27.05.2023 à 13:22
10 ans après le meurtre de Clément Méric : week-end international antifasciste
lemarteausansmaitre
Le 5 juin, cela fera 10 ans que Clément Méric est mort, assassiné par des militants d’extrême-droite à Paris. Cela fera 10 ans que nous commémorons chaque année la mémoire de notre camarade, ciblé parce qu’antifasciste.
Le mot fait peur désormais, il sent la dissolution et le souffre. Il y a fort à parier que ceux qui se déclaraient spontanément antifascistes au lendemain de la mort de Clément y réfléchiraient aujourd’hui à deux fois. Les pitres socialistes qui paradaient sur les plateaux il y quelques années ont définitivement rompu avec la tradition antifasciste en prenant leurs quartiers dans les ministères. Tandis que dans la presse mainstream le mot est devenu sulfureux, renouant, malgré les tentatives d’obscurcissement, avec ce qu’il désigne réellement historiquement, à savoir l’héritage d’une frontière politico-militaire qui fracture l’Europe depuis un siècle.
Après le tournant de 1917, le péril rouge est perçu par les élites européennes comme « le parti de la guerre civile internationale » ; le fascisme est la réponse politique et militaire au « péril rouge » du bolchévisme et au « péril jaune » de la révolte anticoloniale.
L’antifasciste est alors la figure combattante du militant internationaliste : il regroupe aussi bien Guingouin dans les maquis du Limousin que les partisans grecs et italiens, tant les artidi del popolo du début des années 1920 que la colonne Durruti, aussi bien les manifestants de Charonne contre l’OAS que les brigades africaines-américaines Abraham Lincoln parties rejoindre les républicains espagnols, aussi bien les Black Panthers et leurs alliés que l’alliance palestino-progressiste face à la Phalange au Liban.
C’est dans cette large histoire révolutionnaire, qui excède évidemment notre organisation, que s’inscrivait Clément. Antifasciste, il l’était lors de sa jeunesse à Brest. Il l’est resté en rejoignant Paris en 2012 pour poursuivre ses études. C’est ici qu’il a intégré l’union syndicale Solidaires et rencontré notre organisation, dans laquelle se côtoient alors militants révolutionnaires, jeunes syndicalistes et ex-ultras de groupes dissous du Virage Auteuil. Pendant près d’une année, il a milité à nos côtés, dans Paris et sa banlieue, pour ne pas laisser la rue à l’extrême-droite, auprès des migrants qui sont traqués et chassés par les forces de l’ordre, avec les collectifs de quartiers populaires qui s’organisent pour exiger la vérité et la justice pour tous les jeunes brutalisés par la police, et contre toutes les formes d’oppressions et de discriminations.
C’est cette histoire qu’il nous faut prolonger, cette trajectoire qu’il est vital de poursuivre. Car en 10 ans la situation s’est accélérée. Le parti de l’ordre, immuablement au pouvoir malgré quelques changements d’étiquettes, continue sa marche au pas de charge. Loin de l’alternance annoncée, et du supposé libéralisme d’un banquier aux dents longues, le hollando-macronisme a en réalité intensifié lourdement toutes les tendances du sarkozysme.
Depuis 10 ans, le racisme d’État se déchaîne, à travers le massacre quotidien des migrants en Méditerranée, l’agitation islamophobe contre les musulmans du pays, à grands coups de perquisitions, de lois contre le voile et de dissolutions d’associations. À travers la persistance des crimes policiers contre les jeunes hommes non-blancs, la rromophobie institutionnalisée et la chasse aux « islamo-gauchistes ». Une nouvelle loi sur l’immigration se prépare, qui vient s’empiler sur toutes les autres et étendra sans doute encore les prérogatives de la police pour chasser les étrangers.
Depuis 10 ans, les interventions impérialistes françaises se multiplient, en Afrique et ailleurs, tandis que les gouvernements successifs ignorent leur rôle dans les attentats commis au sein de la métropole tout en essayant de criminaliser le soutien aux luttes de libération anticoloniales, en premier lieu celle du peuple palestinien, qui fait aujourd’hui face de manière héroïque à la politique d’apartheid mise en place par le régime colonial de l’État sioniste.
Depuis 10 ans, une lourde offensive néolibérale s’abat sur tous les pauvres du pays, et ceux qui ne l’étaient pas encore. Elle s’accompagne d’un tournant autoritaire qui s’intensifie d’année en année. Aux ordonnances Macron, à la loi travail, la taxe carbone et la réforme des retraites, il faut associer les multiples lois « antiterroristes », « de sécurité globale », « contre les séparatismes », dont la tâche est soit de garantir que la police française puisse réprimer toute velléité de rébellion soit de tenter d’entretenir la fragmentation entre les classes subalternes. Ceux qui se soulèvent dans ce pays portent dans leur chair la mémoire du déferlement de violence tombé sur les banlieues en 2005, les gilets jaunes en 2018 ou, il y a quelques semaines, les écologistes à Sainte-Soline. Il faut désormais s’armer de courage pour aller manifester.
Depuis 10 ans, le programme du fascisme français progresse à la mesure du raidissement néolibéral, s’incarne dans des lois et des politiques qui puisent dans le vieil arsenal d’un État colonial et d’une république façonnée pour l’autoritarisme. Pourtant, on ne cesse de nous faire le coup des fronts républicains des dimanche électoraux, de brandir la menace de l’accession au pouvoir du Rassemblement national pour justifier le statu quo. Mais cette menace change au fur et à mesure que les gouvernements se réapproprient les mots d’ordre de l’extrême-droite. Ce n’est plus tant le racisme ouvert du RN qui gêne désormais, mais la perspective d’un chaos économique. Ce n’est plus l’héritage pétainiste qui est mis en accusation, mais leur supposée mollesse.
L’opération politique de la macronie est double. D’un côté, il s’agit de façonner un inévitable face à face avec l’extrême-droite, tout mensonger qu’il soit. En les renforçant institutionnellement, à l’Assemblée ou ailleurs dès que faire se peut, en reprenant leurs mots d’ordre et en légitimant leurs questions. En diabolisant par tous les moyens une NUPES pourtant évidemment social-démocrate. De l’autre, il s’agit de circonscrire la politique au jeu électoral. C’est sans doute là l’un des motifs profonds des vagues de dissolutions et des menaces qui pèsent jusqu’à la LDH. Briser la société, tout ce qui bouge et conteste, tout ce qui invente et résiste, tout ce qui pourrait peser sur le jeu institutionnel, voire le renverser.
Ce que Darmanin et ses sbires visent, c’est l’écrasement total de la politique de la rue. Nulle légitimité accordée aux immenses manifestations contre les retraites, nulle place pour le dialogue ou la concession. Les salves de grenades et les dissolutions auront raison d’un peuple trop remuant. Y compris d’ailleurs les dissolutions visant l’extrême-droite. Pendant que certains se racontent que ce sont des victoires, il suffit de constater combien la macronie s’est radicalisée pour voir ce qu’il en est. Et qu’on ne s’inquiète pas pour les quelques fascistes qui aiment parader, avec la progressive incorporation des civils aux schémas du maintien de l’ordre, il y a fort à parier qu’ils pourront porter bientôt un uniforme pour jouer le seul rôle qu’ils aient jamais su composer avec talent : supplétifs de la flicaille.
Écraser la rue, c’est la condition pour s’assurer du bon déroulement du programme néolibéral, en dépit de l’urgence climatique. Écraser la rue, c’est s’assurer que rien ne se passe si Le Pen est élue, ou que personne ne soit tenté de rappeler ses quelques promesses à un gouvernement de gauche miraculeusement victorieux.
Face à cela, l’antifascisme ne doit ni se laisser aller au vieux refrain de la spécificité de l’extrême-droite, quand bien même Le Pen serait pire que Macron, ni au front unique électoral. Face au raidissement de la situation, il est plus que jamais nécessaire de savoir constituer des fronts pratiques victorieux. D’éviter les querelles dogmatiques et le sectarisme qui sévit par gros temps, mais de contribuer à tisser des complicités entre toutes les réalités qui ont fait de la France le théâtre de la plus grande conflictualité sociale en Europe.
Un antifascisme à la hauteur de la situation se doit d’embrasser toutes ces dimensions, de concourir à la rencontre entre les diverses trajectoires de luttes qui ont constellé le pays au cours des dernières années, en étant toujours attentif à l’autonomie et la spécificité de chacune, afin de pouvoir tisser des alliances réelles, entre luttes antiracistes autonomes, mouvement ouvrier classique et Gilets jaunes. Entre luttes féministes, écologistes et syndicales.
C’est de la capacité à mener ce travail de composition et à le rendre victorieux que dépend notre futur. C’est ce travail qu’il faut mener dès maintenant pour se montrer à la hauteur de notre histoire, et de la mort d’un camarade.
Revenant des camps de concentration nazis où il avait été emprisonné en raison de son activité résistante, dans un contexte dont on mesure sans doute mal la gravité, Robert Antelme a écrit un beau texte intitulé « Vengeance ? » en 1946. On peut y lire que « Seul le monde dans sa vie peut venger chaque jour ceux qui sont morts, parce que ces morts ne sont pas ordinaires ; seule une victoire des idées et des comportements pour lesquels ils sont morts peut avoir le sens d’une vengeance ; cette mort ne se mesure pas à la nouvelle mort d’un homme, c’est l’avènement, le développement d’une société et d’un certain monde intérieur qui peuvent y répondre ».
En ce sens, nous n’avons pas renoncé à venger Clément. Et c’est pour commencer, continuer à construire cet autre monde et cette autre vie que nous appelons à un week-end de mobilisation à l’occasion des 10 ans de son meurtre :
RDV DIMANCHE 4 JUIN
MANIFESTATION ANTIFASCISTE
11H MÉTRO BARBES
18.03.2023 à 12:31
lemarteausansmaitre
Rien ne l’a arrêté. Ni les manifestations de masse parmi les plus impressionnantes de l’histoire récente, ni l’opposition constante et opiniâtre de l’opinion publique. Ni les remords de la droite face à un peuple à bout, ni l’absence d’une quelconque majorité à l’Assemblée nationale. Macron se sait minoritaire. Mais ça lui est égal.
Car en réalité, Macron est ce soldat sacrificiel du capital qui est prêt à faire passer les intérêts financiers devant ses propres intérêts politiques et ceux de son camp. « On ne peut pas prendre le risque », déclarait Élisabeth Borne jeudi devant l’Assemblée. Voilà qui a le mérite de la transparence : ces gens-là n’autorisent des votes que lorsqu’ils sont sûrs de les gagner. À la moindre incertitude, le formalisme démocratique vole en éclats. Reste le commandement pur, au service du marché, quoiqu’il en coûte.
On ne compte plus les recours à l’article 49.3 depuis la nomination d’Elisabeth Borne il n’y a même pas un an. Et pour cause, la macronie n’a plus les moyens de prétendre représenter une majorité. Élu par un peu moins de 20% des français en 2017, Macron a perdu sa majorité absolue en 2022. S’il recourt comme un forcené à tous les outils antidémocratiques que la Ve république, née pour régler l’insurrection algérienne, a prévu dans but d’assurer le pouvoir des Césars, c’est qu’il n’a pas les moyens politiques de faire autrement.
Le 49.3 est une victoire. La mobilisation massive a suffisamment ébranlé l’Assemblée pour empêcher Macron de donner même l’illusion d’une majorité.
Le 49.3 est une défaite : on vient d’arracher deux ans de nos vies pour satisfaire les calculs glacés de marchés égoïstes. Pour qu’une minorité de riches continue de s’enrichir inlassablement, on condamne, purement et simplement, à deux ans de travaux celles et ceux qui produisent la richesse captée par d’autres.
À mi-mouvement un bilan s’impose : la stratégie intersyndicale est impuissante. Elle n’est ni à la hauteur de ses propres objectifs – le retrait de la loi – ni à celle de la situation – une inflation délirante dans un contexte de précarisation généralisée et de spirale autoritaire.
Les manifestations, les grèves et les blocages repartent de plus belle depuis jeudi. Et c’est de leur intensification et de leur combinaison quotidienne que dépend en grande partie l’issue de ce mouvement. Mais que nous manque-t-il ? Sans doute des lieux pour se rencontrer, éprouver une force collective, se sentir nombreux dans la durée.
Nous avons besoins de camps. Où être rejoignables. D’où se projeter ensemble, à l’assaut des quartiers bourgeois et des ports industriels, d’une Assemblée défaite et d’un sinistre Sénat, de locaux Renaissance comme des lycées ou des facs où la police empêche les blocus. Rejoindre les piquets de grève, envahir les gares et le périphérique, revenir discuter en assemblée.
À Paris, la Concorde est une évidence. Au cœur du Paris ennemi, en face de l’Assemblée, non loin du palais de l’Élysée, une place portait autrefois le nom de Révolution. Les têtes de rois y tombaient et on y inventait une autre vie. Et il y a dans chaque ville, d’autres places, d’autres lieux, qui peuvent servir de bases arrière au mouvement, occupées chaque jour et chaque nuit, non comme un endroit de repli, mais comme autant de places fortes, arrachées à l’ordre policier, d’où déferle sur la ville un peuple qui rêve encore d’une vie meilleure.
Prenons la Concorde, partons à l’assaut du monde.
05.02.2023 à 10:57
[Italie] Sur le cas d’Alfredo Cospito : luttes anti-carcérales au fil du temps
lemarteausansmaitre
Jeudi 19 janvier 2023, Paris. À quelques heures d’une grève intersyndicale massive, Pasquale Abatangelo, ancien membre des Noyaux Armés Prolétaires, présente la traduction française de son livre Je courais en pensant à Anna. Une histoire d’amour et de lutte qui traverse une grande partie des luttes radicales italiennes des années 1970. Parmi elles, inévitablement, les luttes carcérales des soi-disant « damnés de la terre »1. La présentation touche à sa fin, ou presque. Les dernières phrases de congé alternent sourires narquois et regards crispés. Cette alternance s’explique de la manière suivante.
Du côté des sourires narquois se trouve l’histoire du 2 octobre 1979. Italie : les prisonniers qui se révoltent dans la prison de haute sécurité de l’Asinara, pour la plupart des membres des Brigades Rouges, provoquent un intense jet de mobilier. Un affrontement éclate avec la police de la prison, des lits et des tables sont utilisés comme béliers, l’objectif est la destruction de la prison. Des policiers et des carabiniers sont massivement mobilisés à Asinara, une prison située au nord de la Sardaigne, sur l’île homonyme. Les policiers sont repoussés avec tous les moyens dont disposent les détenus. La bataille dure plusieurs heures, le pavillon de haute sécurité est partiellement détruit et les détenus sont enfin contenus. Alors que la prison doit être reconstruite, après que l’émeute l’a rendue inutilisable, les détenus peuvent être transférés temporairement hors de l’« Alcatraz italienne ». Une victoire partielle. Puis Pasquale sourit à nouveau en racontant le 28 décembre 1980, le soulèvement à la prison spéciale de Trani. Des anecdotes qui témoignent d’une époque où les mouvements révolutionnaires italiens avaient la force de revendiquer la fin de la dureté des politiques judiciaires et pénitentiaires italiennes.
Puis c’est le tour des yeux qui se durcissent. À l’heure actuelle, jeudi 19 janvier 2023, en Italie, Alfredo Cospito est à son 96e jour de grève de la faim ; il a perdu plus de 40 kg et son état de santé est bien critique2. Le fil rouge des dernières minutes du débat est la lutte contre les prisons et Cospito en mène actuellement une contre le régime de haute sécurité qui lui est réservé dans la prison de Sassari.
Le 20 octobre 2022, il a entamé sa grève de la faim. Alfredo est un anarchiste accusé d’avoir tiré dans la jambe de Roberto Adinolfi, administrateur d’Ansaldo Nucleare, la principale entreprise nucléaire italienne. Il est en prison depuis 2013. À la suite d’une deuxième condamnation prononcée pendant son incarcération (à propos de son implication dans les dépôts de deux colis piégés placés devant l’école des carabiniers de Fossano qui n’ont fait ni morts ni blessés), il a finalement été condamné à la perpétuité réelle et incompressible et soumis au régime de sécurité maximale dit « 41 bis » – le régime le plus sévère en vigueur en Europe. Ce régime prévoit un isolement total et des limitations importantes des droits normalement accordés aux prisonniers ordinaires3.
Telles sont les conditions auxquelles est soumis Cospito, ainsi que les 749 autres personnes soumises à la mesure du 41 bis en Italie – pour la plupart condamnées pour des délits de terrorisme ou de mafia. Lors de la présentation du livre, nous suivons un fil rouge sur les luttes contre la prison ; cela commence sournoisement mais se termine silencieusement. La soirée à la librairie se termine sans aucun applaudissement.
Pour ceux/celles qui suivent de près les affaires judiciaires et carcérales italiennes, il est possible de reconnaître dans l’affaire Cospito la première tentative, après plus de 40 ans, de susciter une mobilisation contre les prisons qui aille au-delà des rangs militants4.
Sur cette affaire, la ligne dure du gouvernement Meloni a pris la forme d’un impénétrable mur de silence institutionnel, par l’intermédiaire du ministre de la Justice Carlo Nordio. Un mur de silence ; sauf pour les moyens répressifs judiciaires « habituels », aussi disproportionnés que sincèrement pathétiques. À titre d’exemple, mentionnons l’avertissement adressé à Angelica Milia, la médecin qui suit la santé d’Alfredo Cospito, à qui il a été officiellement interdit de faire des déclarations sur l’état de santé de son client (Milia a ignoré l’avertissement). Ou bien l’intervention grandiloquente de la police romaine pour identifier des lycéens mineurs qui préparaient une banderole pour Cospito en vue des journées de solidarité qui se tiendront à l’université La Sapienza les 3 et 4 février à Rome. Université, La Sapienza, qui se trouve actuellement occupée depuis le soir du 2 février.
Et puis soudain, du silence institutionnel, le tumulte au Parlement : des tensions éclatent entre les différents partis politiques à Montecitorio, qui ne s’apaiseront pas. La Première ministre Giorgia Meloni tente un coup de théâtre en déclarant qu’il ne « s’agit pas d’une question politique, la gauche et la droite ne comptent pas » ; elle cherche la politique du bouc émissaire tandis que circulent des interceptions couvertes par le secret judiciaire et que, au Parlement, des voix s’élèvent pour demander la démission du ministre Nordio, jugé inapte à gérer l’affaire.
Entre-temps, avec la complicité des principaux journaux, le gouvernement et les appareils judiciaires se lancent dans une opération de délégitimation aussi imaginative que maladroite, accusant Cospito de s’être entretenu en prison avec des représentants de la mafia afin de « signer » un pacte contre le 41 bis. Une véritable mise en scène qui vise à décrédibiliser le détenu, qui demande l’abolition du carcere duro pour tout.e.s les prisonnier.e.s, et pas seulement pour certain.e.s.
Nous ne sommes plus dans les années 1970 et le mouvement social peine à imposer un rapport de force capable de sauver la vie de Cospito ; néanmoins, il n’est pas surprenant que les années 1970 soient mentionnées depuis le Palazzo Chigi et Montecitorio. Les ministres du gouvernement d’extrême droite évoquent le retour de la stratégie de la tension ; Tajani, ministre des Affaires étrangères, déclare dans une conférence de presse que l’État serait dans le collimateur de l’Internationale anarchiste (une phrase chimérique qui ne veut rien dire) ; le ministre de la Justice, Claudio Nordio déclare lors de la même conférence de presse que « comme pour l’enlèvement de Moro, nous devons suivre la ligne de la fermeté ».
En bref, le croque-mitaine d’une alerte terroriste inexistante, mais indispensable pour faire valoir une position forte et unie : la création d’un monstre social est une stratégie politique absolument pas originale mais extrêmement efficace pour construire un consensus politique. Le souci du gouvernement de clore le plus rapidement possible le débat sur ces questions est également éloquent dans le rejet du ministre Nordio de négocier le régime du 41 bis pour Cospito. Cela prouverait la possibilité et la capacité de l’activation sociale d’influencer la modification des lois de l’État sur la justice5. Une conception qui montre, s’il en était nécessaire, le caractère autoritaire et fasciste de cet exécutif. Face à la restriction des espaces d’agilité démocratique, il est nécessaire de continuer à alimenter le débat public sur le sujet des luttes contre les prisons.
Entre-temps, Cospito se trouve dans un état de santé gravissime ; pour cette raison, il a été transféré de la prison de haute sécurité de Sassari à celle de Milan, où l’on pense qu’il existe un établissement plus adapté pour l’accueillir dans ces conditions. Aujourd’hui, le 4 février 2023, c’est son 108e jour de grève de la faim ; en ce moment, une manifestation en soutien à sa lutte, contre la perpétuité et la mesure du 41 bis, se tient à Rome.
30.01.2023 à 09:32
Derrière la fusillade de Jérusalem, la violence de l’État israélien
lemarteausansmaitre
La fusillade meurtrière de Jérusalem-Est de vendredi soir prend place dans un contexte d’interventions israéliennes particulièrement violentes et tout aussi meurtrières dans les camps palestiniens en Cisjordanie ces dernières semaines, qu’il parait important de restituer pour tenter d’éclairer ce nouvel embrasement en Palestine occupée.
L’évènement qui a causé la mort de sept israéliens et grièvement blessé trois autres, à la sortie d’une synagogue de Jérusalem-Est, succède en effet à un raid de l’armée israélienne, la veille, dans le camp palestinien de Jénine en Cisjordanie durant lequel elle a tué neuf personnes, fait une vingtaine de blessés et bombardé l’unité pédiatrique de l’Hôpital de Jénine au gaz lacrymogène.
Rappelons aussi que les interventions de l’armée à Jénine et Naplouse sont actuellement quotidiennes et très violentes – on comptait déjà 30 morts palestiniens depuis de le 1er décembre 2023 ce jeudi soir.
Dans la nuit de jeudi à vendredi et dans le silence le plus complet de la communauté internationale, le Hamas a tiré en représailles deux roquettes depuis Gaza et l’Autorité Palestinienne a annoncé la fin de sa coopération avec Israël.
On peut légitiment penser que le jeune homme de 21 ans qui a tiré sur les passants dans la colonie de Nave Yaakov, l’a aussi fait au regard de cette situation et des évènements récents.
Non revendiqué par une faction en particulier, cet acte, isolé au premier abord, semble plutôt s’inscrire dans un nouveau mouvement de contestation porté par une partie de la jeunesse palestinienne pas directement liée aux organisations de résistance et que certains observateurs voient déjà comme une nouvelle intifada.
20.01.2023 à 14:37
400 milliards pour l’armée, 0 pour les retraites : Macron s’en va-t-en guerre
lemarteausansmaitre
Ce vendredi, Emmanuel Macron a annoncé une enveloppe de 413 milliards d’euros pour le financement des armées pour la période 2024-2030. Depuis la base aérienne de Mont-de-Marsan, où il a exprimé ses traditionnels vœux aux armées, le président a joué la carte de la « transformation » militaire et du « retour de la guerre en Europe » pour justifier une augmentation d’un tiers des budgets de défense par rapport à la loi de programmation militaire 2019-2025. Sur le plan technologique, il s’agit de renforcer les secteurs des drones et des munitions rôdeuses tout en insistant sur la capacité de frappe française et ses moyens de défense sol-air. Usant de la rhétorique de la multiplication et de l’agrégation des « menaces », Macron a également annoncé une augmentation de 60 % du budget du renseignement militaire sur la même période.
Au lendemain d’une mobilisation massive partout en France contre la réforme des retraites ayant rassemblé plus de 2 millions de manifestants, l’exécutif affiche donc clairement ses priorités budgétaires, tout en poursuivant son réalignement atlantiste (en fait, sa subordination sur les visées impérialistes américaines). L’objectif est clair : assumer l’escalade militaire et garantir dans la durée le soutien astronomique à la guerre en cours « jusqu’au dernier ukrainien ».
Pour rappel, Elisabeth Borne a justifié son projet de réforme des retraites par une prétendue hausse du déficit du système par répartition qui passerait de 1,8 milliards d’euros cette année à 43,9 milliards en 2050. Ces chiffres mensongers, contredits par le rapport annuel du Conseil d’orientation des retraites de 2022, permettent tout de même de prendre la mesure du budget alloué au secteur de la défense par le président.
Cessons de nous mentir en prétendant que les caisses de l’État sont vides : la destruction du système des retraites – et plus généralement des services publics – n’est rien d’autre qu’un choix politique.
18.01.2023 à 15:14
Pasquale Abatangelo : « Sa rage aura trouvé un horizon »
lemarteausansmaitre