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14.04.2025 à 11:52

« Nous, journalistes français, nous déclarons solidaires de nos collègues de Gaza »

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Les bombardements israéliens sur la bande de Gaza ont tué plus de deux cents journalistes palestiniens en dix-huit mois. Un collectif d'organisations professionnelles françaises, dont Orient XXI fait partie, a dénoncé, dans une tribune, cette hécatombe et le black-out médiatique qu'Israël organise sciemment. En voici des extraits. Ce collectif organise mercredi 16 avril, à 18h, deux rassemblements simultanés : devant l'Opéra Bastille, à Paris, et sur le Vieux-Port, à Marseille. […] En un (…)

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Texte intégral (901 mots)

Les bombardements israéliens sur la bande de Gaza ont tué plus de deux cents journalistes palestiniens en dix-huit mois. Un collectif d'organisations professionnelles françaises, dont Orient XXI fait partie, a dénoncé, dans une tribune, cette hécatombe et le black-out médiatique qu'Israël organise sciemment. En voici des extraits.
Ce collectif organise mercredi 16 avril, à 18h, deux rassemblements simultanés : devant l'Opéra Bastille, à Paris, et sur le Vieux-Port, à Marseille.

[…] En un an et demi de guerre dans l'enclave côtière, les opérations israéliennes ont causé la mort de près de 200 professionnels des médias palestiniens, selon les organisations internationales de défense des journalistes, telles Reporters sans frontières, le Comité pour la protection des journalistes et la Fédération internationale des journalistes, en lien avec le Palestinian Journalists Syndicate. Dans l'histoire de notre profession, tous conflits confondus, c'est une hécatombe d'une magnitude jamais vue, comme le démontre une récente étude de l'université américaine Brown.

Protéger nos confrères et consœurs palestiniens

[...] Tous ces confrères et consœurs portaient un casque et un gilet pare-balles, floqué du sigle « Press », les identifiant clairement comme des professionnels des médias. Certains avaient reçu des menaces téléphoniques de responsables militaires israéliens ou bien avaient été désignés comme des membres de groupes armés gazaouis par le porte-parole de l'armée, sans que celui-ci fournisse des preuves crédibles à l'appui de ces accusations. Autant d'éléments qui incitent à penser qu'ils ont été délibérément visés par l'armée israélienne.

[…] En tant que journalistes, viscéralement attachés à la liberté d'informer, il est de notre devoir de dénoncer cette politique, de manifester notre solidarité avec nos collègues palestiniens et de réclamer, encore et toujours, le droit d'entrer dans Gaza. Si nous demandons cela, ce n'est pas parce que nous estimons que la couverture de Gaza est incomplète en l'absence de journalistes occidentaux. C'est pour relayer et protéger, par notre présence, nos confrères et consœurs palestiniens qui font preuve d'un courage inouï, en nous faisant parvenir les images et les témoignages de la tragédie incommensurable en cours à Gaza.

Signataires : les syndicats de journalistes SNJ, SNJ-CGT et CFDT-Journalistes, Reporters sans frontières, le prix Albert-Londres, la Fédération internationale des journalistes, le collectif Reporters solidaires, la commission journalistes de la SCAM, les sociétés de journalistes et les rédactions des médias suivants : AFP ; Arrêt sur images ; Arte ; BFMTV ; Blast ; Capital  ; Challenges ; Le Courrier de l'Atlas ; Courrier International ; Le Figaro ; France 2 ; France 3 rédaction nationale ; France 24 ; FranceInfo TV et franceinfo.fr ; L'Humanité ; L'Informé ; Konbini ; LCI ; Libération ; M6 ; Mediapart ; Le Monde ; Le Nouvel Obs ; Orient XXI ; Politis ; Le Parisien ; Premières Lignes TV ; Radio France ; Radio France Internationale ; RMC ; Saphirnews ; Sept à Huit ; 60 millions de consommateurs ; Télérama ; TF1 ; La Tribune ; TV5 Monde ; L'Usine nouvelle ; La Vie.

Collectif

14.04.2025 à 06:00

Kfar Kila, Liban. « Les Israéliens ont tout tué, même la peur qui était en nous »

Laurent Perpigna Iban
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Si, depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, le 27 novembre, un semblant de vie a repris au Sud-Liban, les villages les plus proches de la ligne de démarcation, eux, sont maintenus dans la guerre. À Kfar-Kila, la ville a été rayée de la carte par l'armée israélienne qui entrave tout processus de reconstruction. Orient XXI a pu se rendre dans ce Liban où la paix ne reste qu'un lointain mirage. De notre envoyé spécial. « Mon village, celui de ma famille sur des générations, n'est (…)

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Texte intégral (6581 mots)

Si, depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, le 27 novembre, un semblant de vie a repris au Sud-Liban, les villages les plus proches de la ligne de démarcation, eux, sont maintenus dans la guerre. À Kfar-Kila, la ville a été rayée de la carte par l'armée israélienne qui entrave tout processus de reconstruction. Orient XXI a pu se rendre dans ce Liban où la paix ne reste qu'un lointain mirage.

De notre envoyé spécial.

« Mon village, celui de ma famille sur des générations, n'est plus. Ils l'ont rasé. Et même si Kfar Kila a connu des périodes sombres, notamment durant l'occupation israélienne, jamais je n'aurais imaginé le voir ainsi. Cela me brise le cœur, si mes parents voyaient cela… »
Hassan Jamil Shami, 65 ans, se tient debout dans ce qui semble avoir été jadis la rue principale de Kfar Kila, mais qui n'est plus qu'un océan de poussière et de gravats, dans lequel le bitume s'est noyé. Pour lui, ce village — qui comptait avant le 7 octobre 2023 quelque 5 000 habitants — était bien plus qu'un lieu de naissance ou qu'une adresse sur son état-civil : c'était la bourgade de toute une vie et une partie de son ADN. Il explique, la gorge nouée :

Notre terre, nous avons appris à l'aimer dans ses pires heures, en réparant les dommages qui lui ont été faits lors des différentes guerres, quand elle a été occupée par l'ennemi, puis libérée. Je suis revenu juste après le cessez-le-feu, jamais je n'aurais imaginé être confronté à ça.

Un drapeau flotte devant un bâtiment effondré, sur un sol poussiéreux.
Dans ce qui semblait être avant le 7 octobre 2023 l'artère principale de Kfar Kila, tout n'est que désolation. Il ne reste que des bâtiments en ruines sur lesquels ont été accrochés des portraits de combattants du Hezbollah morts au combat.

L'homme possédait trois maisons dans le village ; deux sont à terre, une autre sens dessus-dessous. C'est dans une pièce éventrée de cette dernière, sans murs ni fenêtres, et sur un matelas posé au sol, qu'il tente, la nuit venue, de trouver le sommeil. Un retour temporaire de quelques jours en forme d'épreuve qu'il s'impose régulièrement depuis le 27 novembre 2024 : « Il n'y a pas d'eau, pas d'électricité, pas de nourriture. Personne ne peut vivre ici. Les Israéliens ont voulu nous rayer de la carte, et pire encore, empêcher la vie de pouvoir renaître ici. »

Terrains dévastés, bâtiments en ruines, montagnes en arrière-plan. Atmosphère désolée.
Kfar Kila n'a pas seulement été bombardé : il a été rendu totalement inhabitable par l'armée israélienne. Tout est à reconstruire.

« Ils ont tout volé »

L'homme salue un petit groupe de sexagénaires, eux aussi de passage. Difficile de savoir ce qu'ils sont venus faire réellement : à Kfar Kila, les maisons ne sont pas seulement éventrées par les frappes aériennes, elles ont été réduites à l'état de ruines. Pour beaucoup, parvenir à récupérer des effets personnels dans cette mer de gravats relève du miracle.

« C'est mon village depuis toujours, c'est pour cela que je viens ici, pour être près de lui. Je m'en veux d'avoir dû l'abandonner pendant la guerre, regardez ce qu'ils [les soldats israéliens] en ont fait », commente Abddallah Mraae, comme s'il parlait d'un proche en fin de vie.

Ruines de bâtiments effondrés, débris et végétation dans un paysage dévasté.
Sur une maison qui n'a pas été rasée, un graffiti laissé par des locaux : «  Nous nous vengerons  ».

Cet agriculteur d'une trentaine d'années estime ses pertes à environ 100 000 dollars (88 030 euros) : « 500 chèvres, 200 acres d'agriculture, et je ne vous parle même pas de nos maisons. » Il montre un matelas posé dans un édifice brinquebalant, mais toujours — pour l'heure — debout : « Moi, je dors ici en ce moment. Les murs tiennent bon », s'amuse-t-il. Avant, rongé par la colère, de reprendre :

Les chèvres que nous avions sur un terrain à Marjayoun ont été visés délibérément depuis le ciel. Il n'y avait rien autour du troupeau, aucun bâtiment, elles sont toutes mortes bombardées. Quelle autre armée au monde bombarde des chèvres ?

À ses côtés, une personne ayant requis l'anonymat le coupe : « Ils ont tout volé, même des chaises en plastique et le générateur d'électricité de la municipalité. » Il relève son pantalon pudiquement, et pointe une blessure à peine suturée. « J'ai voulu aller voir près du mur l'état de mes oliviers, les soldats israéliens m'ont tiré une balle dans la jambe. »

Des hommes assis devant un bâtiment partiellement détruit, entourés de débris.
Dans un des seuls bâtiments encore debout, des locaux ont installé des matelas : ceux qui rentrent pour quelques jours à Kfar Kila y trouvent un peu de repos la nuit venue.

Le groupe se montre prudent : selon eux, les tireurs, embusqués le long du mur de séparation1, visent régulièrement les personnes qui s'approchent à quelques centaines de mètres d'eux. Un drone d'observation vrombit dans le ciel, il suit nos moindres faits et gestes. Un homme, hilare, se coiffe d'une perruque. Depuis le retour dans le village, tous ont appris à évoluer sous vidéosurveillance constante.

Zone de conflit avec un mur, des barbelés et un soldat en arrière-plan.
L'armée israélienne n'est pas bien loin : embusqués derrière des protections sur le versant libanais du mur de séparation, les soldats surveillent les moindre faits et gestes de la population, appuyés par des drones d'observation qui vrombissent dans le ciel. À quelques mètres, des soldats libanais stationnent, ainsi que les troupes de la Finul.

Tireurs en embuscade

Un peu plus loin, le mur de séparation vient lécher des bâtiments en ruines, où de nombreux graffitis en hébreu sont visibles. Nous sommes au cœur d'une « zone tampon » de quelques dizaines de mètres, qui offre un panorama pour le moins surprenant : dans un triangle improvisé se regardent en chiens de faïence les militaires israéliens embusqués derrière de lourdes protections, les troupes dont la Force intérimaire des Nations unies (Finul) retranchées dans leur base, et quelques soldats libanais, avachis sur un tas de gravats en plein soleil.

Ruines d
Partout, des marques de l'occupation israélienne sont encore visibles : les soldats ont laissé des mots aux habitants libanais.

Un véhicule avec à son bord une famille libanaise passe à proximité. La tension monte d'un cran : par la fenêtre, des femmes font avec leurs doigts le signe de la victoire, destiné aux Israéliens qui scrutent la scène à la jumelle. Le drone, toujours présent, descend dangereusement.

Des débris de bâtiments effondrés, des personnes marchent sur les ruines.
Les habitants de Kfar Kila insistent : leur ville n'est pas seulement inhabitable, tout processus de reconstruction est totalement bloqué par l'armée israélienne. Depuis le cessez-le-feu, des dizaines de personnes ont été blessés par des snipers israéliens, et au moins quatre ont trouvé la mort.

Au bout de la rue, dans une zone supposée à l'abri des potentiels tirs israéliens, un habitant, ayant lui aussi requis l'anonymat, commente : « Je crains que les Israéliens ne finissent par revenir, rapidement. Mais je n'ai pas peur. Nous sommes sur nos terres et nous ne menaçons personne. »

Il poursuit :

Kfar Kila est laissée pour compte, nous le savons. À cinq kilomètres d'ici, l'armée libanaise a fait beaucoup d'efforts, aide la population à se réinstaller, tente de régler les problèmes d'électricité… Nous avons souvent été critiques envers eux, alors il faut le reconnaître. Mais ici, il semble que l'endroit soit trop sensible, et à part ces quelques soldats, personne ne nous est venu en appui.

Abdallah Mrae le coupe :

Nous sommes totalement livrés à nous-mêmes. Pour avoir de la nourriture ou de l'eau, il faut aller à Marjayoun, à une dizaine de kilomètres. Quant à la reconstruction, juste pour mettre une tente, il faut s'enregistrer auprès des autorités libanaises. C'est un processus compliqué qui n'avance pas. Il y a clairement une volonté politique de maintenir un statu quo. Des centaines de préfabriqués devaient être livrés, ils ne sont pas arrivés. De toute évidence, les Israéliens font pression sur l'armée libanaise.

Son camarade reprend :

Je suis prêt à m'installer dès ce soir dans une tente. De toute façon, nous reviendrons. Nous avons été occupés jusqu'en 20002, puis nous avons connu 20063. Comme toujours, nous reconstruirons Kfar Kila. Le problème, c'est que les snipers israéliens continuent de sévir, et cela rend notre présence dangereuse. Tout peut arriver à n'importe quel moment.

Des ruines et des collines, avec un mur et des graffitis au loin.
Le contraste est saisissant : au premier plan, Kfar Kila, en ruines. De l'autre côté du mur, le mont Tfiya, appartenant à la ville israélienne de Metoula, laisse apercevoir des habitations intactes.

L'influence persistante du Hezbollah

Bien qu'officiellement, le Hezbollah n'exerce plus aucun contrôle sur la zone, ce n'est un secret pour personne, le parti de Dieu est enraciné dans le Sud-Liban depuis trop longtemps pour perdre sa mainmise, et encore moins sa popularité. Partout dans Kfar Kila, des drapeaux du parti, plantés au milieu des gravats, saturent le paysage.

« La résistance a donné plus de sang que n'importe qui pour protéger nos frontières. Si les combattants n'avaient pas freiné l'avancée terrestre israélienne, ils seraient remontés jusqu'à Dahieh [la banlieue sud de Beyrouth] », clame un habitant.

Des personnes en deuil dans un cimetière, avec des portraits et des bouquets de fleurs.
Dans la partie du cimetière réservée aux combattants du Hezbollah, des familles pleurent leurs proches tombés au combat depuis le 8 octobre 2023, et l'ouverture d'un front de soutien au Hamas palestinien par la formation politico-militaire chiite. À quelques mètres, une femme est inconsolable : elle explique être la seule survivante de sa famille, ses quatre garçons et son mari sont morts durant la guerre.

Pour les habitants de Kfar Kila, qu'importe si la formation politico-militaire chiite a été à l'initiative, le 8 octobre 2023, de l'ouverture d'un front de soutien au Hamas depuis le Liban-Sud. Le Hezbollah, même décapité d'une large partie de sa chaine de commandement et très affaibli militairement, continue de rayonner dans les cœurs des locaux.

Abdallah Alaoui, 55 ans, est venu « pour la énième fois » inspecter les ruines de sa maison. L'homme montre son ancienne demeure, et l'épicerie attenante qu'il possédait. Il explique avoir perdu quinze proches originaires du village dans cette guerre, sans vouloir pour autant entrer dans les détails. Laconique, il commente :

Quatorze dans les combats, et le quinzième, mon cousin, fin novembre, le lendemain du cessez-le-feu, visé par des tireurs israéliens. Nous avons payé un bien lourd tribut. Ils ont tout tué en nous, même le sentiment de peur que nous pouvions avoir. Qu'ils tirent sur nous s'ils le veulent, nous sommes prêts à mourir.

Pour ce dernier, comme pour l'ensemble des personnes interrogées, l'avenir n'engage pas à l'optimisme :

Avec Joe Biden, les Israéliens faisaient ce que bon leur semblait. Avec l'alliance Nétanyahou-Trump, nous nous attendons au pire. Nous savons qu'il n'y a pas et qu'il n'y aura pas de justice, nous n'y avons pas droit. Le monde entier se tient avec Israël, seul Dieu nous viendra en aide et les jugera.

Ruines avec des murs érodés, arbres et débris au sol. Atmosphère désolée.
Sur le mur extérieur du cimetière, les soldats israéliens ont écrit «  Fuck Gaza  », en arabe.

Sur les hauteurs de la ville, Abir Shan, une femme d'une quarantaine d'années enveloppée dans une abaya noire, observe ce qu'il reste de Kfar Kila, depuis le cimetière situé sur une colline. La quasi-totalité des tombes a été endommagée, et les soldats ont laissé de nombreux messages sur les murs environnants. Elle nous emmène sur les ruines de sa maison : « Elle avait été construite par mon grand-père, explique-t-elle, les yeux larmoyants. Nous avions un beau jardin, et même un bunker aménagé en dessous. En 2006, nous y avions trouvé refuge. Aujourd'hui, il n'y a plus rien à récupérer, même pas une paire de chaussures. »

Femme en habit noir dans un cimetière, entourée de pierres tombales et de débris.
Abir constate les dégâts dans le cimetière de Kfar Kila, qui a été sévèrement impacté par les frappes israéliennes.

La femme, très affectée, se retourne vers le cimetière : « C'était un endroit de paix, où reposent nos familles. Souvent je venais leur rendre visite, comme je l'ai fait aujourd'hui. » Le soleil décline sur Kfar Kila, et le ciel se drape de couleurs orangées. « Même ces couchers de soleil ne sont plus les mêmes, Kfar Kila n'existe plus. »

Regain de tension

C'est une évidence : le long de la bande frontalière, le cessez-le-feu a toujours davantage relevé du mirage que de la réalité. Quarante-huit heures après notre passage, l'armée israélienne abattait par drone une des personnes rencontrées sur site, et diffusait les images de la frappe sur ses réseaux. Filmé en train de charger des armes légères dans sa camionnette, il était, de toute évidence, en train de les exfiltrer de Kfar Kila.

Des tirs récurrents qui maintiennent de force, en dépit du cessez-le-feu, la région sous tension, malgré les propos pour le moins rassurants du président libanais Joseph Aoun. Ce dernier a assuré dans un entretien à France 24 que « le Hezbollah coopérait au sud du Liban ».

Ruines d
Le village de Kfar Kila, situé au pied de la ligne de démarcation, est adossé au mur de séparation construit par les Israéliens.

Une première depuis le 27 novembre : trois roquettes en provenance du Liban ont été interceptées dans le ciel de Métoula le 22 mars 2025. Bien que le Hezbollah ait catégoriquement nié en être à l'origine, et malgré les avertissements de la Force intérimaire de l'ONU qui a demandé instamment « à toutes les parties de s'abstenir de prendre des mesures qui pourraient compromettre les progrès accomplis », le feu de l'armée israélienne n'a pas tardé à fondre sur le Sud-Liban, à nouveau.

Des frappes qui ont fait au moins une dizaine de morts, en différentes localités. Dans un communiqué, l'armée libanaise a tiré la sonnette d'alarme. Elle a rapporté qu'en outre, des véhicules militaires israéliens « avaient traversé la clôture technique et effectué des opérations de terrassement dans la vallée de Qatamoun, à la périphérie de la ville de Rmeich », « en violation flagrante de la résolution 17014 du conseil de sécurité et de l'accord de cessez-le-feu », avant de se retirer.

Même scénario, ou presque, le 28 mars au matin : de nouveaux tirs de roquettes — toujours non revendiqués — en provenance du Liban-Sud. L'armée israélienne y a répondu par le pilonnage de la zone frontalière, en particulier de Kfar Kila, tandis que le ministre israélien de la défense, Israël Katz, menaçait directement Beyrouth en cas de futures frappes. Quelques heures plus tard, un nouvel ordre d'évacuation visait le quartier de Hadath, dans la banlieue sud de Beyrouth. Enfin, le 4 avril, l'armée israélienne a bombardé la ville de Saïda, capitale du Sud, tuant un responsable palestinien et ses deux fils. C'est pour toutes et tous une évidence : la rupture du cessez-le-feu à Gaza aura des conséquences au pays du Cèdre. Avec ou sans front de soutien du Hezbollah au Hamas.


1À l'instar de celui qui fend le paysage en Cisjordanie occupée et autour de la bande de Gaza, l'armée israélienne a construit un mur le long de sa frontière avec le Liban. Le chantier, décidé par le gouvernement de Benyamin Nétanyahou, a débuté en avril 2012 le long de la ville libanaise de Kfar Kila.

2En 2000, harcelée par la guérilla du Hezbollah, l'armée israélienne évacue le Sud-Liban après une longue occupation.

3À l'été 2006, une guerre de 33 jours met aux prises le Hezbollah et l'armée israélienne.

4NDLR. Adoptée à l'unanimité en 2006, la résolution 1701 a pour objectif de mettre fin aux hostilités entre le Hezbollah et Israël, le Conseil appelant à un cessez-le-feu permanent fondé sur la création d'une zone tampon.

11.04.2025 à 06:00

Au Congrès du Caire de 1932, la musique arabe en quête d'identité

Henri Mamarbachi
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L'ouvrage posthume de Bernard Moussali, Le Congrès du Caire de 1932 — La musique arabe à la recherche de son identité, éclaire les tensions culturelles de l'époque tout en questionnant les fondements de la « musique arabe » aujourd'hui. Dans quelle mesure cet héritage musical demeure-t-il vivant et pertinent face aux défis modernes ? Mondes et modes anciens et nouveaux, tradition et modernité, rupture et continuité. Voire retours en arrière et bonds dans le futur. Est-il utile de rappeler (…)

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Texte intégral (3597 mots)

L'ouvrage posthume de Bernard Moussali, Le Congrès du Caire de 1932 — La musique arabe à la recherche de son identité, éclaire les tensions culturelles de l'époque tout en questionnant les fondements de la « musique arabe » aujourd'hui. Dans quelle mesure cet héritage musical demeure-t-il vivant et pertinent face aux défis modernes ?

Mondes et modes anciens et nouveaux, tradition et modernité, rupture et continuité. Voire retours en arrière et bonds dans le futur. Est-il utile de rappeler que toute civilisation est un jour confrontée, consciemment ou non, à ce type de choix qui touche toutes les activités des sociétés, politique, culturelle, scientifique ? Nul n'y échappe. Sauf les Arabes ? On évoque le bédouin qui préfère contempler la lune au milieu du désert : peu lui chaut de l'explorer ! Et pourtant… À l'instar d'autres cultures, celles des sociétés arabes durent se redéfinir par rapport à leur passé durant leur Renaissance (Nahda) qui accompagna l'effondrement de l'Empire ottoman en 1922. Leur musique aussi, ce que l'on a parfois tendance à oublier. D'ailleurs les Arabes n'ont-ils jamais eu une identité ? Vaste question.

Cela remonte (déjà !) à près d'un siècle, comme on peut le constater dans l'éclairant ouvrage qui vient d'être publié sur le Congrès du Caire de 1932, événement capital dans l'histoire mondiale de la musique, avec pour sous-titre : « La musique arabe à la recherche de son identité », du chercheur et professeur d'arabe libano-français Bernard Moussali (1953-1996). Cet ouvrage est basé sur son mémoire de thèse inachevé, qui a fait l'objet d'une édition critique et augmentée établie par l'ethnomusicologue Jean Lambert, enrichie d'un avant-propos et d'une postface.

« La convocation d'un Congrès de musique arabe, nous explique Bernard Moussali, répondait aux vœux de nombreux musiciens, compositeurs et théoriciens égyptiens, mais aussi syro-libanais. Pour beaucoup de ces intellectuels, le Congrès devait être l'occasion d'un dépassement de la musique traditionnelle dite « orientale », et il devait être résolument tourné vers l'avenir : il concrétisait (leur) volonté de fonder une nouvelle musique avec la caution de musicologues européens, censés arbitrer le débat entre l'Ancien et le Nouveau ». Le compositeur et pianiste hongrois Béla Bartok y participa. Comme le disait l'ethnomusicologue et directeur du conservatoire de musique marocaine de Rabat, Alexis Chottin (1891-1975) : « Ce congrès semble une manière d'États généraux, auxquels les Orientaux réclament un statut solide, une vraie Constitution de la musique arabe. »

Du 14 mars au 3 avril 1932, le Congrès du Caire réunit ainsi musicologues et musiciens venus des diverses parties du monde arabe, à l'initiative principale du baron français Rodolphe d'Erlanger et sous le patronage du roi égyptien Fouad Ier. La Ligue arabe, censée définir une politique commune, n'était pas encore née. Mais déjà les spécialistes se retrouvaient pour unifier les formes d'expression musicales qui seraient ainsi affranchies de siècles de tradition. Soit une vaste entreprise d'émancipation.

Hégémonisme égyptien

Plusieurs visions de la musique arabe moderne s'y confrontèrent : d'une part, des conservateurs qui étaient fidèles à la tradition de l'improvisation et du tarab (l'émotion musicale), et d'autre part, des réformistes qui souhaitaient utiliser les médias inventés par l'Occident, notamment la radio, le cinéma et l'écoute de masse.

Notons-le sans tarder pour les mélomanes, ce fut l'occasion d'effectuer de nombreux enregistrements sur disques 78 tours : musique d'Égypte, classique, populaire et sacrée ; musique arabe, principalement d'Irak, Algérie, Tunisie et Maroc (qui n'étaient pas encore des États). Après leur publication intégrale par la Bibliothèque nationale de France (BnF) en 2015, déjà basés sur la documentation de Bernard Moussali et sous la direction de Jean Lambert, ces enregistrements remastérisés n'ont pourtant pas livré tous leurs secrets, comme le révèle le livre.

À la lueur des recherches récentes émerge une proposition d'interprétation des significations historiques et anthropologiques de ce Congrès : « Comment concilier le sentiment de parenté et d'unité de civilisation, spontanément perçu par les Arabes, avec la grande diversité de leurs traditions musicales ? Comment concevoir une future musique arabe de manière universelle, à la fois inventive et inclusive de ses riches sources culturelles ? », selon les termes de l'éditeur de cet ouvrage massif et savant, mais surtout passionnant.

Comme l'explique Jean Lambert à Orient XXI :

Bernard Moussali, qui préparait dans sa thèse de doctorat une analyse des débats du Congrès, avait d'abord mis cet évènement crucial en perspective avec la période ottomane tardive, la renaissance littéraire et culturelle arabe, la Nahda, ainsi que le mécénat des khédives d'Égypte. Le Congrès permit en particulier d'« arabiser » le répertoire instrumental ottoman. Il valida l'introduction du violon, mais rejeta le piano comme trop éloigné de « l'oreille » arabe. Il valida (avec réticences) l'élaboration théorique d'une échelle arabe à 24 quarts de tons (donc plus détaillée que l'échelle occidentale à 12 demi-tons), en se basant sur les théoriciens ottomans tardifs. L'inconvénient de ce système est qu'il estompait les variations locales des micro-tons pratiqués au Caire, à Damas ou Alep, perdant ainsi en incarnation (ironie du sort, ce n'est que bien plus tard que le synthétiseur allait être en mesure de reproduire les nuances micro-tonales arabes…).

L'analyse sans concession par Bernard Moussali des débats du Congrès du Caire lui avait fait prendre conscience de l'importance de l'influence de la musique ottomane sur sa consœur arabe, ainsi que le rôle essentiel, mais occulté par la suite, des nombreux minoritaires chrétiens, juifs… Vis-à-vis de l'hégémonisme égyptien, il mettait en valeur l'apport historique de la Syrie au XVIIIe et au XIXe siècle, trop peu valorisé au Congrès.

De fait, ces débats entre tradition (al-qadîm) et modernité (al-jadîd), combinés avec le débat Orient/Occident, soulevaient déjà la question de l'identité culturelle arabe, avant même que la plupart des pays arabes obtiennent leur indépendance. Se posait également la question de la prédominance de l'Égypte en musicologie (elle occupe 10 des 18 CD du coffret de la BnF), en raison de sa centralité géopolitique et économique, sur les autres parties de la Nation arabe en gestation.

Influence ottomane

Cette expression de « musique arabe » reste d'ailleurs problématique jusqu'à aujourd'hui alors que l'idée même de « Nation arabe » était déjà à la recherche de ses racines. Dans le même temps, « les théoriciens orientaux étaient confrontés à l'image toute puissante de la musique occidentale, à la fois très différente et si proche par son voisinage plus que millénaire », rappelait Bernard Moussali. En outre, les théoriciens orientaux faisaient le « constat d'une coexistence de la tradition arabe et de la tradition turque (ottomane) dans le même creuset depuis au moins cinq siècles ». Jean Lambert poursuit :

Même si elle est récente, l'expression [musique arabe] renvoie à des phénomènes artistiques très divers qui se sont manifestés depuis plus d'un millénaire et demi dans une aire linguistique étendue sur trois continents : l'Asie, l'Afrique, l'Europe (…). (Elle avait) comme « référence historique majeure le développement d'une musique de cour lors des premières dynasties de l'Empire islamique, du VIIe au XIIIe siècle, et en particulier à la cour abbasside (…) avec l'emploi de la langue arabe littérale ou dialectale » comme « un marqueur culturel majeur »

C'était aussi l'époque des grands théoriciens arabophones de la musique — Avicenne, Farabi et Safî al-Dîn al-Ormawî — qui étaient souvent d'origine iranienne.

Pour compliquer les choses, souligne le chercheur, les intellectuels arabes du XIXe et du XXe siècle faisaient face à une énigme historique déroutante : « à partir de la destruction de Bagdad par les Mongols en 1254, il n'y avait plus de pouvoir politique arabe ni de patronage public d'envergure pouvant servir de référence "arabe" à ces phénomènes culturels ». Ce qui ne devait pas s'arranger avec la longue domination ottomane de cinq siècles sur les peuples arabes.

Il faut également rappeler que le terme musiqa posait lui aussi un problème, car il ne deviendra synonyme de « musique », au sens de l'art des sons, qu'à l'époque moderne. Pendant des siècles, la connotation séculaire de cette notion grecque « avait incité les milieux religieux à s'en détourner », car le tarab (à la fois émotion musicale et musique) était pour eux quelque chose de dangereux, de même que les instruments (malahi) qui risquaient de détourner les croyants de la prière. Heureusement, les choses ont changé depuis ! Les cultures musicales arabes se sont adaptées…

Quant au concept de « musique orientale » (musiqa sharqiyya), utilisé jusqu'au Congrès du Caire, il posait lui-même le problème de l'orientalisme, qui sera dénoncé ultérieurement par le théoricien littéraire et critique palestino-américain Edward Saïd, car soumis à la pensée d'une Europe dominante. Ainsi, nous apprend Jean Lambert :

L'apparition de l'expression « musique arabe » semble émerger de la convergence en Égypte entre deux courants intellectuels : d'une part des conceptions théoriques et des répertoires venus de Syrie et de Constantinople, et la promotion qui en est faite par les musicologues orientalistes et occidentaux ; d'autre part la volonté des Égyptiens, après les révolutions patriotiques de 1879 et 1919, de se poser comme le centre d'un monde alors en plein éveil politique et culturel.

On redécouvrit alors les théoriciens arabes du haut Moyen Âge, et l'on arabisa tout un vocabulaire technique et un langage esthétique.

Document décoré avec des motifs colorés, titre en arabe et en français.
Billet des participants au Congrès du Caire (1932)
DR

Choc musical européen

En plein réveil patriotique, le Congrès du Caire sera confronté à un difficile défi, celui de définir « une identité ethnique dans la musique en fonction d'un passé prestigieux, mais révolu, et d'un présent multiforme et insaisissable », lit-on encore. Une problématique (ou un casse-tête) qui se pose encore de nos jours :

Les débats hésiteront continuellement entre deux pôles extrêmes de la culture musicale arabe : une définition large et idéaliste (« de l'Atlantique au Golfe »), et une définition restreinte (la musique égyptienne et éventuellement sa part syro-libanaise). Il en naîtra bien des malentendus. Et à cela s'ajoutera l'insistance de donner la priorité aux formes « savantes », et l'exclusion des formes populaires, le peu d'intérêt pour les formes religieuses (…), qui constitueront les signes d'une définition chauvine [et bourgeoise] la plus restrictive et la moins généreuse possible, de la musique arabe.

Des chapitres passionnants évoquent « l'irruption musicale de l'Europe au XIXe siècle », qui constitua « un choc ou une série de chocs culturels et musicaux dans l'Empire ottoman ». Il suffit de rappeler l'impact local de la création de Aïda, de Verdi, à l'Opéra du Caire en 1870.

Pour conclure ces réflexions sur l'identité musicale, lisons encore Jean Lambert :

On peut dire que la conception dominante de la « musique arabe » se réduisait en grande partie à la musique d'art égyptienne traditionnelle jusque dans le courant des années 1930, basée sur le répertoire dit « khédivial » (et excluant la plupart des musiques populaires, à l'inverse du nationalisme musical kémaliste turc). On intégra aussi de nombreux muwashshaḥ et d'autres formes chantées importantes qui avaient en partie été récupérées de Syrie, sans que cette dette soit vraiment reconnue. La partie instrumentale, typiquement ottomane, fut sciemment « arabisée » [au cours des travaux du Congrès].

Dans les années 1940 à 1960, sous l'influence assumée de la musique occidentale, ce genre se transforma en une sorte de musique de variétés, transformation en partie masquée par le génie improvisateur de la grande chanteuse égyptienne Oum Kalthoum.

Le chant du cygne

Le rôle des minorités qui avaient contribué intensément à la composition de la musique ottomane, notamment arménienne, grecque et juive, fut lui aussi occulté. Les diverses traditions savantes apparentées aux pays arabes voisins, l'Irak et les pays du Maghreb, n'étaient que partiellement intégrées dans cet égypto-centrisme (selon l'expression de l'ethnomusicologue Philippe Vigreux). Elles tentèrent de se développer de leur côté comme musique nationale de certains de ces pays, par exemple la musique arabo-andalouse au Maroc (à partir du Congrès de Musique marocaine de Fès de 1969).

En tout état de cause, toutes ces formes produites jusque dans les années 1930 étant devenues « anciennes » en Égypte. Elles ne résistèrent pas aux évolutions technologiques de l'émergence de la radio, du cinéma et de la bande magnétique. L'obsolescence plus ou moins soudaine du disque 78 tours précipita cet oubli collectif. C'était son « chant du cygne », selon Bernard Moussali.

Mais la constitution étatique d'un répertoire « classique » — selon une terminologie qui viendra plus tardivement — contribua à l'émergence d'une identité musicale panarabe fortement essentialisée et où, en réalité, l'Égypte se gardait la part du lion. Ainsi, l'identité musicale arabe contemporaine, faite d'assemblages hétéroclites et figés, s'est construite sur plusieurs mythes d'origine (cf. le chapitre VII), décrétant des inclusions et des exclusions de manière plus ou moins avouée. De ce point de vue, la musique est peut-être le domaine culturel où cette tentative de construction nationaliste panarabe est le plus facilement observable à l'œil nu, pour peu que l'on ait suivi le long parcours quasiment archéologique qu'en a dressé Bernard Moussali. « À la fin du XXe siècle et au début du XXIe siècle, ces constructions musicales ont largement éclaté, et n'en finissent plus de se réfracter sous différentes formes de plus en plus acculturées », observe Jean Lambert.

Au terme de ces réflexions, on peut se demander où en est aujourd'hui la musique arabe ? Et aussi sa musicologie ? Les questions de l'époque du Congrès continuent à se poser à tous les musiciens de tradition orale : l'innovation technologique est-elle incontournable ? Est-elle la garante absolue d'un « progrès » ? Ou bien n'est-elle pas condamnée à dissoudre l'authenticité de la transmission orale ? D'un autre côté, l'attachement à une tradition « authentique » n'autorise-t-il pas un certain conservatisme esthétique paralysant ? Des interrogations douloureuses que posent opportunément les deux auteurs de cet ouvrage posthume.

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Livre intitulé "Le congrès du Caire de 1932", avec une couverture ornée et colorée.

Bernard Moussali Le Congrès du Caire de 1932. La musique arabe à la recherche de son identité.
Éditions Geuthner
Édition critique et augmentée
Avant-propos et postface de Jean Lambert
560 pages
46 euros

7 / 10

 

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