Le travail de Gianfranco Rosi est ce que la culture contemporaine du divertissement n'est pas: lent, nuancé, contemplatif.
Ce parti pris artistique l'a mené au sommet du cinéma européen avec un Lion d'or remporté à la Mostra de Venise en 2013 et l'Ours d'or à Berlin en 2016, deux des prix les plus prestigieux du septième art après la Palme d'or à Cannes.
"Il y a des gens qui disent: +comment peut-on donner un Lion d'or à quelqu'un qui n'a jamais dirigé un acteur?+", a-t-il confié à l'AFP.
"Cette séparation (entre fiction et documentaire) n'est pas importante pour moi. Ce dont je me sens le plus proche, c'est du cinéma", affirme-t-il.
Son dernier travail, "Pompei, Sotto le Nuvole" (Sous les nuages), est un portrait du port italien de Naples, brut et authentique.
Il porte la marque de fabrique du cinéma de Gianfranco Rosi, 61 ans, qui croit en "l'immersion" et part souvent vivre seul sur le lieu de ses films, sans scénario, avec seulement une vague idée de ce qu'il compte capturer.
Temps long
Pour son dernier travail, il a passé trois ans à Naples, errant, rencontrant des gens, filmant sans relâche, trouvant les personnages dont les vies forment le cœur de ce festin visuel de près de deux heures.
"Je suis un réalisateur qui ne rentre pas chez lui le soir pour dormir. Je suis toujours sur place", explique-t-il. Pour "Sacro GRA", qui lui a valu le Lion d'or, il a passé deux ans à vivre dans une camionnette à la périphérie de Rome, gagnant lentement la confiance de ses sujets: un conducteur d'ambulance, un éleveur d'anguilles, un aristocrate déchu, des prostituées.
"Notturno", sorti en 2020, a vu Rosi passer plus de trois ans aux frontières de l'Irak et de la Syrie, documentant l'impact du groupe État islamique.
Son premier film "Boatman", sur un batelier du Gange en Inde, a pris cinq ans pour être achevé. "Le temps est mon plus grand investissement", confie-t-il. "Travailler seul me permet d'attendre le bon moment, de créer une certaine intimité avec les personnes que je rencontre, et me permet d'attendre la bonne lumière", défend le cinéaste.
Gianfranco Rosi méprise l'apparence de nombreux documentaires modernes — caméra à la main, ton urgent et grave — préférant un point de vue statique, avec un objectif fixe.
Il ne mène aucune interview à l'écran, ne fait aucune narration, et se limite strictement à diriger ses sujets pour s'assurer que son travail reste presque entièrement observationnel.
Méditation
"Sous les nuages", prix spécial du jury à la dernière Mostra, capture des moments de vie de personnages non connectés entre eux à Naples: un enseignant après l'école, un opérateur de centre d'appel des pompiers, un marin, des archéologues, dont les vies sont révélées par petites touches.
Les clichés de la vie napolitaine comme la mafia et le football sont soigneusement évités.
"Il y a toujours un stéréotype très fort sur Naples", explique Rosi. "Je voulais me débarrasser de tout ce qui appartient à l'imaginaire collectif", poursuit-il.
Le long-métrage est une méditation sur le temps qui relie le volcan du Vésuve surplombant la ville à son passé romain enfoui et à son présent souvent chaotique.
"Le film, pour moi, est une réflexion sur la complexité de Naples et sur l'histoire, sur le poids du passé, et en quelque sorte sur le temps suspendu", ajoute Gianfranco Rosi.
Tourné en noir et blanc, il est accompagné de la musique du compositeur Britannique Daniel Blumberg, oscarisé pour la bande originale de "The Brutalist".
Texte intégral (612 mots)
Le travail de Gianfranco Rosi est ce que la culture contemporaine du divertissement n'est pas: lent, nuancé, contemplatif.
Ce parti pris artistique l'a mené au sommet du cinéma européen avec un Lion d'or remporté à la Mostra de Venise en 2013 et l'Ours d'or à Berlin en 2016, deux des prix les plus prestigieux du septième art après la Palme d'or à Cannes.
"Il y a des gens qui disent: +comment peut-on donner un Lion d'or à quelqu'un qui n'a jamais dirigé un acteur?+", a-t-il confié à l'AFP.
"Cette séparation (entre fiction et documentaire) n'est pas importante pour moi. Ce dont je me sens le plus proche, c'est du cinéma", affirme-t-il.
Son dernier travail, "Pompei, Sotto le Nuvole" (Sous les nuages), est un portrait du port italien de Naples, brut et authentique.
Il porte la marque de fabrique du cinéma de Gianfranco Rosi, 61 ans, qui croit en "l'immersion" et part souvent vivre seul sur le lieu de ses films, sans scénario, avec seulement une vague idée de ce qu'il compte capturer.
Temps long
Pour son dernier travail, il a passé trois ans à Naples, errant, rencontrant des gens, filmant sans relâche, trouvant les personnages dont les vies forment le cœur de ce festin visuel de près de deux heures.
"Je suis un réalisateur qui ne rentre pas chez lui le soir pour dormir. Je suis toujours sur place", explique-t-il. Pour "Sacro GRA", qui lui a valu le Lion d'or, il a passé deux ans à vivre dans une camionnette à la périphérie de Rome, gagnant lentement la confiance de ses sujets: un conducteur d'ambulance, un éleveur d'anguilles, un aristocrate déchu, des prostituées.
"Notturno", sorti en 2020, a vu Rosi passer plus de trois ans aux frontières de l'Irak et de la Syrie, documentant l'impact du groupe État islamique.
Son premier film "Boatman", sur un batelier du Gange en Inde, a pris cinq ans pour être achevé. "Le temps est mon plus grand investissement", confie-t-il. "Travailler seul me permet d'attendre le bon moment, de créer une certaine intimité avec les personnes que je rencontre, et me permet d'attendre la bonne lumière", défend le cinéaste.
Gianfranco Rosi méprise l'apparence de nombreux documentaires modernes — caméra à la main, ton urgent et grave — préférant un point de vue statique, avec un objectif fixe.
Il ne mène aucune interview à l'écran, ne fait aucune narration, et se limite strictement à diriger ses sujets pour s'assurer que son travail reste presque entièrement observationnel.
Méditation
"Sous les nuages", prix spécial du jury à la dernière Mostra, capture des moments de vie de personnages non connectés entre eux à Naples: un enseignant après l'école, un opérateur de centre d'appel des pompiers, un marin, des archéologues, dont les vies sont révélées par petites touches.
Les clichés de la vie napolitaine comme la mafia et le football sont soigneusement évités.
"Il y a toujours un stéréotype très fort sur Naples", explique Rosi. "Je voulais me débarrasser de tout ce qui appartient à l'imaginaire collectif", poursuit-il.
Le long-métrage est une méditation sur le temps qui relie le volcan du Vésuve surplombant la ville à son passé romain enfoui et à son présent souvent chaotique.
"Le film, pour moi, est une réflexion sur la complexité de Naples et sur l'histoire, sur le poids du passé, et en quelque sorte sur le temps suspendu", ajoute Gianfranco Rosi.
Tourné en noir et blanc, il est accompagné de la musique du compositeur Britannique Daniel Blumberg, oscarisé pour la bande originale de "The Brutalist".