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Chaîne de service public - Actualité internationale.

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13.12.2025 à 10:55

Inde: la venue de Lionel Messi sème le chaos à Calcutta

FRANCE24
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En visite jusqu'à lundi, le joueur de 38 ans, idolâtré en Inde où le football n'est pourtant pas d'une immense popularité, a été accueilli à son arrivé dans l'Etat du Bengale occidental samedi matin par des fans exubérants qui scandaient son nom. Quelques heures plus tard, des milliers de fans portant des maillots du joueur réunis dans le stade Salt Lake de Calcutta ont été frustrés par les mesures de sécurité entourant la venue de Messi et la quasi-impossibilité de l'apercevoir. Selon les médias locaux, le champion du monde a fait le tour du terrain en saluant la foule puis a immédiatement quitté le stade, alors qu'il était prévu qu'il y joue quelques minutes. La colère de certains fans, dont beaucoup avaient payé plus de 100 dollars, "un mois de salaire" pour d'autres, a alors éclaté. Des sièges arrachés ont été lancés sur la pelouse, ainsi que des bouteilles d'eau. Puis le terrain a été envahi. "Voir Messi était un rêve. Mais je n'ai pas eu la chance de l'apercevoir à cause de l'inorganisation dans le stade", a regretté auprès de l'AFP un homme d'affaires de 37 ans, Nabin Chatterjee. "Je suis venu avec mon fils pour voir Messi, pas des politiciens", s'est fâché Ajay Shah, cité par l'agence de presse indienne PTI, soulignant qu'alors qu'il n'avait pu voir la star, des policiers et des militaires qui assuraient sa sécurité "prenaient des selfies" avec le joueur. Le chaos est dû à "l'organisation", a-t-il accusé. Accusation reprise par les autorités, dont la ministre en chef de l'Etat du Bengale occidental, Mamata Banerjee, qui s'est dite "choquée" par la mauvaise organisation. "Je présente mes sincères excuses à Lionel Messi ainsi qu'à tous les amoureux de sport et à ses fans pour le malheureux incident", a écrit Mme Banerjee sur son compte X, ajoutant qu'elle avait lancé une enquête sur les événements. Avant sa venue au stade Salt Lake, une immense statue (21 m) de Messi brandissant la coupe du monde a été dévoilée dans la ville. L'Argentin doit poursuivre sa tournée à Hyderabad, Bombay et New Delhi.

13.12.2025 à 10:39

Au Chili, la peur du crime porte l'extrême droite aux portes de la présidence

FRANCE24
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Depuis le début des années 2000, la violence liée au crime organisé a augmenté d'environ 40% au Chili, selon les statistiques officielles. Le taux d'homicides a progressé d'environ 50%, d'après les données de l'ONU. Et les sondages montrent qu'aux yeux d'une majorité de Chiliens la criminalité est maintenant le premier problème du pays. Ainsi, dans le centre de Santiago, peu après 18H00 jeudi, des dizaines de policiers masqués et armés surgissent d'un convoi de 15 véhicules banalisés. Ils vont défoncer les portes de neuf maisons soupçonnées d'abriter des trafiquants. L'"Opération Colombie" est le fruit d'une enquête de six mois sur un réseau étranger de trafic de drogue menée par la police d'investigation, équivalent chilien du FBI américain. Chargée de faire respecter la loi dans ce qui fut autrefois le pays le plus sûr d'Amérique latine, elle se retrouve désormais en première ligne d'une bataille féroce contre le crime organisé. Erick Menay, chef de l'unité de lutte contre le crime organisé et presque 35 ans de service, raconte à l'AFP comment son métier s'est transformé face à l'arrivée de gangs sophistiqués et ultra-violents en provenance du Pérou, d'Equateur, de Colombie et surtout du Venezuela, dont est issue l'organisation criminelle Tren de Aragua. Les guerres de territoire "ont apporté beaucoup de violence, beaucoup de coups de feu, de victimes et d'insécurité", dit-il. Nuances "Le pays part en lambeaux", affirme avec emphase José Antonio Kast, candidat à la présidentielle pour la troisième fois. Après une campagne centrée sur l'insécurité et l'immigration clandestine, il devance largement la candidate de gauche Jeannette Jara dans les sondages en vue du scrutin de dimanche. Abrité derrière des vitres pare-balles, le candidat ultraconservateur, père de neuf enfants, promet dans ses discours d'expulser des centaines de milliers de migrants en situation irrégulière, principalement issus du Venezuela en crise, de boucler la frontière avec la Bolivie et de déclarer l'état d'urgence. Pourtant, les chiffres et les témoignages venus du terrain viennent nuancer ce constat alarmiste: si la criminalité a augmenté et est devenue plus violente, elle est partie d'un niveau très bas. Selon une récente enquête gouvernementale, 88% des Chiliens estiment que la criminalité a augmenté l'an dernier. Les statistiques policières indiquent pourtant que le taux de crimes violents s'est stabilisé et, dans certains cas, est même en baisse. La part de la population ayant été victime de délits violents - cambriolages, vols avec violence ou encore extorsion - atteint un peu moins de 6%. Selon Hassel Barrientos Hermosilla, chef de l'unité anti-enlèvements et extorsion de la police d'investigation, il est rare que des Chiliens soient la cible de ces crimes très médiatisés. En dépit de la perception des habitants. "Eloigné de la réalité" La peur a grandi bien plus vite que la criminalité, selon l'ex-général Christian Bolivar, qui dirige la sécurité municipale de Las Condes, banlieue aisée de Santiago. "Il est évident que la perception, ce que les gens ressentent en matière de sécurité, est très éloignée de la réalité", confie-t-il à l'AFP. Quand les gens ont peur, les rues se vident et deviennent moins sûres, un cercle vicieux. "Cette perception, c'est le plus difficile à aborder", dit-il, malgré les 450 personnes sous ses ordres et un centre de commandement moderne où affluent les images des caméras de sécurité. "Nous pouvons mettre en place des mécanismes de contrôle, de supervision et de lutte contre la criminalité, mais il est bien plus difficile d'atteindre les esprits, d'essayer d'influencer les gens pour qu'ils comprennent que la situation en matière de sécurité n'est pas aussi critique qu'elle est dépeinte ou perçue", souligne-t-il. Des éléments suggèrent que les médias, dont beaucoup diffusent en direct des opérations anti-drogue mineures, attisent la peur. D'après un récent sondage UDP-Feedback, les Chiliens qui regardent la télévision sont 25% plus susceptibles d'affirmer que la criminalité violente est un problème par rapport à ceux qui lisent le journal.

13.12.2025 à 10:23

Pourquoi la perspective d'une entrée en Bourse de SpaceX fait tant parler

FRANCE24
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Entre capitalisation historique et annonce surprise, la manoeuvre qui pourrait être réalisée dès l'année prochaine fascine et interroge. Explications sur ce qui devrait constituer la plus grosse entrée en Bourse de l'histoire. - De quoi s'agit-il concrètement? SpaceX est aujourd'hui détenue par Elon Musk, aussi patron de Tesla, xAi, et une multitude de fonds d'investissement. Le géant Alphabet, la maison mère de Google, fait partie des actionnaires de l'entreprise spatiale. En devenant cotée en Bourse, SpaceX devrait attirer de nouveaux investisseurs plus divers, dont des particuliers, et permettre à ses actionnaires actuels de vendre plus facilement leur participation en empochant une importante plus-value au passage. L'entreprise devrait aussi y gagner: "SpaceX n'a jamais eu de difficultés à lever des fonds sur le marché privé, mais les marchés publics sont sans aucun doute plus vastes", souligne auprès de l'AFP Matthew Kennedy, du cabinet spécialisé Renaissance Capital. Selon l'agence Bloomberg, la levée pourrait dépasser les 30 milliards de dollars, du jamais-vu pour une opération de ce genre, et bien plus que les 10 milliards levés par la société depuis sa création, selon la plateforme spécialisée Pitchbook. Cela porterait sa valorisation totale à 1.500 milliards de dollars. - Pourquoi autant d'argent ? Cette entrée en Bourse survient en plein boom du spatial. De 630 milliards de dollars en 2023, le secteur devrait tripler de taille d'ici 2035, selon le cabinet de conseil McKinsey et le Forum Economique Mondial. Et SpaceX, qui domine le marché des lancements spatiaux avec ses fusées réutilisables et possède la plus grande constellation de satellites via Starlink, bénéficie d'un attrait unique. C'"est en quelque sorte un mouton à cinq pattes, donc nous ne pouvons pas établir trop de parallèles avec l'ensemble de l'économie spatiale", prévient Clayton Swope du Centre d'études stratégiques et internationales (CSIS) auprès de l'AFP. Ce statut particulier s'explique aussi par celui de son patron, première fortune mondiale. Elon Musk a ainsi déjà réussi à pousser la valorisation du constructeur automobile Tesla bien au-delà de celles des géants du secteur Toyota et Volkswagen, malgré des ventes 5 à 6 fois inférieures. - Pourquoi maintenant? C'est la question que tout le monde se pose, car le multimilliardaire avait longtemps écarté cette option. Depuis sa création en 2002, SpaceX revêt un statut particulier pour lui car elle vise à assouvir son ambition personnelle de coloniser Mars. Cet objectif fou est au centre des priorités de l'entreprise, qui développe aujourd'hui Starship, la plus grande fusée jamais conçue pour des voyages vers la Lune et Mars, et veut également bâtir des centres de données dédiés à l'intelligence artificielle (IA) dans l'espace. Autant de projets qui pourraient bénéficier des nouvelles liquidités qu'apporterait une cotation en Bourse. Pour Clayton Swope, la manoeuvre viserait donc à "accélérer le processus de réalisation de la vision (d'Elon Musk) d'une présence humaine sur Mars". - A quelles conséquences s'attendre? Mais cet afflux d'argent aura également un coût car l'entrée en Bourse obligera SpaceX et Elon Musk à faire preuve d'une certaine transparence, notamment sur les revenus générés, et pourrait leur imposer une pression à la rentabilité. "Je pense que cela pourrait quelque peu freiner SpaceX à court terme", explique ainsi Mason Peck, professeur en aéronautique à l'Université Cornell. La stratégie de prise de risque de l'entreprise, qui mise sur des technologies souvent non éprouvées et n'hésite pas à multiplier les lancements de prototypes pour apprendre de ses erreurs, pourrait ainsi être mise à mal par les attentes des nouveaux actionnaires. Avec pour risque que SpaceX devienne alors "comme toutes les autres entreprises aérospatiales", qui tablent sur des développements technologiques plus traditionnels, poursuit-il. Pour Clayton Swope, un tel virage reste néanmoins peu probable, car ce mode opératoire fait partie de l'ADN même de l'entreprise. "Je pense que (les investisseurs) seront prêts à prendre ce risque."

13.12.2025 à 10:20

Ukraine : Trump envoie Witkoff rencontrer Zelensky

FRANCE24
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Donald Trump envoie son émissaire Steve Witkoff à Berlin ce week-end pour rencontrer Volodymyr Zelensky et des dirigeants européens, au moment où les Etats-Unis poussent l'Ukraine à des concessions majeures pour mettre fin à la guerre avec la Russie. Les précisions de Gulliver Cragg, correspondant de France 24 à Kiev.
Texte intégral (676 mots)
Donald Trump envoie son émissaire Steve Witkoff à Berlin ce week-end pour rencontrer Volodymyr Zelensky et des dirigeants européens, au moment où les Etats-Unis poussent l'Ukraine à des concessions majeures pour mettre fin à la guerre avec la Russie. Les précisions de Gulliver Cragg, correspondant de France 24 à Kiev.

13.12.2025 à 10:19

Sur les points de deal à Marseille, des ados traités comme des "esclaves modernes"

FRANCE24
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"On a souvent des mineurs violentés très gravement, séquestrés, mis à l'amende, qui n'arrivent plus à sortir des réseaux" mais "c'est l'omerta, on ne dénonce pas", explique à l'AFP le procureur de Marseille, Nicolas Bessone, qui n'hésite pas désormais à parler de traite d'êtres humains. Les autorités ne savent pas quoi faire pour endiguer ce phénomène apparu peu avant le Covid. Des centaines d'adolescents, souvent en rupture familiale, "jobbent" à Marseille, recrutés sur les réseaux sociaux. Certains viennent d'ailleurs et les autorités ont même parlé de "narcotourisme". "On fait croire que c'est le job de rêve mais 100 euros pour guetter de 10H à minuit, au taux horaire, c'est de l'exploitation", remarque une actrice associative qui souhaite rester anonyme tant la peur règne depuis l'assassinat mi-novembre de Mehdi Kessaci, tué sans doute pour faire taire son frère Amine, militant anti-drogue. Pour Hakim*, descendu de région parisienne fin 2020, les choses ont vite mal tourné. C'est l'un des rares cas qui a donné lieu à des poursuites, car les victimes ne portent presque jamais plainte. Quelques jours à peine après son arrivée, il se jette sur des policiers en patrouille cité de la Busserine, les suppliant de le sortir de là. Cet adolescent alors âgé de 15 ans est certes venu de son plein gré dans la deuxième ville de France mais très vite on lui prend son téléphone, on l'oblige à dormir chez une logeuse "énormément radine": un bol d'eau pour se laver et un cookie à partager avec un partenaire d'infortune, raconte-t-il aux enquêteurs. Il fait le guetteur et doit crier "ara" à l'arrivée de la police. On lui reproche d'avoir raté une alerte, c'est le début d'un déferlement de violences. Et le gérant du point de deal, à peine plus âgé, un surnommé Loose D dont il ne connaissait pas le vrai nom, une garantie en cas d'interpellation, lui lance sous la menace d'un couteau: "Qu'est-ce que tu serais prêt à faire pour rester en vie ? Est-ce que tu serais prêt à me sucer ?". Il est violé, on lui fait croire qu'il est filmé pour qu'il se taise. des "mouchoirs jetables" Début février une affaire similaire sera jugée aux assises des Bouches-du-Rhône. Les faits se passent cette fois dans la cité de Frais-Vallon en 2022: deux minots à qui on invente "un trou" dans la caisse de 500 euros. Dans les pochons de drogue qu'ils remettent aux clients, ils glissent des petits papiers: "bonjour, on est séquestré pour le réseau. SVP appelle la police il nous oblige a vendre gratuit depuis 1 mois et nous tabasse avec des bare. SVP appelle la police on a besoin d'aide (on a 15 ans)" (sic). Ils finiront par sauter du 2e étage de l'appartement où ils étaient retenus et les pompiers les récupéreront grâce à l'appel d'un passant. Cette brutalité commence désormais à déborder sur des fratries: "si d'aventure, le frère ne rembourse pas ou ne jobbe pas assez, le petit frère ou la petite soeur est mis à contribution, elle est violée pour rembourser", témoigne un directeur d'un établissement accueillant des mineurs délinquants. Il confirme: ils ne portent jamais plainte par peur des représailles et parce qu'on ne "balance" pas. Les dossiers se ressemblent et face à ce phénomène, où les tortionnaires ont parfois eux-mêmes subi des sévices, la justice est en train d'opérer un changement d'approche significatif. "Quand nous sommes arrivés en 2023, c'était en pleine guerre de gangs entre les clans Yoda et DZ Mafia. Et nous avons fait immédiatement le constat qu'on avait énormément de mineurs décédés, gravement blessés. C'était eux qui étaient au front, ils étaient complètement interchangeables, des mouchoirs jetables. Ils arrivaient volontairement en disant +je vais rentrer dans un réseau+, et puis, très vite, ils déchantaient, puisqu'ils étaient vraiment traités comme des esclaves", explique Isabelle Fort, qui pilote le pôle criminalité organisée au parquet de Marseille. C'est une juge pour enfants aujourd'hui à la retraite, Laurence Bellon, qui a commencé à parler de traite d'êtres humains. "Ces adolescents sont coincés dans un processus de répétition que l'on aborde aujourd'hui uniquement sous l'angle de la récidive alors qu'il s'agit aussi d'emprise et de soumission à des réseaux très violents", expliquait-t-elle à l'AFP en 2023. Habituellement, la traite d'êtres humains est réservée aux dossiers de proxénétisme ou de mendicité forcée. Parler de criminalité forcée est totalement inédit en France et cette approche bouscule, divise, mais finit par cheminer. L'Unicef a poussé un cri d'alerte en juillet, soulignant qu'il est "en contradiction avec le droit international que les enfants victimes d'exploitation criminelle fassent encore l'objet de poursuites et de sanctions pénales en France au lieu d'être considérés et pris en charge comme des victimes". En Belgique ou au Royaume-Uni des lois récentes établissent "que les victimes de la traite ne doivent pas être punies pour des infractions commises sous contrainte", souligne l'organisme onusien. D'abord auteur ou victime ? La France commence à avancer sur ce sujet. En janvier, le ministre de la Justice Gérald Darmanin préconisait lui-même dans une circulaire d'"envisager le traitement des procédures sous l'angle de la répression de la traite des êtres humains". Le parquet de Marseille a donc ouvert une dizaine d'enquêtes comportant un volet traite d'êtres humains sur des réseaux de trafiquants, annonce-t-il à l'AFP. "Il y a un travail de changement de paradigme pour tout le monde, mais sans tomber dans l'excès inverse de déresponsabiliser complètement les jeunes qui viendraient au soleil de Marseille parce qu'on paye mieux qu'ailleurs", insiste Céline Raignault, procureure-adjointe, en charge de la division Mineurs-Famille. La traite d'êtres humains obéit à des critères précis : la notion de déplacement, de recrutement aux fins d'exploitation, les menaces, violences, l'abus de vulnérabilité et éventuellement le recrutement par voies de télécommunication, énumère-t-elle. Du côté des policiers, il y a une certaine réticence et une difficulté à faire parler ces petites mains du trafic. "Il faut dans la traite d'être humains qu'on ait à faire à des victimes à 100%", estime Sébastien Lautard, numéro deux de la police marseillaise. "Actuellement, c'est bien beau, c'est des belles idées, mais on n'est pas prêts", ajoute le commissaire, pour qui "il y a un flou artistique dans le traitement de ces jeunes-là", notamment le manque d'"un parcours pour sortir du trafic". "Il n'y a aucun retour possible, à part de les extraire et de prendre soin d'eux", insiste le directeur d'établissement déjà cité: "il faudrait les mettre à la campagne et les reconsidérer comme des enfants", faire des choses simples avec eux, des jeux de société, la cuisine pour les sortir d'un mode de fonctionnement qui repose sur la violence où "agresseur, agressé tout se mélange". Me Frédéric Asdighikian, spécialiste du droit des enfants, se souvient d'un client, un mineur en fuite. Il est revenu brûlé au chalumeau sur le flanc, sa blessure était à vif, pas soignée. "Ils ont l'habitude de cette douleur, on l'avait torturé dans une cave trois jours". "c'est vraiment de l'esclavage moderne", estime l'avocat pour qui "il faut qu'on essaie de réfléchir autrement parce que c'est une histoire sans fin". * prénom modifié
Texte intégral (1265 mots)
"On a souvent des mineurs violentés très gravement, séquestrés, mis à l'amende, qui n'arrivent plus à sortir des réseaux" mais "c'est l'omerta, on ne dénonce pas", explique à l'AFP le procureur de Marseille, Nicolas Bessone, qui n'hésite pas désormais à parler de traite d'êtres humains. Les autorités ne savent pas quoi faire pour endiguer ce phénomène apparu peu avant le Covid. Des centaines d'adolescents, souvent en rupture familiale, "jobbent" à Marseille, recrutés sur les réseaux sociaux. Certains viennent d'ailleurs et les autorités ont même parlé de "narcotourisme". "On fait croire que c'est le job de rêve mais 100 euros pour guetter de 10H à minuit, au taux horaire, c'est de l'exploitation", remarque une actrice associative qui souhaite rester anonyme tant la peur règne depuis l'assassinat mi-novembre de Mehdi Kessaci, tué sans doute pour faire taire son frère Amine, militant anti-drogue. Pour Hakim*, descendu de région parisienne fin 2020, les choses ont vite mal tourné. C'est l'un des rares cas qui a donné lieu à des poursuites, car les victimes ne portent presque jamais plainte. Quelques jours à peine après son arrivée, il se jette sur des policiers en patrouille cité de la Busserine, les suppliant de le sortir de là. Cet adolescent alors âgé de 15 ans est certes venu de son plein gré dans la deuxième ville de France mais très vite on lui prend son téléphone, on l'oblige à dormir chez une logeuse "énormément radine": un bol d'eau pour se laver et un cookie à partager avec un partenaire d'infortune, raconte-t-il aux enquêteurs. Il fait le guetteur et doit crier "ara" à l'arrivée de la police. On lui reproche d'avoir raté une alerte, c'est le début d'un déferlement de violences. Et le gérant du point de deal, à peine plus âgé, un surnommé Loose D dont il ne connaissait pas le vrai nom, une garantie en cas d'interpellation, lui lance sous la menace d'un couteau: "Qu'est-ce que tu serais prêt à faire pour rester en vie ? Est-ce que tu serais prêt à me sucer ?". Il est violé, on lui fait croire qu'il est filmé pour qu'il se taise. des "mouchoirs jetables" Début février une affaire similaire sera jugée aux assises des Bouches-du-Rhône. Les faits se passent cette fois dans la cité de Frais-Vallon en 2022: deux minots à qui on invente "un trou" dans la caisse de 500 euros. Dans les pochons de drogue qu'ils remettent aux clients, ils glissent des petits papiers: "bonjour, on est séquestré pour le réseau. SVP appelle la police il nous oblige a vendre gratuit depuis 1 mois et nous tabasse avec des bare. SVP appelle la police on a besoin d'aide (on a 15 ans)" (sic). Ils finiront par sauter du 2e étage de l'appartement où ils étaient retenus et les pompiers les récupéreront grâce à l'appel d'un passant. Cette brutalité commence désormais à déborder sur des fratries: "si d'aventure, le frère ne rembourse pas ou ne jobbe pas assez, le petit frère ou la petite soeur est mis à contribution, elle est violée pour rembourser", témoigne un directeur d'un établissement accueillant des mineurs délinquants. Il confirme: ils ne portent jamais plainte par peur des représailles et parce qu'on ne "balance" pas. Les dossiers se ressemblent et face à ce phénomène, où les tortionnaires ont parfois eux-mêmes subi des sévices, la justice est en train d'opérer un changement d'approche significatif. "Quand nous sommes arrivés en 2023, c'était en pleine guerre de gangs entre les clans Yoda et DZ Mafia. Et nous avons fait immédiatement le constat qu'on avait énormément de mineurs décédés, gravement blessés. C'était eux qui étaient au front, ils étaient complètement interchangeables, des mouchoirs jetables. Ils arrivaient volontairement en disant +je vais rentrer dans un réseau+, et puis, très vite, ils déchantaient, puisqu'ils étaient vraiment traités comme des esclaves", explique Isabelle Fort, qui pilote le pôle criminalité organisée au parquet de Marseille. C'est une juge pour enfants aujourd'hui à la retraite, Laurence Bellon, qui a commencé à parler de traite d'êtres humains. "Ces adolescents sont coincés dans un processus de répétition que l'on aborde aujourd'hui uniquement sous l'angle de la récidive alors qu'il s'agit aussi d'emprise et de soumission à des réseaux très violents", expliquait-t-elle à l'AFP en 2023. Habituellement, la traite d'êtres humains est réservée aux dossiers de proxénétisme ou de mendicité forcée. Parler de criminalité forcée est totalement inédit en France et cette approche bouscule, divise, mais finit par cheminer. L'Unicef a poussé un cri d'alerte en juillet, soulignant qu'il est "en contradiction avec le droit international que les enfants victimes d'exploitation criminelle fassent encore l'objet de poursuites et de sanctions pénales en France au lieu d'être considérés et pris en charge comme des victimes". En Belgique ou au Royaume-Uni des lois récentes établissent "que les victimes de la traite ne doivent pas être punies pour des infractions commises sous contrainte", souligne l'organisme onusien. D'abord auteur ou victime ? La France commence à avancer sur ce sujet. En janvier, le ministre de la Justice Gérald Darmanin préconisait lui-même dans une circulaire d'"envisager le traitement des procédures sous l'angle de la répression de la traite des êtres humains". Le parquet de Marseille a donc ouvert une dizaine d'enquêtes comportant un volet traite d'êtres humains sur des réseaux de trafiquants, annonce-t-il à l'AFP. "Il y a un travail de changement de paradigme pour tout le monde, mais sans tomber dans l'excès inverse de déresponsabiliser complètement les jeunes qui viendraient au soleil de Marseille parce qu'on paye mieux qu'ailleurs", insiste Céline Raignault, procureure-adjointe, en charge de la division Mineurs-Famille. La traite d'êtres humains obéit à des critères précis : la notion de déplacement, de recrutement aux fins d'exploitation, les menaces, violences, l'abus de vulnérabilité et éventuellement le recrutement par voies de télécommunication, énumère-t-elle. Du côté des policiers, il y a une certaine réticence et une difficulté à faire parler ces petites mains du trafic. "Il faut dans la traite d'être humains qu'on ait à faire à des victimes à 100%", estime Sébastien Lautard, numéro deux de la police marseillaise. "Actuellement, c'est bien beau, c'est des belles idées, mais on n'est pas prêts", ajoute le commissaire, pour qui "il y a un flou artistique dans le traitement de ces jeunes-là", notamment le manque d'"un parcours pour sortir du trafic". "Il n'y a aucun retour possible, à part de les extraire et de prendre soin d'eux", insiste le directeur d'établissement déjà cité: "il faudrait les mettre à la campagne et les reconsidérer comme des enfants", faire des choses simples avec eux, des jeux de société, la cuisine pour les sortir d'un mode de fonctionnement qui repose sur la violence où "agresseur, agressé tout se mélange". Me Frédéric Asdighikian, spécialiste du droit des enfants, se souvient d'un client, un mineur en fuite. Il est revenu brûlé au chalumeau sur le flanc, sa blessure était à vif, pas soignée. "Ils ont l'habitude de cette douleur, on l'avait torturé dans une cave trois jours". "c'est vraiment de l'esclavage moderne", estime l'avocat pour qui "il faut qu'on essaie de réfléchir autrement parce que c'est une histoire sans fin". * prénom modifié
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