ONU, citant des responsables locaux de la santé, a indiqué que « plus de 27 femmes et filles âgées de 6 à 60 ans » avaient été « victimes de viols et d’agressions sexuelles ».
Hassan (dont le nom de famille n’est pas cité pour des raisons de sécurité), âgé de 51 ans, a fui Al-Sireha le 22 octobre avec sa femme et ses trois filles. Les RSF les ont arrêtés à un poste de contrôle : « L’un des combattants des RSF a regardé ma plus jeune fille, qui a 15 ans, et a dit : "Laisse-la ici, pour que nous puissions en profiter, et tu pourras partir." Ils ont commencé à faire des commentaires sexuels sur ma fille. » Hassan et sa famille ont réussi à s’échapper.
Des groupes de défense des droits humains et des médias ont déclaré avoir reçu des informations faisant état de pillages généralisés dans l’est d’Al Gezira. Ces attaques aggravent une situation humanitaire déjà désastreuse, qui a été exacerbée par les restrictions imposées par les FAS sur l’accès aux zones contrôlées par les RSF et par les pillages perpétrés par les RSF.
Le Royaume-Uni est le « penholder » (pays chargé de rédiger des projets de résolutions) concernant le Soudan, au Conseil de sécurité de l’ONU et assure la présidence du Conseil pour le mois de novembre. Durant cette période, le Conseil débattra des moyens de mieux protéger les civils au Soudan, suite à la publication en octobre d’un rapport du Secrétaire général de l’ONU. Compte tenu de la recrudescence massive des attaques brutales contre les civils, il est urgent que le Royaume-Uni, en coopération avec les États membres de l’Union africaine, fasse pression sur le Conseil de sécurité pour qu’il autorise une mission de protection des civils au Soudan. Les États membres de l’ONU devraient également renforcer leur soutien à la Mission internationale indépendante d’établissement des faits des Nations Unies pour le Soudan, comme l’a recommandé le Secrétaire général.
« Le Royaume-Uni, chargé de rédiger les projets de résolution sur le Soudan, devrait intensifier ses efforts en ce moment de crise et veiller à ce que les appels des personne ayant désespérément besoin de protection au Soudan ne soient pas ignorés », a conclu Mohamed Osman. « Les dirigeants mondiaux et régionaux ne peuvent pas se permettre de rester inactifs, face aux événements alarmants dans ce pays. »
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07.11.2024 à 06:30
Human Rights Watch
(Berlin) – Les gouvernements participant à la 29e Conférence annuelle des Nations Unies sur les changements climatiques (COP29) devraient s’engager d’urgence à réduire considérablement leurs émissions de gaz à effet de serre, notamment en éliminant immédiatement et équitablement les combustibles fossiles, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. La conférence sur le climat se tiendra à Bakou, en Azerbaïdjan, du 11 au 22 novembre 2024.
« Les gouvernements qui préparent leurs plans nationaux sur le climat devraient veiller à ce qu'ils soient cohérents avec la limitation du réchauffement climatique à 1,5 °C », a déclaré Richard Pearshouse, directeur de la division Environnement et droits humains à Human Rights Watch. « L’augmentation de la production de charbon, de pétrole et de gaz aggrave les dommages causés à la santé humaine, entraîne des violations des droits des communautés vivant à proximité des sites de production de combustibles fossiles et accélère la dégradation du climat à l’échelle mondiale. »
À l’issue de la COP28 tenue en 2023, le document final clé a appelé les pays à entamer une « transition vers l’abandon des combustibles fossiles ». Bien que ce soit la première fois depuis plus de 30 ans de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) que les pays prenaient une décision clé mentionnant explicitement les « combustibles fossiles », cet engagement n’a pas été à la hauteur de ce qui est nécessaire pour contenir la hausse de la température mondiale au seuil de 1,5 °C et éviter les pires conséquences de la crise climatique. Depuis la COP28, il n’y a toutefois eu que peu de progrès au niveau national, à l’égard de cet engagement.
Les combustibles fossiles sont le principal moteur de la crise climatique, représentant plus de 80 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone, et ils peuvent être associés à de graves atteintes aux droits humains à toutes les étapes de la production. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat a affirmé que les projets actuels de combustibles fossiles sont déjà au-delà de ce que le climat peut supporter.
En 2021, l’Agence internationale de l’énergie (IEA, ou AIE en français) a déclaré qu’il ne pouvait y avoir de nouveaux projets liés aux énergies fossiles si les pays voulaient atteindre les objectifs climatiques existants et éviter les pires conséquences de la crise climatique. Malgré le consensus scientifique, les gouvernements continuent d’autoriser la construction de nouvelles infrastructures liées aux énergies fossiles et de mal réglementer les opérations existantes.
Un récent rapport de l’ONU a souligné que les pays devraient « faire preuve d’une ambition et d’une action considérablement plus fortes » dans leurs plans climatiques nationaux, et que s’en abstenir risquerait de provoquer une augmentation de la température de 2,6 °C à 3,1 °C au cours de ce siècle, avec des conséquences dévastatrices pour les populations et la planète.
COP29 Conférence sur le climat (Bakou)Selon diverses sources, l’Azerbaïdjan, pays hôte de la COP29, prévoit d’augmenter sa production de pétrole et de gaz au cours de la prochaine décennie. Les revenus pétroliers et gaziers représentaient 60 % du budget de l’État de l’Azerbaïdjan en 2021 et environ 90 % de ses recettes d’exportation. Lors d’une réunion de haut niveau en avril 2024 pour préparer la COP29, le président azerbaïdjanais Ilham Aliyev a affirmé que les réserves de pétrole et de gaz du pays étaient « un don de Dieu », suggérant que l’Azerbaïdjan a le droit d’accroître sa production de pétrole et de gaz alors que tous les pays sont appelés à éliminer progressivement la production et l’utilisation des combustibles fossiles.
« Les gouvernements participant à la COP29 ne devraient pas permettre à l’Azerbaïdjan d’utiliser sa position d’hôte de la COP29 pour continuer à promouvoir l’expansion des combustibles fossiles et saper les efforts visant à faire face à la crise climatique et à protéger les droits humains », a déclaré Richard Pearshouse.
Une action climatique respectueuse des droits requiert la participation pleine et significative des activistes, des journalistes, des défenseurs des droits humains, de la société civile et des groupes de jeunes, ainsi que des représentants des peuples autochtones, pour garantir un contrôle minutieux des mesures gouvernementales et faire pression afin d’obtenir des résultats ambitieux de la COP29. Cela inclut les personnes qui sont en première ligne de la crise climatique et les populations les plus exposées aux impacts du changement climatique. La liberté d’expression, l’accès à l’information, la liberté d’association et de réunion pacifique doivent être protégés, car ces droits sont essentiels pour concevoir des politiques inclusives et ambitieuses visant à lutter contre la crise climatique.
Toutefois, l’Azerbaïdjan est régi par un gouvernement autoritaire qui fait preuve depuis longtemps d’intolérance à l’égard de la dissidence. Ces derniers mois, les autorités ont intensifié la répression contre les derniers vestiges de la société civile et des médias indépendants en arrêtant des dizaines de personnes sur la base de fausses accusations criminelles à motivation politique et en appliquant arbitrairement des lois très restrictives régissant les organisations non gouvernementales. Parmi les personnes détenues arbitrairement figurent un militant anti-corruption critique du secteur pétrolier et gazier azerbaïdjanais, ainsi qu’un défenseur des droits humains qui a cofondé une initiative qui plaidait en faveur des libertés civiques et la justice environnementale en Azerbaïdjan avant la COP29.
L’hostilité du gouvernement azerbaïdjanais à l’égard de l’activisme indépendant suscite des inquiétudes quant à la capacité des organisations de la société civile à participer de manière significative à la COP29 et quant aux possibilités de l’activisme environnemental en Azerbaïdjan après la conférence, selon Human Rights Watch.
Pour respecter leurs engagements en matière de droits humains, les hôtes des conférences sur le climat, dont l’Azerbaïdjan, ainsi que le Secrétariat de la CCNUCC, devraient respecter les droits humains de tous les participants, notamment leurs droits à la liberté d’expression et à se rassembler pacifiquement à l’intérieur et à l’extérieur du lieu officiel de la conférence.
En août 2024, le Secrétariat de la CCNUCC a signé un accord d’accueil avec l’Azerbaïdjan pour la COP29, mais il ne l’a pas rendu public. Human Rights Watch en a obtenu une copie révélant des lacunes importantes en matière de protection des droits des participants. Bien que l’accord accorde l’immunité juridique pour les déclarations et les actions des participants, il leur impose de respecter les lois azerbaïdjanaises et de ne pas s’immiscer dans ses « affaires intérieures ».
Pourtant, nul ne sait exactement ce qu’implique cette « ingérence » et si les lois azerbaïdjanaises s’appliquent dans la zone de conférence de l’ONU. Étant donné les restrictions imposées par l'Azerbaïdjan à la liberté d'expression et de réunion, les participants pourraient faire l'objet de représailles en dehors de la zone, a indiqué Human Rights Watch.
Le Secrétariat de la CCNUCC et les gouvernements participant à la COP29 devraient appeler publiquement le gouvernement azerbaïdjanais à respecter ses obligations en matière de droits humains et à faciliter une conférence sur le climat respectueuse des droits.
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Articles
Reporterre L'Humanité
07.11.2024 à 06:00
Human Rights Watch
(Genève, le 7 novembre 2024) – Les pays préoccupés par les graves dommages physiques, psychologiques, socioéconomiques et environnementaux causés par les armes incendiaires devraient s’efforcer de renforcer le traité international qui les régit, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui. Les États parties à la Convention sur certaines armes classiques (CCAC) devraient condamner l’utilisation d’armes incendiaires et évaluer l’adéquation du Protocole III de la CCAC sur les armes incendiaires, lors de leur réunion annuelle qui se tiendra du 13 au 15 novembre, au siège européen des Nations Unies à Genève.
7 novembre 2024 Beyond BurningLe rapport de 28 pages, intitulé « Beyond Burning : The Ripple Effects of Incendiary Weapons and Increasing Calls for International Action » (« Au-delà des brûlures : Effets domino des armes incendiaires et appels croissants à une action internationale »), examine l’utilisation récente d’armes incendiaires dans des conflits armés et ses vastes répercussions. Human Rights Watch présente des études de cas sur l’utilisation par l’armée israélienne de phosphore blanc – une arme aux effets incendiaires – dans la bande de Gaza et au Liban depuis octobre 2023, ainsi que sur l’utilisation en Ukraine et en Syrie d’autres types d’armes incendiaires. Le rapport évoque également l’intérêt croissant de nombreux pays pour répondre aux multiples préoccupations humanitaires soulevées par les armes incendiaires.
« Les armes incendiaires sont utilisées dans plusieurs conflits, mettant en danger la vie et les moyens de subsistance des civils », a déclaré Bonnie Docherty, conseillère senior auprès de la division Armes à Human Rights Watch et auteure du rapport. « Les gouvernements devraient prendre des mesures immédiates pour protéger les civils, les infrastructures civiles et l’environnement contre les effets horribles de ces armes. »
Play VideoLes armes incendiaires comptent parmi les armes les plus cruelles de la guerre moderne. Elles infligent des brûlures atroces, des lésions respiratoires et des traumatismes psychologiques. La mise à feu de maisons, d’infrastructures et de cultures cause des dommages socioéconomiques et environnementaux. Les personnes qui survivent souffrent souvent toute leur vie.
Le rapport s’appuie sur des entretiens menés par Human Rights Watch avec des survivants, des professionnels de la santé et des membres de groupes de la société civile qui ont décrit les effets de l’utilisation d’armes incendiaires.
Depuis octobre 2023, l’armée israélienne a utilisé des munitions au phosphore blanc à explosion aérienne lancées depuis le sol contre des zones peuplées du Liban et de Gaza, comme le montrent des preuves vidéo et photographiques. Human Rights Watch a vérifié l’utilisation de munitions au phosphore blanc par les forces israéliennes dans au moins 17 municipalités, dont 5 où des munitions à explosion aérienne ont été utilisées illégalement au-dessus de zones peuplées du sud du Liban entre octobre 2023 et juin 2024.
Des armes incendiaires lancées depuis le sol et larguées depuis le ciel continuent d’être utilisées en Ukraine. Il n’est pas possible d’attribuer précisément la responsabilité de leur utilisation, mais la Russie et l’Ukraine possèdent toutes deux les mêmes types de roquettes incendiaires que celles utilisées dans les attaques. Les deux camps ont également utilisé des drones, dont un type familièrement appelé « drone dragon », pour larguer des munitions incendiaires sur le champ de bataille. Le drone dragon survole la zone ciblée et largue de la thermite ou un composé incendiaire similaire qui brûle à des températures exceptionnellement élevées, dispersant des étincelles ou du gaz chaud après l’allumage.
Les forces gouvernementales syriennes continuent d’utiliser des armes incendiaires lancées depuis le sol en Syrie. Au cours de la dernière décennie, Human Rights Watch a également documenté l’utilisation d’armes incendiaires en Afghanistan, en Irak et au Yémen.
À ce jour, 117 pays ont adhéré au Protocole III de la CCAC sur les armes incendiaires, mais il contient deux lacunes qui compromettent sa capacité à protéger les civils. Tout d’abord, la définition de ces armes par le Protocole exclut les munitions polyvalentes, notamment le phosphore blanc, qui ne sont pas « principalement conçues » pour mettre le feu ou brûler des personnes ; toutefois, elles provoquent les mêmes terribles effets incendiaires. En outre, le Protocole contient des réglementations plus faibles pour les armes incendiaires lancées depuis le sol que pour celles larguées par voie aérienne.
Au Liban, des centaines de civils ont été déplacés à la suite d’attaques au phosphore blanc. Les survivants ont été confrontés à des problèmes de santé, notamment des lésions respiratoires, des mois après avoir été exposés à des armes incendiaires. Le phosphore blanc a brûlé des oliveraies et d’autres cultures, détruisant les moyens de subsistance des agriculteurs et affectant les communautés locales. Le phosphore blanc menace également l’environnement car le feu et la fumée peuvent nuire à la faune, détruire les habitats et altérer la qualité du sol, de l’eau et de l’air. Ses produits chimiques toxiques peuvent produire une contamination dangereuse dans certaines situations.
La volonté de répondre aux préoccupations concernant les armes incendiaires s’est accrue ces dernières années. Lors de la dernière réunion de la CCAC en novembre 2023, plus de 100 pays ont critiqué les conséquences humanitaires de l’utilisation d’armes incendiaires et ont appelé à l’ouverture de discussions pour répondre à ces préoccupations.
Les États parties au traité devraient lancer des consultations informelles qui, au minimum, évalueraient l’adéquation du Protocole III et chercheraient à créer des normes internationales plus strictes, a déclaré Human Rights Watch. Ils devraient tenir des discussions en dehors de la réunion du traité pour envisager des mesures nationales et internationales visant à résoudre les problèmes posés par les armes incendiaires.
« Les gouvernements devraient saisir cette occasion pour réitérer leurs inquiétudes concernant les armes incendiaires et discuter des moyens de renforcer le traité afin de mieux protéger les civils », a conclu Bonnie Docherty. « Une interdiction totale des armes incendiaires aurait sans aucun doute les plus grands avantages humanitaires. »
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06.11.2024 à 17:32
Human Rights Watch
(Washington) – L’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis pour un second mandat constitue une grave menace pour les droits humains dans ce pays et dans le monde, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Ces inquiétudes reflètent le bilan de Trump en matière de violations des droits humains au cours de son premier mandat, son adhésion aux partisans et à l’idéologie de la suprématie blanche, les politiques antidémocratiques et anti-droits extrêmes proposées par des groupes de réflexion dirigés par d’anciens collaborateurs, et ses promesses de campagne, notamment celles d’appréhender et d’expulser des millions d’immigrés, et d’exercer des représailles contre ses opposants politiques.
« Donald Trump n’a jamais caché son intention de violer les droits humains de millions de personnes aux États-Unis », a déclaré Tirana Hassan, directrice exécutive de Human Rights Watch. « Les institutions indépendantes et les groupes de la société civile, dont Human Rights Watch, devront faire tout ce qui est en leur pouvoir pour le tenir responsable, lui et son administration, des abus commis. »
Au cours du premier mandat de Trump en tant que président, de 2017 à 2021, Human Rights Watch a documenté son bilan en matière de violations des droits humains. Il s’agit notamment des politiques et des efforts visant à expulser les demandeurs d’asile et à séparer les familles à la frontière entre les États-Unis et le Mexique, à promouvoir des stéréotypes racistes concernant les communautés noires et d’autres personnes de couleur, à adopter des politiques punitives à l’égard de familles à faible revenu, par exemple en les privant de soins de santé, et à attiser l’insurrection violente du 6 janvier 2021, qui a tenté de défaire les résultats de la précédente élection démocratique.
Les promesses de Trump pendant sa campagne de 2024 suscitent davantage d’inquiétudes pour un second mandat, tant au niveau national qu’international. En 2023, il a déclaré qu’il ne serait pas un dictateur « sauf le premier jour » de son mandat. Trump a fait l’éloge à plusieurs reprises d’autocrates tels que Viktor Orban, Vladimir Poutine, et Kim Jong Un. Il a proposé des politiques qui affaibliraient les institutions démocratiques qui protègent les droits humains fondamentaux et réduiraient les contrôles sur l’autorité présidentielle. La menace d’abus de pouvoir est encore plus préoccupante en raison d’une récente décision de la Cour suprême des États-Unis qui accorde aux présidents une large immunité contre les poursuites pénales pour les actes officiels commis dans l’exercice de leurs fonctions.
Le Projet 2025 (Project 2025), un plan de gouvernance rédigé par des anciens conseillers et alliés politiques de Trump, détaille de nombreuses autres politiques abusives, souvent discriminatoires sur le plan racial, que la nouvelle administration pourrait adopter. Bien que Trump ait nié tout lien avec le projet 2025, nombre de ses déclarations font écho à ses prémisses.
Alors que le cycle de campagne présidentielle a été marqué par des discours hostiles envers les immigrés de la part des deux candidats, Trump a fait de la désignation des immigrés comme boucs émissaires un pilier central de sa campagne. Il a appelé à des politiques extrêmes, notamment la détention massive de migrants et les expulsions massives de millions de personnes, qui déchireraient des familles profondément enracinées aux États-Unis. Un tel programme entraînerait invariablement un profilage racial, conduirait à des abus accrus de la part des forces de l’ordre lors des rafles de masse et inciterait à des actions plus xénophobes dans le grand public. Pendant la campagne, Trump et son colistier, JD Vance, ont répandu des mensonges racistes sur les migrants haïtiens en particulier et fomenté la désinformation selon laquelle l’immigration entraîne une augmentation de la criminalité aux États-Unis.
Le droit à l’avortement sera de plus en plus menacé au cours du second mandat de Trump. Son insistance à ce que les États aient le pouvoir de bloquer l’accès aux soins de santé de base autorise des politiques qui violent les droits, mettent en danger la santé, entraînent des décès évitables et criminalisent les décisions privées en matière de soins de santé.
Trump a promis de riposter à ses ennemis politiques. Tout au long de ses discours et de ses interviews de campagne, il a utilisé une rhétorique de plus en plus dangereuse, qualifiant ses détracteurs d’« ennemi de l’intérieur » (« enemy from within » ). Trump a menacé d’ordonner au ministère américain de la Justice d’engager des poursuites contre le président Joe Biden et d’autres personnes qui, selon lui, s’opposent à son programme, notamment des responsables électoraux et des électeurs. Trump a également suggéré qu’il invoquerait la loi sur l’insurrection (« Insurrection Act ») pour déployer l’armée et la garde nationale américaines contre des personnes aux États-Unis exerçant leur droit de manifester.
En ce qui concerne la politique étrangère, au cours de son premier mandat, Trump a montré peu de respect pour les traités, les institutions multilatérales ou les efforts visant à protéger les droits humains des personnes vivant sous des gouvernements répressifs. Son administration s’est régulièrement opposée aux mesures favorables aux droits des femmes et aux progrès environnementaux dans le cadre des Nations Unies et a tenté de redéfinir et de limiter la définition des droits que le Département d’État américain devrait aider à protéger, dans le monde.
Trump a manifesté son opposition au financement de programmes d’aide humanitaire et d’efforts visant à protéger les civils dans les conflits internationaux et les crises majeures. Les partenariats probables avec des gouvernements qui violent les droits de l’homme au cours d’une nouvelle administration Trump risquent d’encourager ces gouvernements à nuire davantage aux personnes relevant de leur compétence et à perpétuer des cycles d’abus et d’immunité contre toute responsabilité dans le monde entier.
« Les institutions et les responsables respectueux des droits devront tenir bon pendant la deuxième administration Trump », a conclu Tirana Hassan. « Les dirigeants mondiaux, les fonctionnaires américains au niveau fédéral et étatique, les activistes et les citoyens ordinaires auront tous un rôle à jouer pour protéger les droits humains, et empêcher Trump de commettre les abus qu’il a promis de perpétrer. »
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06.11.2024 à 17:10
Human Rights Watch
(Nairobi) – Les forces de sécurité kenyanes ont enlevé, arrêté arbitrairement, torturé et tué des personnes considérées comme les leaders des manifestations contre le projet de loi de finances entre juin et août 2024, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Les agents de sécurité ont détenu les personnes enlevées sans respecter leurs droits légaux, dans des centres de détention illégaux situés dans divers lieux dont des bâtiments abandonnés et des forêts, et leur ont refusé l’accès à leurs familles ni à leurs avocats.
Les manifestations, organisées en grande partie par des personnes âgées de 18 à 35 ans, ont commencé des semaines plus tôt mais ont pris de l’ampleur après l’introduction du projet de loi de finances 202 au Parlement le 18 juin. Les manifestants ont exprimé leur indignation face aux dispositions qui augmenteraient les taxes sur les biens et services essentiels pour atteindre les objectifs de recettes du Fonds monétaire international. Le 25 juin vers 14 h 30, une foule estimée à 3 000 - 4 000 personnes par l’équipe de sécurité du Parlement a franchi la clôture du Parlement ; des agents de la police antiémeute ont alors tiré directement sur la foule, tuant plusieurs personnes. Certains manifestants ont forcé des barrages de police et ont pénétré dans le Parlement par l’entrée arrière, détruisant des meubles et d’autres objets.
« La répression meurtrière en cours contre les manifestants ternit encore davantage le bilan déjà lamentable du Kenya en matière de droits humains », a déclaré Otsieno Namwaya, directeur adjoint de la division Afrique à Human Rights Watch. « Les autorités devraient mettre un terme aux enlèvements, dénoncer publiquement les discours qui tentent de criminaliser les manifestations pacifiques et garantir une enquête rapide et des poursuites équitables contre les agents de sécurité impliqués de manière crédible dans les abus. »
Le président William Ruto a qualifié l’action des manifestants d’« invasion » et de trahison. Le 26 juin, le président a retiré le projet de loi, mais la police continue de traquer et d’enlever des activistes utilisateurs de médias sociaux qui sont soupçonnés d’être des leaders du mouvement, ainsi que des manifestants dont les visages ont été filmés par des caméras de vidéosurveillance au Parlement.
Entre août et septembre, Human Rights Watch a mené des entretiens avec 75 personnes dans les quartiers de Mathare, Kibera, Rongai, Mukuru Kwa Njenga et Githurai à Nairobi, la capitale kenyane. Parmi ces personnes figuraient d’anciennes personnes enlevées, des témoins, des journalistes, des membres du personnel parlementaire, des proches de personnes enlevées ou disparues, d’autres manifestants, des militants des droits de l’homme et des policiers.
Ces personnes ont décrit comment, plusieurs semaines après les manifestations, des agents de sécurité en civil, le visage dissimulé, pourchassaient encore les personnes considérées comme des leaders des manifestations, les faisaient disparaître de force et les tuaient. Des témoins et des survivants d’enlèvements ont déclaré que les ravisseurs conduisaient des voitures banalisées dont les plaques d’immatriculation étaient changées à plusieurs reprises, ce qui rendait difficile la recherche des propriétaires.
Les recherches de Human Rights Watch montrent que les agents étaient en grande partie issus de la Direction des enquêtes criminelles, avec le soutien de l’Unité de déploiement rapide, des services de renseignements militaires, de l’Unité de police antiterroriste et du Service national de renseignement.
Les personnes enlevées ont déclaré avoir été arrêtées à leur domicile, à leur travail et dans la rue, et détenues pendant de longues périodes sans inculpation, alors que la loi kenyane exige que les suspects soient traduits en justice dans les 24 heures.
Un manifestant de 28 ans a déclaré avoir été interpellé lors des manifestations du 27 juin par des hommes en civil au visage couvert. Il a été brièvement détenu au commissariat central de Nairobi, puis emmené avec d’autres personnes dans un bâtiment abandonné à un endroit qu’il n’a pas reconnu. « L’endroit semblait avoir été utilisé pour la torture, avec des taches de sang sur le sol », a-t-il déclaré. « Environ huit policiers armés m’ont jeté par terre et m’ont frappé à coups de crosse sur les côtes et m’ont donné des coups de pied pendant environ deux heures jusqu’à ce que je saigne. Ils ont menacé de me tuer en me demandant : "Qui finance cette affaire ? Qui vous soutient, vous les manifestants ? " »
En août, la Commission nationale des droits de l’homme du Kenya, financée par l’État, a déclaré avoir documenté au moins 73 enlèvements. Mais trois hauts responsables ont déclaré à Human Rights Watch qu’ils avaient cessé de publier des informations à cause des menaces et des pressions exercées par de hauts responsables du gouvernement. Si certaines des personnes enlevées ont été libérées, des proches inquiets d’autres personnes disparues, qu’ils soupçonnent d’avoir été enlevées par les forces de sécurité, continuent de les rechercher. Les corps de certaines des personnes portées disparues ont été retrouvés dans des rivières, des forêts, des carrières abandonnées et des morgues ; ils présentaient des signes de torture, certains étant mutilés et démembrés. Plusieurs personnes interrogées par Human Rights Watch, dont d’anciens détenus, ont déclaré que la police les avait " de tenter de renverser le gouvernement et menacé de les tuer s’ils ne révélaient pas l’identité des dirigeants et des bailleurs de fonds des manifestations.
Plusieurs victimes ont déclaré que les policiers les avaient frappées, giflées, frappées à coups de pied et battues à coups de fouet en caoutchouc, de bâton, de tuyaux en plastique et, dans certains cas, à coups de crosse d’armes à feu. Au moins deux personnes ont déclaré que les policiers avaient utilisé des pinces pour leur arracher les poils pubiens et les ongles pendant les interrogatoires. Presque toutes les personnes précédemment détenues ont déclaré que la police leur avait refusé de l’eau et de la nourriture et avait demandé aux familles de payer entre 3 000 et 10 000 shillings kenyans (entre 23 et 77 dollars US) de pots-de-vin pour leur libération.
Certains membres de familles qui ont été témoins d’enlèvements ont déclaré qu’ils n’avaient pas pu localiser leurs proches enlevés par des personnes qu’ils pensaient être des policiers en civil. D’autres ont déclaré avoir vu des policiers qui ont abattu leurs proches et emporté les corps.
Un homme de 25 ans a déclaré avoir vu des hommes en civil, qu’il croyait être des policiers, alors qu’ils communiquaient par radio, enlever son frère de 28 ans, Brian Kamau, dans le quartier de Githurai : « Il s’agissait de trois hommes en civil, portant des cagoules. Ils ont donné des coups de pied, des coups de poing et marché sur Brian avant de le pousser de force dans une voiture Subaru et de s’enfuir à toute vitesse. C’est la dernière fois que je l’ai vu. »
Les autorités devraient fournir des informations aux familles sur le lieu où se trouvent leurs proches disparus, a déclaré Human Rights Watch. En vertu de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, nul ne devrait être soumis à une disparition forcée et aucune circonstance exceptionnelle, même un état ou une menace de guerre, ne peut être invoquée comme justification. Une disparition forcée est définie comme l’arrestation, la détention ou l’enlèvement de personnes par les forces de l’État, ou avec l’autorisation ou le soutien de l’État, suivi du refus de reconnaître la détention ou de donner des informations sur le sort ou le lieu où se trouve la personne lorsqu’on le lui demande.
Les autorités kenyanes devraient immédiatement mettre un terme à ces abus et faciliter les enquêtes sur les enlèvements et les meurtres de manifestants par un tribunal indépendant composé de Kenyans et de non-Kenyans, y compris des avocats, des juges et des enquêteurs. Les partenaires internationaux du Kenya devraient faire pression sur les autorités pour qu’elles respectent le droit de manifester pacifiquement et créent un environnement propice à des enquêtes indépendantes.
En vertu des Principes de base des Nations Unies sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois, la police et les autres responsables de l’application des lois doivent toujours s’identifier et éviter de recourir à la force contre des manifestants pacifiques ou limiter cette force au minimum nécessaire. La force létale ne doit être utilisée que lorsque cela est strictement nécessaire pour prévenir une menace imminente pour la vie. La police ne doit pas non plus faire un usage excessif de la force contre les détenus qu’elle garde.
« Le gouvernement kenyan devrait mettre fin à la récurrence de l’application abusive de la loi qui caractérise la réponse aux manifestations au Kenya depuis deux décennies », a conclu Otsieno Namwaya. « Le président Ruto devrait publiquement désavouer les abus de la police et garantir des enquêtes et des poursuites indépendantes pour ces abus. »
Suite du communiqué en anglais, comprenant des informations et recommandations plus détaillées.
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04.11.2024 à 07:00
Human Rights Watch
Lors d'un discours prononcé à Kisangani le 23 octobre, le président de la République démocratique du Congo, Félix Tshisekedi, a proposé des mesures visant à modifier la constitution du pays, laissant planner la possibilité d’une modification de la limitation du nombre de mandats présidentiels. Félix Tshisekedi s'était auparavant engagé à « respecter scrupuleusement [s]es obligations constitutionnelles ».
À Kisangani, Félix Tshisekedi a qualifié la constitution actuelle de « dépassé[e] » et « pas adaptée aux réalités du pays ». Il a annoncé son intention de mettre en place une commission chargée de rédiger une nouvelle constitution en 2025, tout en précisant qu'il appartiendrait au peuple de décider de l’éventuelle suppression de la limitation du nombre de mandats présidentiels. Des représentants du gouvernement, dont le ministre de la Communication et des Médias, ont publiquement exprimé leur soutien à une telle révision. Le 10 octobre, le Secrétaire général de l'Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), le parti au pouvoir, a demandé à ses membres de promouvoir la révision de la constitution auprès des sympathisants du parti.
La question de la limitation des mandats présidentiels a une résonance historique particulière pour les Congolais. L’article 220 de la constitution de 2006, qui avait été révisée sous le défunt président Joseph Kabila, interdit toute modification du « nombre et [de] la durée des mandats du Président de la République ». Joseph Kabila avait néanmoins réussi à se maintenir au pouvoir au-delà de la fin de son deuxième et dernier mandat prévu par la constitution en décembre 2016 à travers la répression et la violence. À l'époque, Félix Tshisekedi faisait partie de l'opposition politique qui exhortait Joseph Kabila à respecter la constitution, y compris en ce qui concernait les mandats présidentiels.
De nombreux groupes de défense des droits et autres organisations de la société civile, ainsi que l'opposition politique, ont critiqué cette annonce, craignant que le président Tshisekedi ne cherche à contourner la limite constitutionnelle de deux mandats. Il a été réélu pour un second mandat en décembre 2023, à l'issue d'une élection entachée de violences.
Depuis lors, le gouvernement a réprimé ses détracteurs et a de plus en plus restreint les libertés fondamentales, dont la liberté d'expression, et a réprimé des manifestations pacifiques. Au moins trois opposants politiques et deux défenseurs des droits humains sont actuellement détenus arbitrairement.
Toutes les constitutions peuvent être sujettes à des amendements. Mais toute modification de la constitution congolaise doit respecter les obligations du pays en vertu du droit international des droits humains, notamment en garantissant le droit de chaque citoyen à choisir ses dirigeants dans le cadre d'élections périodiques et équitables.
02.11.2024 à 05:00
Human Rights Watch
(Istanbul, 2 novembre 2024) – Le parlement turc devrait rejeter un projet d’amendement législatif qui vise à élargir la définition de l’espionnage de manière si vague que cela pourrait criminaliser le travail légitime des défenseurs des droits humains, des journalistes et d’autres acteurs de la société civile, ont déclaré aujourd’hui Human Rights Watch et la Commission internationale de juristes (CIJ).
Le Parlement turc procèdera prochainement à un vote au sujet d’un projet d’amendement législatif portant sur les « crimes contre la sécurité ou les intérêts politiques de l’État ». Cet amendement ajouterait au Code pénal turc un nouvel article, 339A, créant une version aggravée du « crime contre la sécurité de l’État ». L’amendement prévoit que si un crime contre la sécurité de l’État turc ou contre « ses intérêts politiques intérieurs ou extérieurs » est commis « dans les intérêts stratégiques ou sur ordre d’un État ou d’une organisation étrangère », le contrevenant peut être condamné à une peine allant de trois ans à 24 ans de prison.
« Le projet d’amendement au Code pénal turc permettrait au gouvernement de critiquer des organisations légitimes de défense des droits humains, des médias et d’autres acteurs de la société civile en les qualifiant d’espions ou d’ennemis de l’État, discréditant et même criminalisant ainsi leur travail », a déclaré Hugh Williamson, directeur de la division Europe et Asie centrale à Human Rights Watch. « Le parlement turc devrait rejeter cet amendement vaguement formulé, qui n’a pas sa place dans un pays démocratique et qui représente un risque sérieux pour les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion. »
Les organisations de défense des droits humains, les médias et d’autres groupes de la société civile en Turquie ont exprimé de vives inquiétudes quant à la menace que ce projet d’amendement représente pour leur travail légitime, avec le risque qu’ils soient confrontés à de fausses accusations d’espionnage pour le compte d’autres États ou d’organisations étrangères.
Selon le Code pénal turc, les infractions existantes dans le chapitre « Crimes contre les secrets d’État et espionnage » (articles 326 à 339) visent l’obtention, la destruction ou la diffusion de secrets et d’informations d’État. Le nouvel article, 339A, ne crée pas d’infraction autonome, mais serait plutôt combiné avec des poursuites portant sur un autre crime. Les poursuites dans tous les cas sont soumises à l’autorisation du ministre de la Justice.
La note explicative officielle accompagnant l’amendement indique que la catégorie des « crimes contre les intérêts politiques nationaux ou extérieurs » pourrait englober « d’autres intérêts tels que les intérêts économiques, financiers, militaires, de défense nationale, de santé publique, de sécurité publique, technologiques, culturels, de transport, de communication, cybernétiques, d’infrastructures critiques et énergétiques », soit une catégorie beaucoup plus large que les infractions d’espionnage existantes.
Il est clair qu’ainsi un procureur turc accusant une personne de certaines infractions pourrait également l’accuser d’avoir agi dans l’intérêt stratégique d’une puissance étrangère, en vertu du nouvel article. Par exemple, un procureur enquêtant sur l’auteur d’un rapport international sur les droits humains soupçonné d’avoir « insulté le président », au motif que son rapport accusait le président d’être responsable de violations des droits humains, pourrait (en vertu de l’amendement) éventuellement l’accuser également d’avoir commis un crime « contre la sécurité ou les intérêts politiques de l’État ».
L’amendement proposé est incompatible avec les obligations de la Turquie en vertu de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), en particulier en ce qui concerne les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion. Le projet d’article est également trop vague et trop large pour répondre au principe de légalité inscrit dans le droit international. Selon ce principe, pour être valide, une loi doit être suffisamment claire pour qu’une personne moyenne puisse raisonnablement prévoir les conséquences de ses actes et s’ils risquent d’être en violation de la loi. Le projet de rajout d’un article 339A au Code pénal turc ne répond pas à ce critère à bien des égards.
Par exemple, les activités qui pourraient constituer des « crimes contre des intérêts politiques nationaux ou extérieurs » ne sont pas définies et donc imprévisibles, tout comme la signification précise de la formulation « dans les intérêts stratégiques d’un État étranger ou d’une organisation étrangère ». Le manque de prévisibilité, et donc de légalité, donnerait aux autorités turques une grande latitude pour utiliser la loi de manière arbitraire contre des groupes de la société civile indépendants et/ou ayant critiqué le gouvernement.
La formulation vague du projet d’article 339A laisse également entrevoir la possibilité que des organisations de la société civile ou des médias locaux en Turquie recevant légalement des fonds étrangers, et donc soumis à des exigences de transparence en matière de rapports et de comptabilité, puissent tomber sous le coup de la nouvelle loi. De tels groupes pourraient être accusés d’agir « selon les intérêts stratégiques d’un État étranger ou d’une organisation étrangère ».
« Étant donné que la Turquie utilise régulièrement son vaste arsenal de lois vaguement définies concernant le terrorisme et la sécurité de l’État pour criminaliser l’expression, le rassemblement et l’association pacifiques, il est inacceptable que le gouvernement turc soit prêt à créer de nouveaux outils criminels pour cibler le travail de défense des droits humains, le journalisme et d’autres activités de la société civile », a déclaré Temur Shakirov, directeur par intérim du programme Europe et Asie centrale à la Commission internationale de juristes. « Il est essentiel que les parlementaires qui se prononceront sur ce nouveau projet le rejettent, en raison de sa formulation vague et sa large portée. »
La protection et la promotion des droits humains sont des obligations juridiques solennelles assumées par la Turquie et sont donc nécessairement dans l’intérêt de l’État. Pourtant, la Turquie a depuis longtemps l’habitude de considérer le travail de défense des droits humains comme hostile aux intérêts prétendument étatiques, et de criminaliser le travail visant à promouvoir les droits humains, ont déclaré Human Rights Watch et la CIJ.
Si l’« intérêt stratégique » d’une organisation internationale de défense des droits humains est de protéger les droits humains dans tous les pays, y compris la Turquie, le projet d’amendement présente le risque qu’un professionnel du domaine des droits humains qui critique les actions du gouvernement turc pour des violations puisse être lui-même poursuivi pénalement simplement pour avoir fait son travail ; une telle situation violerait le droit international et serait totalement intenable, ont noté les organisations.
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Articles
Figaro/AFP Entrevue
01.11.2024 à 05:00
Human Rights Watch
(Istanbul, 1er novembre 2024) – La détention illégale en Turquie du défenseur des droits humains Osman Kavala est due au fait que les procureurs et les tribunaux de ce pays opèrent sous le contrôle politique du gouvernement, ont déclaré trois organisations de défense des droits humains, dont Human Rights Watch, dans une intervention de tiers (« third-party intervention ») déposée auprès de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) concernant cette affaire. Les trois organisations ont appelé à la libération immédiate d’Osman Kavala et à l’annulation de sa condamnation, conformément aux précédents arrêts contraignants de la Cour européenne.
Osman Kavala est emprisonné depuis sept ans, sa détention ayant débuté le 1er novembre 2017 ; le 25 avril 2022, il a été condamné a la prison à vie après avoir être reconnu coupable de « tentative de renversement du gouvernement », accusation infondée, à l’issue d’un procès manifestement inéquitable. Osman Kavala se trouve toujours en prison, malgré deux arrêts contraignants de la CEDH (rendus le 10 décembre 2019 et le 11 juillet 2022), qualifiant sa détention d’« arbitraire » et basée sur des « motifs politiques ». Osman Kavala purge une peine de prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle ; quatre autres personnes condamnées avec lui purgent des peines de prison de 18 ans pour leur rôle présumé dans les manifestations de masse de 2013, déclenchées par un plan de transformation urbaine autour du parc Gezi d’Istanbul.
En janvier 2024, les avocats d’Osman Kavala ont soumis à la CEDH une nouvelle requête qui évoquait de nombreuses violations de ses droits depuis l’arrêt rendu par la Cour le 10 décembre 2019 ; selon cet arrêt, Kavala avait été condamné en l’absence d’un « soupçon raisonnable qu’il ait commis une infraction », et que sa détention était plutôt motivée par des « motifs politiques » visant à « réduire [Kavala] au silence ».
Dans leur requête de janvier, les avocats d’Osman Kavala ont souligné le caractère illégal de sa détention qui se poursuit. Selon la requête, les violations des droits d’Osman Kavala – droit à un procès équitable, droits à la liberté d’expression, de réunion et d’association – ainsi que la violation du principe de légalité conforme à l’État de droit, démontrent que les autorités turques ont continué à poursuivre leur objectif politique de réduire Kavala au silence et de le punir en raison de ses activités en tant que défenseur des droits humains. La requête rappelle également que les poursuites engagées contre lui et sa condamnation à perpétuité, sans possibilité de libération conditionnelle, violent l’interdiction des traitements inhumains et dégradants et de la torture (stipulée par l’article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme). La CEDH devrait rendre un nouvel arrêt dans les prochains mois.
La CEDH a accepté que Human Rights Watch, la Commission internationale de juristes (CIJ) et Turkey Litigation Support Project soumettent une « intervention de tiers » dans cette affaire. Le 16 septembre, ces trois organisations ont conjointement soumis ce document afin de fournir des informations et un contexte supplémentaires pertinents que la Cour pourra prendre en considération lors de l’examen de la requête déposée par les avocats d’Osman Kavala. L’intervention de tiers souligne la tendance par les autorités turques à éviter la mise en œuvre des arrêts de la CEDH dans des affaires considérées comme politiquement sensibles, notamment celles impliquant des dissidents présumés.
Les trois organisations de défense des droits humains soulignent également les caractéristiques suivantes du système national turc : la mainmise des partis politiques au pouvoir sur le pouvoir judiciaire ; le manque d’indépendance du Conseil des juges et des procureurs, qui est devenu un mécanisme de consolidation d’une influence indue sur le pouvoir judiciaire ; de graves préoccupations concernant l’indépendance et l’efficacité de la Cour constitutionnelle turque ; et le mépris persistant par les autorités judiciaires turques à l’égard des arrêts de la CEDH, et des normes de jurisprudence établies.
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Articles
OLJ
Sur X
https://x.com/hrw_fr/status/1853130308352151648
Vidéo de 2019 (sous-titres via cc)
Play Video31.10.2024 à 02:15
Human Rights Watch
Le gouvernement de la République démocratique du Congo semble avoir entrepris de remanier un plan visant à vendre aux enchères des droits de forage pétrolier et gazier dans 30 blocs répartis dans tout le pays. Le 11 octobre, le ministre congolais des Hydrocarbures avait annoncé avoir annulé la vente aux enchères de 27 concessions pétrolière, invoquant des dépôts de candidature tardifs, des offres inappropriées ou irrégulières et un manque de concurrence. Mais cette annonce n’a fait aucune mention de trois blocs de forage de gaz.
L’annonce de l’annulation avait été reçue avec soulagement par les organisations de défense de l’environnement et des droits humains, dans le pays et à l’étranger. En juillet 2022, le gouvernement de la RD Congo avait annoncé qu’il allait commencer à vendre aux enchères les droits de forage dans les 30 blocs. Les activités pétrolières actuelles de la RD Congo se sont, jusqu’à présent, limitées à la façade atlantique de l’ouest du pays, sur la côte et au large. Mais l’appel d’offres de 2022 a créé la possibilité d’une nouvelle production massive de combustibles fossiles à travers de vastes étendues de forêts et de tourbières dont l’existence est critique en matière de climat. Nombre de ces zones constituent l’habitat de communautés rurales, parmi lesquelles des peuples autochtones, qui ont affirmé n’avoir jamais été consultées.
Aggravant ces préoccupations, le gouvernement congolais a annoncé en mai 2023 qu’il avait entamé des négociations avec l’Ouganda voisin en vue de relier certaines concessions pétrolières de l’est de la RD Congo à l’East African Crude Oil Pipeline (EACOP), un oléoduc de 1 443 kilomètres de long en cours de construction afin de relier les champs pétroliers de l’ouest de l’Ouganda à la côte tanzanienne sur l’océan Indien. Human Rights Watch a documenté des violations des droits humains liées au processus d’acquisition de terres de l’EACOP en Ouganda, notamment une indemnisation inadéquate des propriétaires fonciers, ainsi que la répression exercée par le gouvernement ougandais à l’encontre des activistes opposés aux combustibles fossiles et des défenseurs de l’environnement.
L’annonce du ministre des Hydrocarbures n’a pas calmé ces inquiétudes. Environ 135 organisations — dont plus de la moitié sont congolaises — se sont jointes à une campagne dénommée « Notre terre sans pétrole », qui appelle à mettre fin de manière définitive à ces plans. Comme ces organisations l’ont souligné dans une déclaration diffusée aujourd’hui, l’annulation annoncée par le ministre n’est que partielle, le gouvernement ayant signalé qu’un nouveau processus d’appel d’offres « restreint » devait être lancé prochainement. Aucun autre détail n’a été fourni.
L’expansion massive de la production de pétrole et de gaz en RD Congo menacerait les droits humains et aggraverait la crise climatique. La campagne « Notre terre sans pétrole » a raison d’appeler le gouvernement à annuler définitivement tous les nouveaux projets pétroliers et gaziers et d’exhorter à mettre fin à toute nouvelle initiative dans ce secteur.